388 GÉOGRAPHIE PHYSIQUE,
ques; qu'enfin le sultan Mahomed, pour rivaliser avec ces
hardis nautoniers, fit construire un bâtiment de 3000
tonneaux, mais qui ne tarda pointa sombrer sous le poids
de sa mâture, et surtout à cause de l'inhabileté des Turcs
à manoeuvrer cette énorme machine. De plus l'historien
byzantin observe qu'à Gette époque (au xvf siècle), il se
trouvait dans 1« port de Sinope beaucoup dë bâtiments
marchands très-eonsidérables, parmi lesquels un de 90
tonneaux : uayç waxociKw xiHm. '
Nicetas Choniata1 nous donne des renseignements fort
curieux sur la flotte que les Vénitiens dirigèrent, à la fin du
xii» siècle, contre Constantinople. Elle portait 31,000 cavalière
pesamment armés de cuirasses, de lances et de boucliers,
et l'on remarquait parmi les bâtiments qui composaient
l'escadre, un navire énorme qu'à cause de ses
gigantesques dimensions on avait baptisé dn nom d'univers,
KOGJAOÇ.
Il résulte des nombreux témoignages que nous avons
rapportés que, tant dans l'antiquité qu'au moyen âge, on'
savait construire et manoeuvrer des vaisseaux tout aussi
considérables que les nôtres, et que, si, généralement,
on leur donnait des dimensions moins grandes, nous ne
sommes nullement en droit d'en conclure que toute rivière
que nos ancêtres considéraient comme navigable dût ne
pas l'être pour no os
1. Nicetae Chômâtes Hist. quoeab Imp. Johan. Comn. innipit,, 1. in, p 714 ,-ed.
de Bonn. >
2. Il ya sans dire qu'on ne peut admettre les propriétés navigables d'une rivière
sur l'assertion des anciens, qu'autant que cette dernière ne se trouve pas en contradiction
avec d'autres autorités é^cileïïiBiit yespectuljles, pu cju'elle n'est pas inconi—
patible arec les" considérations pnisées dans une critique sévère; tel est, par
exemple, le cas avec le SccitHuticlfÊ, que nous ne pouvons accepter comme ayant
été jamais navigable du temps de Pline, bien qu'il l'assure .po&itiyim&nt.
CHAPITRE Vil. .
Nous pouvons également conclure de ce qui précède,
que si des' cours d'eau, aujourd'hui insignifiants, avaient
été unanimement qualifiés par les anciens comme rivières
navigables, et surtout susceptibles d'être parcourues par des
flo,rn de guerre, c'est que, .depuis, ces rivières ont dù
nécessairement subir un notable changement dans leur
régime hydrographique.
Lorsqu'on réfléchit à l'échelle vraiment gigantesque sur
laquelle l'oeuvre de la formation des dépôts détritiques
s'est effectuée en Asie Mineure, d'après les assertions multipliées
des anciens, qui nous y signalent une foule d'îles
actuellement englobées dans l'enceinte des continents et
nous parlent de tant de fleuves navigables, réduits aujourd'hui
aux plus modestes proportions,; il est impossible de
ne point chercher la cause de ce phénomène autre part que
dans l'action seule des cours d'eau. M.. Ho£f, dans son classique
ouvrage sur lès changements qu'a éprouvés la surface
de notre globe dans les époques historiques', émet à c&t
égard une opinion qui mérite toute l'attention des naturalistes
: l'illustre savant allemand pense que l'accumulation
énorme des dépôts, le long du littoral occidental de l'Asie
Mineure, est puissamment favorisée par la convergence,
vers ces parages, du double courant dont l'un se dirige de
la côte, de la Syrie:, et l'autre de la mer Noire, et qui viennent
y concentrer de cette manière leurs tributs iespectifs.
Quant aux bassins lacustres de l'Asie Mineure, une
des particularités qui les caractérisent, paraît être la fré-
1. L'Ile de Lode, qui aujourd'hui est probablement cachée sous l'énorme nappe
du delta du Méandre, était, du temps d'Hérodote (Eralo, o. 7 et ) 1), entourée de la
mer où, près de l'Ile même, fut livrée une batauuî navale entre les Ioniens et les
Persans.
S. Vol. l.sect. 4, p. Î59.