
nauséeuse, et qui tourne à l’aigre avant la fin de l’année; il s’appelle Râkh.
Je l’ai souvent goûté, mais sans jamais pouvoir faire plus. Le vin coûte
environ deux annas, ou of,3o la bouteille, et le Râkh trois fois davantage.
L ’un et l ’autre seraient invendables en Europe. Un de mes gens, qui
est allé à Cachemir, dit que le vin qu’on y fait n’a aucune ressemblance avec
celui-ci; mais cet homme est Hindou, e t , quoique de basse caste, il assure
n’en avoir pas goûté.
Dans leurs fêtes, les Kanaoris s’excitent avec cette triste boisson ; mais je n’en
a i jamais vu d’ivres. Ils en exportent une portion dans la Tartarie chinoise.
Le 3o septembre i 83o. — De Suniung a Bouroune.— Longue et pénible
marche. Le chemin, jusqu’à la vallée de la Buspa, monte et descend continuellement
sur les bords du Setludje, et quoiqu’il s’élève à peine à 200“ au-
dessus, il redescend si souvent au bord de la rivière et par des pentes si rapides,
en général par des escaliers qui forment des angles de plus de 55°, que
j ’ai eu peu de journées si fatigantes. Plusieurs fois je trouvai quelques-uns de
mes gens arrêtés devant une de ces difficultés, et hésitant de passer. Chargé,
en effet , il faut quelque adresse pour y garder son équilibre. Les plus agiles
passaient le fardeau de leurs camarades. À 6 milles ( i f 1. ) au-dessous de Sun-
tu n g , est un autre village tout à fait semblable, élevé pareillement sur la
montagne, avec un vignoble au-dessous. C’est Ralli; on y avait déjà vendangé.
Les escarpements de la rive droite excèdent 3oo“ , ce qui est très-rare dans
l’Himalaya. D’ailleurs, la végétation est des plus brillantes et des plus touffues.
Le Frêne, Fraxinus terebinthus, est très-commun, ainsi que l’Olivier que
j ’ai indiqué près de Tcbégaon, Olea incerta. C’est un arbre tout à fait semblable
par le port à l’Olea europea. Ses fruits, également, d’un violet foncé, sont beaucoup
plus petits. Il est confiné aux expositions chaudes du fond de la vallée, où
il neige peu, où la neige ne tient pas, et dont le climat estival n’a plus déjà la
sécheresse du Kanawer. Du reste, il cesse de se montrer là où les pluies solsticiales
régnent avec force : sa localité est ainsi très-circonscrite. Il s’appelle
Huï, et n’a aucun usage.
La Buspa, jusqu’à son confluent avec le Setludje, est bordée de hautes montagnes.
Quoique depuis Pouari la végétation soit devenue à chaque mille sensiblement
plus belle, la verdure de la vallée de la Buspa et de ses montagnes paraît
superbe quand on y entre. Le Néoza s’arrête à son entrée avec bien d’autres
plantes auxquelles les pluies solsticiales sont contraires, car elle est soumise
à leur influence. La Buspa est un très-large torrent parfaitement limpide, dont
la pente est énorme. Son cours est souvent interrompu par des cascades de
1 effet le plus pittoresque : il monte d’abord au S .S .E . , et se courbe ensuite
au S .E ., puis à l’E . Sa source est éloignée de plusieurs jours de marche. Il y
a plusieurs grands villages dans sa vallée, dont le plus considérable est Sangla,
4o familles. Ils produisent tous ensemble 5oo roupies ( i , 25of ) au Rajah, et
ioo roupies (2 5of) au vizir Tikumdâsse. |
Ses habitants descendent peu dans la vallée du Setludje, et ne mènent pas la
vie ambulante des véritables Kanaoris, qui tous trafiquent. Cependant, pour
se procurer du se l, ils remontent au sommet de leur vallée, et là , passent dans
la Tartarie chinoise par un col situé entre le massif des Kaïlas occidentaux et
la chaîne méridionale de l’Himalaya (au nord de laquelle ce groupe se projette);
on me représente ce col comme très-difficile. Il n’est praticable qu’aux chèvres
et aux moutons.
Les habitants de cette contrée sont de caste kannaïte et n’ont pas de Brahmanes.
Leur vallée est sujette aux pluies solsticiales dans toute son étendue, mais elles
n y ont pas la même*violence que sur le penchant méridional de l’Himalaya.
Cependant les pluies de l’été y rendent magnifique la végétation de l’automne.
A 1 mille ( I I .) au-dessus de l’embouchure de la Buspa dans le Setludje,
on traverse ce torrent sur un sanga qui a environ i 3m à i 4m dè longueur. Au
delà sont deux chemins : l’un conduit dans la vallée du Setludje à Wongtou ;
il est extrêmement mauvais : l’autre, sans aucune difficulté, mène au village de
Bouroune, dont le Bôurendo-pass dérive son nom ( Bouroune-ghauti). L ’élévation
absolue du confluent est d’environ 6ooop,a* ( 1,829“ ).
Les montagnes de la rive droite de la Buspa sont élevées au moins de 8oom
au-dessus. Leurs pentes sont excessivement rapides, mais partout verdoyantes,
et semées çà et là de bouquets de bois qui s’élèvent jusqu’à leurs sommets.
Dans les parties les plus basses, où des ruisseaux entretiennent une fraîcheur
continuelle, des Balsamines ( Impatiens) et d’autres plantes herbacées végètent,
avec une vigueur prodigieuse, sous des forêts d’Aulnes superbes. Plus
loin, dans des lieux secs, ce sont des bois de Chênes ( Quercusprotea) , mêlés
de Déodars. Au fond de ce cadre si riche et si ga i, blanchissent quelques pics
neigés de la chaîne de l’Himalaya.
Bouroune est un médiocre village, 8 maisons, situé à 200mhnviron au-dessus
du fond de la vallée. La plupart des maisons y ont encore des toits en terrasse,
et il y a quelques vignes; leurs raisins, plus précoces que ceux de
Kanawer, sont déjà vendangés. Les étés ici ne sont guère plus pluvieux, je
pense, que ceux de la France Centrale ou de la Lombardie. Je retrouve le
53.