
lies M a rianne s. qui persistoient encore dans leur révolte; les plus coupables furent exécutés,
Histoire.
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et les autres renvoyés aux Philippines.
Dès que l’ordre eut été rétabli parmi les troupes, Quiroga se mit à
déployer sa vigilance et son habileté accoutumées, pour faire rentrer les
Mariannais turbulens dans ie devoir, empêcher les chrétiens d’être troublés
, et réparer les maux produits par la guerre. Ces soins furent interrompus
par l’arrivée du vaisseau annuel de la Nouvelle-Espagne, qui,
avec un secours considérable d’hommes et d’effets , apporta dans l’île une
épidémie terrible. C’étoit un rhume violent mêlé de fièvre et de flux de
sang, qui se propagea par une contagion tellement active, que personne
n’en fut exempt. Les secours que les missionnaires prodiguèrent avec un
zèle infatigabie aux malades, diminuèrent l’intensité et la durée du mal,
mais ne purent empêcher qu’il ne fît un nombre considérable de victimes.
Depuis quelques années on n’avoit pu s’occuper des îles du Nord.
Quiroga, voyant la tranquillité régner à Goam sans entraves, reprit son
projet de reconquérir ces îles, devenues la retraite des rebelles et un foyer
permanent d’insurrection. II s’embarqua donc au mois de juillet avec ses
meilleures troupes; mais le temps devint tout-à-coup si mauvais, qu’il
iui fallut remettre à une autre époque l’exécution de son entreprise. On
ne fut pas pius heureux du côté du Midi dans la recherche de i’îie Carolina
[Faroïlep], découverte en 1686 par Lascano; car le Mariannais
D. Aionzo Soon, qui étoit ailé pour établir des relations amicales avec les
habitans, ne put parvenir à ia voir.
D. Damian de Esplana revint des Philippines, en i 690, fort mécontent
du voyage qu’il y avoit fait : son absence des Mariannes sans autorisation
spéciale, y fut considérée comme une faute grave; on le mit en prison, et
il se vit obligé de dépenser, pour se tirer de ce mauvais pas, tout l’argent
fruit de ses exactions et de ses rapines. Revenu à Goam avec le projet
de se dédommager de tant de pertes , il ordonna la construction d’un
vaisseau qui, armé ensuite aux frais de l’état, fut vendu pour son compte
et envoyé aux Philippines avec un équipage de quatre-vingts soldats ;
affaiblissant ainsi la garnison pour satisfaire à une honteuse avarice.
Au mois de juin suivant, deux navires de la Nouvelle-Espagne,
voulant entrer dans le port de Mérizo, se perdirent sur la petite île
) 690.
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LIVRE III. — D e T i m o r a u x M a r i a n n e s i n c l u s i v e m e n t . 207
Danéono, qui est à l’entrée, circonstance qui augmenta ies forces colo- Iles Mariannes,
niales d’un personnel de pius de cent hommes, et ajouta au nombre
des missionnaires une vingtaine de religieux franciscains. Ces naufragés
eussent pu être, sans doute, utilement employés à poursuivre la conquête
des îles du Nord; mais D. Damian, excité par l’appât sordide
du gain, préféra les faire travailler pour son compte à la construction
d’un autre vaisseau. Parmi ces nouveaux débarqués, se trouvoient un
assez grand nombre de forçats qu’on déportoit de la Nouvelle-Espagne
aux Philippines ; impatiens du joug auquel iis étoient soumis, et désirant
s’affranchir de toute contrainte, ces misérables formèrent l’horrible projet
d’égorger le gouverneur, ses principaux officiers, et les missionnaires, ne
voulant, par un scrupule fort remarquable, se réserver qu’un seul de
ceux-ci pour être leur aumônier ; iis devoient s’emparer en même temps
du vaisseau qu’on attendoit dans le courant du mois d’août, et, après
s’être rendus maîtres des richesses qu’ii contenoit, piller i’île, et se retirer
dans des pays éloignés : l’exécution fut fixée au jour de S.*' Rose, fête
qui devoit attirer beaucoup de monde au village d’Agat; mais le bâtiment
attendu ne paroissant point à l’époque dite, les mesures concertées en
éprouvèrent quelque dérangement. Sur ces entrefaites, un des conjurés,
effrayé par l’énormité de son crime, vint en découvrir toute la trame au
gouverneur. D. Damian, en cette circonstance, agit avec tant d’activité et
de prudence, que, dès le lendemain, vingt des coupables furent arrêtés,
et ies trois autres quatre jours plus tard ; on leur fit leur procès ; et ces
scélérats, condamnés à être passés par les armes, moururent après avoir
fait l’aveu de leur crime.
La tranquillité étoit à peine rétablie , après tant de révoltes et de
séditions dues à la méchanceté des hommes, qu’on eut à iutter contre ia
fureur des élémens. Un ouragan, plus terrible qu’aucun de ceux que l’îie
eût éprouvés jusqu’alors, éclata à l’entrée de la nuit du 20 novembre 1 693.
Le vent souffloit avec une violence inouie, les coups de tonnerre se
succédoient avec un épouvantable fracas, la pluie tomboit par torrens,
les flots de la mer soulevés envahissoient les terres de toute part; enfin,
l’île ébranlée sembloit près de s’abîmer sous les pieds des malheureux
habitans, qui, dans leur effroi, n’entrevirent d’autre espoir de salut que
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