
dont les fruits font imputés fur le principal qui diminue
à proportion.
Dans quelques coutumes , les peres avantagent
quelques-uns de leurs enfans par des morts-gages, en
leur donnant la jouiflance d’une terre , jufqu’à ce
qu’un autre enfant la racheté pour un certain prix.
Le terme de mort-gage lignifie aufli quelquefois un
bien engagé qui ne fe peut racheter ; c’eft en ce fe'ns
que la coutume de Tournai, tit. des fiefs, art. j j 6*
g à. parle des fiefs donnés à morts-gages.-
Quelquefois au contraire gage-mort fe prend pour
la jouijfance d'un bien, donné fous la condition de le
rendre au bon plaifir de celui qui l’a ainfi engagé,
c ’eft alors une pofleflion fiduciaire ; ainfi tenir une
hoirie à mort-gage, c’eft l’avoiry wefiduciario.
Enfin, mort-gage ou gage-mort fe dit quelquefois
pour/e gage que l’on donne pour la délivrance du bétail
pris en débit fur le nion-gage. Voyez L'anc. coutume
de Normandie \ ch. x x . Loyfeau, du déguerpijf.
liv. I. ch.vij. n. 13. les coutumes d'Artois <S‘ de Lille &
le glojf. de Lauriere , au mot mort-gage.V oyez aufli
G a g e & Ma r ia g e à mort-gage. ( A )
Mo r t i e r , f. m. en Architecture, compofition dë
chaux , de fable , &c. mêles av e c de l’eau qui fert à
lier les pierres, &c. dans les bâtimens. Foye^ B a t i m
e n t , C im e n t .
Les anciens a voient une. efpece d e mortier fi dur
& fi liant, que , malgré le tems qu’il y a que lcs'bâ-?
timens qui nous relient d’eux durent, il eft impoflible
de féparer les pierres!dïi mortier de certains d’en-
tr’eux ; il y a cependant des perfonnes qui attribuent
cette force exceflive au tems qui s’eft écoulé depuis
qu’ils font conftruits, & à l’influence de quelques
propriétés de-.’air qui dufciten effet certains corps
d’une maniéré furprénante. Foye^ Air.
On dit que les a'nciens fe fervoient, pour faire
leur chaux, des pierres les plus dures, & même de
fragmens de marbre. Foye{ C haux.
Delorme obferve que le meilleur mortier eft celui
qui eft fait de pozzolâné au lieu de fable, ajoutant
qu’il pénétré même les pierres à feu, & que de nob
res il les rend blanches. Voye^ Po z z o l a n e .. , ,
M. Worledge nous dit que le fable fin fait du mortier
fo ib le , 6c que le fable plus rond fait de meilleur
mortier : il ordonne donc de laver le fable avant que
de le mêler ; il ajoute que l’eau falée affoiblit beaucoup
le mortier. Foye{ SABLE.
Wolf remarque que le fable doit être fec & pointu
, de façon qu’il pique les mains lorfqu’on s’en
frotte ; & qu’il ne faut pas cependant qu’ilfoit terreux,
de façon à rendre l’eau fale lorfqu’on l’y
lave.
Nous apprenons de Vitruve que le fable foflile fe-
che plus vite que celui des rivières , d’oii il conclut
que le premier eft plus propre pour les dedans des
bâtimens , & le dernier pour les dehors : il ajoute
que le fable foflile expofé long-tems à l’air devient
terreux. Palladio avertit que le fable le plus mauvais
eft le blanc, & qu’il en faut attribuer la raifon à fon
manque d’afpérité.
La proportion de la chaux & du fable varie beaucoup
dans notre mortier ordinaire. Vitruve prefcrit
trois parties de fable foflile & deux de rivières contre
une de chaux ; mais il paroît qu’il met trop de fable.
A Londres & aux environs, la proportion du fable
à la chaux vive eft de 36 à 25 ; dans d’autres endroits
, on met parties égales des deux.
Maniéré de mêler le mortier. Les anciens maçons ,
félon Felibien, étoient fi attentifs à cet article, qu’ils
employoient conftamment pendant un long efpace
de tems dix hommes à chaque baflin, ce qui rendoit
le mortier d’une dureté fi prodigieufe , que Vitruve
nous dit que les morceaux de plâtre qui tomboient
ides anciens bâtimens feryoient à faire des labiés ;
Felibien ajoute que les anciens maçons prefcfivoient
à leurs manoeuvres comme une maxime dele délayer
à la futur de leurs four cils, voulant dire par-là de le
mêler long-tems au lieu de le noyer d’eau pour
avoir plutôt fait.
