
cela fait 3îo o ” (l'élévation relative au-dessus de la vallée à Cursali. C’est
moins que la hauteur du Mont-Blanc au-dessus de la vallée de Chamouny.
La différence toutefois n’est que légère; mais elle parait grande par la distance
horizontale de ces cimes, comparée à celle du sommet du Mont-Blanc,
à la vallée : l’angle visuel est ici plus petit.
L’influence de la latitude se fait sentir ici dans la végétation jusque
près de la zone des neiges éternelles, devant laquelle toute végétation
s’arrête. Les derniers lambeaux de forêts, qu’on trouve en s’élevant dans les
Alpes, sont composés ou dé Sapins ou de Mélèzes, mais de Conifères seuls :
leur sombre et triste uniformité a quelque chose de funèbre qui est en
harmonie avec la désolation des sites où ils croissent. Dans l’IIimalaya, quelques
Amentacées et d’autres arbres peut-être encore, se mêlent aux Conifères
jusqua la limite supérieure des forêts. Cette variété serait agréable dans une
zone plus basse; mais ce qui n’est qu’agréable est déplacé dans .ces hautes
régions.
Malgré cette variété des arbres, la liste de mon herborisation de ce jour
est bien courte, comparée à celle des espèces que m’eùt produites une excursion
dans les Alpes jusqu’à la même hauteur. Cette pauvreté de la flore
est l’effet de l’uniformité des sites et des stations. L ’élévation n ’est qu’une
des conditions de l’habitation des plantes. Il y en a d’autres nombreuses
dans la nature du sol, son humidité, l’exposition, les aspects et leurs complications
diverses; l’uniformité générale de la végétation est ici commandée par
celle des sites.
Sur les escarpements, j ’ai trouvé deux Saxifrages : une de- forme asiatique,
Saxifraga ciliosa N ., extrêmement grande et belle; l’autre, d’apparence
alpine, comme le groupe auquel appartient le Saxifraga oppositi-
folia, biflora , etc. Une Anémone, la première espèce de ce genre que j ’aie
rencontrée dans l’Inde, y croît également dans les lieux les moins accessibles;’
son feuillage est celui d’un Thalictrum (Anemone thalicthroïdes N. f Sur le
sol mouvant des pentes les plus rapides, où filtrent les eaux de neiges au
travers des feuillets du Schiste, le Primula vincoïdes N. est commun. Une
autre espèce à fleurs en ombelles, Primula crassipes N., s’y trouve également,,
mais elle est rare.
A 335o" , je n’avais encore vu aucun Genévrier. Depuis, quand j ’ai atteint
la limite de ce genre dans l’Himalaya, c’était à une hauteur de 35oo” ou 36oom,
là où les forêts expirent. Mais quelques fragments du Juniperus nepalensis N.,
étaient épars sur les neiges dans le vallon, arrachés sans doute sur les cimes par
des tourbillons de neigOe et de vent.
Deux Hindous venus ici en pèlerinage s’étaient joints à ma partie. L ’un
d’eux était un jeune brahmane d’un extérieur agréable. Il me suivit dans tous mes
détours, et me parut beaucoup plus curieux que dévot. Je soupçonne d’ailleurs
que malgré l’extrême sainteté de ce lieu, il n’y vient chaque année qu’un bien
petit nombre de pèlerins. Celui des visiteurs européens ne laisse pas detre
considérable, à en juger par, le nombre de plaques de plomb couvertes de
leurs noms qu’un vieux brahmane', accroupi près de la source, quand j ’y
redescendis, me montra suspendues à son cou. Une dizaine de voyageurs
peut-être y montent chaque année,, depuis que la conquête des montagnes
inférieures et l’expulsion des Gorkhas en ont rendu l’accès si facile.,.,
Jumnoutri n’est pas la seule source thermale de ce vallon. A son entrée,
à une demi - heure de marche de Cursali et sur l’antre bord du torrent, sur la
rive droite, dans un lieu où elle est moins étroitement serrée parles escarpements,
et où un tailbs épais de Saules, d’Erables, de Daphnés et de Chalefs (Salix
incerta, Acer pubescens, Hippophaë nepalensis, Eloeagnus nepalensis, Da-
phjie frigida) croit sur ses grèves, on marche quelque temps près d’un petit
ruisseau qui s’échappe de leurs bases. La quantité de Conferves dont il
était rempli me le fit remarquer, et en y mettant la main pour eu tirer
quelques-unes, je fus surpris de trouver l’eau presque tiède; celle de la
Jumna et de tous les autres ruisseaux qui y tombent est presque glacée.
J’ignore si on l’a remarqué auparavant.
G éologie. — J’ai dit que les montagnes qui s’élèvent autour du bassin
terminal de Cursali étaient formées à leur base, de couches épaisses de Quartz
compacte et pur, ou diversement associé au T alc , et peut-être quelquefois en
même temps au Schiste argileux: et comme ces couches plongent avec assez de
régularité au nord, sous uu angle variable de 25° à 4o% les sommets inaccessibles
des montagnes, ou ceux que nul voyageur certainement, plus que
moi, n’a éu la constance de visiter, doivent être composés des mêmes roches,
du prolongement des mêmes couches. Cette disposition continue d’exister dans
tout le vallon au-dessus de Cursali jusqu a Jumnoutri, et plus haut jusqu’où
je suis monté. La stratification même est de plus en plus prononcée à mesure
que l’on s’élève davantage.
J’ai nommé déjà le Quartz compacte parmi les roches dont les couches s’y