
8o VOYAGE AUTOUR DU MONDE.
Iles Carolines. Kadokapoué[i). Vowssés par leur zèle, et engagés cl ailleurs par iaccuei
Histoire. pacifique des indigènes, les pères Duberron, Cortil, et quatorze personne;S
de i’équipage , s’embarquèrent dans la chaloupe , le 5 octobre, et se
rendirent à terre, accompagnés de Moak.
Le vaisseau cependant, ne trouvant là ni port ni mouillage, ne put
jeter i’ancre sur cette île, et fut réduit, pendant quatre jours, à lutter
contre les courans qui l’en éloignoient. Quelques insulaires qui vinrent à
bord montrèrent le gisement des îles voisines Mcrières et Pou! (2). Le
I I , on aperçut Panlog, ou Bahletoup, capitale des Palaos, dont quelques
naturels étant venus à bord se montrèrent si incommodes qu’il fallut
faire feu sur eux. Le surlendemain , on se dirigea de nouveau vers
Soronsol, dans l’espoir d’y reprendre ia chaloupe et les personnes qu’on
y avoit laissées ; ce fut en vain. Padilla, pendant piusieurs jours, chercha
d’abord à se maintenir aux environs de l’île; mais ne découvrant aucune
trace de ses infortunés compagnons, ne recevant même, contre l’ordinaire,
aucune visite des insulaires, il dut avoir les plus tristes pressentimens.
Privé d’embarcation pour descendre à terre, et commençant d’ailleurs à
manquer d’eau et de vivres, il fut enfin forcé, le 2 1 décembre, de reprendre
la route de Manille, rapportant pour tout fruit de son voyage le
récit de ce déplorable événement.
Padilla n’étoit pas encore de retour, quand D. Miguel Eloriaga partit
lui-même pour reconnoître ies Palaos : ce voyage probablement n’eut
point de résultat heureux; aucune relation du moins n’est restée pour le
constater.
Au désir de conquérir les Carolines se joignit alors celui de sauver ies
Espagnols laissés à Soronsol, Pour atteindre ce double but, ie P. Serrano
fit armer un navire à Manille, qui, monté par des marins choisis, portant
plusieurs missionnaires, et commandé par D. Blas de Lesso, mit à la
voile vers la fin de i 7 1 i . N’étant encore qu’en vue des côtes de l’île
Marindoiiqué ( 3 ), un coup de vent terrible assaillit le vaisseau, qui fut
( 1 ) C e s'île s sont au Sud-Ouest des Palaos. L a plus septentrionaie des d e u x , appelée ici
Soronsol, est aussi connue sous les noms de S o n ro l, Sonsorol, & c .
( 2 ) Nommée depuis P o u lo , puis abusivement, P o u lo u -A n v a , ou même simplement A n n a .
{3 ) U n e des Philippines.
Histoire.
LIVRE III. — D e T i m o r a u x M a r i a n n e s i n c l u s i v e m e n t . 8 i
bientôt entièrement perdu ; deux matelots seulement échappèrent au ile s Caroline s.
naufrage.
Le 3 o janvier de l’année suivante, le bâtiment qu'on avoit coutume d’en-
vpyer aux Mariannes, eut ordre d’aller, à son retour, sous le commandement
deD. Bernard d’Égoy, àia recherche des hommes laissés sur Soronsol.
Cet officier aperçut, le 6 février, deux petites îles, et les jours suivans
plusieurs autres, au nombre de dix-huit, qui, d’après lu i, furent nommées
îles Ée,oy: il apprit des naturels les noms particuliers de plusieurs d’entre
elles, comme Falalep et Mogmog, qui sont les principales. Enfin, le 19 ,
il eut connoissance de Soronsol ; mais continuellement repoussé par
les courans et les vents contraires, il revint à Mardlle, ne ramenant avec
lui que deux Indiens des îles qu’il avoit découvertes , sans aucune
nouvelle des malheureux missionnaires et de leurs compagnons.
Toutes les recherches faites pendant les dix années qui suivirent i’a-
bandon des PP. Duberron et Cortil, à Soronsol, ne donnèrent pas de
résuitatpius satisfaisant ; car, si d’un côté on lit dans une lettre du P. Cazier,
écrite de Chine, que, de leur propre aveu, les indigènes ont, à l’instigation
de Moak, massacré ies Espagnols, il est dit positivement dans
une autre, datée de Manille en décembre 17 21 , qu’on n’a encore rien
pu découvrir sur leur sort , mais que sans doute iis ont été victimes
des sauvages.
A cette époque, i’espoir d’arriver aux Caroiines étoit sinon éteint,
du moins fort ralenti par tant de vaines tentatives , lorsqu’un événement
imprévu vint le ranimer tout-à-coup. Une pirogue que montoient plusieurs
Indiens, hommes, femmes et enfans, aborda, ie 19 juin 1 7 2 1 ,
dans la baie de Tarofofo, sur la côte orientale de Guam : le surlendemain,
une autre barque portant six personnes prit terre à la pointe Oroté ( i ),
sur la même île. Sorties de Farro'iiep pour se rendre à Gouliay {2), elles
avoient été jetées par un coup de vent sur les côtes de ia principale
des Mariannes. Les Espagnols traitèrent ces insulaires avec bonté, et
( 1 ) C ’est la pointe la plus occidentale de l’île Guam.
( 2 ) lie dont le nom s’écrit aussi G u lia y , C/lie, O lié , U U a , U ïé e , et même Vlee. II est
douteux si les insulaires qui montoient ces pirogues étoient de F arro ïlep ou de G o u lia v ;
ce qui est ce rta in , c’est qu’ il n’y a pas une grande distance entre te s îles.
l 'oyagc de l ’ Urnuu'. — Historique. T . II. ]_