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Dé cembre .
i8 VOYAGE AUTOUR DU MONDE,
nommé par nous Passage de ÎUranie. Il est borné au Sud par Rouib,
Balabalak, et quelques autres îles qui, n’étant pas connues jusque-là
des navigateurs, reçurent, ainsi que la plupart de celles qui composent
le groupe Vayag, le nom de quelques-uns de nos compagnons de voyage
et de nos amis. ( Voyei pl. 3Ô. )
Un caractère singulier de ces îles (i), c’est que presque de tous côtés
elles sont minées inférieurement, de telle sorte que chacune d’elles est
moins large à sa base qu’à six ou sept pieds au-dessus du niveau de ia
mer, circonstance qui leur donne assez exactement l’apparence de ces
meules de paille qui reposent sur un cône tronqué renversé. Une telle
configuration doit rendre ces îles inabordables ; et toutes le seroient en
effet, si plusieurs n’avoient çà et là de petites anses sablonneuses, seuls
points où il seroit peut-être possible de mettre à terre. La plus admirable
végétation couvre toutes ces îies ; même quelques îlots entièrement rocailleux
ne sont pas dépourvus de verdure.
Parvenus au Sud de i’îie Ine, nous aperçûmes sur Vaigiou l’entrée
du havre Piapis ; nous ne cherchâmes pas à y pénétrer; mais, dans la
journée du i4 , naviguant à petite distance des côtes septentrionales de
ia dernière de ces îles, notre habile observateur, M. Duperrey, chargé
spécialement de la levée des cartes hydrographiques depuis notre départ
de Timor, s’occupa d’en faire l’exploration. Nous dépassâmes successivement
la baie Arago et ie havre Offak, dont les abords sont reconnois-
sables par le sommet aigu d’une montagne que le capitaine Forest a
nommée Corne-de-Biiÿle.
A mesure qu’on s’avance vers l’Est, les montagnes de Vaigiou paroissent
plus élevées ; une végétation vigoureuse les tapisse jusqu’à la
cime. Les falaises qui bordent la côte, sont, comme ies îles Vayag, en
général minées à leur base par les eaux de la mer. On y voit plusieurs
grottes ou crevasses considérables, d’un aspect assez pittoresque.
Nous allâmes le soir mouiller près de l’île Manouaran. Le i 5 , nous
fîmes route pour nous rendre au havre Boni ; mais le calme ayant suspendu
notre course, nous fûmes accostés par une barque partie des côtes
( i ) V qy ei la partie N av iga tion et hydrographie de notre V o y a g e , p. i 6 i et suiv.
LIVRE IIL — De T i m o r ' a u x M a r i a n n e s i n c l u s i v e m e n t . 15?
de Vaigiou. L’homme qui la commandoit étoit vêtu comme les chefs des
corocores de Guébé, c’est-à-dire qu’avec une grande robe en indienne,
ii portoit un pantalon et un turban. Il nous offrit des cocos, des flèches,
des chapeaux, & c ., et reçut en échange quelques-unes de nos bagatelles.
Après une heure et demie d’entretien , la brise s étant élevée , on
continua ia route. Le soir, vers cinq heures, la mer changea brusquement
decouieur; je fis sonder aussitôt, et l’on trouva 30 brasses d’eau, puis
successivement, 20, i4> 10 , 8 et 5 brasses, sur un fond de corail.
L’approche de la nuit, et le vent qui souffloit très-fort, rendoient notre
position tellement critique, que je jugeai prudent de nous éloigner promptement
de terre : cette manoeuvre ayant été faite sur-le-champ, le bras-
siage augmenta bientôt, et nous revînmes passer ia nuit, sous petites
voiles, à l’abri de Manouaran , dont nous avions reconnu que les côtes
étoient très-saines.
Le l ô , étant peu éloigné du havre Rawak, dont l’entrée est facile,
• je donnai la préférence à cette relâche sur celie de Boni , pour établir
ia station qui devoit avoir lieu par cette latitude. Ayant donc fait éclairer
ia route par une de nos embarcations, la corvette alla y jeter i’ancre le
même jour, à midi.