
récoltes. Mais c’est l'enlèvement du bétail qu’avaient pour objet les guerres fréquentes
qui désolaient jadis les États des montagnes; aussi, chaque nuit il
rentre dans les villages.
Le 8 septembre i8 3 o .— A Paukh.
Le terrain de transition ancien se montre peut-être déjà à la base des montagnes
entre lesquelles le Laloungtcho (i) débouche dans le Spiti. Autour
de Dankhar , il est entièrement caché par le terrain diluvial, et, du sommet
des montagnes, il ne descend que des quartiers de Calcaires coquilliers ou
de roches dé cette formation.
Mais en descendant vers Paukh, on voit le terrain de transition ancien
reparaître à la base des montagnes, là où le* sol alluvial a été emporté. Il est
coiffé du terrain coquillier ou de quelques-uns de ses termes seulement, des
Calcaires noirâtres ou gris abondamment traversés de veines spathiques et
indistinctement coquilliers. Ce n’est pas qu’on n’observe un grand nombre
de blocs épars de Grès très-coq uillier; mais ils me paraissent provenir plutôt
des débris du sol diluvial. La stratification très-contournée du sol intermédiaire
ancien, laisse douteux le mode de son recouvrement par le terrain
coquillier. A l’embouchure du Laloungtcho, la superposition est transgressé
e . Entre Dankhar et Paukh, elle semble parallèle. Avant que d ’arriver à
ce lieu, le terrain coquillier a complètement disparu.
Je rencontrai dans cette marche deux bandes de voyageurs. La première
était une pauvre famille de bourreliers : un homme de moyen âge, deux
femmes jeunes encore, et plusieurs enfants, le plus jeune attaché sur un âne.
Un autre âne portait l’atelier ambulant. L ’homme jouait de la clarinette en
marchant, et l’une des femmes frappait son tambour de basque. L’homme me
fit le premier salut européen que j ’aie reçu dans l’Inde : il ôta son bonnet en
s’inclinant quand je passai devant lui; les femmes, qui n’avaient pas de bonnet
à ôter, firent le salut hindoustani, et me crièrent dans cette langue : Monsieur !
et à l’expression de leur physionomie en me parlant, je jugeai quelles me
firent des compliments superbes, pour préluder à leur humble requête. Aucun
des gens près de moi n’avait d’argent sur lu i, ce qu’on leur expliqua. Par
les femmes, j ’appris qu’ils n’avaient pas de demeure fixe, mais passaient leur
vie à voyager ainsi, vivant de l’ouvrage qu’ils trouvaient à faire de temps en
temps dans les villages.
(i) Laloung est le nom d’un grand village qu’on aperçoit sur la rive gauche de cette
yallée en montant à Ghuyoumoeul. Tcho veut donc dire rivière ou torrent.
L autre caravane était celle d’un jeune marchand qui allait de la Tartarie
chinoise à une foire près de Ladak : il avait les traits aquilins, mais fort
raccourcis, et avec cela la peau la plus rouge que j ’aie jamais vue. Un troupeau
de moutons à laine de bianggui et de chèvres avec du paschm, marchait à
vide devant lu i, poussé par un autre homme qui semblait un serviteur. Tous
deux néanmoins avaient à la main une sorte de jouet d’enfant, un petit cylindre
de bois cerclé d’ivoire et monté sur un axe de bois. Un petit dodécaèdre en
fer suspendu à un fil attaché au cylindre, mobile sur son axe, servait à le tenir
aisément en mouvement de rotation. En faisant tourner leur silencieuse crécelle
, l’un et l’autre chantaient Oum mani padmei oum. Je me joignis en
choeur à eux, selon ma coutume, e t, comme il arrive toujours, mon intrusion
dans le concert sacré excita leur bonne humeur.
Rien de moins sérieux que la prière chez les montagnards, hindous ou bouddhistes
: le silence des Musulmans prosternés dans les mosquées est la plus
belle de toutes ses formes.
Le 10 septembre i83o. — Au camp sur la.rive gauche cju Gumdo.
Le. 9 septembre i83o. — De Paukh à Lari. -
L e 10 septembre i83o. — De Lari au,, camp sur la rive gauche du Gumdo.
Le Home est quelque chose de bien relatif. En quittant ce matin Lari pour
retourner en Hangarang, j ’éprouvais la même sensation agréable que si j ’eusse
pris la route de Paris, éloigné seulement de quelques jours de marche. Mais
Hangarang mène en Kanawer, et Kanawer à Simla et dans l’Inde. Il me
semble que je serai chez moi en Hangarang.
Comme j ’ai peu abondé jusqu’ici dans le sens des précipices, qu’il me soit
permis de dénoncer ceux sur le bord ou sur le penchant desquels est fréquemment
tracé le chemin de Dankhar au Gumdo, mais particulièrement depuis
Lari. Sûr du cheval que je monté depuis douze jours, je n’ai pas songé à
mettre pied à terré dans les passages les plus scabreux; mais ils ne sont
qu’effrayants sans être dangereux.
Un grand nombre de roches schisteuses, et? le terrain diluvial surtout, se
couvrent d’efflorescences salines alcalines. A juger p a rla saveur, elles varient
beaucoup dans leur nature, ou du moins dans la proportion des sels dont elles
sont formées. Au delà de Ghuyoumoeul, près de mon camp du 5 septembre,
le sel marin y dominait : dans la vallée du Spiti. c’est du sulfate, du sous-
carbonate , ou du borate de soude. Ces efflorescences ont un pouce d’épaisseur
dans les parties basses de la vallée du Spiti^ à peine élevées au-dessus du
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