
concassée, pétrie et brûlée à l’extérieur sur la braise ardente, est pour eux un
régal. Us ne se l’accordent pas .tous les jours. Leur unique repas consiste souvent
en de jeunes pousses d’herbes qu’ils ramassent le long du chemin, et qu’ils
font bouillir sans sel. Us mangent indistinctement toutes les espèces de Che-
nopodium et àiAmaranthus, malgré l’odeur très-désagréable de plusieurs d’entre
elles, et les jeunes pousses d’un Pteris, fort voisin du Pteris aquilina, très-répandu
dans les montagnes, et qui sont remplies d’un suc jaunâtre ayant une
odeur urineuse repoussante.
C’est à 3oom environ au-dessous d elà cime, que reparaissent les forets sur les
pentes septentrionales du Rédar-Ranta ; hauteur sensiblement égale à celle
qu’elles atteignent à l’exposition du sud. Le Rhododendron pulverulentum s’avance
seul un peu au-dessus. Le premier arbre que l’on rencontre au-dessous est
XAbies complanala, e t, presque en même temps, le Quercus diversifolia; sous
leurs rares ombrages, poussent le Rihes erectum et le Ribespendulum, arbrisseaux
qui, je pense, ne descendent nulle part au-dessous de 3ooom. Le Taxus nepalen-
sis vient ensuite. Ici, le Juniperus nepalensis habite cette zone et ne s’élève pas
au-dessus des arbres. Quand XAbies complanata a trouvé un climat qui lui est
favorable, il disparaît presque entièrement; XAbies circularis lui succède.
Le Quercus diversifolia croît à ce niveau dans toute sa force ; et l’on voit
paraître en même temps les Erables, le Tilleul et les autres arbres que j ’ai déjà
nommés comme appartenant spécialement à cette zone, dont 3ooom représentent
assez bien le milieu.
L 'Abies circularis atteint ici jusqu’à 4om et 5om de hauteur. UÆsculus
hippocastanoïdes et l'Acerpubescens y sont aussi de très-grands arbres; mais
le Noyer ne le cède qu’au Sapin. Nul doute que cet arbre ne soit indigène
ici. Il est le plus magnifique ornement de ces forêts.
Çà et là , au milieu de leurs ombrages, s’ouvre un fertile pâturage. C’est
durant l’été le séjour des troupeaux des vallées voisines. Des herbes grossières
composent les gazons, mais leur verdure est éclatante et forme des taches
brillantes sur le sombre manteau des forêts.
A a5oom, un arbre nouveau pour moi commença à se montrer, et presque
aussitôt exclut tous les autres, pour occuper à lui seul toute la zone inférieure
des forêts. C’est un Pin, Pinus âttenuata N. Ses feuilles sont aussi
longues que celles du Pinus longifolia, mais il y en a 5 au lieu de 3 dans
chaque faisceau. Son port d’ailleurs n’est pas très-différent de celui de cette
espèce , quoique ses rameaux soient légèrement inclinés d’abord, et se relèvent
ensuite, formant une sorte d’xSextrêmement allongée et sensiblement horizontale;
mais ce qui l’en distingue absolument, ainsi que de toutes les autres espèces de
ce genre, cest la forme de ses cônes. Leur longueur dépasse communément
° ” ,2 ’ lls sont presque cylindriques, et leurs écailles, sans être amincies au
sommet en une lame tranchante comme celles des Abies, ne sont nullement
épaissies comme celles des Pinus.
Rien de si dangereux que les pentes recouvertes de cet arbre. Ses feuilles
desséchées, éparses sur le sol, le rendent plus glissant que la glace la plus
dure.Nu-pieds, les montagnards y marchent avec sûreté; mais avec une chaussure
quelconque dépourvue de crampons, on ne peut descendre sans péril
qu’en y taillant lentement des degrés.
Je n arrivai qu à 5 h. à mon camp, établi au-dessus du hameau de Dergaon ou
Denngaon. L orage, qui n avait cessé depuis midi de gronder sur quelques-unes
des cimes, d alentour, s était abaissé en même temps que le soleil ; il m’atteignit
comme j ’arrivais. Sa violence fut terrible. Toute la nuit la pluie tomba,
emportée par des rafales furieuses. C’est un misérable abri qu’une tente en
de tels lieux, par de tels temps. J’étais campé sur le bord d’un petit plateau,
au-dessous duquel fuyaient des pentes rapides; et chaque fois quêla bourrasque
se déchaînait, je m attendais à chaque moment à voir ma tente mise en pièces,
et la tempete, s engouffrant dans ses lambeaux, balayer tout ce qu’elle abritait.
Une mauvaise observation du baromètre, faite avant le coup de vent, me
donne 2182" ( 7 1 5gp-*-) pour le niveau de Dergaon. Il eût été intéressant de
suivre la marche de cet instrument d urant la bourrasque ; mais l’abri de ma
tente était trop précaire pour que j ’osasse l’y mettre en expérience.
Le 29 mai 183o . g De Dergaon a un hameau voisin, sur la rive gauche du
Soupine, en face de la vallée, du Poupine. — Dergaon est situé sur la pente des
montagnes qui bordent la rive gauche de la Tonse, à 700”1 ou 8oom au-dessus
de ses eaux. D autres hameaux également misérables y sont dispersés à diverses
hauteurs, séparés par leurs minces territoires et des bouquets de bois, où le
Pinus attenuata et le Pinus longifolia, le Quercus castanoïdes et le Rhododendron
arboreum croissent mêlés ensemble. Celui de ■ ces hameaux où je v in s
camper, après une très-courte marche, est encore élevé lui-même de 3oom environ
au-dessus de la Tonse, droit en face du vallon du Roupine.
La Tonse est un des torrents les plus considérables de cette partie de l’Hi-
malaya : grossie plus has du Pâbeur, qui double presque le volume de ses
eaux, elle s unit à la Jumna dans le Dhoun, un peu avant que celle-ci n’ait
reçu le tribut du Guirri, autre grande rivière des montagnes q u i, à l’exception
des autres, n’a point sa source au pied des neiges éternelles de la chaîne cen-
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