ront pour y arriver, on s’il pourra franchir les précipices qui
lui en défendent l’accès : mais l’air v if & frais qu’il refpire fait
couler dans fes veines un baume qui le reftaure, & l’efpé-
rance du grand ipectacle dont il va jouir, & des vérités nouvelles
qui en feront les fruits, ranime fes forces & fon courage.
11 arrive : fes yeux éblouis & attirés également de tous
côtés, ne favent d’abord où fe fixer; peu-à-p eu il s’accoutume
à cette grande lumière ; il fait un choix des objets qui
doivent principalement l’occuper , & il détermine l’ordre qu’il
doit fuivreen les obfervant. Mais quelles expreflions pour-
roient exciter les fenfations, & peindre les idées, dont ces
grands fpeétacles rempiiifent l’ame du Philofophe ! Il femble
que dominant au defïus de ce Globe, il découvre les reflorts
qui le font mouvoir, & qu’il reconnoît au moins les principaux
agens qui opèrent fes révolutions.
Du haut de l’Etna, par exemple, il voit les feux fouter-
rains travailler à rendre à la Nature, l’eau, l’a ir , le phlogif-
tique & les fe ls , emprifonnés dans les entrailles de la Terre;
il voit tous ces élémens s’élever du fond d’un gouffre im-
menfe , fous la forme d’une colonne de fumée blanche, dont
le diametre a plus de goo toifes ; il voit cette colonne monter
droit au C ie l, atteindre les couches les plus élevées de l’Ath-
mofphere, & là fe divifer en globes énormes qui roulent à de
grandes diftances en fuivant la concavité de la voûte azurée.
Il entend le bruit fourd & profond des explofions que produit;
le dégagement de ces fluides élaftiques ; ce bruit circule par
de longs roulemens dans les vaftes cavernes du fond de l’Etna,
& la croûte vitrifiée qui le couvre tremble fous fes pieds. Il
compte autour de lu i , & voit jufques dans leur fond les nombreux
crateres des bouches latérales ou des foupiraux de l’Etna,
qui vomirent autrefois des torrens de matières embrafées ;
mais qui refroidis depuis long-tems, font en partie couverts
de prairies, de forêts,' & de riches vignobles. Il admire la
malfe de la grande pyramide que forme l’enfemble de tous
ces Volcans; elle s’élève de plus de ioooo pieds au deffus delà
Mer qui baigne fa bafe, & cette bafe a plus de 60 lieues de
circonférence. Cependant toute cette pyramide n’eft de fond
en comble que le capnt mortuum , ou le refidu des matières
que ces bouches ont vomies depuis un nombre de fiecles.
Et ce qui augmente encore l’étonnement de l’Obfervateur ,
c’eft que toutes ces explofions n’ont pas fuffi pour épuifer dans
le voifinage de cette montagne , la matière des feux fouter-
rains ; car il voit prefque fous fes pieds , les Isles Eoliennes,
qui furent autrefois produites par ces feux, & qui en vomii-
fent encore. Mais confiderant de plus près le corps mémo
de l’E tn a ,le Naturalifte obferve,que tandis qu’il fort des entrailles
de la T e r re , des torrens de minéraux vitrifiés qui
augmentent la maile de la montagne, l’aétion de 1 air & de
l’eau ramollit peu-à-peu fa furface extérieure; les ruilfeaux
produits par les pluies & par la fonte des neiges, qui entourent
même en été là moyenne région, rongent & minent les