
niveau de la rivière. L’herbe, maigre et rare, pousse au travers. Quelques faibles
sources qui sortent du terrain qui s’effleurit ainsi, sont très-douces. Elles
ne sont nulle part plus abondantes qu’à la base des escarpements du terrain
diluvial.
Si l’on passait subitement des vallées indiennes de l’Himalaya dans Celle du
Spiti, son aspect désolé, la nudité absolue des pentes des montagnes qui la
dominent, les formes bizarres du terrain alluvial qui y a pris un si énorme
développement, paraîtraient bien étranges. Mais le pays de Kanawer fait une
transition si insensible, que j ’en ai été peu frappé. Il y tombe si peu de neige
en hiver, que la route de Ladak n’est jamais fermée.
La laine des moutons y est de cette qualité particulière que les Kanaori s
appellent Bianggui, longue et fine, sans jarre, mais moins longue et moins
fine que plus à l’E;. ou au N .E ., dans les possessions chinoises. Les chèvres
portent toutes du Paschm. Le territoire cultivable des villages que j ’ai vu s ,
est bien plus étendu et d’une culture bien plus facile qu’en Kanawer. Le
bétail est beaucoup plus nombreux et plus beau. Les chevaux sont plus grands
et plus forts, sans être moins adroits. C’est la principale richesse des hahi-
tants. Les meilleurs, à 4 ans, coûtent 80 ou 90 roupies (200 ou 225 fr.).. Leur
taille n’excède pas i ",45 ou i ”,5o.
A quelques journées de marche, en avant de Ghuyoumoeul, il y en a de
sauvages, m’ont dit des villageois ; mais il est évident que ce sont des animaux
échappés, car les gens de Ghuyoumoeul ajoutèrent que les leurs sont souvent
très-difficiles à rattraper, quand vient l’hiver et qu’ils ont passé toute la belle
saison libres à la montagne ; quelquefois même on en perd. Il n’y a pas danes
sauvages; mais, en domesticité, cet animal est très-commun, presque toujours
noirâtre. Il en est de même du yâk : les gris sont moins communs que les
noirs ; les blancs sont les plus rares de tous.
On tond ces animaux tous les ans au printemps, et leur laine mêlée sur les
flancs et les fesses d’une grande quantité de paschm, comme le poil des chiens
de l’Himalaya, sert à faire des étoffes grossières. C’est de cette étoffe que sont
fabriquées les tentes sous lesquelles vivent toute l’année les bergers nomades de
la Tartarie chinoise. Dépouillé de sa longue toison, le yâk ressemble beaucoup
au boeuf ; ses cornes sont identiques ; ses oreilles plus courtes ; le métatarse
est aussi plus court , ainsi que la jambe entière.
Entre Soumra et Gumdo, on voit plusieurs couches de Gypse, dans le
Schiste argileux et le Quartz, près du Calcaire saccbaroïde ou grenu. C’est évidemment
d e l’Anhydrite épigénique.Il forme des masses très-courtes, lenticulaires,
qui se prolongent cependant en veines très-minces, mais très-étendues
quelquefois, dans les roches auxquelles il est subordonné. Exactement comme
le Gypse et le Calcaire d’Airolo, mais sur une fort petite échelle.
Le terrain diluvial est extrêmement développé dans la vallée du Gumdo.
Un peu au-dessus de son confluent avec le Spiti, il y a un sanga sur ce torrent.
Je remontai jusque-là pour éviter de le passer à gué une seconde fois, ce qui
n’est pas sans quelque danger pour les hommes chargés. Il ne roule que des
blocs de Quartz, de Grunstein (?) ; de Calcaire compacte avec veines spathi-
ques (coquillier); des Schistes argileux,'les mêmes roches enfin que j ’ai observées
dans les montagnes de la vallée du Spiti.
Le 11 septembre i 8 3 o ._ A Tchangrising.
La source thermale de Zongtchum coule presqu’au bord du Gumdo : elle
est sulfureuse probablement. Un sentier y descend du pont naturel de Zongtchum
; mais à peine est-il tracé. Le massif de montagnes que l'on contourne
est presque exclusivement formé de Schistes argileux très-diversement stratifiés;
mais en approchant du pont de Zongtchum, les couches de Quartz
font retour, d’abord sombres, brunâtres ou verdâtres, alternant avec le Schiste,
dominant ensuite : puis leur couleur s’éclaircit ; celle du Schiste aussi, et il
prend un faible éclat micacé. Près du pont, des couches de Granité s’y associent,
et le Schiste disparaît.
Quelques-uns de mes gens étaient montés sur des yâks ou des dzos ( métis
du yâk et du boeuf commun). Ils passèrent sans difficulté le pont de Zongtchum;
mais il fallut infiniment de précautions pour retenir, sur cette pente
rapide et glissante, le cheval que je montais ; cependant il n’y eut aucun
accident.
La frontière chinoise était déserte. Je vins camper à Tchangrising.
Le ia septembre i 83q . •— A Skialkhur.
La nuit, tenu réveillé par le froid, j ’entendis quelques gouttes de pluie
tomber sur ma tente, et ce matin, en en sortant, je vis toute la région élevée
des montagnes blanchie par la neige. C’est la première qui soit tombée cette
année à ce niveau. Il y a déjà plusieurs jours que l’automne a commencé : les
pentes des montagnes, où la végétation est moins rare, ont déjà des teintes
d’un rouge vif; ailleurs elles sont d’un brun obscur; le vert n’est plus qu’un
accident, qu’à distance on ne peut distinguer.
La composition du terrain entre le pont de Zongtchum et Tchangrising est
46.