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Iles Mariannes, Noiivelle-Espagne de faire parvenir à Gaarn un corps armé de 200 Philippinois,
Histoire.
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un petit vaisseau pour faciliter les communications d’une île à
l’autre, et généralement tout ce qui pouvoit être utile à la mission. Ces
ordres furent transmis au gouverneur des Philippines, qui, sous divers
pietextes, refusa les 200 Philippinois; mais ne pouvant se dispenser
d’envoyer le vaisseau pour lequel il avoit reçu des fonds, ii se contenta
de fournir une chaloupe non pontée, sans mâts et sans voiles, aussi incommode
que peu convenable au service pour lequel elle étoit destinée.
Ce léger secours arriva ie 22 mai 1673 sur le navire le Sant-Antonio,
à bord duquel D. Durand de Montfort se trouvoit comme passager : ce
général fit aux missionnaires un cadeau précieux en leur laissant un cheval
pour la commodité de leurs voyages. La surprise que causa l’arrivée de cet
animal s’étendit à toutes les îles ; de toute part les insulaires accoururent
pour ie voir; ia grandeur et la noblesse de sa taille, son hennissement,
ses bonds subits, ses ruades et sa vitesse à la course, excitèrent
en eux 1 admiration et ia terreur. Prenant son mors pour sa nourriture,
ils ne pouvoient comprendre qu’il mâchât et digérât du fer. Plusieurs
s’en approchoient, lui parloient comme s’il eût pu les comprendre, ie
flattoient, et lui faisoient des présens de cocos et d’antres fruits pour
qu’il leur permît d’arracher quelques crins de sa longue queue : c’étoit un
ornement que les olitaos sur-tout recherchoient pour parer ieurs
tinas ( I ), bâtons peints et garnis par le haut de filamens de plantes et
de rubans en feuilles de palmier, analogues au phallus de l’antique paganisme
, et qu’ils portoient dans leurs fêtes comme un symbole de leurs
débauches.
Fatigués d’être toujours sur ieurs gardes pour surprendre les Espagnols
ou se défendre de leurs attaques, ies insulaires dissidens vinrent d’enx-
mêmes offrir leur soumission, apportant, non des écailles de tortues , selon
leur usage, mais leurs enfans, qu’ils prièrent les missionnaires de baptiser.
Les conditions qu’on ieur imposa furent simples et faciles à suivre, et l’on
vit enfin ia tranquillité renaître dans ce beau pays. Le P. Esquerra et
les autres missionnaires profitèrent de ces momens de paix pour travailler
( J ) L e P. le G ob ien dit tunas ou plutôt îa n a s , mot qui offre une idée toute différente.
Histoire.
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1674.
LIVRE III. — D e T i m o r a u x M a r i a n n e s i n c l u s i v e m e n t . 185
à ramener dans ie sein de l’église plusieurs néophytes qui, encore mal af- Iles Mariannes.
fermis dans la foi, s’étoient laissés aller aux sollicitations des idolâtres ; à
encourager ceux qui y avoient résisté, baptiser les enfans, enfin visiter
l’île Goam dans ses divers quartiers, pour y abolir les usages superstitieux
et les remplacer par de saintes pratiques.
Au commencement de l’année 1674. D P. Esquerra alla visiter ia
nouvelle mission de Fogna et le viliage d’Hati (i), pour y développer et y
expliquer la doctrine chrétienne. A son retour, il rencontra, le 2 février,
une femme dans un état déplorable, qui, souffrant depuis piusieurs
jours les douleurs- de l’enfantement, étoit sur le point de périr ; cette
infortunée lui demanda le sacrement de l’extrême onction ; il alloit le lui
administrer, lorsque quatre Mariannais s’y opposèrent, persuadés que
l’huile sainte ôtoit la vie. Esquerra voulut leur prouver le contraire; mais
sans l’écouter, ils appelèrent leurs amis et fondirent ensemble surie missionnaire
et les six catéchistes qui l’accompagnoient. Deux de ces derniers
tombèrent bientôt sous les coups de la multitude accourue aux cris ; deux
autres prirent la fuite ; poursuivis par les insuiaires, l’un de ceux-ci ne
tarda pas à devenir aussi une de leurs victimes; l’autre, Francisco Gon-
çalez, se cacha dans les broussailles, et l’on ne put le découvrir. Le P.
Esquerra, ainsi que les deux compagnons qui restoient près de ini, voyant
approcher l’instant du martyre, se préparèrent à la mort, et ne tardèrent
pas à être accablés sous une grêle de pierres et de traits. Pendant que
les furieux s’acharnoient sur le corps du vénérable ecclésiastique , la
dernière personne qui l’accompagnoit se sauva dans les montagnes voisines;
mais ies meurtriers s’en étant aperçus, se mirent à sa poursuite,
et ia traquèrent bientôt comme une bête fauve.
Après avoir traversé d’affreux précipices, et parcouru un espace de
deux lieues, Francisco Gonçalez , se croyant en sûreté, se rapprocha
du rivage; malheureusement il y rencontra un des meurtriers, qui,
l’ayant aperçu, le frappa de ses armes et le laissa pour mort. Horriblement
blessé, Gonçalez eut cependant encore assez de force pour se
traîner jusqu’à un village ami : là il reçut les premiers secours , et
( [ ) Vilkige situé au N o rd , et à un mille seulement d’ fflmata. ( Voyeç^ le chap, su iv ., § i , )
Voyage de l ’Uranie. — Historique. T . II. ^ ^