
Iles Mariannes. pendent en groupes des tubercuies dont quelques-uns sont recouverts de
D e riiomme croûtes. De pareils accidens ont pris la place des mamelons, et se
comme individu. t \ i / • i t • t montrent en grand nombre au dos, a la region lombaire, aux membres
supérieurs et inférieurs, et sur-tout aux avant-bras et aux jambes. Ces
excroissances, même lorsqu’il ies coupe, ne lui font éprouver aucune
douieur; seulement il s’en épanche alors beaucoup de sang. Comme ses
malheureux compagnons, il a des hémorrhagies nasales quotidiennes. Le
frère et une soeur de son père, ainsi qu’une fille de celle-ci, ont eu la
même maladie.
» 6.“ Joachim Taï-péto, né à Pago, âgé de vingt-trois ans, sentit
d’abord aux pieds, il y a neuf ans, les premiers indices de cette incommodité.
Tout ce qu’elle offre de particulier sur cet individu, ce sont des
taches noirâtres et quelques boutons sur le ventre ; les doigts des mains
réduits à une phalange et demie, et les pieds complètement déformés.
Aucun de ses parens n’est en proie à ce fléau.
» 7.° Domingo Viagomès, d’Agagna, âgé de vingt ans, n’en avoit que
douze quand les premiers symptômes de la lèpre se déclarèrent d’abord
à ia figure ; celie-ci est totalement infiltrée, ie nez méconnoissabie, les
lèvres entamées par des ulcères, la bouche rapetissée et ne laissant qu’un
passage difficile et bruyant à la respiration; les mains privées de doigts,
les pieds hérissés d’un nombre infini de petits tubercules noirs et très-
durs, comme dans l’éléphantiasis, le corps couvert de taches noires : tout
concourt à donner à ce jeune infortuné i’air d’un vieillard décrépit. La
même mort qui le menace a déjà enlevé un de ses frères.
» 8.° José Diego, de la même ville, âgé de vingt-six ans, est malade
depuis seize. Sa face est semée d’excroissances semblables à de petits lobes
plus ou moins arrondis, dont quelques - uns, par leur agglomération,
tiennent ia place du nez. Les doigts n’ont plus que deux phalanges ; les
pieds, noirs, grands et déformés, sont pleins de tubercules éléphantiasiques.
Ce malheureux ne peut se tenir debout; il éprouve des démangeaisons
générales et des hémorrhagies nasaies habituelles. Aucun de ses parens
n’est attaqué du même mal. »
Dans le iazaret consacré aux femmes , M. Gaimard a trouvé un bien
moindre nombre de malades. Voici ia description rapide de leur état.
LIVRE III. — D e T i m o r a u x M a r i a n n e s i n c l u s i v e m e n t . 295
Lazaret des femmes près d’Assan. — « 9.° Jacintha Taï-sageé, née à Ile s Mariannes.
Pago et âgée de vingt-six ans, est affectée de la lèpre depuis six années.
Les os du nez, ies poils des sourcils, n’existent pius ; elle a chacjue semaine
une hémorrhagie nasale. Elle est seule de sa famille qui ait eu à
souffrir de cette maladie.
» io .° Manueia de Castro, d’Agagna, est malade depuis quatorze
ans. Son nez est remplacé par un tubercule; ses lèvres sont saillantes,
ses traits difformes, ses sourcils privés de poils , ses doigts déformés ou
raccourcis. Une fois par mois elle est sujette à nne hémorrhagie nasale.
Cette femme, cousine de José de Castro, dont il a été parié au n.° 5 ,
est mère de deux enfans, une fille de dix-sept ans et un garçon de
quinze , qu’on a eu l’imprudence de laisser auprès d’eile, et qui présentent
déjà, mais à un moindre degré, les mêmes phénomènes morbides.
» I 1 . “ Nicolassa Na-macilig, d’Assan, âgée de vingt-deux ans , étoit
séquestrée dans la même maison, quoique en proie depuis trois années à
une maladie qui, selon les Mariannais, diffère du mai de Saint-Lazare :
ils l’appellent houras. Son nez étoit déformé, ses sourcils sans poils, les
deux paupières de l’oeii gauche ulcérées au point que l’inférieure étoit
presque détruite ; le coude gauche présentoit des ulcérations tuberculeuses.
Cette femme, dont la mère a ia même infirmité, éprouve, au
iieu d’hémorrhagies nasales, des vomissemens fréquens.»
« En général, chez tous ces individus, continue M. Quoy, le danger
de ia contagion ne m’a pas paru aussi imminent qu’on le dit être. Dans ces
lazarets isolés, deux infirmiers, l’homme et la femme, sont chargés de
soigner ces êtres disgraciés : iis ne prennent aucune pi-écaution, vivent
avec eux, les touchent sans cesse, car il y en a de tellement mutilés
qu’on est obligé de ies faire manger; et cependant, quoiqu'ils fassent
depuis iong-temps ce service, iis paroissent très-sains.
Éiéphantiasis. — » Nous terminerons notre revue par deux autres variétés
de la lèpre, qu’oii ne regarde pas, à beaucoup près, comme aussi
dangereuses. La première, que j’ai observée à Goam, est l’éiéphantiasis ,
ou gonflement monstrueux des extrémités inférieures.
» Un jour un homme vint à bord vendre des comestibles : étonné de
la grosseur de sa jambe, je lui demandai des renseignemens sur cette