
De Thomme
en société.
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CTtssifîaitiori des habitans. — Los tabieiuix qui précèilont fout siiliisaïu-
ment connoître, sans qu'il soit besoin de les faire suivre d’aucun développement,
de combien tle races diverses la |iopulation actuelle îles
Mariannes se compose. Avant leur assujettissement à la monarchie espagnole,
les indigènes étoient partages en trois classes politiques : les noiiles
les ilemi-nobles [¡/icârfofj] et les plébéiens ou mangatchangs.
Ces derniers, qu’on doit considérer comme les parias du pays, avoient
une taille moins élevée que celle des autres habitans : ils ne pouvoient
jamais sortir du rang social dans lequel ils étoient nés ; ia navigation sur
mer leur étoit absolument interdite : ce qui explique pourquoi on plaçoit
toujours parmi les nobles les étrangers qui abordoient sur ces rivages.
Les atchaots, au contraire , n’étant que déchus de leur noblesse par suite
de quelque faute grave, pouvoient, après une réhabilitation convenable,
reprendre leurs premiers titres ; dans aucun cas cependant la dégradation
n’eût pu ies taire déchoir au niveau de la populace.
Les mataas, véritables chefs du pays, avoient sous leurs ordres ies
atchaots et les mangatchangs, et jouissoient de certains privilèges que
nous ferons connoître ailleurs.
Sous ie rapport des occupations habituelles, il existoit de nouvelles
classifications des habitans. Au premier rang, il faut placer les makanas,
sorciers, qui remplissoient une sorte de sacerdoce. Venoient ensuite les
guérisseurs, ou plutôt les guérisseuses [e'amtis]-, car presque tous étoient
du sexe féminin ( i ) : il y en avoit dans les diverses castes. Chaque
éamri ne s’adonnoit à la cure que d’une seule espèce de maladie : ainsi
les diverses branches d’infirmités naturelles ou fortuites qui affligent
l'espèce humaine, dislocation ou fracture de membres, blessures de
tout genre, fièvres, dysenteries, indigestions, rhumes, &c. & c ., comp-
toient autant d’empiriques spéciaux dont on invoquoit i’assistance selon
l’occasion. Quant à la pratique des accouchemens, elle étoit exclusivè-
ment dévolue aux femmes.
( i ) En Europe, du temps de l’ancienne chevalerie, les dames ou demoiselles du plus haut
parage apprenoient communément la chirurgie, pour se rendre utiles à leurs pères, maris ou
parens, qui couroient à tout moment le danger d’etre blessés dans les combats, tournois ou
joutes. ( Voyez Rolland, Recherches sur les prérogatives des dames chez les Gaulois, ¿fc. )
LIVR E IIJ. — D e T im o r aux Marianne s jncj.usivement. 365
La profession de constructeur de pirogues appartenoit de droit aux 11« AUmrra«.
matoas, (|ui, attachant ie plus grand prix a cette prérogative, m c U o i t n t
un extrême amour-propre à y faire preuve d’habileté. Les atchaots étoient
admis à les seconder dans cet important travail ; mais de sé-veres rcgie-
rnens empêchoient les mangatchangs d’y prendre ia moindre part.
Les mêmes réserves avoient lieu pour la profession militaire et la
pêche maritime : les deux castes privilégiées pouvoient seule.s s’y livrer.
Tous ies nobles qui habitoient ies bords de la mer étoient marins; mais,
en cas d’expédition lointaine, les guerriers de l’intérieur venoient se
joindre aux premiers et partoient avec eux dans leurs pirogues.
Langage. — Sans être dépourvu de ressemblance avec le maiais,
répandu dans tout i’archipel d’A s ie , et le tagale, que i’on parle aux
Philippines, l’idiome mariannais, d’une prononciation douce et aisée, a
cependant un caractère qui lui est propre. Il existoit toutefois jadis des
différences assez fortes entre le langage des îles du Nord et celui des îles
plus voisines de Goam; différences qui se manifestaient même sensiblement
d’une localité à i’autre de i’île principale, et dont on reconnoissoit
encore des traces il y a peu d’années : aujourd’hui même la prononciation
n’est pas identique par-tout. Lors de la réunion des diverses peuplades
à Gfflam, en 16 9 9 , tout a été mêlé, hommes et langages. Le travail
considérable que nous préparons sur la langue mariannaise, et qui doit
former une division spéciale de ce V o y ag e , embrassera à cet égard un ensemble
de détails qui pourront intéresser ies amateurs de lexicologie (i).
Le P. Muriilo [op. cit. ) nous apprend que, portés a la poésie, ies habitans
ont conservé dans leurs chants nationaux des traditions historiques,
mais obscurcies par le voile fabuleux qui les enveloppe.
Caractère. — On nous a assuré, et l’examen attentif des lois et des
principaux usages de ces contrées le confirme jusqu a un certain point ,
que les hautes classes de la société étoient animées des sentimens les
plus honorables, et sur-tout d’un grand amour pour la vérité ; or c’est
ià , comme on sait, ce qui caractérise en tous lieux la vraie noblesse ( a \
( i) On peut voir quelques échantillons du langage mariannais, ci-dessus, p. 199 e t io c , e:
plus bas, p. 369 et suiv. ^
(z) « Le respect le plus scrupuleux pour la vérité, et Texactitude la plus religieuse a rempur