
Iles Mar iannes. gouverneur fit préparer, pour ie roi de Lamoursek, divers présens, et
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Mai.
entre autres de grands vases de terre cuite et des outils de fer. Ces
derniers objets furent confectionnés, pour la plupart, à une des forges de
la ville, sous l’inspection du premier pilote Ouamétaou. 11 indiquoit lui-
même ies formes les plus convenables; car celles qui sont usitées parmi
nous n’entroient pas, à ce qu’ii paroît, dans ies habitudes des Carolinois.
Ces bons insulaires mettoient une attention vraiment curieuse à suivre et
à examiner les travaux dans leurs moindres détails. Le gouverneur voulut
joindre à son envoi le don d’ime petite forge; nous reconnûmes bien là
i’impulsion de son ame généreuse.
Un violent tremblement de terre se manifesta, le 7, à une heure et
demie du soir. Nous vîmes, avec une surprise mêlée d’effroi, ia terre
onduler du Nord au Sud pendant 3 o secondes environ ; la maison craqua
dans tontes ses parties, ies tuiles se heurtèrent, et i’on eût dit que
tout i’édifice alloit crouler sur nos têtes. Tous ies habitans s’enfuirent,
les uns dans les rues, les autres dans les jardins ; cependant il n’arriva
aucun malheur. La commotion, communiquée à ia mer, se fit sentir à
bord par de fortes secousses.
Le I I , une pirogue de l’île Goulimarao, voisine de Lamoursek,
arriva seule à Agagna, et en repartit peu après avec le reste de la
flottille carolinoise.
Les prévenances assidues du gouverneur, l’habileté de nos médecins,
la pureté de l’air qu’on .respiroit, accélérèrent ia guérison des malades,
dont le nombre déjà étoit fort diminué. Plus libre de son temps, notre
chirurgien-major, M. Quoy, put s’occuper, avec plus de suite qu’il ne
l’avoit fait jusque là , de l’histoire naturelle du pays , et entreprendre des
voyages dans i’intérieur et sur le littoral de l’île pour en étudier la géologie
et les productions. Sa première course eut lieu le 15 mai, la quatrième
et dernière le 28. Notre maître canonnier, Rolland, homme excellent et
fort habile chasseur, l’accompagna dans les trois premières, et M. Peilion
dans celle dont le but étoit i’examen du mont Ilikio , qui domine la ville
d’ffimata.
Depuis près de trois semaines, D. Médinilia nous avoit proposé de nous
conduire au lieu illustré, en 16 7 2 , parla mort du P. Sanvitores, l’un des
1819.
Ma i .
LIVRE III. — D e T i m o r a u x M a r i a n n e s i n c l u s i v e m e n t . i 4 p
premiers missionnaires et ie véritable apótre des Mariannes. On a élevé un lies Mar iannes ,
autel dans la baie de Toman , sur le lieu du martyre, qui sert de but de
pèlerinage à plus d’un dévot Mariannais. Le gouverneur ne parlant plus
de son projet, il sembloit l’avoir oublié ; de notre côté nous pensions d’autant
moins à le lui rappeler que nos travaux nous occupoient davantage,
et que ia santé de M. l’abbé de Quéien, qui devoit être des nôtres, étoit
encore chancelante. Cependant, le i 8 mai, D . Médinilia nous entretint de
nouveau de Sanvitores , et le départ fut fixé au lendemain. On se mit en
route de grand matin pour ce voyage de deux lieues : ies uns allèrent a cheval ;
moi, je préférai accompagner le gouverneur dans son canot ; et comme il ne
prétlndoit pas que la dévotion nous interdît de dîner, une autre embarcation
suivoit portant ses domestiques et sa cuisine. Le temps étoit superbe, et
notre petite navigation fut très-heureuse. Le bord de la mer offrit à notre
admiration divers sites aussi gracieux que pittoresques. Le nombre prodigieux
de cycas ( i ) que nous remarquâmes, dans les environs sur-tout de la
pointe Taynanesso (pl. 59), nous surprit; mais ce qui étoit pour nous au
moins aussi surprenant, c’étoit de voir des nuées d’énormes chauves-souris
voler en plein jour, à de grandes hauteurs, comme des hirondelles.
En arrivant à Tamon, le silence qu’avoit gardé D. Médinilia depuis
quelque temps sur notre excursion fut expliqué. Ce iieu est inhabité;
mais, par ses ordres, on avoit aplani le terrain , et dressé, à notre intention,
piusieurs jolies cabanes de feuillage. L ’une devoit servir de salie
à manger, une autre de salon, toutes deux bien abritées du soleil;
d’autres étoient destinées à ia cuisine ; enfin des provisions avoient été
apportées en abondance; il ne restoit rien à desirer.
Après avoir parcouru les lieux révérés, et entendu rapporter les traditions
sur cette mort apostolique, qui peut-être rencontrèrent plus dun
incrédule parmi ies auditeurs , nous traversâmes les bois , et une route
très-raboteuse nous conduisit au petit village de Gnaton, au-delà duquel
nous aperçûmes la pointe de los Amantes [des Amans J , célèbre à Gaam ,
mais dont l’histoire trouvera place dans la description des moeurs des
f
( i ) S o r te de palmier d o n t il a déjà été fai t me n t io n plus h a u t ( c h a p . XXI ) ; les Espagnols
l’a p p e l le n t /ô /é r ic o , c omme à Ma n i l le ; mais il por te che z les indigènes le n om ma r iannai s de
fadan'é. L a fécule qu’on en r e t i r e , avons -nous d i t , res semble au sagou.