W GÉOGRAPHI E PHYSIQUE.
dépressions entre les rochers, là où les pentes ne sont pas
trop rapides.
Le cratère lui-même ne saurait être bien apprécié de la
sommité méridionale de la montagne, à cause de l?énorme
quantité de rochers dont sont hérissées ses parois intérieures.
Lorsqu'on est placé sur les flancs escarpés d'un des deux
pics du sommet, tout ce que la regard peut découvrir dans
cet abîme, c'est un immense entonnoir plus remarquable
peut-être par sa profondeur que par sa circonférence ; il est
ouvert du côté nord-est, et. bordé au _sud par des pics
abrupts; sa forme est celle d'un croissant tourné du nordouest
au sud-est et ayant conséquemment sa concavité dirigée
au nord-est. La hauteur du bord méridional du cratère,
au pied d'un dés pics les plus élevés qui le bordent de
ce côté, est de 3841 mètres.
C'est le point le plus élevé qu'il soit possible d'atteindre,
car les aiguilles susmentionnées s'élèvent perpendiculairement,
et toutes mes tentatives pour les gravir échouèrent
complètement, car lés parois des rochers n'offrant
pas de saillies suffisantes pour y placer les pieds, il n'y a
aucun moyen d'y fixer une corde, afin de se hisser eu se
balançant au-dessus de l'abîme.
Lorsqu'on se trouve au pied d'une des aiguilles les plus
élevées, qui pourrait avoir 100 mètres environ de hauteur
au-dessus du sommet qu'elle couronne, on embrasse un
horizon très-vaste, mais un peu confus malgré le ciel serein •
dont nous eûmes le bonheur de jouir, et la disparition presque
complète des nuages et des vapeurs, qui île tardèrent
point à s'écouler le long des flancs de la montagne. Au sud,
au sud-ouest et au sud-est, l'horizon est borné par la chaîne
de l'Alla-dagh et du Boulgar-dagh, sans que l'on puisse
CHAPITRE IX. 4i i >
découvrir les moindres traces de la Méditerranée; au nord
et au nord-est la contrée se présente d'une manière bien
moins saillante encore, car les contours des montagnes
s'y perdent dans une vapeur bleuâtre et l'on n'aperçoit
qu'une surface horizontale, sillonnée par un mince cordon
blanchâtre qui figure le Kizil-Irmak. La ville de Kaïsaria
n'apparaît que comme un petit point noir à peine perceptible..
La chaîne de montagnes • qui du côté du nord-est
borde l'horizon, est probablement le massif du Pont et de
l'Arménie, qui ne permet pas d'apercevoir la mer Noire.
Ainsi s'évanouit l'assertion de Strabon, qui prétend que du
haut du mont Argée on aperçoit tout à la fois la Méditerranée
et le Pont-Euxin.
Le revers méridional du cône compris entre la hauteur
de 3005 mètres et son sommet: (3841 mètres.) et ayant conséquemment
836 mètres-de hauteur, a une pente assez rapide,
qui est ordinairement de 2 5 , 40 et quelquefois de
55° Malgré cela, mes guides m'assurèrent que dans les
années normales on pouvait gravir ce talus en trois heures ;
mais*la montagne avait reçu cette année une quantité de
neige tellement extraordinaire, que celle-ci recouvrait soit
en nappes, soit en sillons, tout lé talus méridional du cône,
en sorte que la marche devenait extrêmement pénible et
souvent dangereuse, tant à cause de l'éboulement de toutes
ces masses poreuses, qui enfonçaient sous les pieds, qu'à
cause des surfaces glissantes qui rendaient le pas mal assuré.
Mais l'inconvénient le plus grave auquel donnait
lieu cette accumulation tout à fait exceptionnelle des neiges,
c'était le phénomène de la chute des blocs qui se détachent
1. Voy. planche 19.