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lies Mariannes.
Ancien
gou v e rnement .
Monnoies.
4 8 6 VOYAGE AUTOUR DU MONDE.
et au point que l’accusé, s’il n’étoit pas puissamment riche, se voyoit
bientôt hors d’état de continuer à y faire face ; car il ne s’agissoit point
de compter sur des délais pour s’acquitter; il falioit que le troc se fit de
ia main à la main, en nature et sur-le-champ. Aussi l’homme opulent
que ses ressources mettoient en état de tenir bbn jusqu’au bout, étoit
renvoyé honorablement déchargé; il se retiroit comblé de politesses,
emportant les morceaux d’écaille , et ses accusatrices les provisions de
bouche. Combien étoit différent, au contraire, le sort de l’accuse dont
les moyens ne pouvoient suffire à tant d’exigences ! Les organes de la
ju.stice, inflexibles pour lui, le coudamnoient à subir dans tonte sa
rigueur la peine qu’il avoit encourue.
Ces sortes de jugemens se nommoient tadio. Les pala-aan ho [proches
parentes] (i) étoient les seules qui pussent mettre des alas devant les
accusés. Les filles maalitaos, c’est-à-dire, celles qui avoient eu commerce
avec les olitaos (2), étoient libres d’assister à ces séances, sans y être
cependant obligées comme ies femmes mariées; il ne leur étoit pas
permis non plus d’apporter des monnoies d’écaille : les filles vierges
étoient exclues. En général une maolitao, quelque jeune qu’elle fût, jouissoit
de plus de considération qu’une personne de son sexe, avancée
en âge, qui s’étoit maintenue dans la chasteté.
Les mangatchangs coupables d’un délit grave n’étoient soumis qu’au
jugement du maga-lahi ou chef de ia tribu; celui-ci décidoit encore en
dernier ressort, conformément à la délibération du conseil , sur les
questions de paix et de guerre, les traités d’alliance, en un mot sur
tout ce qui intéressoit le bien-être et la sûreté du pays.
On a vu précédemment (3) quelles étoient la forme et la nature des
colliers que les dames mariannaises, et parfois aussi les hommes, faisoient
servir tant à leur parure qu’à s’acquitter de certaines redevances; le
prix qu’on attachoit à i’écaille qui avoit mérité l’honneur d’être percée d’un
certain nombre de trous, croissoit en raison même de leur quantité (4).
( 1) Voyez plus haut, page 372.
(2) I b id , page 18 0 et 369.
(3 ) Pag. 3 1 1 , 376, 39^ et 395-
(4 ) Voyez l’ explication de cette cou tum e ,p ag e 395.
Sous le nom générique d’ö/ö5, on comprenoit, avons-nous dit, le Iles Mariannes.
gaiin, collier un peu moins gros que le petit .doigt (pl. 79, fig. i4), et g ^ ^ ^ r a lm e n t .
Je lakao-hagaa, d’un pouce environ de diamètre (même pl., fig. 23) : le
ghintos éto'it un fragment du précédent, sans distinction de longueur
particulière. Une écaille de tortue toute simple s’appeloit Idilai ; si cette
écaille étoit légalement percée de trous, elle recevoit le nom de pinipa,
et sa valeur étoit d’autant de fois trois Idildl qu’ii y avoit de trous sur
la même écaille: Je pinipa que jeprésente notre pianche 79, fig. 16,
valoit donc i 2 laïlaïs. Nous nous servirons de cette même unité pour
établir ie rapport des diverses monnoies mariannaises entre elles.
L e g o in ï valoit 6 laïlaïs.
à I t ro u . 3. _ ^
à 2 ..... 6.
à 3 .... 9-
L e pinipo ( à 4 • • à . . . i 2,
^ 5 ...... I)'-
à 6 ......... 18.
à 7 ........ 2 1.
E nfin le lokao-hûgûa 2 4 la ïla ïs , ou un pinipo percé de 8 trous.
"Le ghintos étoit d’un prix moindre que le gainï, mais plus considérable
que le laïlaï : c’est tout ce que la tradition conserve à ce sujet ; quant
à la vaieux An goinéha famagoon, on la regardoit comme inappréciable;
elle étoit, aux yeux des Mariannais , ce que seroit pour nous un diamant
de très-haut prix.
Ici se présente une réflexion bien naturelle : chaque habitant n’é-
toit-il pas libre d’augmenter à son gré la valeur des écailles qui étoient
en sa possession, en y multipliant indéfiniment le nombre des trous ?
La bonne foi et la sincérité qu’ils mettoient dans leurs relations mutuelles,
pourroient servir de réponse à cette objection : mais une telle fraude,
au cas où quelqu’un eût osé la commettre, n’eût point échappé aux
yeux vigilans des membres de sa famille et même de ses compatriotes,
et auroit attiré sur son auteur ie châtiment et d’infamie. Ces espèces de
monumens, destinés à perpétuer le souvenir de faits remarquables et
connus de tout le monde, n’auroient pu en présenter d’inexacts sans
qu’ils fussent à l’instant démentis.
La cupidité des Européens qui les premiers vinrent s’établir aux
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