Outre le mortier ordinaire dont on fe fert poitr
placer des pierres , des briques, 6*c. il y a encore
d’autres elpeces de mortiers, comme :
1 Le mortier blanc dont on fe fert pour plâtrer les
murs & les plafonds, qui eft compofé de poil de
boeuf mélé avec de la chaux & de l’eau fans fable.
Le mortier dont on fe fert pour faire les aqueducs,
les citernes, &c. eft très-ferme & dure long-tems. On
le fait de chaux & de graifle de cochon qu’on mêle
quelquefois avec du jus de figues , ou d’autres fois
avec delapoixliqui.de : après qu’on l’a appliqué, on
le lave avec de l’huile de lin. Foyer C i t e r n e .
Le mortier pour les fourneaux le fait d’argille rouge,
qu’on mêle dans de l’eau où on a fait tremper de la
fiente de cheval & de la fuie de cheminée. Foye^
Fo u r n e a u .. ,
On f^la int journellement du peu de folidité des
bâtimens modernes ; cette plainte paroît très-bien
fondée, & il eft certain que ce défaut vient du peu
de foin que l’on apporte à faire un mortier durable ,
tandis que les anciens ne négligeoient rien pour fa
folidité. D ’abord la bonté du mortier dépend de la
qualité de la chaux que l’on y emploie; plus la pierre
à chaux que l’on, a calcinée eft dure & compaéle,
plus la chaux qui en réfulte eft bonne. Les Romains
fentoient cette vérité, puifque, lorfqu’il s’agifloit
de bâtir de grands édifices, ils n’employoient pour
l’ordinaire que de la chaux de marbre. La bonté du
mortier dépend encore de la qualité du fable que l’on
mêle avec la chaux ; un fable fin paroît devoir s’incorporer
beaucoup mieux avec la chaux qu’un fable
groflier ou un gravier, vu que les pierres qui com-
pofent ce dernier doivent nuire à la Iiaifon intime
du mortier. Enfin, il paroît que le peu de folidité du
mortier des modernes vient du peu de foin que l’on
prend pour le gâcher, ce qui fait que le fable ne fe
mêle qu’imparfaitement à la chaux.
M. Shaw, célébré voyageur anglois, obferve que
les habitans de Tunis &c des côtes de Barbarie bâ-
tiflent de nos jours avec. la même folidité que les
Carthaginois. Le mortier qu’ils emploient eft compofé
d’une partie de fable, de deux parties de cendres
de bois, & de trois parties de chaux. On pafle
ces trois fubftances au tamis, on les mêle bien exactement
, on les humeéte avec de l’eau, & on gâche
ce mélange pendant trois jours & trois nuits confé-
cutives , fans interruption, pour que le tout s’incorpore
parfaitement ; & , pendant ce tems, on hu-
meéte alternativement le mélange avec de l’eau &
avec de l’huile : on continue à remuer le tout juf-
qu’à ce qu’il devienne parfaitement homogène &
compacte. Foye^ Shaw, Foyage en Afrique. ( — )
Mo r t i e r , ( Jurifprud. ) eft une efpece de toque
ou bonnet qui é toit autrefois l’habillement de tête
commun, & dont on a fait une marque de dignité
pour certaines perfonnes.
Le mortier a été porté par quelques empereurs de
Conftantinople, dans la ville de Ravene : l’empereur
Juftinien eft repréfenté avec un mortier, enrichi de
deux rangs de perle.
Nos rois de la première race ont aufli ufé de cet
ornement, ceux de la fécondé & quelques-uns de
la troifieme race s’en fervirent aufli. Charlemagne
& S. Louis font repréfentés dans certaines vieilles
peintures avec un mortier ; Charles VL eft repréfenté
en la grand’chambre avec le mortier fur la tête.
