
Le 14 juillet i83o — à Tchini, 5 mil. ( i ^ I.)d e Rogui, et séjour jusqu’au aa juillet.
La distance de Rogui à T chini est seulement de 5 mil. ( i £ I. ) ; il faut remonter
à plusieurs centaines de mètres, le chemin atteignant à peu près le même
niveau qu’hier. C’est d’ailleurs la même répétition d’escaliers et d’échafauds jetés
çà et là le long d’escarpements. On descend de là vers T ch ini, sous des forêts
de Cèdres et de Néozas.
Tchini est un village situé sur les pentes des montagnes, dans une sorte de
vallon qui n’y forme qu’une dépression à peine sensible. De nombreux ruisseaux
y coulent, qui fertilisent son petit territoire. Le village, élevé de 6oom environ
au-dessus de la rivière, et de 2700“ au-dessus de la mer, est dominé par
un petit monticule que couronnent les restes d’une forteresse. Ses maisons, pressées
les unes contre les autres sur un espace étroit, lui donnent une assez bonne
apparence. Un peu au-dessous est un terrain parfaitement plat qui n’a pas
moins de 3 hectares de surface; il est richement cultivé; c’est de beaucoup le
plus étendu que j ’aie vu dans l’Himalaya. En descendant vers le Setludje | on
en trouve d’autres presque aussi favorables à la culture, qui appartiennent soit
à Tchini, soit à des villages voisins, dispersés sur les pentes inférieures des montagnes.
Chacun d eux a ses vignobles, toujours situés le plus près qu’il est possible
du lit de la rivière, sa proximité étant la condition de la maturité des raisins.
La chaîne méridionale de l’Himalaya, qui s’élève en face, montre des traits
inaccoutumés de grandeur et de beauté. Au-dessus de la ligne dentelée de ses
sommets s élance le pic aigu de Raldang, le plus hardi de ceux que j ’aie observés
dans ces montagnes.
Les villages d alentour sont séparés par des forêts de Néozas et. de Cèdres, où
se voyent çà et là des arbres monstrueux.
L agréable situation de Tchini l a fait choisir par deux Européens, q u i, voyageant
en Kanawer, il y a quelques années, s’amusèrent à y bâtir chacun une
maison. Us en jouirent quelques semaines, et depuis elles servent aux voyageurs
qui passent. Les propriétaires cependant étouffent, l’un rà Lucknow (M. Mad-
dock), 1 autre à Indore (M. Wellesley). Je trouvai l’un de ces bungalows occupé
parM. R. Inglis, facteur à Canton, venu ici de Simla par le Bourendo-pass,
et je m’emparai de l’autre.
Ce n est pas encore ici ce pays sec que visite à peine là pluie. Depuis plus de
huit jours il n en est pas tombé, il est vrai, tandis qu’en cette saison elle a dû être
certainement presque continuelle de l ’autre côté desmontagnes; ici, le ciel est habituellement
couvert sans être menaçant; les cimes des montagnes, sur l’une et
1 autre rive du Setludje, sont enveloppées dans les nuages , qui emplissent même
souvent tout le fond de la vallée ; le soleil qui se montre dans les éclaircies est
extrêmement vif.
Il y acependant un retard sensible dans l’avancement des récoltes, qui ne tient
pas seulement à l’influence de l’élévation absolue, plus considérable ici que pour
aucun autre village que j ’aie vu sur la pente méridionale des montagnes ou
dans leur partie soumise à toute la violence des pluies solsticiales. Les abricots
étaient en pleine maturité, il y a dix jours, sur tout le territoire de la rive
gauche du Setludje, entre Rampour et Natchar, où l’élévation absolue des villages
est moyennement de 2000“ et 2100“ , et leur élévation relative au-dessus
de la rivière, de 8oom à 5oom; et en traversant celle-ci, en descendant de Natchar
pour monter à Tchégaon, je trouvai sur cette pente des montagnes, bien
qu elle soit exposée au sud, les mêmes fruits encore verts. Le lit de la rivière a
sensiblement ici la même élévation absolue que les villages que j ’ai visités sur sa
rive gauche, Gaoura, Sourann , Trandah, Natchar, et cependant, même sur
ses bords, où la chaleur concentrée est excessive, les abricots ne sont pas encore
très-mûrs.
Ce retard tient vraisemblablement à ce que le printemps dans cette partie des
montagnes, où les pluies solsticiales sont nulles ou marquées seulement par des
brumes fréquentes, est plus tardif et plus froid.
Le Pecher ne laisse pas d’y être cultivé, et devient un arbre de moyenne taille;
mais ses fruits n’ont que la peau sur le noyau. Point de cerises ni de prunes. Le
Poirier, qui me paraît sauvage sur l’autre pente des montagnes et jusqu’à
Natchar, est devenu moins commun autour des villages. Le Noyer est commun,
mais moins beau que dans la vallée de la Jumna.
Le Peuplier que j ’ai appelé dans mon catalogue Populus cordata, est cultivé
autour des villages. Il y devient, dans les lieux favorables, un très-grand arbre
du port du Populus nigra. Ses feuilles desséchées servent à la nourriture du
bétail pendant l’hiver. C’est une misérable fenaison que celle des montagnes. Elle
occupe pendant trois ou quatre mois de la belle saison une partie considérable
de la population, et cependant le bétail est bien peu nombreux. Les femmes, que
ce soin regarde plus particulièrement, vont couper ou arracher poignée par poignée
l’herbe dure;et grossière qui croît sur les pentes inférieures des montagnes;
elle sèche rapidement au soleil sur le toit des maisons. D’autres feuilles que
celles du Peuplier sont récoltées comme fourrage ; mais je ne vois plus, depuis
que j ’ai traversé le Setludje, le Morus vicorum.
Les moutons, les chèvres, et la plupart des vaches demeurent en cette saison