
Iles Mariannes. Les habitations des anciens Mariannais étoient vulgairement cons-
De l’homme truites de deux manières : les unes s’élevoient sur des piliers en pierre : les
en famille. ^ . i l ’
Habitations étoient immédiatement assises sur le sol. Parmi ces dernières, nous
citerons d’abord le simple abri, dressé d’une manière accidentelle pour
se préserver de l’ardeur du soleil : il portoit le nom iakkagaa. Lanagong,
hutte d’une construction fort simple , étoit destiné au logement des
gens les plus misérables. Le sadi gani [ couverture échouée ] , cabane de
forme conique, ne semble propre qu’à recevoir un gardien ou un homme
piacé en vigie ; construite en bois, et recouverte en feuilles de palmier,
cette cabane n’a , comme i’anagong, qu’une porte pour toute
ouverture : on fait particulièrement usage aujourd’hui des sadi-gani pour
le logement de ceux qui travaillent, au bord de la mer, à la fabrication
du sel (pl. 8 I ).
II existe une autre espèce de maison, de la même catégorie, remarquable
par une capacité plus grande et par sa forme en carpé long ; ce
n’est souvent qu’un refuge passager, construit en bois et en feuilles de
palmier, dont la destination est de mettre le voyageur à couvert d’une
averse, ce que son nom ganta padja [maison d’orage] rappelle assez;
on s’en servoit aussi jadis pour déposer momentanément les produits
d’une récolte (pi. 6z ).
Les maisons de la seconde catégorie, ou les ganta saga [ maisons d’habitation],
seules demeures permanentes des Mariannais, étoient toutes supportées
par des piliers en maçonnerie. Le grand nombre de pierres debout
que l’on rencontre encore, tant à Goam que dans les autres îles de l’archipei,
met hors de doute un fait que ia tradition et l’histoire confirment
d’ailleurs si parfaitement.
Dans l’abrégé qu’il donne du Voyage de Legaspi, exécuté plus d’un
siècle avant tout établissement espagnol dans les îies qui nous occupent,
l’historien Gaspar dit expressément « que les habitations des insulaires sont
“ hautes, proprement bâties, et bien divisées en piusieurs appartemens ;
» et que le tout, élevé d’un étage au-dessus de terre, est porté sur de forts
» piiiers de pierre. Indépendamment de ces maisons où ils demeuroient,
» poursuit-il, les naturels avoient des espèces de hangars, bâtis éga-
» iement sur de grands piliers en pierre. L ’un de ces hangars, situé
LIVRE III. — D e T i m o r a u x M a r i a n n e s i n c l u s i v e m e n t . 3 13
>> près de faiguade, contenoit quatre de leurs plus grandes embarca- Iles M arianne s.
>. tions ( I ). » De l’homme
' ^ ^ en tamille.
Les piiiers ies pius élevés, parmi ceux dont il reste aujourd’hui des
ruines, se voient sur l’île Tinian; iis ont été décrits, pour la première
fois, dans le Voyage d’Anson. Un de nos plus habiles observateurs,
M. Bérard, les a examinés lui-même, et iis lui ont fait concevoir une
haute idée de i’industrie, du goût et de l’adresse des habitans de ces contrées.
Voici, à cet égard, comment il s’exprime : « Nous avons admiré,
à Tinian, les ruines d’un édifice situé à environ une encablure du
rivage (2), et qu’on eût dit avoir appartenu à une nation civilisée : ce
sont des piliers pyramidaux, au nombre de d ix , remarquables par leur
volume et la régularité de leur espacement ; sept sont debout, et trois
renversés. La description qu’on en trouve dans le Voyage d’Anson est
exacte ( 3 ) ; mais les racines et les branches d’arbres qui sont aujourd’hui
incorporées en quelque sorte avec la maçonnerie, donnent à ces monumens
un aspect tout autre que celui qu’ils avoient alors : les angles des
piliers se sont aussi émoussés, et les demi-sphères qui les couronnent
n’ont plus la même rondeur (pl. 74)- On ne sait à quelle cause attribuer
la chute des trois qui gisent sur le soi (4) ; peut-être est-elle due à
quelque commotion souterraine. Ces constructions, il est vrai, n’ont
point de fondations et sont assises à la surface du terrain; mais leurs
volumineuses proportions et leur forme particulière sont suffisantes pour
en assurer la stabilité. Chacun de ces piliers est d’un seul bloc, composé
de chaux, desabie, et, en quelques endroits, de grosses pierres englobées
( 1 ) V o y e z Conquist. ternp, y spir. de las islas F ilip in a s , por ira y C a sp a r , I. l , c. 1 7 ,
et J . Burney, a Chronol. H is t . o f the dlscov. in the South s ea , t. 1.
( 2 ) 11 paroît que c’est auprès du v illage de Seinharoni,
( 3 ) fc On trouve en divers endroits de T in ia n , dit le rédacteur de ce V o y a g e , des ruines qui
» prouvent suffisamment que le pays doit avoir été fort peuplé; ces ruines consistent presque
» toutes en deux rangs de piliers de figure p y ram id a le , et ayant pour base un carré. C e s piliers
» so n t l’un de l’autre à la distance d ’environ 6 pieds (anglais) [ i " ’ ,83 ] , et le double de cet
» espace sépare ordinairement les rangs. L a base des piliers a autour de <> pieds en
» c a r ré , et leur hauteur est d’environ 13 pieds [ 3 "’ ,96 ] : sur le sommet de chaque pilier est
» p la c é un d em i-g lo b e ; la surface plate est en dessus. L es piliers et les demi-globes sont de
» s a b le et de pierres cimentés ensemble, et recouverts de plâtre. » ( Voyage d ’A n s o n , liv. i l i ,
chap. 2 , page 24 7 de la traduction frança ise , in -4 -°)
( 4 ) C e tte circonstance ayant permis à M . Bérard d’avoir la mesure exacte des diverses