
Iles Ca roline s. Les hommes, séparés des femmes, s’avancent vis-à-vis les uns des autres;
D e l’ homme puis ils remuent la tête, les bras, ies mains et les pieds en cadence. Les
en société.
ornemens dont ils ont soin de se parer, donnent, selon eux, un nouvel
agrément à cet exercice : leur tête est couverte de plumes ou de fleurs ;
des herbes aromatiques leur pendent aux narines, et l’on voit attachées
à leurs oreilles des feuiiies de palmier arrangées avec assez d’art; aux
bras, aux mains, aux pieds, iis portent d’autres parures propres à ces
parties.
» Les femmes, de leur côté, se livrent à un divertissement plus convenable
à leur sexe. Assises, et se regardant ies unes les autres, elies
commencent un chant pathétique et langoureux, accompagnant le son
de ieur voix du mouvement cadencé des bras et de la tête : ce chant s’appelle
en ieur langue tanger ija'ifl [la plainte des femmes].
« A la fin de ia danse, le tamor, quand il se piqne de libéralité, élève
en l’air une pièce de toile qui devient le prix de ceiui des danseurs qui
peut s’en saisir ie premier.
» Ils ont en outre plusieurs autres jeux où iis donnent des preuves de
leur adresse et de ieur force, en s’exerçant à manier la lance, à jeter des
pierres ou des balles dans les airs. Chaque saison a son genre d’amusement
particulier. »
Nous avons été piusieurs fois témoins des danses carolinoises ; j ’ai
parié (page 72) de celie qu’ils exécutèrent sur le vaisseau pendant que
nous naviguions près de leurs îles ; mais c’est aux Mariannes sur-tout que
nous en avons vu des plus variées et des plus agréables. Dans l’une de
ces danses, les acteurs, en assez grand nombre, se rangent sur deux lignes
et en face ies uns des autres; tous sont armés d’un bâton pareil à celui
qui est figuré pi. 58, fig. 13 . Un cri général se fait entendre : à l’instant,
chaque danseur frappe adroitement avec son bâton , tantôt ceiui de la personne
qui est vis-à-vis de lui, et tantôt, en sautant et faisant un quart
de conversion, celui de son voisin sur la meme ligne, soit adroite, soit a
gauche. Bientôt iis changent de place, s’entremêient en formant diverses
ficrures parfois très-compliquées, et de manière à toujours heurter en cadence
ie bâton d’un de leurs voisins. II est à remarquer que ce n’est pas
avec le milieu de cette arme qu’ils frappent, mais avec ses extrémités.
LIVRE III. — De T i m o r a u x M a r i a n n e s i n c l u s i v e m e n t . 12 1
et qu’à chaque coup elle doit toucher par un bout celle d un des danseurs ,
et par le bout opposé celle d’un autre. Notre planche 5 5 donnera une
idée de ce genre d’exercice, dont deux combinaisons seulement ont pu
être représentées, quoiqu’elles soient à I exécution très-muitipiiées. Un
chant général règle tous ces mouvemens, qui charment par ieur précision
et leur grâce. Voici les paroles d’une de ces chansons que M. Gaimard a
transcrites ; les acteurs appartenoient à i’île Satahoual ; i air étoit peu
harmonieux.
Touka poui atta lata oiiaké,
Touka poùi atta la la ouaké,
Touka poui & c.
Nous n’avons pu nous faire expliquer le sens de ce jargon. Dans une
autre circonstance, ayant interrogé, sur un pareil sujet, la personne qui
nous servoit d’interprète , eile nous dit de même n’être pas capable de
nous donner la traduction des paroles chantées , mais savoir que leur
objet étoit ordinairement de peindre les peines de l’absence, les craintes
d’une femme dont le mari est en mer, &c.
Les danses n’ont pas toutes ie même caractère ; souvent les acteurs,
sur une seule ligne , se frappent ies cuisses avec ieurs mains , lèvent ensuite
les bras, et recommencent en chantant ce jeu monotone. D’autres fois,
rangés en rond, iis se tiennent par le poignet et sautent sur la jambe
gauche en appuyant la droite sur ia cuisse de leur voisin (pl. 56); enfin
on les voit également former un rond, au miiieu duquei un homme fait
diverses contorsions que tous ies autres sont tenus d’imiter. Nous avons
en France une danse analogue , connue sous le nom de branle des capucins :
aux Carolines, comme chez nous, toutes ces folies excitent une vive
hilarité.
La musique a presque toujours ia monotonie de la danse ; on peut en
juger par Féchantillon suivant :
D e Thomme
en société.
Métronome. y-J |—
Voyagt de l’Uranie. — Historique. T. II.