Les conjonâions explicatives /avoir, ( quippc ï
ntmpt, nimirhm ,fciiictt, videlicet, ) défignent entre
les propofitions , une liaifon d’identité , fondée fur
ce que l’une eft le développement de l’autre.
Les conjonctions périodiques quand , lorfque,
(quandb, ) défignent entre les propofitions, une liaifon
pofitive d’exiftence, fondée fur leur relation à
une même époque.
Les conjonctions hypothétiques J i , Jinon, \Jl?
n ifi, f in , ) défignent entre les propofitions, une liaifon
conditionnelle d’exiftence , fondée fur ce que la
fécondé eft une fuite de la première.
Les conjonctions conclufives ainfi, aujfi , donc,
partant, ( crgo, igitur, 8cc. ) défignent entre les propofitions
, une liaifon néceffaire d’exiftence, fondée
fur ce que la fécondé eft renfermée éminemment
dans la première.
Les conjonctions caufatives car, puifquc, ( nam,
tmm f tttnim , quoniam, quia , ) défignent entre les
propofitions , une liaifon néceffaire d’exiftence ,
fondée fur ce que la première eft renfermée éminemment
dans la fécondé.
Les conjonctions tranfitives or , ( atqui , autem ,
& c . ) défignent entre les propofitions , une liaifon
d’affinité , fondée fur ce qu’elles concourent à une
même fin.
Les conjonctions déterminatives que t pourquoi J
( quàd, quàm, cùm , ut, cur, quare , & c . ) défignent
entre les propofitions, une liaifon de détermination,
fondée fur ce que l’une , qui eft incidente, détermine
le fens vague de quelque partie de l’autre, qui
eft principale.
On voit par ce détail la vérité d’une remarque de
M. l’abbé Girard , ( tom. II. pag. z 5j . ) « que les
» conjonctions font proprement la partie fyftémati-
» que du difeours ; puifque c’eft par leur moyen qu’on
» affemble les phrafes , qu’on lie les fens , & que
» l’on compofe un tout de plufieurs portions, q u i,
» fans cette efpece, ne paroîtroient que comme des
» énumérations ou des liftes de phrafes , 8c non
» comme un ouvrage fuivi 8c affermi par les liens de
» l’analogie ». C ’eft précifément pour cela que je di-
vife la claffe des mots indéclinables en deux ordres
de mots , qui font les fupplétifs & les difeurfifs : les
adverbes 8c les prépofitions font du premier o rdre,
on en a vu la raifon ; les conjonctions font du fécond
ordre, parce qu’elles font les liens des propofitions
, en quoi confifte la force, l’ame & la vie du
difeours.
Je vais rapprocher dans un tableau raccourci les
notions fommaires qui refultent du détail de l’ana-,
lyfe que nous venons de faire.
S y s t è m e figure des efpeces de mots.
( AFFECTIFS.
cn
H ,
Os
ÉNONCIATIFS./
Interjections.I5 fubflantifi.
£ abftraCtifs.
I
f propres.
|appelM&.
de la I. perfonne,
de la II. perfonne.
de la 111. perfonne.
riques.
Ipéciàques.
^ phyfiques.
métaphyfiques.
fubftantif ou abftrait.
(.adjectifs ou concrets.
^Prépositions.
< palli fs.
(.neutres.
Conjonctions
Cette feule expofition fommaire des différens ordres
de mou eft fuffifante pour faire appercevoir
combien d’idées différentes fe réunifient dans la fignification
d’un feul mot énonciatif ; 8c cette multiplication
d’idées peut aller fort loin , fi on y ajoute
encore celles qui peuvent être défignées par les différentes
formes accidentelles que la déclinabilité
peut faire prendre aux mots qui en font fufceptibles ,
telles que font , par exemple , dans amaverat, les
idées du mode, du nombre, de la perfonne, du tems ;
& dans celle du tems , le^ idées du rapport d’exiftence
à l’époque, & du rapport de l’époque au moment
de la parole.
Cette complexité d’idées renfermées dans la lignification
d’un même mot, eft la feule caufe de tous
les mal-entendus dans les arts, dans les fciences, dans
les affaires, dans les traités politiques & civils ; c’eft
l’obftacle le plus grand qui fe préfente dans la recherche
de la vérité , 8c l’inftrument le plus dangereux
dans les mains de la mauvaife foi. On devroit être
continuellement en garde contre les furprifes de ces
mal-entendus : maison fe perfuadeaucontraireque,
puifqu’on parle la même langue que ceux avec qui
l’on traite , on attache aux mots les mêmes fens
qu’ils y attachent eux-même ; indemali labes.