Lorfque nos rois quittèrent le palais de Paris pour
en faire le fiége de leur parlement, ils communiquèrent
l ’ufage du w v w & autres ornemens à veux qui
ydevoient préfider afin de leur attirer plus de ref-
peél ; le mortier des préfidens au parlement eft un
refte de l’habit des chevaliers, parce qu’il eft de velours
& qu’il y a de l’or.
Le chancelier & le garde des fceaux portent un
mortier de toile d’o r , bordé & rebrafle d’hermine.
. Le premier préfident du. parlement porte le mortier
Ao. velours noir, bordé de deux galons d’or. Les
autres préfidens n’ont qu’un feul galon ; le greffier
en chef porte aufli le mortier.
■ Autrefois le mortier fe mettoit fur la tête deflous
le chape.ron, préfentement ceux qui portent le mortier
le tiennent à la main , il y a néanmoins quelques
cérémonies où ils le mettent encore fur la tête
comme aux entrées des rois. & des reines, ils le portent
aufli en cimier.fur leurs armes.
Les barons le portent aufli au-deffits de leur écuf-
fon avec des filets.de perles. Foye^ le Traité des Ji-
gnes des penfées , par Coftadan, tom. 1F. ÇA )
Mortier ’, ( Chimie ) infiniment fort connu &
qui eft commun à la Chimie & à plufiéurs arts ;
mais l’unique qualité requife dans cet infiniment
pour l’ufage commun , c’eft d’être plus dur que les
matières qu’on veut y piler, afin que fes parois ne
foient pas égrugés & ufés , & que la pulvérifatiort
n’y foit pas lente , difficile ou impoflible ; mais outre
cette qualité qu’on peut appeller méchanique, &
qui eft néceflaire aufli pour les pulvérifations chimiques
; l’on .a égard encore dans ces dernieres opérations
à la nature chimique de la matière dont le
mortier eft compofé, & à les rapports avec les fubftances
qui doivent être traitées dedans , aufli les
Chimiftes fe font-ils faits des mortiers de beaucoup
de differentes matières pour y traiter fans inconvénient
les differens fujets chimiques. Ils ont des mor-
tie/s de cuivre, de fer fondu , d’argent, de marbre,
de granit, de.verre, de bois. Les ufages des mortiers
de ces differentes matières font déterminés par
la connoifîance que l’arîifte doit avoir de l ’aélion
des differentes fubftances chimiques, fur chacune de
ces matières ; & quant aux préparations pharmaceutiques
ou médicinales qu’on exécute au moyen de
ces inftrumens, l’efpece en eft ordinairement déterminée
dans les pharmacopées , il y eft dit, broyez
dans un mortier d’airain*, de marbre, &c. en général
le. grand mortier du laboratoire. ou de la boutique
doit plutôt être de fer fondu, que de cuivre ou de
bronze. Ce dernier métal eft attaqué par un très-
grand nombre de fubftances, & fes effets dangereux
fur les corps humains font allez connus, voye^ C uivre.
Le petit mortier.6c la main de.s boutiques , celui
dans lequel on prépare les potions , les juleps,
les loochs, .&c. doit être d’argent plutôt que de cuiv
re , par les raifons que nous venons d’alléguer pour
la profcription de ce dernier métal, & parce que le
mortier de fer nuiroit à l’élégance de la plûpart de
ces préparations.
Tout ce que nous venons de dire du mortier convient
également au pilon , infiniment que tout le
monde connoît aufli , & dont l’ufage eft néceflaire-
ment lié avec celui du mortier, ou même qui ne fait
proprement avec, qu’un même & feul inilrument.
Ces confédérations conviennent aufli généralement
à toutvaifleau, & à la plûpart des inftrumens
chimiques 6c pharmaceutiques. Foye£ I n s t r u m
e n t , C himie & V aisseau. ( b)
Mortier de veille. (Lang, franç.) On appelle
chez le roi de France , mortier de veille , un petit
vaifleau d’argent qui a de la reflemblance au mortier
à piler ; il eft rempli d’eau fur laquelle fumage
un morceau de cire jaune groffe comme le poing,
pefant une demi-livre , & ayant un petit lumignon
au milieu ; ce morceau de cire fe nomme aufli mor-
Tome X ,
tier. On l’allume quand le roi eft couché, & il brûle
toute la nuit dans un coin de fa chambre, conjointement
avec une bougie qu’on allume en même tems
dans un flambeau d’argent, au milieu d’un baflin
d’argent qui eft à terre. (D . J.')
