
du Taglakar. Quoique le vent soit faible, à 2 heures, sous un ciel pur, le
froid, dans ma tente, est incommode. Le ciel se couvre; puis des nuages
s’y forment et s’abaissent tout à coup, et laissent tomber pendant 2 ou 3 minutes
au plus, quelques gouttes de pluie fine : tous les jours, depuis Lari
(le 3 i août ), excepté h ie r , à la même heure , entre 4 et 5 heures , j ’observe
le même phénomène.
Le 6 septembre i83o, — A Ghuyoumoeul. = [ Exploration des terrains autour du camp du 5 septembre].
La nuit fut pure et calme : la terre, longtemps après le lever du soleil,
resta couverte de givre. Elle était fortement gelée. Le ruisseau près duquel
mon camp était placé, était couvert d’un pouce de glace. Je renvoyai mon
bagage à Ghuyoumoeul, et commençai l’exploration des terrains d’alentour.
Marchant d’abord dans la direction du village dont j ’ai parlé hier, je vis
rassemblés, sur une sorte de cól, une quarantaine de montagnards, presque
tous vêtus comme les Lamas, de rouge et de jaune. Ils me firent signe de ne
pas avancer, et je continuai de marcher au pas de mon cheval, sans tenir
compte de leur injonction. Tous alors se levèrent à la fois pour me fermer le
passage; je leur commandai de vider le chemin, et un geste menaçant du poing
fermé fit reculer la multitude : deux hommes seulement s’obstinèrent à le barrer.
J’en poussai un rudement : l'autre ne bougea pas. Ou tré , je le battis : je n’avais
que quatre de mes gens avec moi, et aucun d’eux n’était armé; mais quand ils
me virent en train de battre, mes serviteurs montagnards levèrent le poing
aussi, fort à propos, je crois; car à ce moment il n’eût pas été prudent de
reculer. L’un d’eux, qui portait mon fus il, me le donna ; et bourrant du
canon ceux qui tardaient à me faire place, je continuai mon chemin sans
embarras.
Je me demande encore pourquoi ces gens voulaient m’empêcher de marcher
vèrs leur village ? pourquoi étaient-ils venus en si grand nombre ? pourquoi
sans armes ? et pourquoi,en mesure de faire la lo i, se la laissaient-ils imposer ?
Mon fus il, dans la main d’un serviteur à quelques pas derrière moi, ne devait
guère leur en imposer; ne connaissant que le fusil à mèche, et ne voyant
pas de mèche allumée autour du mien, ce ne devait être pour eux qu’un
bâton. Mais j ’étais le premier homme blanc, e t, couleur à part, j ’étais aussi
probablement le plus grand seigneur qu’ils eussent vu; ils avaient dû distinguer
dans mon camp plusieurs hommes armés : ils obéirent donc, parce
que je commandai : ils craignirent, parce que je menaçai. G’est l’instinct
animal.
Le village d’où ils étaient venus est plus grand que Ghuyoumoeul. Deux
hameaux en dépendent , et un Takouourdoum ou monastère de Lamas.
L ’espèce de vallon où j ’avais campé hier, est situé sur le sommet du premier
étage des montagnes qui bordent la rive gauche du Sp iti, et s’appuie a la
base de celles qui s’élèvent au-dessus.
Les couches les. plus profondes qu’on puisse voir dans ce vallon sont
composées de Calcaire compacte, coquillier, alternant avec des strates dépourvus
de fossiles. Au-dessus sont des Grès, le plus souvent coquilliers;
au-dessus des G rè s, une masse très-épaisse de Schiste noir, pourri, dans lequel
on trouve abondamment des Ammonites pétrifiées en Lydienne ; enfin des bancs
très-minces de Grauwacke ou de Grès non coquillier. En montant jusqu’au
sommet de la montagne, on observe diverses alternances du Schiste noir avec
des Grès. Mais le Schiste, dans ses masses supérieures, parait dépourvu d’Ammonites.
Quelques Grauwackes renferment des impressions végétales. Les
couches de la cime ne sont pas coquillières. Tout le terrain est stratifié horizontalement
avec la plus grande régularité. C’est le même qu’entre Gantong-
ghauti et Békoeur. Mais près de Békoeur, le Schiste à Ammonites ne se montre
nullement distinctement recouvert, si ce n’est par des lambeaux de Grès; au
lieu qu’ici la régularité de la stratification ne laisse aucun doute sur son intercalation
dans un terrain composé de Calcaires divers, la plupart coquilliers, et
de Grès coquillier ou non, dans lequel les Calcaires forment l’étage inférieur,
le schiste l’étage moyen et le Grès l’étage supérieur de la formation : quoique le
Grès forme aussi, de même que le Schiste, quelques bancs subordonnés dans les
couches inférieures du Calcaire, et que celui-ci reparaisse également, mais peu
développé vers le sommet de la montagne, subordonné auxroches quartzeuses.
La montagne que j ’examinai sur deux de ses faces jusqu’à sa cime, ne peut
etre élevée de moins de 800" au-dessus de mon camp de ce matin. Sa hauteur
absolue doit donc être environ de i8,ooop-‘ - (5486"). Plusieurs plantes, cependant,
végètent jusqu’à sa cime : le Pyrethrum roseu/n est la plus commune
parmi elles; une Labiée (B. t 665), que j ’ai observée déjà à plus de i 5,ooop''
( 4572“ ), à Hangarang-ghauti, ne l’est guère moins ; une autre plante (B. 1689),
dont je n’ai pas déterminé l’ordre ; et enfin une Ortie ( Urticà hyperborea).
Cette montagne domine à l’Est un vallon semblable à celui qui s’étend le
long de sa base occidentale ; au delà, s’élèvent des montagnes encore plus
hautes, couvertes de neiges éternelles. Elles sont parallèles à celles qui bordent
la rive droite du Spiti, c’est-à-dire que leur chaîne court du sud au nord
sensiblement. Leur écartement est considérable; je l’estime à plus de 9 à