
De l’homme
en société.
tout ce jour-là un jeûne rigoureux, mais ils ne manquent pas de s’en
dédommager la nuit suivante.
» Quelques-uns renferment le corps du défunt dans un petit édifice
de pierre (i) que l’on garde dans l’intérieur de la maison; d’autres l’enterrent
loin de leurs habitations, et environnent la sépulture d’un mur
de pierre : ils déposent auprès diverses sortes d’alimens, dans la persuasion
où ils sont que l’ame s’en nourrit (2).
» Iis croient qu’il y a un paradis où les gens de bien sont récom -
pensés, et un enfer où les méchans sont punis, lis disent que les ames
qui vont au ciel reviennent le quatrième jour sur la terre, et demeurent
invisibles au miiieu de leurs parens.
Prêtres. — <> II y a parmi eux des prêtres qui prétendent avoir commerce
avec ies ames des morts. Ce sont eux qui, de leur propre autorité ,
déclarent ceux qui vont au ciel, ou ceux dont l’enfer est le partage : on
honore les premiers comme des esprits hienfaisans, et on leur donne ie
nom de Tahoutoups, ou saints patrons {3). Chaque famille a son Tahoutoup,
auquel elle s’adresse dans ses besoins ; si quelques-uns de ses membres
tombent malades, s’ils entreprennent un voyage, s’ils vont à la pêche, s’ils
travaillent à ia culture de leurs terres, iis invoquent ieur Tahoutoup : ils
lui font des présens qu’ils suspendent dans la maison de leur tamor (4),
soit par intérêt, pour obtenir de lui les grâces qu’ils lui demandent, soit pat-
gratitude, pour le remercier des faveurs qu’ils ont reçues de sa main libérale.
Mariages.— » La pluralité des femmes est non-seulement permise
à tous ces insulaires, c’est encore une marque d’honneur et de distinction.
Iis disent que le tamor de l’ile Hogoleu en a neuf. Ils ont horreur de
l’adultère comme d’un grand péché; mais celui qui s’en est rendu cou-
Perse. ) Cet usage de se tondre les cheveux dans de pareilles circonstances, existoit chez presque
tous les peuples de l’antiquité. Dans Homère, Achille dépose sa blonde chevelure sur le tombeau
de Patrocle,et, à son exemple, tousses autres amis le couvrent de la leur. {Il'md. ch. XXIII.)
( I ) Ce même fait nous a été attesté par D. Luis. Queiquefois, d’après le même auteur, en
ensevelit le corps dans une pirogue qui reste dans la maison mortuaire.
(2) Cette croyance se trouve dans la religion des Chinois, avec laquelle on remarque ici
quelque similitude. D. Luis a cru qu’on offroit des mets à Dieu en faveur du mort ; mais je
pense que l’opinion de Cantova est à cet égard la plus exacte et la plus vraisemblable.
(3) Ou bien esprits tutélaires: on ies retrouve par-tout à la Chine,
(4) On dit indifféremment ici tamor, tainol, tamore et tamour.
LIVRE III. — De T imor au x M ariannes in c lu s iv em en t , i 19
pable, obtient aisément ia rémission de sa faute; il lui suffit de faire Iles Caroline!,
quelque riche présent à l’époux de celle avec laquelle il a eu un commerce De 1 homnra
illicite.
„ Le mari peut répudier sa femme lorsqu’elle a violé la foi conjugale,
et la femme a ie même pouvoir de répudierson mari lorsquil cesse de iui
plaire : dans ce cas, certaines lois sont établies pour la disposition de la
dot ( I ). Quand l’un d’eux meurt sans postérité, ia veuve épouse le frère
de son mari défunt. »
c< Lorsque, à Gouliay, un ami réclame de son ami l’hospitalité, dit Divers usages,
Kotzebue (2 ), il doit lui céder sa femme pendant la durée de la visite,
ce qui n’a pas lieu à Feis ni aux îles situées plus à l’Ouest. »
D’après M. Duperrey, ie baiser, ou signe de salut entre deux personnes
qui se rencontrent, consiste à se flairer mutuellement la main ou le nez :
cet usage est fort répandu, non-seulement dans ia Polynésie, mais aussi
dans le grand archipel d’Asie.
« Les insulaires de Gouliay et de Farroïlep sont accoutumés à se
baigner trois fois ie jour, ie matin , à midi et sur le soir ( 3 ). Ils prennent
leur repos dès que le soieil est couché, et se lèvent avec l’aurore. Le chef ou
tamor de l’île ne s’endort qu’au bruit d’un concert que forment une troupe
tle jeunes gens réunis le soir autour de sa maison, et qui chantent a leui
manière certaines compositions poétiques, jusqu’à ce qu’on les avertisse de
cesser.
» Pendant lanuit, au clair de iune, iis .s’assemblent de temps en temps
pour chanter et danser devant ia demeure de ieur tamor. Le son de la
voix seule, car iis n’ont point d’instrumens de musique, règle leur danse,
dont la beauté consiste dans l’exacte uniformité des mouvemens du corp.s.
•Amusemens.
( I ) Suivant les remarques Ju capitaine Kotzebue a Kadak, 1 homme, en se mariant, fait au
père de sa prétendue un présent consistant en fruits, poissons et autres choses semblables. La
valeur en est réglée en raison du rang qu’occupe le père de la mariée , car les mariages peuvent
aussi avoir lieu entre des personnes de rangs inégaux. Si le père, ou la mère seulement, est de
la classe des chefs, les enfans sont réputés appartenir à cette classe. Dans le second cas, le
père et le mari donnent à la femme et à ses enfans toutes les démonstrations extérieures de
respect dues à sa naissance. (Kotzebue, op. cit. t. 111.)
( 2 ) L o c . cit.
(3) Cantova, Lettres édifiantes.