
Ancien
gouv e rnem en t.
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» Les vaincus envoient aussitôt des ambassadeurs et des présens (i)
» aux victorieux , qui les reçoivent avec tout le plaisir que goûtent des
" gens timides et lâches, quand ils voient leurs ennemis abattus à leurs
» pieds. Comme ce peuple est naturellement vain et orgueilleux, ies
» vainqueurs triomphent d’une manière insolente. Ils insultent aux
» vaincus, ils s’en moquent par des chansons satiriques, qu’ils com-
» posent et qu’ils récitent dans leurs fêtes. » Ils en usoient de même
avant d’en venir aux mains avec l’ennemi, afin d’exalter leur irritation
contre lui et de s’animer au combat (2).
Armes.— L ’arc et la flèche ieur étoient inconnus; ils se servoient, à
la guerre principalement, d’un bâton à deux bouts (pl. 79, fig. 3 ) ,
nommé gatdgad anam, fait en bois d’aréquier (3), et ayant huit pieds de
longueur et deux pouces de diamètre au milieu; quelques-uns étoient
garnis, à chaque extrémité, d’os humains (4) diversement barbelés.
«Ces os, qu’ils travaillent assez proprement, dit le Gobien, sont si veni-
» meux par leur propre vertu, que ia moindre esquille qui en reste au
» corps blessé, lui cause infaiiliblement ia mort (5) avec des convulsions,
» des tremblemens de tout le corps, des grincemens de dents et des
» douleurs inconcevables, sans qu’on ait pu, jusqu’à présent, apporter
» aucun remède pour arrêter un poison si violent. Ces barbares ont une
» grande quantité de ces traits.»
Le dagaa (pl. 79, fig. 4 ). instrument d’agriculture dont il a déjà été
question, page 401 , servoit au besoin tant pour l’attaque que pour la
défense. L’espèce de harpon barbelé , joo/at (pl. 79, fig. 1 1 ), spécialement
consacré à ia pêche de certains poissons et des crabes, et dont
v en t , pendant leurs guerres contre les Espagnols, montrer assez de résolution et de courage.
( Voyez pag. 17 9 . )
( I ) L es monnoies en écaille étoient une des choses précieuses qu’ils s’empressoient le
plutôt d’apporter comme gage de ieur soumission, ( Voyez page 18 4 . )
( z ) Voyez plus h au t , pag. 17 7 et 18 2 .
( 3 ) C e bois est t r è s -d u r quand il est vieu x . L e bâton à deux bouts a fait autrefois
partie de nos armes de guerre offensives ; on le retrouve encore au Brésil chez les sauvages
M bayas.
(4 ) C ’étoit ordinairement ie tibia qui servoit à former ces pointes.
( 5 ) L e P . M u r iilo , dans son / /L toW a ¿ e TüViyinfli, fa it, sur le danger de ces sortes de blessures,
des réflexions analogues à celles de le Gobien.
LIVRE III. — D e T i m o r a u x M a r i a n n e s i n c l u s i v e m e n t . 4p i
les aspérités étoient formées d’os humains ou entaillées dans le bols Ile s Mariannes,
même, ne pouvoit non-seulement être employé pour la défense person-
neile que dans ies circonstances impérieuses et prévues par la coutume,
mais, pour des motifs que je ne saurois m’expliquer, iis se faisoient
même un point d’honneur de n’en faire jamais usage à ia guerre.
En cas de nécessité, on se servoit encore, pour parer ies coups de
iance, du fadfad, bâton de 3 pouces de diamètre et de 5 pieds — de
longueur (pl, 79, fig. 10), qui, garni de feuilles de paimier à une de ses
extrémités, étoit plutôt destiné, les jours de fête, à faire des simulacres de
combat qu’à devenir un instrument meurtrier. Les Mariannais n’avoient
aucune autre arme défensive, et ne se préservoient des coups qu’on leur
portoit que par l’agiiité et la souplesse de leurs mouvemens, sur lesquelles
ils comptoient beaucoup.
La fronde [atapet] étoit une de leurs armes offensives les plus redoutables
; ils lançoient par son moyen des pierres avec tant de roideur,
qu’il n’étoit pas rare d’en voir pénétrer dans le tronc des arbres. La
plupart des frondes étoient tissées en kair (pl. 79 , fig. 6); d’autres,
faites en vacoua, étoient beaucoup moins estimées. Le projectile [djiak-
pato] qu’on y mettoit avoit ia forme que représente la figure 7 de notre
planche 79; chaque frondeur en portoit une certaine quantité dans un
sac [halahag] (i) suspendu à son côté par une bandoulière.
Les armes décrites ci-dessus servoient sur-tout pour les engagemens
à une certaine distance ; falioit-il se battre corps à corps, le damang et
la katana (2), espèces de coutelas ou de casse-têtes dont la forme précise
est maintenant inconnue, étoient préférés : les anciens habitans avoient
aussi i’habitude de porter constamment ces dernières armes à leur ceinture,
ainsi que les modernes le font pour la machete.
Fortifications. — L’art des retranchemens ne leur étoit point étranger.
( 1 ) Kqycz plus haut, pag. 3 17 et 3 I 8.
( 2 ) J ’ai déjà parlé de ces instrumens, pages i 8 i et 4o i . J ’ajouterai que ce mot katana p ourroit
bien être d’origine japonnaise. E n effe t, ia relation du voy age que D . R o d r ig o de V ie ro y
V elasco fit dans cette con tré e , en i 6 i o , parle d’épées japonnaises nommées c a ra n f lj, dont la
valeur n’étoit pas estimée à moins de ïo o o o o ducats. (V o y e z Revue des deux mondes, avril
1 8 3 0 . ) N e verroit-on pas là nne preuve que les Jap on n ais ont anciennement visité les
Mariannes! C e tte idée a déjà été suggérée ci-dessns, pag. 2 76 .
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