Les Philofophes préfentent contre ce mal une
foule d’obfervations folides, fubtiles , détaillées 9
mais par-là même difficiles à faifir ou à retenir : je
n’y connois qu’un remede, qui eft le refultat de toutes
les maximes détaillées de la Philofophie : explU
quc{-vous avant tout, avant que d’entamer une dif-
euflion ou une difpute, avant que d’avouer un principe
ou un fa it , avant que de conclure un aCte ou
un traité. L’application de ce remede fuppofe que
l’on fait s’expliquer, 8c que l’on eft en état de distinguer
tout ce qu’une faine Logique peut apperceyoir
Voir dans la lignification des mots ; ce qui prouve ,
en paffant, l’importance de l’étude de la Grammaire •
bien entendue, 8c l’injuftice ainfi que le danger qu’il
peut y avoir à n’en pas faire affez de cas.
Or i°. il faut diftinguer dans les mots la lignification
objective 8c la lignification formelle. La lignification
objective , c’eft l ’idée fondamentale qui eft l’objet
de la lignification du mot, 8c qui peut être défignéfe
par des mots de différentes efpeces : la fignification
formelle , c’eft la maniéré particulière dont le mot
préfente à l’efprit l’objet dont il eft le ftgne, laquelle
eft commune à tous les mots de la même efpece 3 &
ne peut convenir à ceux des autres efpeces.
Le même objet pouvant donc être lignifié par des
•mots de différentes efpeces , on peut dire que tous
ces mots ont une même fignification objective, parce
qu’ils repréfentent tous la même idée fondamentale ;
mais chaque efpece ayant fa maniéré propre de pré-
fenter l’objet dont il eft le ligne, la fignification formelle
eft néceffairement différente dans des mots de
diverfes efpeces, quoiqu’ilspuiffent avoir une même
fignification objective. Communément ils ont dans
ce cas , une racine générative commune, qui eft le
type matériel de l’idée fondamentale qu’ils repréfentent
tous ; mais cette racine eft accompagnée
d’inflexions 8c de terminaifons, qui, en défignant la
diverfité des efpeces , caraCtérifent en même tems
la fignification formelle. Ainfi la racine commune
àm dans aimer, amitié, ami , amical, amicalement ,
eft le type de la lignification objective commune à
tous ces mots, dont l’idée fondamentale eft celle de
ce fentiment affeCtueux qui lie les hommes par la
bienveillance ; mais les diverfes inflexions ajoutées
à cette racine , défignent tout-à-la-fois la diverfité
des efpeces, 8c les différentes lignifications formelles
qui y.font attachées.
C’eft pour avoir confondu la fignification objeCti-
v e & la fignification formelle du verbe, que Sanc-
tius, le grammairien le plus favant 8c le plus phi-
lofophe de fon fiecle, a cru qu’il ne falloit point admettre
de modes dans les verbes : il croyoit qu’il
étoit queftion des modes de la fignification objeCti-
v e i qui s’expriment en effet dans la langue latine
communément par l’ablatif du nom abftrait qui en
eft le ligne naturel, & fouvent par l’adverbe qui renferme
la même idée fondamentale ; au lieu qu’il n’eft
queftion que des modes de la fignification formelle ,
.c’eftà-dire des diverfes nuances , pour ainfi dire,
qu’il peut y avoir dans la maniéré de préfenter l’idée
objeftive. Voye^ Mode.
20. Il faut encore diftinguer dans la fignification
objective des mots l’idée principale 8c les idées ac-
ceffoires. Lorfque plufieurs mots de la même efpece
repréfentent une même idée objective , variée feulement
de l’une à l’autre par des nuances différentes
qui naiffent de la diverfité des idées ajoutées à la première
; celle qui eft commune à tous ces mots , eft
l’idée principale ; 8c celles qui y font ajoutées & qui
différencient les lignes, font les idées ateeffoires.
Par exemple , amour 8c amitié font des noms abftrac-
tifs , qui préfentent également à l’efprit l’idée de ce
fentiment de l ’ame qui porte les hommes à fe réunir ;
c ’eft l’idée principale de la fignification objective de
ces deux mots: mais le nom amour ajoute à cette idée
principale, l’idée acceffoire de l’inclination d’un
fexe pour l’autre; 8cle nom amitié y ajoute l’idée
acceffoire d’un jufte tondement, fans diftinCtion de
fexe. On trouvera dans les mêmes idées acceffoires
la différence des noms fubftantifs amant 8c ami, des
adjeCtifs amoureux 8c amical, des adverbes amoureu-
fiement 8c amicalement.
