
que le délabrement et la saleté. La forteresse est un rectangle de 40“ sur un
côté et de i 5m à 20“ sur l’autre, fermé d’une mauvaise muraille de 6“ à 7*
de hauteur : au-dedans, la garnison habite des maisons dont les dimensions
et toute l’apparence rappellent des niches à chiens. J'ignore quel microscopique
Rajah des montagnes la possédait avant l’occupation anglaise.
Elle n ’a aucune importance offensive, ni, ce me semble, défensive, rien n’étant
si aisé que de faire mourir de soif ceux qui y seraient renfermés. Elle atteste
néanmoins l’existence d’une prospérité ancienne, d’un développement de la
culture, de la population qui donnait à ses chefs des ressources que depuis bien
longtemps ils ont perdues. La période du déclin ne paraît pas remonter à une
moindre antiquité dans les vallées de l’Himalaya que dans les plaines de l’Hin-
doustan.
Au-dessous du Fort, mais hors de la portée de la mousqueterie, on traverse
le Pâbeur sur un sanga, le mieux construit que j ’aie encore vu. Il a 4om de longueur.
La rivière est moins grande que la Tonse, mais plus considérable que
la Jumna à Tahnao. Elle est moins torrentueuse et plus profonde. Elle serpente
ici dans un petit vallon plat, de 200” de largeur, couvert de champs de’
riz et de blé. Ce petit territoire fayorisé est occupé par quelques familles de
brahmanes, les desservants de deux pagodes voisines. C’est un des sites les plus
agréables que j ’aie rencontrés dans l ’Himalaya. Depuis longtemps, j'avais besoin
de repos. J'en pris un jour entier sous les ombrages de noyers qui entourent
ces pagodes.
Quoique l’élévation de ce lieu soit de 1465“ ( 48o6p- 7), j'y ai vu pendant deux
jours le thermomètre atteindre et dépasser 3o0àl'ombre et auvent. Ce n’était même
que la température du vent du sud, soufflant du fond de la vallée, qui l’élevait
à cette hauteur : la température locale était moindre d'une couple de degrés.
Mais tel est le caractère particulier de l’atmosphère dans les montagnes, que
pour demeurer inactif, en repos, dans ce courant modéré d’air chaud, les
vêtements de laine les plus épais, ceux que je ne porte jamais dans mes
marches que pour monter sur des cimes, parmi les neiges, ne m’étaient pas
incommodes ; et cependant sous cette enveloppe extérieure de laine épaisse,
je suis vêtu de flanelle de la tête aux pieds. Et le vent qui souffle actuellement
sur toute l’Inde dans la même direction, et qui n’atteint guère, en beaucoup
de lieux, une chaleur plus forte, au Bengal par exemple, y rend insupportable
toute espèce de vêtements : l’air étouffé des maisons les plus chaudes paraît
plus frais et plus léger que son souffle énervant : peut-il donc être le même qui
monte jusque dans les vallées de l’Himalaya ?
Le temps était admirable, et deux jours de suite, un intervalle de calme
s ecoula entre la cessation de la brise des montagnes et l’établissement de celle
des plaines; interruption analogue à la période de calme qui sépare fréquemment,
sur le rivage des îles intertropicales, la brise de terre et la brise de mer
Le calme qui y-règne alors est accablant. Il me paraît que celui qui occupe
quelquefois ici les mêmes heuresdu jour, entre 10 h. et midi, ou 10 h. et 1 h.
après midi, a sur l’économie animale une influence semblable, à un deoré très-
foible. 0
Il y a autour de Ratmghur un dérangement notable dans la disposition des
couches du terrain; les arêtes qui descendent des montagnes dans la vallée,
celle dont la base relevée en un monticule supporte la forteresse elle-même
formées des mêmes roches que les pentes plus élevées des montagnes ont
leurs couches dirigées presque de T E . à l’O. et faiblement inclinées au N
Le Pâbeur, sur sa rive droite, èstflanqué de médiocres escarpements verticaux de
Quartz grenu, légèrement micacé et fissile. Ses feuillets sont horizontaux; il en
est à peu près de même à la base de toutes les montagnes au-dessus du s’anga,
et partout c’est le même Quartz grenu qui se montre sous les Micaschistes, plus
rarement grenatiques, auxquels il passe insensiblement. Le Pâbeurne roule presque
aucunes rochesfeldspathiques. Les blocs dont son lit est pavé, sont la plupart
du même Quartz grenu qui paraît ici sur ses bords.
Chacune dès deux pagodes de Hardébi, presque contiguës l’une a l’autre, est
carrée, bâtie de pierre exclusivement, recouverte d'un énorme toit très-surbaissé,
relevé en pointeau sommet, et coiffé d’un ornement pyramidal de la même’
forme que lui, mais beaucoup plus petit. On dirait des kiosque chinois. La construction
de ces pagodes est fort moderne; mais elles sont bâties sur dès ruines
assez considérables, dont les débris sont couverts de sépultures. Ce sont des séries
de petites pagodes nútrales et cannelées en travers, comme dans l ’Hindous-
tan : ailleurs de petites colonnes encore debout, qui m’ont rappelé dans leur petite
proportion les restes de la colonnade hindoue qu’on voit près du Koutoub de
Delhi ; mais elles ne supportent plus rien. Du reste, il n’y a aucune inscription,
non plus que sur la forteresse.
Le Grenadier paraît croître sans culture autour de ce joli hameau, avec le
Jasmm, Jasminum officinale, que je n’avais pas vu auparavant dans l’Inde;
il est douteux quils n y aient pas été plantés autrefois. Mais une belle espèce
de Câprier, à grandes fleurs blanches odorantes, comme celui du midi de la
France, croît dans toutes les fissures des rochers aux expositions chaudes. Une