
On en aperçoit un très-léger à peu dé distance au delà de Nankah. Quelques
faibles ondulations à la surface du sol l’accompagnent, ou sans doute plutôt
le déterminent. Des amas de gravier se montrent çà et là , la culture les
contourne sans les occuper, puis de vastes espaces en sont recouverts, e t la
culture s’arrête ; elle ne s’avance plus qu’accidentellement, là où 1 alluvion
sablonneuse est restée découverte. ■
Un bois, où peu d’arbres s’élèvent au-dessus de buissons épars sur de rudes
<uizons, commence à cette zone nouvelle, dont l’inclinaison vers les montagnes,
quoique très-faible encore, est cependant plus marquée. Aux espèces
frutescentes que l’on trouve dans toutes les plaines de l’Hindoustan, <Zizy-
phi sp., Justicia adathoda, Vitex trifolia, etc., s’ajoute une espèce de Ca-
rissa (B. 282) , le Phoenix acaulis (1), Palmier dont la tige, réduite à une
souche enterrée dans le sol, n’émèt que des frondes d’un mètre de hauteur
cachées dans les herbes. Il abonde ici; mais je ne trouve que des individus
femelles, cependant leurs fruits sont fécondés. Les Capparis de la plaine
inférieure ont disparu. Le Dalbergia sissoo et le Butea frondosa, associés autour
de Dehli et vers le N .O ., dans le pays des Sikes, au Salvadora (?), se
mêlent ici à des espèces nouvelles d’arbres : un Erythrina (B. 35o) à un
Erhetia (B. 280), et un Icica (B. 290) au Garugapinnata (B. 2g3), descendus
des pentes inférieures des montagnes qui semblent leur patrie.
Cette forêt qui se déploie en une zone d’une largeur variable tout autour
des montagnes de l ’Inde, est absolument dépourvue de magnificence. Elle
a fourni aux floristes de cette contrée un grand nombre d’espèces nouvelles
de plantes, dont la plupart se retrouvent à 3ooo” et 4000” plus h aut, dans les
vallées creusées au pied des grandes montagnes, et à en juger par les noms
spécifiques imposés à plusieurs d’elles, la forêt ou elles croissent devrait etre
superbe, elle n’est que variée.
Nous vînmes camper, le 11 avril, à Mohun, sur les bords de cette forêt,
à sa limite supérieure, près d’un torrent sans èau dans cette saison et qui
débouche ici des montagnes.
Nonobstant l’interposition de la forêt que nous avions au sud, les hot
winds nous amenèrent des nuages de poussière, et malgré l’abri de quelques
arbres, notre tente avec sa double couverture devint à midi d’une chaleur
insupportable.
Quand le soleil commença à s’abaisser, je traversai le torrent, et pénétrai
pour la première fois dans les bases de ces montagnes célèbres. Quelques
(1) Cité à tort plus haut.
heures suffisaient aisément aux petites proportions des collines âpres et sauvages
qui fianquent leurs pieds et cachent entièrement leurs cimes.
Une espèce de Saule (B. 208)-fia première que je vois dans l’Inde, est
commune sur les grèves du torrent. C’est un arbre qui ressemblé beaucoup,
par son port, au Salix alba d Europe. Le bois, ou j entrai sur sa rive opposée,
était, composé, d’arbres presque tous nouveaux pour moi. Aux espèces que j ’avais
trouvées le matin dans la plaine se joignaient un Rondèletia (B. 284 ) ;
le Shorea robusta; une Térébinthacée semblable au Mango par son port
(B. 28 9); lé Bauhinia purpurea, fréquemment cultivé dans les plaines; le
Boswellia thurifera qui fournit l’Oliban, et que j ’avais rencontré précédemment
au ghaut de Kuttrah ; un Casaria ( B. 3o3 ); une Ifymenodychium
(B. 3<>4 ); le Semecarpus anacardium, dont le pédoncule, comme celui de
1 Anacardium, se renfie en une pulpe bacciforme orangée ; le Bombax gos-
sypium; le Robinia macrophylla (B. 3o 5 )È et le Bauhinia racemosa. Des
lndigofera, un Combretum (B. 3o î ) 'f des Hedysarum croissaient à l’ombre de
cette forêt claire et peu élevée. De hautes graminées couvraient les espaces vides
d’arbres (espèces d'Andropogon la p lupart, voir mon catalogue ) , et parmi elles,
croissait çà et là une nouvelle espèce de Dattier très-distincte-(B. 343 ). Ces
formes et ces associations végétales appartiennent exclusivement à cette partie
du monde. L organisation de ces plantes est conforme au voisinage du tropique ;
la grandeur et les couleurs, éclatantes de leurs fieurs, en général, rappellent
aussi une fiore tropicale ; mais 1 absence de monocotylédo.ns arborescents; car
le Phoenix que j ’ai cité s’élève à peine au-dessus des herbes, contrarie bizarrement
cet effet sans le détruire. La végétation obéit ainsi aux conditions du climat
modifiées selon des lois bien connues par la latitude, et par les infiuences plus
obscures du voisinage-des montagnes colossales qui s’élèvent derrière ce premier
rideau de collines. Le soir me surprit dans Ces lieux sauvages. Je vis le soleil se
coucher dans des nuages de poussière à l ’horizon des forêts qui s’étendent au pied
des montagnes. Malgré les fieurs dont il était paré, le paysage autour de
moi avait une expression étrange d’âpreté et de désolation. La plupart de ses
arbres couverts de fleurs éclatantes, les Erythrina, les Bauhinia, les Bombax,
étaient dépouillés de feuilles. Il en est ainsi dans les forêts de l’Europe : nos
arbres fleurissent presque tous avant de feuiller, mais leurs fleurs se distinguent
à peine. Un arbrisseau sarmenteux, dont le feuillage est magnifique,
remplit ici les vides de l’hiver; c’est le Bauhinia racemosa. Ses.tiges, semblables
à dessables flexibles, s’élancent sur les arbres, se projettent de l’un
à 1 autre,, s’enlacent autour de leurs rameaux, et donnent souvent à une souche