•"f GÉOGRAPHIE PHYSIQUE.
A 5 lieues au nord-ouest de Kaïsaria, le Kizil-irmak
reçoit du côté gauche le Kara-sou. Ce petit torrent qui n'a
que quelques pas de largeur à son embouchure, se déve-,
loppe un peu à 4 lieues au sud-est de cette dernière, où il
est traversé par un pont en pierre, et prend le nom de Saroumchak
sou. Au sud de ces parages, se déploie la vaste
plaine de Kaïsaria jusqu'aux contreforts septentrionaux du
colosse d'Argée. Près du pont qui traverse Je Saroumchaksou,
ce dernier reçoit l'Ambar-sou, qui sort des hauteurs
trachytiq ues situées a l'ouest de Kaïsaria, et parcourt la
plaine au sud du Saroumchak-sou présque parallèlement à
ce dernier; il est entouré de marécages, et bordé des restes
d'une route antique dont les dalles bouleversées et glissantes
font à chaque instant trébucher et tomber lés che-
•vaux. Dans tout son cours, le Saroumchak-sou est. parfaitement
guéable, il forme par-ci par-là des marais plus ou
moins 'étendus. Pendant l'été, le Kara-sou que l'on traverse
en allant de Kaïsaria à Erkélet, est complètement à sec; il
n'est représenté alors que par un ravin que l'on franchit
sans s'en apercevoir.
Le Kara-sou ne peut être que le Mêlas de Strabon, qui le
plàceà 40 stades (un sixième delieue)de Mazaka(Kaïsaria),
ce qui s'accorde assez bien avec la position de cette dernière
ville, en supposant que le Mêlas comprenait la partie
du Kara-sou désignée aujourd'hui par le nom de Saroumchak.
Mais ce qui est en contradiction avec tous les faits,
c'est l'assertion de Strabon relativement à l'embouchure
du Mêlas dans VEuphrale; la méprise est si grossière qu'il
devient plus naturel de l'imputer à une faute de copiste
plutôt qu'à un géographe né en Asie Mineure, et qui d'ailleurs,
indépendamment de cette circonstance, ne se serait
CHAPITRE IV.
point avisé de placer l'embouchure de, ce petit torrent à
70 lieues de Kaïsaria, tandis qu'elle n'en est éloignée que de
4 lieues. Au reste, cette bévue a déjà été relevée par plusieurs
auteurs, et récemment par MM. Caillier et W. Hamilton.
Strabon nous rapporte ' que le roi Ariarathès avait
fermé l'embouchure du Mêlas et converti la contrée en
un lac, au milieu duquel surgissaient de petites îles que le
prince aimait à habiter. « La rupture de la digne, ajoute
le géographe, détermina une telle hausse dans les eaux
dfi l'Euphrale (Strabon veut dire Halys), qu'elles emportèrent
des portions considérables de terrain, détruisirent plusieurs
villages et champs cultivés, et occasionnèrent les
plus grands dégâts dans la Galatie phrygienne. Les habitants
obtinrent, à titre d'indemnité, la somme de 300 talents
que les Romains condamnèrent le roi à leur payer. »
Quand on considère les localités, on a bien de la peine à
comprendre comment l'inondation produite par un ruisseau
qui, comme le Kara-sou, n'a environ que 3 à 5 mètres
de largeur et moins d'un mètre de profondeur, put couvrir
la vaste plaine de Kaïsaria d'une nappe d'eau ayant
l'apparence d'une mer parsemée d'îles habitables, D'ailleurs
cette opération ne se fit que dans, le courant de quelques
années, en sorte qu'on ne peut même pas l'expliquer par
la durée du temps, qui, à la longue, eût peut-être fini par
concentrer dans la plaine un volume d'eau assez considérable.
Le roi Ariarathès paraît avoir voué une affection toute
particulière à ces inondations artificielles, car, selon Strabon,
il ne se contenta point de boucherie Mêlas et d'expier
ce divertissement ruineux par une grosse amende, mais il
1. L. in, î.
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