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plus en plus. Il résulte donc du passage de Pline, que
l'espace qui séparait l'île de Leucse de l'embouchure de
l'Hermus a été comblé à une époque historique consacrée
vaguement par les traditions', et tout porte à croire que le
demi-cercle d'îlots dont nous avons parlé auront un jour
le même sort, ce qui naturellement occasionnera un rétrécissement
très-appréciable du golfe de Sttyrne, rétrécissement
dont les progrès finiront peut-être par ensabler complètement
ce dernier. De plus, Pline parle d'une île nommée
Syrie, que les dépôts dé l'Hermus auront rattachée à la
terre ferme : « Mediis j'arn catnpis Syrien insulàm adjecitK'»
En faisant le tour de ce golfe depuis l'embouchure du
Guedis-tchaï jusqu'à la ville de Smyrne, nous y trouvons
une foule de ruisseaux parmi lesquels nous ne citerons que
le Mélès-sou qui traverse la ville de Smyrne. Il a sa source
à quatre lieues environ au sud-ouest de la ville, sur le versant
méridional du Kizil-dagh, le Pagus des anciens; avant
de tourner au sud-est vers la ville , il reçoit un ruisseau
venant de Sédikôï; en s'àpprochant de Smyrne, le Mêlés se
divise éii deux bras, dont l'un passe par les faubourgs de
la Ville èt va déboucher à côté du chantier de la marine.
Un peu aa-dessous de sa bifurcation , la petite rivière , qui
a très-peu d'eau en été, porte lé pittoresque pont dès Éa)rovanès,
que le pinceau dés artistes voyageurs s'est complu,
avec raison, à reproduire tant de fois. Une lieue environ
plus bas, la jolie vallée de Mélès est traversée par deux
aqueducs antiques, qui sont complètement revêtus d'une
épaisse croûte de travertin, déposée par les ruisseaux qu'ils
étaient probablement destinés à recueillir pour les con-
1. L. n, 93.
CHAPITRE y- w
duire dans la ville. La grande quantité de carbonate de
Chaux tenu qn dissolution dans les nombreux ruisseaux
qui descendent tout le long du bord nord-est de la vallée,
se manifeste par l'énorme accumulation de travertin sur les
parois des rochers trachytiques ; il forme à, leur pied et dans
le fond de la vallée des masses puissantes qui s'étendent
sur un très-grand espace, car on peut les poursuivre
jusqu'à la plaine deSédikoï, c'est-à-dire sur une longueur
de près de trois lieues..
Malgré son insignifiance, le ruisseau de Smyrne, dont
Strabon1 place l'embouchure exactement où elle est maintenant,
c'est-à-dire à c§té- de cette vill,e, a joui dans l'antiquité
d'une grande célébrité, parce que Sipyrne était au
nombre des. cités qui réclamaient l'honneur d'avoir donné
le jour à Homère, et que c'est sur les rives mên>és du Mélès
que ce poëte était censé avoir recueilli ses inspirations immortelles.
Pausanias en, parlant de Smyrne, dit que le territoire
de...cette: ville est traversé par la belle rivière Mélès., près
de la source de laquelle se trouve la. grotte où l'on croit
qu'Homçre composa ses poëmes. Aussi Tibulle 3 désigne
ces derniers par l'expression de feuilles mélétiennes « Meletoe
ihartoe. » Phi lost rateen parlant des chefs-d'oeuvre
de peinture et de,sculpture des anciens, signale un tableau
représentant Crithéis, la mèrt! du chantre de l'Iliade, auprès
de-la rivière Mélès, figurée sous la forme d'un adolescent
étendu au m i l i e u .de.fleurs; Crithéis est agitée d'une
passion violente pour le jeune Mélès, et ce fut Homère qui
4. L. xiv. — 2. Achaic., c. 5.
3, L. iv, Eleg. i, vers. 200.
4. Imagines, pars vi, 1. n, tab. 8.