36 GÉOGRAPHIE PHYSIQUE,
plus en plus erronées et vagues. C'est ainsi qu'au x° siècle,
Léon le Diacre" discute laborieusement la question de
savoir d'où vient l'Ister (le Danube), et, sans oser la décider
lui-même, il rapporte l'opinion de ceux qui croient
que le Danube vient des Indes, et qu'il ne forme qu'une et
même rivière avec le Gange'.
Aboulféda mentionne à peine la mer Noire, et coupe
court à toute discussion par ces paroles naïves : IDieu seul
sait ce qu'il en est3 . » Le peu qu'il en sait lui-même nous
prouve seulement qu'au xiv" siècle le Pont-Euxin était
indifféremment nommé mer de Crimée, mer Arménienne
et mer Noire.
Ce nom classique de Pont s'était conservé pendant
longtemps chez les écrivains orientaux , malgré les diverses
altérations qu'il subissait en passant par leur bouche.
C'est ainsi que Massoudi écrit Pontous, et appelle le Palus
Méotides Maïtous, tandis qu'Aboulféda le nomme lac Matytch,
en observant cependant que, déjà à son époque, on
le désignait par l'épithète de mer d'Azof. Edrisi4 fait aussi
usage du terme de nier du Pont.
Les auteurs occidentaux du moyen âge s'en servaient
également. Rubruquis5 appelle la mer Noire, tantôt mer du
Pont, tantôt mare M a] us.
1. Leonis Diaeoni flist., 1. vni, 3.
2. Jean le Lydien*, bien qu'antérieur à Léon, ne partageait point l'inconcevable
ignorance de ce dernier à l'endroit du Danube, car du moins ne le fait-il pas arriver
de l'Inde, mais il admet au contraire (quoique sur l'autorité déjà alors fort surannée
de Jules César) que ce fleuve aies mêmes sources que le Rhin.
- 3. LA Géographie d'Albonféda, traduite par Reinaud, t. 1, p. 38.
4. Géographie d'Edrisi, traduite par Am. Joubert.
5. Voyages de Rubruquis., éd. delaSoc. de Géog. t. IV, p. 214.
Joannit Lydi de OtlenUil, p. 22S, édit. de Bonn.
CHAPITRE II. 37
Plan Carpin • n'emploie presque toujours que cette dernière
dénomination.
Si le nom de Pont-Euxin traversa presque intact tant de
siècles et tant de langues, ceux de Bosphore, de Propontide
et de Hellespont n'eurent pas tout à fait le même privilège1,
car tantôt leur signification véritable se trouva
altérée, tantôt ils étaient remplacés par des noms complètement
différents. Ainsi Edrisi' désigne par le nom collectif
de détroit-de Constantinoph le Bosphore, la mer de
Marmara et les Dardanelles, de même que l'expression
encore plus générale de mer de Syrie embrasse chez lui la
Méditerranée, l'Archipel grec, les deux détroits et la Propontide;
aussi, dans ce sens étendu, il ne désigne comme
mer que le Pont et la Méditerranée; tout le reste n'est pour
lui qu'un golfe de cette dernière, et se trouve désigné par le
nom de golfe d'Abydos.
Les chroniqueurs chrétiens du moyen âge ne se servent
presque jamais que du terme de bras de Saint-George « brachium
Sancti Georgii » pour désigner tantôt l'Hellespont,
, vavaaes de Rubruquis, éd. de la Soc. de Géog., t. IV, P-7 i 3 -
a p lqi f toni i l anciens écrivains s'accordent à donner au nom de Bosphor
l'étrange étvmologie de p«, taureau. Longus, dans son célèbre roman Dopta« et
c S r dSfles t a Z n x ont tant de facilité dépasser la mer à la nage queplui
l : S S n t e a vus franchir, ont été désignés par le nom de Bo sphore
se rattache à l'opinion de ceux qui voient dans cette dénomxnot^
n nue allusion a la fable de la flUe d'Inachus métamorphosée en tam.au.
S t e t a e » parait être le seul auteur qui donne à ce nom une origme Mférente
r f ™ n'avoir pas sa racine dans la mythologie, n'en est peuteetae. que plus
ïïiï n pense que les termes de Bosphore Cimmérien et delavrlle de Bosphore
dltàvtm^de ce true les habitants de cette contrée payaient leurs tributs non en argent
cite, à l'appui de son assertion, l'exemple
prince des Huns établis sur le Bosphore Cimménen, et qui payatf a 1 empereur
Justinienun tribut annuel d'un nombre convenu de taureaux.
3. Géographie d'Edrisi, t. II, p. 301.
. L. ,,j0. _ L. Ta, 8— T " V.i, p. 644, éd. de I o n .