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Avr il.
I
Iles Mari.mnes. Acapulco, et son capitaine, D. Antonio Rocha, voulut bien se charger
cies cle'pêches que j’envoyois en France. Je partis moi-môme d’Omata
le 28 , après avoir fait revenir à bord tons nos malades, et me dirigeai
vers ie port San-Lnis, à l’entrée duquel je mouillai le soir du même
jour, à peu de distance de la pointe Oroté. Une brise très-fraîche m’empêchant
de pénétrer à la voile dans le havre, il fallut s’y haler à la
touée.
Cette manoeuvre, avec un écjuipage fatigué comme le mien , étoit fort
pénible et fort lente; mais le gouverneur, dont la prévoyance alloit toujours
au-devant de nos besoins, envoya à bord, ie i." ' avril, une corvée
de trente hommes vigoureux qui nous aidèrent à nous rendre enfin au
fond du port, après avoir parcouru à la cordelle un espace de trois
milles au moins. A peine l’ancre fut-elle mouillée, que nous vîmes, à notre
grand étonnement, reparoître la Paz, qui nous remplaça bientôt à notre
première station sous la pointe Oroté : le retour de ce bâtiment étoit
commandé par une voie d’eau considérable qui s’étoit déclarée récemment.
Il se toua aussi dans ie fond du havre; et plus tard son capitaine
m’ayant prié de lui prêter les ouvriers de ia corvette pour réparer ses
avaries , j’y consentis d’autant plus volontiers , que je m’estimois fort
heureux, après une si longue absence de notre pays, de pouvoir secourir
un navire d’une nation amie dans une aussi fâcheuse situation.
L ’Uranie étant en sûreté dans le port, il fut question d’aller nous
établir à Agagna, point éloigné encore de six milles. Le 2 avril, une
partie de nos malades furent embarqués dans mon canot, le reste à bord
d’une grande chaloupe espagnole , tandis qu’on chargea dans celle de
l’Uranie tons nos instrumens d’astronomie et de physique. On partit de
grand matin, et ia route fut dirigée entre ia grande terre et i’île Apapa.
Cette dernière n’avoit pas encore été dépassée, lorsque je fus accosté par
un canot, armé d’excellens rameurs, que D. Médinilia m’envoyoit, avec
prière de monter dans cette embarcation, qui devoit certainement arriver
à Agagna beaucoup plus tôt que la mienne, en raison de l’épuisement
des hommes qui la montoient. J ’y passai de suite avec les personnes
nous devions compter une demi-révolution de p lu s ; d’où par conséquent, entre nous, un jour
de différence.
18 19 .
Avril .
LIVRE III. — De T i m o r a u x M a r i a n n e s i n c l u s i v e m e n t . i 4 i
qui m’accompagnoient, et laissai ie reste de ma petite expédition sons ia lies Mariannes
conduite d’officiers vigilans et expérimentés.
Nous avançâmes assez rapidement jiisquen face deTépangan (pl. 59);
mais alors, contrariés par les vents et la maree, il fallut relâcher au village
d’Assan, pour éviter une lutte pénible contre des difficultés qui nous
eussent empêchés d’atteindre Agagna avant la nuit. En débarquant, nous
fûmes agréablement surpris de voir t}ue le digne gouverneur, ayant prévu
le contre-remps cjiti nous arrivoit, s’étoit rendu à Assan avec des chevaux,
pour les offrir à ceux des nôtres qui étoient en santé, et des hamacs pour
les malades. Je lui témoignai combien j’étois touché de sa prévenance obligeante;
cependant séduits par ia douceur, si nouvelle alors pour nous,
de fouler aux pieds un terrain uni, sous de grands arbres qui ne déro-
boient pas à la vue un paysage charmant, nous préférâmes de gagner la
ville à pied, et ce fut une promenade délicieuse. La chaleur étoit tombée,
et nous ne cherchâmes point k hâter ie pas; aussi, quoiqu’il n’y eût que
deux milles à parcourir, nous n’atteignîmes Agagna cjua la nuit close.
Une salve avoit été préparée en notre honneur; mais comme ï angélus
avoit sonné lorsque nous parûmes, elle ne put être tirée.
En traversant le joli village d’Anigaa, situé sur ia route, je vis un
vieillard qui, se tenant à la porte de sa maison, attendoit le gouverneur
pour le saluer : ce vénérable insulaire , entouré de ses enfans , petits-
enfans et arrière-petits-enfans, me rappela une de ces scènes patriarcales
dont le tableau touchant nous charme et nous émeut en lisant les saintes
Écritures.
L’embarcation qui portoit nos autres malades fit à-peu-près la même
manoeuvre que nous; car, dans l’impossibilité de doubler la pointe Acahi-
Fanihi, qui sépare Assan de Tépongan, elle fut contrainte d’aborder à ce
dernier point. L à , quelques-uns d’entre eux, que notre habiie médecin
M. Gaimard jugea capables de faire sans danger un tei trajet, s’acheminèrent
à petits pas jusqu’à la ville, où iis arrivèrent le soir; les antres
restèrent sur leurs cadres, et passèrent la nuit dans l’embarcation, à
l’abri d’une tente qui fut dressée à cet effet.
Prévenu de leur situation, je priai ie gouverneur de vouloir bien
donner des ordres pour qu’ils fussent transportés par terre à Agagna, ce