
l’une et l’autre face d’une arête de montagne analogue à celle qui divise le Bis-
sahir et le Kanawer. L ’un d’eux a été écrasé l’an passé sous un éboulement de.
roches. Quelques maisons se tiennent encore debout près du courant de débris
qui en est résulté, menacées d’un sort semblable. D’immenses blocs de rochers sont
épars sur la crête, ouest bâti un temple en bois qu’ombragent les plus grands
Cèdres que j ’aie observés jusqu’ici. Ils excèdent fréquemment 6m, et en atteignent
quelquefois 7 à 8 de circonférence. Cependant leur hauteur dépasse rarement
3om. Ce temple, dont quelques pierres sont grossièrement sculptées au dehors,
sert d’abri aux voyageurs; je campai auprès.
De ce lieu, comme de Sourann, dans les courts intervalles de la pluie, on
aperçoit, entre les montagnes qui bordent immédiatement le Setludje, les cimes
neigées s’éloigner en s’alignant vers le nord-ouest. Brouillards, pluies continuelles,
le jour et la n uit
Le 10 ju ille t 1.83p. — A Natchar, 6 h. de marche de Trandah.
Le chemin, comme entre Sourann et Trandah, est souvent supporté le long
de pentes rapides sur des échafaudages grossiers. Il ne saurait guère être plus
mauvais sans cesser d’être praticable ; tel qu’il est cependant, c’est un ouvrage
considérable ; eu égard à la rareté des villages et au petit nombre des habitants.
Il traverse une forêt de Cèdres plus magniiiques.encore que ceux qui couronnent
la crête de Trandah. J’en ai mesuré plusieurs qui avaient io "d e circonférence
et qui ne diminuaient pas sensiblement de grosseur jusqu’à la hauteur de 5“
à 6m. Ils s’élèvent jusqu’à 3om et 4om. Un grand nombre font la fourche ; ce
sont ceux dont la base est la plus monstrueuse. On dirait que ces arbres sont sacrés.
Sous leurs ombrages , comme à Trandah , est bâti un temple, ici éloigné
de tout village. Il est clos de murs ét entouré de quelques jardins. Il y a
auprès une maison où habitent les brahmanes qui le desservent. Ce temple
est bâti partie en boisetpartie en pierre; il est couvert de sculptures grossières;
son apparence à demi chinoise est assez pittoresque.
On traverse, avant que d’arriver à Natchar, un vallon profond et tellement
incliné du sommet des montagnes sous lesquelles il prend naissance jusqu’au
lit du Setludje, que le torrent qui y coule, roulant de cascade en cascade,
n’y forme qu’une longue trace blanchissante d’écume que l’on prendrait de
loin pour de la neige. C’est le volume d’eau le plus considérable que j ’aie
vu se rendant au Setludje, à l’exception peut-être du Naugri qui s y jette
entre Ditnaghur et Rampour.
Le nom de Saldang que lui donne Herbert dans sa car te , où sa position
est exactement indiquée , est inconnu de tous les gens que j ’ai rencontrés
et questionnés sur la route; il a autant de noms divers qu’il y a de hameaux
épars sur les pentes du vallon au fond duquel il se précipite, un des plus gracieux
que j'aie vus dans l’Himalaya. Quoiqu’à 4 mil. ( i i 1.) environ de Trandah, plusieurs
montagnards me l’ont nommé le Trandahgâd, ou Trandahgar. Au lieu où
on le traverse, il est divisé en deux branches séparées par une île étroite, couverte
dune belle forêt dAulnes. Enflées par les pluies, ses eaux étaient tellement
hautes, qu’elles atteignaient presque un des ponts jetés au-dessus et menaçaient
à chaque instant de l’emporter. Il était également dangereux de s’arrêter près
de ses bords. Une masse considérable de rochers, détrempée par la pluie, et détachée
des pentes, y tomba tout à coup et faillit m’écraser. En général, rien de moins
rassurant que ces montagnes durant les pluies; il semble toujours qu’un lit de
boue court sous le sol qui vous supporte, prêt à céder sous le moindre effort et
à rouler dans la vallée.
La végétation herbacée est exubérante dans ces lieux humides, mais elle se
compose .de plantes tardives pour la plupart.
A Natchar, pour la première fois , je vis quelques festons de Vignes. Les raisins
y mûrissent mal. Ce village est d’ailleurs entouré de vergers superbes, dont
1 Abricotier ét le Noyer sont le principal ornement. Ses terres arables, toutes bien
arrosées, descendent fort bas vers le Setludje, sur une pente assez douce. Les
montagnes qui le dominent sont couvertes d’épaisses forêts.
Dans cette partie de la vallée du Setludje , les maisons des montagnards sont
bâties sur le même plan et des mêmes matériaux que dans celle de la Jumna.
Leur aire est carrée; leurs murailles sont faites de lits alternatifs de pierres et de
pièces de bois équarries, qui s’enchevêtrent fortement les unes dans les autres aux
coins où elles s'e rencontrent; les étages sont nombreux et très-bas, il y en a
trois le plus souvent, quatre "quelquefois; les ouvertures sont rares et petites ;
un balcon fermé règne au moins sur deux des faces de la maison à l’étage
supérieur et souvent l’entoure complètement ; le toit peu élevé déborde
de beaucoup les murailles. Mais les bois sont mieux équarris et mieux ajustés
, les moellons mieux taillés, les murs mieux dressés que dans les villages
de la Jumna et de ses affluents, et je ne connais aucun village en France qui
ait aussi bonne apparence que ceux - ci. Quoique le bois et la pierre soient
partout à portée, la main-doeuvre cependant doit rendre ces'maisons fort chères,
relativement à la pauvreté des habitants, et je ne puis m’expliquer comment
on en voit de presque, neuves abandonnées désertes. Livrées aux influences'destructives
des saisons, elles tombent en ruine, mais lentement : le toit s’affaisse
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