
Le Mica n’est certainement pas étranger à toutes les couches de ces Schistes
divers. A Seraô, il se présente distinctement en enduits dorés ou argentés,
dans les Calcaires qui leur sont subordonnés. Or, ces Caleaires se montrent
dans le vallon du Kuttalahgâd, et d’autant plus qu’on s’y élève davantage ,
en bancs d’une énorme épaisseur. Ceux-là sont saecharoïdes, et le Mica y est
fort abondant;il forme des veines de Calcaire micacé, jaunâtre, dans le Calcaire
blanc. Ces bancs sont sensiblement horizontaux, mais leur stratification n’est
rien moins qu’évidente. L à , au contraire, où les couches du Calcaire moins
épaisses, alternent continuellement avec des couches schisteuses, leur stratification
n’est pas douteuse; elles sont dirigées à l ’E .N .E . et plongent au
N .N .O . d’un nombre variable de degrés.
Est-ce par ces Calcaires micacés que l’on passe des Stéaschistes aux Micaschistes ?
Je l’ignore ; mais dès que l’on a traversé le K uttalahgâd, c’est des débris de cette
roche surtout que les pentes de la montagne sont jonchées. Ils abondent
dans le lit du torrent lui-même, mêlés à des blocs de ce Gneiss entrelacé
que la nature ambiguë de son Mica permettrait peut-être également de
nommer Protogyne ; ce sont du moins les Gneiss qui accompagnent la Pro-
togyne au sommet de la vallée de la Jumna, près de Jumnoutri. La dépression
boisée de la montagne par où l’on s’élève du torrent , dont les deux
rives baignent le Calcaire micacé, au sommet du Kédar-Kanta, n’offre jusqu’à
la limite des forêts aucune occasion de déterminer avec certitude quelles
roches affleurent ses pentes. Elles sont couvertes de blocs' anguleux immenses
de Schiste micacé, d’une seule et même variété, celle que j ’ai vue ensuite
dans son gîte naturel, sur les cimes, et de quelques blocs de Gneiss ou de Protogyne
que j« n’ai pas retrouvés en place.
Le 28 Mai i 83o.^fiDu camp dans la forêt, sous les cimes de Kédar- Kanta ,
a Dergaon ou Denngaon. Ascension sur la cime du Kédar-Kanta. 11 h. de
marche. — Malgré l’élévation et l’égalité de la température au Bengal, pendant
la saison des pluies, d’imperceptibles refroidissements m’y avaient occasionné
des rhumes presque continuels. Une seule fois la même cause avait agi sur lés
intestins, et ce fut la seule indisposition que je me souvienne d’avoir éprouvée
dans un lieu et dans une saison, où presque tous les nouveaux venus sont constamment
entre les mains des médecins, sans compter la besogne que donnent à
ceux-ci un grand nombrei de gens établis dans l’Inde depuis bien des années.
Exposé ensuite à des variations de température relativement considérables, quand
je voyageai durant l’hiver au travers de l’Hindoustan, ma santé n’avait pas éprouvé
dans ce long voyage le plus léger dérangement. Un changement complet de rég
i¿ e et une exposition constante au soleil ardent des ¿ o is de mars et d’avril, n’avaient
eu également sur elle aucune influence; mais le froid humide des montagnes,
pendant la première semaine que je passai Campé sur les sommets de Mossouri,
troubla cet heureux équilibre. Je commençai là pressentir des douleurs vagues
dans les entrailles. Le beau temps revenu, elles cessèrent, et jusqu’à Jumnoutri,
les fatigues de la route me parurent bien légères; mais là , sans doute, le
froid qui, malgré mes précautions,me surprit sur les cimes neigeuses, combiné
avéc un changement forcé de régime (la substitution des pommes de terre au
riz ), rappela un mal qui n avait fait que sommeiller. Alors les marches si courtes
des montagnes me parurent longues .souvent. Le retour à ma diète accoutumée
ne me guérit pas; des lavements de décoction de tètes de pavot assoupirent le
mal quelque temps, mais il se réveilla avec une violence nouvelle et excessive.
Le lieu était mal choisi pour être malade; j ’étais campé au milieu dés forêts désertes
de Kédar-Kanta. La crise du mal m’avait laissé dans une telle faiblesse
que je ne pensais pas être capable de poursuivre ma route le lendemain. Cependant
je me trouvai assez rétabli le matin par quelques heures de sommeil léger,
pour entreprendre cette longue marche. La nécessité d’ailleurs faisait loi à la
prudence ; mes gens seraient morts de faim dans cette solitude, il fallait donc
avancer ou"r eeuler.
Je n avais au reste qu’une hauteur très-médiocre à monter , partant d’un lieu
si élevé déjà.
A 200; environ au-dessus de mon camp, c’est-à-dire à 33oo", l'Abies circu-
lans fut remplacé généralement par XAbies complanata, et le Quercus diver-
sifoha commença à diminuer de taille. A 35oo“ la forêt expira, réduite à quelques
arbres rares et rabougris de ces deux espèces, et à des buissons de Rhododendron
pulverulentum. C’est le niveau moyen de la ligne assez peu ondulée que
je voyais, sur toutes les faces méridionales et orientales de la montagne,
marquer la limite des forêts. I c i, il est bien évident que c’est le climat seul
qui arrête la végétation arborescente. Elle s'arrête en effet sur des pentes
peu inclinées, couvertes d’une couche épaisse de terreau fertile : en même
temps, des crêtés voisines forment des abris contre la tempête dea cimes.
Malgré toutes ces circonstances propices, et malgré l’exposition du midi qui
fait disparaître les neiges, sans doute, dans les premiers jours d’avril, les
forêts s arrêtent ici à la même hauteur où je les ai vues s’arrêter près de
Cursali. Les hauteurs pareilles dans les deux localités sont loin pourtant de
représenter le même climat. La différence est attestée par l’énorme quantité
de neiges que j ai commencé à trouver au-dessus de Cursali, dès la hauteur