M o r t ie r , le , eft dans l'Artillerie une efpece de
canon plus court que le canon ordinaire , & de même
métal, qui fert à jetter des bombes & quelquefois
des grenades. Foye{ B o m b e .
L’ufage des mortiers eft fort ancien. M. Blondel
les croit du tems des plus vieux canons, & qu’ils ne
fervoient alors qu’à jetter des pierres & des boulets
rouges. Les premières bombes jettécs avec le mortier
furent employées au fiége de Vaclhtendonek en
1588 ; ce fut Malthus, ingénieur anglois , qui a le
premier introduit l’ufage des bombes en France dans
l’attaque des places , & qui s’en fervit d’abord au
premier fiége de la Motte en 1634. Le roi Louis
XIII. avoit fait venir cet ingénieur de Hollande.
Il y a plufiéurs fortes de mortiers ; favoir, de 6 ,
7 > ^ » 9-* t o , 1 1 , i z , & même de 18 pouces de
diamètre à leur bouche ; ils contiennent dans leurs
chambres 2 , 3 , 4 , 5,6 & 12 livres de poudre.
E x p lica tio n d un mortier de doutée pouces , conten
a n t f i x livres de p o u d r e , P I . F U . de fortification,
fig. 4. A fa cu la fle , B la lumière av e c fon baflïnet,
C le? tourillons, D l ’aftragalle de la lumiè re , E le
premier renfort , F plate-bande de renfort chargé
de fon an fe , & avec les moulures ; G la vo lée a v e c
fon ornement, ü f l ’aftragale du c o lle t , I le c o lle t ,
K le b o u r re let, L l’embouchure ; l’am e , ce qui eft
ponÛué depuis, la bouche jufqu’au deflous de la plate
bande , la chambre ponéluée depuis le deflous de
la plate-bande jufqu’à la lumière. Foye^ P I . F i l .
fig. 5. la bombe de ce. mortier, & fig. G. la coupe de
cette bombe av e c fa fufée. F oy eç F u s é e d e l a
b o m b e .
Il y a des mortiers dont la chambre eû. cylindrique,
c’eft-à-dire partout de même longueur , 6c le fond
un peu arrondi. D’autres à chambre concave ou
fphérique , parmi lefquelles chambres , il y en a â
poire 6c à cône tronqué. Les chambres concaves & à
poire n’ont pas le même inconvénient que dans le
canon, parce que fon peu de hauteur permet de l’é-
couvillonner exa&ement ; ainfi , nul inconvénient
n’eft à craindre à cet égard. Et comme ces chambres
font plus propres à l’inflammation de la poudre, que
les cylindriques,il s’enfuit qu’elles font les plus avan-
tageufes pour le mortier.
Nous ajoutons ici ce que M. Belidor dit dans fon Bombardier
françois fur les différentes chambres des mortiers.
» L’on a imaginé, dit cet auteur, quatre fortes de
» chambres pour les mortiers : la première eft celle
» que l’on nomme cylindrique, parce.qu’en effet elle-
» a la figure d’un cylindre, dont la lumière qui porte
» le feu à fa charge, répond au cercle du fond ; il
» y en a où ce fond fe trouve un peu concave,afin
» qu’une partie de la poudre fe trouvant au-deffous
» de la lumière, toute la charge puifle s’enflammer
» plus promptement ; car les chambres cylindriques
» ont cela de défeélueux, que lorfqu’on y met beau-
» coup de poudre, il n’y a guere que celle qui fe
» trouve au fond qui contribue à chaffer la bombe ,
» l’autre ne s’enflammant que quand elle eft déjà
» partie ; & l’on a remarqué plufiéurs fois que fix
» livres de poudre ne chafloient la bombe guere
» plus loin, fous le même degré d’élévation que cinq
» livres, à caufe que l’am'e du mortier n’ayant que
» très-peu de longueur, la bombe ne parcourt pas
» un aflez long efpace avant que d’en forrir, pour
»/recevoir l’impulfion de la poudre qui s’enflamme
» fur la fin, ce qui eft un des plus grands défauts
» que puifle avoir une arme à feu ; dont la perfec-
» tion fe réduit à faire enforte que toute la charge 7 7 _:: ®