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Iles Mariannes. fig. d); la planchette striée sur laquelle on lave le linge (pl. fig- g) ;
D e l’homme
en famille.
Occupations
et usages.
puis ie fer qui sert à le repasser (pl. 80, fig. h.).
Occupations des deux sexes. — Lors de la première arrivée des Européens
aux Mariannes, les femmes prenoient généralement une part beaucoup
pius active que les hommes aux travaux pénibles du ménage : cette habitude
s’est maintenue parmi les indigènes , malgré l’exemple contraire que
leur donnent la plupart des colons et des métis ; il n’est pas rare néanmoins
de voir les femmes de ces dernières classes se livrer comme les
autres aux pêches riveraines et même à la culture des terres, sans négliger
pour cela ies soins nombreux et journaliers qu’elles doivent à la
conduite de leur maison.
Les deux sexes, disons-nous, se livroient jadis en commun aux travaux
de la pêche et de l’agriculture : mais la construction des cases ou maisons,
ceile des pirogues , la navigation, l’entretien des chemins et les transports
difficiles étoient le partage plus particulier des hommes ; ceiui des
femmes consistoit dans la fabrication des tresses et des cordes employées
dans la marine, le tissage des voiles pour les embarcations , celui des
nattes, et généralement de tous ies nombreux ustensiles qui se faisoient
avec des feuilles de vacoua, tels que paniers, corbeilles, boîtes, berceaux
d’enfans, sacs, &c. & c ., dont nous avons plus haut donné ia
nomenclature : les préparations culinaires et ia pratique de la médecine
étoient en grande partie aussi de leur ressort.
De nos jours les gens de ia classe inférieure ne songent nullement à
la culture des champs : pour approvisionner leur famille de végétaux , il
ieur suffit d’aller le matin dans les forêts ou sur les montagnes , et d’y
ramasser les racines nutritives, le fédériko, les cocos, et le bois dont ils
ont besoin ; la provision se fait pour un jour ou pour deux , et rarement
pour trois. La chasse ne ieur est pas non plus étrangère.
Heures de repos. — L’habitude de se parler au lit, très-répandue chez nos
insulaires, rend assez difficile l’appréciation de la durée moyenne de leur
sommeil; ils passent ordinairement neuf ou dix heures de suite au lit,
à moins que l’obligation d’une pêche au flambeau ne les fasse rester hors
de chez eux une partie de la nuit. Au reste, ils dorment indifféremment
à tous ies instans de la journée, sans heures fixes. Quelques habitans
LIVRE III. — De T im o r a u x M a r ia n n e s i n c l u s iv e m e n t . 3 2 1
modernes, à l’imitation des Espagnols, ont pris ia coutume de faire la Iles Mariannes.
siesta. Autrefois, un de leurs passe-temps étoit la promenade après le D e Thomme
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coucher du soleil ; elle avoit presque constamment pour but de jouir de
la fraîcheur de la soirée, ou de surveiller les travaux de leurs champs.
Propreté. — L ’usage journalier du bain étoit général aux Mariannes,
autant du moins que le voisinage des eaux pouvoit le permettre; celui de
se frotter le corps et la tête avec l’huile de coco, tant pour se préserver
du froid que pour éloigner certains insectes, n’étoit pas moins répandu ;
les personnes qui ailoient en mer n’y manquoient jamais. A défaut d’huile,
on empioyoit aussi l’amande de coco pilée ou simplement mâchée :
quelques individus préfèrent aujourd’hui, pour se frictionner ia tête, le
jus d’orange à l’huile de coco.
Tatouage. — Ii ne paroît pas que ies anciens Mariannais se soient
jamais tatoués; il est toutefois certain que cette pratique, si jamais elle
a existé, est maintenant chez eux tout-à-fait oubliée : leurs voisins les
Carolinois ont, au contraire , une prédilection particulière pour ce genre
d’ornement.
Bétel. — Il n’en est pas de même du bétel , qui, inconnu aux Carolines
, est, de temps immémorial, un objet de première nécessité aux
Mariannes. Là ce masticatoire ne se compose que de noix d’arek, de
feuiiles du poivre bétel et d’un peu de chaux; car ie tabac, introduit
depuis peu dans ces îles, n’en faisoit et n’en fait encore aucunement
partie.
Cagares. — C ’est en cigares que la consommation de cette dernière
plante y a acquis une grande vogue : nul habitant de Goam ne sort sans
en être muni et sans avoir sur lui son briquet (i) , et, dans un étui,
un petit morceau de bois léger de balibago, qui, prenant feu à la
moindre étincelle, forme un excellent amadou.
Manière d'allumer le feu. — Nous avons réfuté précédemment (2) ia
singulière assertion de ceux qui veulent qu’à l’époque de la découverte
des Mariannes , leurs habitans ne connussent pas le feu. D’un autre côté,
( 1 ) Les pierres à fu s il, aujourd’hui assez communes à G o am , y ont été laissées par les
navires du capitaine C ro z e t. ( ci-d e s su s , p. 2 1 8 . )
( 2 ) Voyez chap. X X V , p. 16 5 ,