C ’eft fur la diftinCtion des idées principales 8c ac-.
ceffoires de la fignification objective , que porte la
■ différence réelle des mots h<?nnêtes & dçshQnnctes,
Tome X %
que les Cyniques traitoient de chimérique ; & c’é-
toit pour avoir négligé de démêler dans les mots les
différentes idées acceffoires que l’ufàge peut y attacher,
qu’ils avoient adopté le fyftème impudent dé
l’indifférence des termei, quilesavoit enfuite menés
iufqu’au fyftème plus impudent encore de l’indifférence
des aâions par rapport à l’honnêteté. Voye£
D eshônnête.
Quand on ne confidere dans les mots de là même
efpece , qui défignent une même idée objective
principale, que cette feule idée principale, ils font
fynbnymes : mais ils ceffent de l’être quand on fait
attention aux idées acceffoires qui les différencient.
Voye^ Synonymes. Dans bien des cas on peut les
employer indiftinfltement & fans choix ; c’eft fur-
tout lorsqu’on né vêtit & qu’on rie doit préfenter
dans le diicours que l’idée principale, &C qu’il n’y a
dans la langue aucun mot qui l’exprime feule avec
abftraéiioh de toute idée acceffoire ; alors les çirconf-
tances font affez conrioître que l’on fait àbftra&ioii
des idées acceffoires que l’on défigrieroit par le même
mot en d’autres occiirrencès. : mais s’il y avoit
dans la langue un mot qui figtiifiat l’idée principale
feule & abftraite de toute autre idée acceffoire, ce
feroit en cette occafion une faute contre la jufteffe ,
de ne pas s’en fervir plutôt que d’un autre auquel
l’ufage auroit attaché la fignification de la même
idée modifiée par d’autres idées açceffoires.
Dans d’autres cas, la jufteffe dé l’exprélîion exige
que l’on choififfe fcrupuleufement entré lés fynony-
mes , parce qu’il n’eft pas toujours indifférent de
préfenter l ’idée principale fous un afpett ou fous un
autre. C ’eft pour faciliter ce choix important, 8c
pour mettre en état d’en fentir le prix 8c les heureux
effets,,que M. l’abbé Girard a donné au public fon
livre des fynonymesfrançdis;c’eftpour augmenter
ce fecours que Ton a répandit dans l’Encyelppédier
différens afticles de même nature ; 8t il feroit à fouhai-
ter que tous les gens de lettres recueilliffentles obfer-,
vations que le hafard peut leur offrir fur cet objet
& les publiaffent par les voies ouvertes au public :il
en réfulteroit quelque jour un excellent diftionnaire,
ce qui eft plus important qu’on rie le penfe peut-être ;
parce qu’on doit regarder la jufteffe de l’élocution
non-feulement comme une fource d’agrément & d’élégance
, mais encore comme l’un des moyens les
plus propres à faciliter l’intelligence 8c la communication
de la vérité.
Aux mots fynonymes, cara&érifés par l’identité du
fens principal , malgré les différerices matérielles,
on peut oppofer les moti homonymes , caraélérifés
au contraire par la diverfité des fens principaux >
malgré l’identité ou la reffemblance dans le matériel.
Voye^ Homonymes. C ’eft fur-tout contre l’abus des
homonymes que l’on doit être en garde , parce que
c*eft la reffource la plus facile, la plus ordinaire ,
& la plus dangereufe de la mauvaife foi;
30. La diftin&ion de l’idée principale 8c des idées
acceffoires a lieu à l’égard de la fignification formelle,
comme à l ’égard de la fignification objeâdve.
L’idée principale de la fignification formelle, eft
celle du point de vue fpéçifique qui caraftérife l"ef-
peee du mot, adaptée à l’idée totale de la fignification
objeftive : 8c les idées acceffoires de la fignification
formelle, font celles dés divers points de vfié
accidentels, défignés ou défignablesparles différentes
formés que la déclinabilité peut faire prendre à
un même mot. Par exemple , amare, amabam, àma-
vident y font trois mots dont la fignification ôbjeûive
renferme la même idée totale , celle du fentiment
général de bienveillance que nous avons déjà vît appartenir
à d’autres mots pris dans notre langue; en
outre, ils préfentent également à l’efprit des êtres
indéterminés, défignés féuleirierit par l’idée de l’exü*
D D d d d