
traie. La Tonse coule à peu près parallèlement à la Jumna, et à quelques
myriamètres au nord ; leurs Sources néanmoins sont extrêmement voisines. Dans
la partie supérieure de son cours, elle porte au reste un autre nom, celui
de Soupine, jusqu’à son confluent avec le Roupine qui descend du Nord,
tandis qu elle vient de l’Est. Du sommet de Rédar-Ranta, on aperçoit bien le
cours de ces deux torrents, l’un et l’autre plus considérable, je pense, au
point où ils s’unissent, que la Jumna sous le Sanga de Tabnao. Peut-être au
sommet de la vallée du Soupine y a-t-il quelque passage dans celle de la Jumna,
qui conduirait à Cursali, ou au moins à Bounasse : je l’ignore, mais il n’y a
du moins aucun sentier fréquenté. Le Roupine, au contraire, a sa source
sous le col de Gounâsse qui mène, au travers de la chaîne centrale, dans le
pays de Ranaor.
Le 3o mai i 83o. — Passage du Soupine et du Roupine ; camp sur la-rive
droite de la Tonse, au-dessous du confluent dès deux rivières.— Au-dessus
du confluent des deux torrents est un petit village appelé Nâïnntar. Il
est, depuis p e u , presque entièrement abandonné. Ses ruines prouvent combien
était plus considérable autrefois la population des montagnes d’alentour,
et combien étaient plus fréquentes les communications de leurs habitants ; car,
bloqué de part et d’autre par le Roupine et le Soupine, immédiatement
dominé par des pentes trop rapides pour avoir jamais pu être cultivées, il
n’a presque aucun territoire; son uniqfte industrie devait être celle quexer-
cent encore les deux familles qui continuent d’y habiter. Leur métier les
soutient à peiné; ils passent, d’un bord du Roupine à l’autre, les voyageurs
et leurs denrées.
Le Soupine se passe sans difficulté sur un sanga construit comme tous ceux
que j ’ai vus jusqu’ic i, mais pliis grossièrement, et qui menace ruine. Cette
frêle construction est néanmoins un monument imposant, comparée à l'appareil
qui sert à traverser le Roupine.
Cet appareil consiste en trois cordes, fort grosses il est v ra i, mais bien fragiles,
tordues et tressées des herbes longues qui croissent alentour sous les
bois, lesquelles sont attachées, sur chaque rive du torrent, à deux arbres
que le hasard a fait croître heureusement l ’un en face de l'autre, et médiocrement
tendues. Cet appui sur la rive gauche du torrent, celle où j ’étais placé,
domine de 8“ environ la surface de ses eaux ; un bloc gigantesque de Gneiss
s’est arrêté là sur ses bords, et dans ses fissures a pris racine le Pin qui sert
de retenue. Sur la rive opposée, le point d’attache des cordes n’est pas élevé
de plus de 3“ au-dessus du torrent, en sorte que près de cette rive leur courbure
descend presque jusquà leau. La largeur du torrent est d’environ i 5”, sa profondeur
assez grande, sa rapidité furieuse, et son fracas en proportion de sa
vitesse.
Les hommes s’attachent autour du corps un petit cerceau, ou plutôt une
sorte d’arc dont la corde passe sous leurs reins et les soutient, tandis que
l’arc lui-même;, suspendu sur le faisceau de câbles, tendus d’un bord à l’autre
peut couler dessus assez facilement, si le patient, au lieu de se laisser peser
de tout son poids, s’aide dès pieds et des mains à le faire glisser : on chemine
ainsi à la renverse et sans beaucoup de peine, pour passer de la rive gauche
à la rive droite, parce qu'il n’y a qu’à descendre. Le passage inverse doit être
au contraire très-laborieux.
Le bagage, attaché à une sorte d’anneau qui embrasse le faisceau de câbles
et se meut librement, est tiré d’un bord à l’autre par des cordes plus petites
qui y ramènent à volonté cet anneau. Je passai comme le bagage.
Cette opération occupa plus de la moitié du jour, et ne devant trouver
aucun lieu habité sur les bords de la Tonse que je devais suivre au delà
je remis au lendemain cette marche fastidieuse et pénible.
Le 3i mai i83o.—Camp sur la rive droite de la Tonsè, à 6 h. de marche lente au-dessous du confluent du Roupine
e t du Soupine.
Une médiocre observation du baromètre m'avait donné i 358” (4456p-j)
pour la hauteur absolue du confluent des deux torrents. A 6 h. de marche au-
dessous en ligne assez droite, vers l’ouest, mais 6 h. d’une marche que les
difficultés fréquentes du chemin rendaient très-lente, je trouvai, par une
observation meilleure, i3o2m pour le niveau du lieu où je, vins camper
sur les bords de la Tonse dans la forêt. Les pentes inférieures des montagnes
qui s’élèvent sur la rive droite de cette rivière, sont généralement très-
rapides, et elles bloquent si étroitement son lit, que rarement on en peut
suivre les bords, où l’accumulation des quartiers de roche et des blocs roulés
rend au reste la marche également très-pénible. Mais les feuilles desséchées
des Pins, Pinus longifolia exclusivement, qui revêtent ici tout ce qu’on aperçoit
de montagnes, font autant de précipices des pentes rapides sur lesquelles
monte et descend sans cesse le sentier. Sur la rive gauche, les montagnes s’a-
baissent doucement, e t , sous la maigre forêt dont elles sont entièrement couvertes,
on aperçoit partout, de la base presque jusqu’au sommet, les traces
anciennes de la culture. Les gradins qu’elle occupait sont mal effacés; cependant
la forêt qui les recouvre est bien ancienne.