
dans les lieux où l’hiver les a accumulées en plus grande quantité. Là où elles
ne fondent que si tard, il n’y a aucune trace de végétation. Si elle est rare
sur les cimes voisines, ce n’est pas à la froidure des étés qu’il faut l’attribuer,
mais à la sécheresse et au manque de sol végétal. Quelques espèces qui se
plaisent dans les pierres d’ébouleinents toujours mobiles, ne végètent nulle
part avec plus de vigueur que sur les sommets , où d’ailleurs à i 5,ooop‘*-
(4,572“ ) et davantage, il ne reste déjà plus de neiges.
Quoique le sol végétal soit aussi rare sur le penchant N . E . du col que sur
celui du S .O . , la,végétation cependant y est moins pauvre. C’est évidemment
l’effet des vents dominants du S. O . qui la dévore sur les pentes livrées à sa
furie. Le catalogue nombreux des plantes que j ’ai recueillies en ce lieu, ne
comprend peut-être pas une couple de genres qui soient étrangers à la Flore
des hautes Alpes, quoique toutes les espèces s’en distinguent sans doute. Mais
encore, comme j ’ai déjà eu occasion de le remarquer, un grand nombre
d’entre elles paraissent calquées sur ¿les espèces alpines congénères , et chacune
affecte les mêmes stations que celle qui la représente dans les Alpes. Pour
ces espèces si voisines les unes des autres, les conditions d’existence sont aussi
presque les mêmes.
Le col de Rounang est fermé par les neiges pendant 4 ou 5 mois de l’année;
mais il reste alors, de Kanum à Soungnum, une autre communication le long
des pentes inférieures du Setludje. Cette route assez dangereuse exige trois
jours de marche ; elle est à peine fréquentée.
Les ruisseaux qui descendent des ravines qui sillonnent les pentes latérales
et supérieures du berceau très-incliné de la vallée creusée depuis le col de
Rounang jusqu’aux bords du Rouskalang, disparaissent fréquemment sous les
débris éboulés dont le sol est formé. Il en est de même sur la pente opposée vers
Kanum. Cependant à 5ooto au-dessous du col, ils se réunissent en un médiocre
torrent qui coule au N.E . A cette hauteur, on voit reparaître les premiers
Déodars. Les deux Genévriers que j ’ai cités sur la pente opposée, se montrent
également, avec un Rhamnus que je n’avais pas encore rencontré. Quelques
Saules, qui croissent de distance en distance, marquent le cours du torrent.
Celui-ci entre à angle droit dans le Rouskalang, rivière considérable,
qui descend avec fracas et avec une vitesse énorme du N .O . , où elle prend sa
source sous les neiges éternelles qui encombrent un col à peine fréquenté,
entre Kanawer et Ladak, à 3 jours de marche de Soungnum.
Le Rouskalang est le premier torrent que j ’aie vu dans l’Himalaya, coulant
daus un vallon plat, de 200“ à 3oom de largeur. Ici, il serre la base des, montagnes
de sa rive droite, souvent escarpée au-dessus de ses bords; e t, pour y
descendre de la vallée de Rounang, il faut gagner le long de leurs pentes un
vallon voisin et parallèle, ou plutôt une ravine où tombe, de cascade en cascade
, un large ruisseau- On traverse un hameau situé entre cette ravine et
la vallée de Rounang, sur un gradin adouci des montagnes, et de là , par
une pente tortueuse et rapide, on descend au bord du Rouskalang, que
l’on traverse sur un pont de bois.
La vallée du Rouskalang paraît avoir, en remontant jusqu’à une distance
considérable, la largeur qu’elle a ici. Elle est couverte des anciennes alluvions
du torrent, tantôt relevées, amoncelées en larges amas de blocs stériles,
tantôt couvertes de bois de Cèdres et de Pins néozas. Entre ces monuments
de son antique puissance dévastatrice, sont des espaces où les eaux
ont laissé des sédiments plus fins. La culture s’en est emparée : elle y est
superbe. Des hameaux se voient ainsi dispersés au milieu de champs fertiles
et de bouquets de bois. Cependant les montagnes qui enferment cette vallée
sont nues et désolées.
Description de Soungnum. — Soungnum est situé au confluent du Rouskalang
et du ruisseau qui descend du col de Hangarang. C’est un grand
village d’assez bonne apparence, qui est habité par une trentaine de familles
; mais non p a s , comme le dit M. Gérard, une ville d’une beauté
remarquable : a Town o f considérable beauty.. Quoique Soungnum soit un peu
plus populeux que K anum, ce dernier village me paraît cependant la capitale
du Kanawer, qui dérive probablement son nom du sien. Les maisons, de pierre
et de bois, avec leurs toits en terrasse comme à Kanum, sont très-rapprochées
les unes des autres, séparées seulement par des voies étroites. Dans cette
saison, où un grand nombre des habitants sont en voyage, ou occupés
dans les montagnes de la garde des bestiaux, les Lamas paraissent en faire
la majorité. Quelques-uns habitent en commun une sorte de couvent, à
quelque distance du village; d’autres, en plus grand nombre, me paraissent
confondus dans leurs demeures avec le reste des villageois. Les plus stricts
d’entre eux sont entièrement vêtus d’étoffes rouges, d’autres n’ont qu’une
ceinture et qu’un bonnet de cette couleur. Le bonnet est d’une forme particulière
et ne ressemble pas mal à une des variétés de l’antique coiffure ecclésiastique
romaine. Je me souviens .de vieux portraits de papes et de cardinaux
coiffés de la sorte.
La plupart des maisons ont une sorte de mât dressé contre leur mur anté