
Ile s Mariannes. s exposent : électrisés par l’exemple , leurs compagnons s’empressent à
Histoire.
¡6 9 5 (suite).
l’envi de les suivre , et tous ensemble montent avec intrépidité jusqu’aux
retranchemens ennemis, dont ils parviennent enfin à s’emparer. Cette
action hardie intimida tellement les assiégés, que sur-ie-champ ils rendirent
les armes et demandèrent quartier. On y consentit, à condition
cjuils viendroient avec leurs familles habiter l’îie Gaam, pour y accomplir
les devoirs de vassaux du roi d’Espagne, mesure qui fut exécutée dès ie
lendemain.
La victoire d’Agoigan , remarquable comme fait d’armes, eut des
conséquences très - importantes. La nouvelle en étant parvenue bientôt
jusqu aux îles Gani ( i ), engagea ies habitans à se soumettre sans coup
férir. Et comment eussent-iis conservé quelque espoir d’une résistance
efficace, après la prise d’un retranchement qu’ils regardoient comme
inexpugnable .' Un aussi brillant avantage ne satisfit cependant pas tout-
à-fait Quiroga , qui voulut encore forcer les insulaires à quitter ieurs îles
natales pour venir habiter Saypan et s’y faire instruire dans la religion
catholique : beaucoup obéirent ; et depuis cet instant, on vit ies Mariannes
jouir dune paix parfaite et non interrompue. Ces succès furent dus uniquement
à 1 habileté et à la conduite mesurée autant que courageuse du
général : Tanto ha^e un hombre, si es hombre ! dit l’auteur espagnol de
qui nous empruntons cette réflexion.
Content de ia campagne qu’ii venoit de terminer, Quiroga revint à
Agagna entouré d’une réputation justement acquise, et remit, l’année
suivante, les rênes du gouvernement à D. José Madrazo. Ce dernier,
ayant appris que quelques insulaires des îles Gani, ne voulant pas se
rendre à Saypan, étoient parvenus à gagner du temps sous divers prétextes,
et qu’à ces mécontens s’étoient réunis plusieurs hommes des
autres îles, se détermina, pour en finir, à envoyer contre eux une escadrille
de cent douze pros , aux ordres du capitaine Sebastian Luis Ramon,
homme plein de valeur et d’expérience. L’expédition quitta Goam en
septembre 16 9 8 , accompagnée du P. Gérardo Bovens, supérieur de
Saypan, de douze soldats espagnols, et d’un grand nombre de guerriers
( I ) C ’est le nom qu’on d o n n e , avons-nous dit d é jà , à celles des îles Mariannes qui sont au
N o rd de Sa yp an .
1 696.
169 8 .
Histoire.
1699,
j'Ji;
LIVRE III. — De T i m o r a u x M a r i a n n e s i n c l u s i v e m e n t . 2 1 1
indigènes. Six mois furent employés à cette tournée, cjui eut tout ie Ile s Mariannes,
succès qu’on s’en étoit proposé. Depuis lors, le christianisme fut établi aux
Mariannes d’une manière stable, et la conversion des insulaires se continua
jusqu’à ce qu’il n’y eût plus un seul idolâtre dans ies trois îles
peuplées, Gaam, Rota et Saypan.
§. III.
Depuis l ’entier assujettissement des M ariannes p a r les Espagnols, ju sq ti ’au
départ de la corvette l’Uranie de Gaam (1 699 — 1819) .
Après la conquête des îles Gani, ies Espagnols étendirent sans résistance
ieur pouvoir sur la population de i’archipei, entièrement agglomérée
alors. Mais, se croyant désormais dégagés d’inquiétudes , ils dédaignèrent
de suivre cet esprit de justice que ie besoin de ménager des hommes
entreprenans et redoutables avoit jusque-ià forcé d’observer : d’énormes
vexations furent la conséquence de ce malheureux système, dont nous
allons avoir bientôt occasion de signaler plus particulièrement ies abus.
D. Madrazo eut pour successeur , en 1700 , D. José Francisco 1700,
Médrano y Asiain, q u i, après une administration de quatre ans, fut 1704.
remplacé Iui-même par D. Antonio Villamor y Vadillo. Ce fut sous ie
gouvernement de ce dernier que mourut, à Goam, en avril i 7 0 1 , le
maréchal-de-camp D. Antonio Ayihi , l’un des Mariannais les plus
fidèles et les pius dévoués. Avant sa conversion au christianisme , sa
force extraordinaire et sa valeur le rendirent un objet de terreur pour
les habitans ; mais ii ne fut pas moins respecté par sa bonté que par la
générosité de son ame. Depuis i’instant où il eut reçu ie baptême, on
ne le vit jamais manquer ni à la foi qu’ii professoit, ni aux obligations
quelle Ini avoit fait contracter. Parmi tous ies actes de vertu qu’il s’honoroit
de pratiquer, ceiui qui lui coûta le plus peut-être, ce fut de pardonner à
la personne qui, mariée avec lui en face de l’église , l’avoit quitté pour
vivre avec un autre; conduite d’autant plus remarquable, que, parmi
les insulaires, l’opinion couvroit de honte ceux qui revenoient avec leurs
femmes après un semblable délaissement. Les obsèques d’Ayihi se firent
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