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a fa'fource dans les montagnes Nébradès , & fon
embouchure fur lacôtefeptentrionale. On l’appelle
aujourd’hui Pollina. (J2. /•)
MONARCHIE, fit. (Gouvernement polit.’) forme
de gouvernement oîiun feul gouverne par clés lois
fixes & établies. •
La monarchie eft cet état dans lequel la fquvèrai-
nepuiflance, & tous les droits'qui luifont effentiels,
réfulc indmfément dans un feul homme appelle roi,
monarque, ou’ empereur.
Etabliffôns, d’après M. de Montefquièu , le principe
de ce gouvernement, fon foutien, tte fa dégé-
hératiôn. ■ • - > . " "*
' La nature de la monarchie co.nfifte en ce que le
monarque eft la fource de tout pouvoir politique &
c i v i l , & qu’il régit feul l’état par des lois fondamentales
; car s&Jfin’y .a v oit dans l’état que la volonté
momentanée & capri'èieufe cl’un feul fans lois ton-
damentales , “ ce feroit un gouvernement •defpptï-
que , oîï Un feul liônimè-entraîne tout par fa volonté
• mais la monarchie, commande par des lois dont le
dépôt eft entre les mains de corps politiques y qui
annoncent les lois lbrfqu’elles font faites , &E les
rappellent lorfqu’on les oublie.
Le gouvernement monarchique n’a pas, comme
le républicain , la bonté des moeurs pour principe.
•Les lois ÿ-tiennent lien des vertus, indépendamment
de l’amour pour la patrie , du defir de la vraie gloire,
du renoncement à foi-même, du facrifice de les
plus chers intérêts , & de toutes les vertus héroïques
des anciens dont nous avons feulement entendu
parler.' Lès moeurs n’y font jamais aufli pures
que dans- les gouvernemens républicains ; & les vertus
qu’on y montre font toujours moins ce que
l’on clbit aux .autres que ce que l ’on fe doit à
foi-même. Elles ne font pas' tant ce qui nous appelle
vers nos concitoyens , que ce qui nous en distingue
; l’honneur , c’eft-à-dire , le préjugé de
chaque perfonne & de chaque condition prend, dans
la monarchie ,.la place de la vertu politique , & la
repréfente. Il entre dans toutes les façons de penfer,
& dans toutes les maniérés de fentir. Il étend ou
borne les devoirs à fa fantailie, foit qu’ils aient leur
force dans la religion , la politique ou la morale. Il
y peut cependant infpirer les plus belles aélions ; il
peut même , joint à la forme des lois, conduire au
but du gouvernement comme la vertu même.
Telle eft la force du gouvernement monarchique,
qu’elle ufe à Ion gré de tous les membres qui la com-
ipofent. Comme c’eft du prince feul qu’on attend
des richeflès , des dignités, des récompenfes, l’em-
preflement à les mériter fait l’appui de fon trône.
De plus, les affaires étant toutes menées par un feul,
l ’ordre, la diligence, lé fecret, la fubordination, les
objets ie^ plus grands, les exécutions les plus promptes
en font les effets affurés. Dans les fecouflès même
, la fûreté du prince eft attachée à l’incorruptibilité
de tous les différens ordres de l’état à la fois;
& les féditieux qui n’ont ni la volonté, ni l’efpé-
rance de renverjer l’é ta t , ne peuvent ni ne veulent
reh.verfer lé prince.
Si le monarque eft vertueux , s’il difpenfe les ré-
compenfës & les peines avec juftice & avec difeer-
nement, tout le monde s’emprefl'e à mériter fes bienfaits,
& fon régné eft le fiecle d’or ; mais ft le monarque
n’eft pas tel , le principe qui fert à élever l ame de fes lujets pour participer à fes grâces, pour
percer la* foule par de belles adions, il dégénéré
en ba Hèflè & en efclavage. Romains , vous triomphâtes
fous les deux premiers Céfars, vous fûtes
fous les autres les plus vils des mortels.
Le principe de la monarchie fe corrompt Iorfque
les premières dignités font les marques de la première
lervitude ; lorfqu’on ôte aux grands le refpeét
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des peuples, & qu’on les rend les inftrumens du
pouvoir arbitraire.
Il fe corrompt, Iorfque des âmes ftngülierement
lâches , tirent vanité de la grandeur que pourroit
avoir leur fervitude ; lorfqu’elles croient que ce qui
fait que l’on doit tout au prince, fait que l’on: no
doit rien à fa patrie ; & plus encore, Iorfque l’adulation
tenant une coquille de fard à la main,s’efforce
de perfuader à celui qui porte le feeptre , que les
hommes font à l’égard de leurs fouverains, ce qu?eft
la nature entière par rapport à fon auteur.
Le principe de la monarchie fe corrompt , Iorfque
le prince change fa juftice en féverité, lorfqu’il met,
comme lès empereurs romains, une tête de Médule
fur fà poitrine ; lorfqu’il prend cet air menaçant &C
terrible que Commode faifoit donner à les fta-
tûes. ‘ r
La monarchie fe perd, Iorfqu’un prince croit qu il
montre plus fa puiffance en changeant l’ordre des
chofes, qu’en le fuivant ; lorfqu’il prive les corps
de l’état.de leurs prérogatives ; lorfqu’il ôte les fonctions
naturelles des uns, pour les donner arbitrairement
à d’autres ; & lorfqu’il eft amoureux de les
fantailies frivoles.
La monarchie fe perd, Iorfque le monarque rapportant
tout direélement à lui, appelle l’état à fa capitale,
la capitale à fa cour, & la cour à fa feule
perfonne. t
La monarchie fe perd, lorfqu’un prince meconnoit
fon autorité , fa fituation, l ’amour de fes peuples ,
& qu’il ne fient pas qu’un monarque doit fe juger en
fûreté, comme un defpote doit fe croire en périL
La monarchie fe perd, lorfqu’un prince, trompé
par fes miniftres , vient à croire que plus les fujets
font pauvres , plus les familles font nombreufes ; ôc
que plus ils font chargés d’impôts , plus ils font en
état de les payer : deux fophifmes que j’appelle crimes
de lèfe-majefté, qui ont toujours ruine, & qui
ruineront à jamais toutes les monarchies. Les républiques
finiffent par le luxe, les monarchies par la dépopulation
& par’la pauvreté.
Enfin la monarchie eft abfolument perdue , quand
elle eft culbutée dans le defpotifme ; état qui jette
bientôt une nation dans la barbarie , & de-là dans
un anéantiffement total, où tombe avec elle le joug
pefant qui l’y précipite.
Mais, dira quelqu’un aux fujets d’une monarchie
dont le principe eft prêt à s’écrouler, il vous eft ne
un prince qui le rétablira dans tout fon luftre. La
nature a doué ce fucceffeur de l’empire des vertus,
& des qualités qui feront vos délices ; il ne s’agit
que d’en aider le développement. Hélas !' peuples ,
je tremble encore que les efpéranees qu’on vous
donne ne foient déçues. Des monftres flétriront,,
étoufferont cette belle fleur dans fa naiflance ; leur
fouffle empoifonneur éteindra les heureufes facultés
de cet héritier du trône , pour le gouverner à leur
gré : ils rempliront fon ame d’erreurs ,d e préjuges
& de fuperftitions. Ils lui infpireront avec l’ignorance
leurs maximes pernicieufes. Ils infeéleront ce
tendre tejetton de l’efprit de domination qui les pof-
fede. _ ■ t
Telles font les caufes principales de la decadence
& delà chûte des plusfloriffantes monarchies. Heut.
quant pereunt brevibus ingentia caufis ! (D . J.)
M o n a r c h i e a b s o l u e , (Gouvernement.) forme
de monarchie , dans laquelle le corps entier des citoyens
a cru devoir conférer la fouverainete au
prince , avec l’étendue & le pouvoir abfolu qui ré-
fidoit en lui originairement , & fans y ajouter de
reftriaion particulière , que celle des lois établies.
Il ne faut pas confondre le pouvoir abfolu d’un tel
monarque, avec le pouvoir arbitraire & defpotique;
car l’origine & la nature de la monarchie abfolue eft
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limitée par fa nature même, par l’intentionde ceux
de qui le monarque la tient, & par les. loix fondamentales
de fon état. Comme les peuples qui vivent
fous un bonne police , font plus heureux que ceux
qui, fans réglés & fans chefs, errent dans les forêts
; aufli les monarques qui vivent fous, lés lois
fondamentales de leur état font-ils plus heureux que
les princes defpotiques , qui n’ont rien qui pniflë régler
le coeur de leurs peuples, ni le leur. (D . J.) .
Monarchie Élective, (Gouvernementpolitiq.)
.On appelle ainfi tout gouvernement dans lequel on
ne parvient à la royauté que par éleélion ; c’eft
fans doute une maniéré très-légitime d’acquérir la
fo u ve rain eté , puisqu'elle eft fondée fur le çonfente-
ment & le cho ix libre du peuple.
L’éleétion d’un monarque eft cet aéle par lequel
la nation défigné celui qu’elle juge le plus capable
de fuccéder au roi défunt pour gouverner l’état ; &c
fitôt que cette perfonne a accepté l’offre du peuple ,
elle eft revêtue de la fouveraineté.-
L’on peut diftinguer deux fortes de monarchies
'électives , l’une dans laquelle l’éieâion eft entièrement
libre, l’autre dans laquelle l’éleêlion eft gênée
à certains égards. La première a lieu Iorfque le peuple
peut choifir pour monarque celui qu’il juge à-
propos ; l’autre , quand le peuple par la conftitution
de l’état eft aftreint d’élire pour fouverain une perfonne
qui foit d’une certaine nation, d’une certaine
famille, d’une certaine religion , & c . Parmi les anciens
Pêrfès , aucun, dit Cicéron, ne pouvôit être
élu roj s’il n’avoit été inftruit par les Mages.
Mais une nation qui jouit du privilège d’élever à
la monarchie un de lès citoyens & principalement
une nation qui feroit encore foumife aux lois de la
nature , n’eft-elle pas en droit de tenir à ce citoyen
lors de Ion éleftion, le difeours fuivant }
« Nous fommes bien aifes de mettre la puiflance
» entre vos mains, maïs en même tems nous vous
» recommandons d’obferver les conventions faites
» entre nous ; & comme elles tendent à entretenir
» une réciprocité de fecours fi parfaite qu’aucun ne
» manque , s’il eft poflib.Ie , du néceflaire & de l’u-
» tile , nous vous enjoignons de veiller de yotre
» mieux à la cônlervation de cet ordre, de nous
.» faciliter les moyens efficaces de le maintenir , &
» de nous encourager à les mettre en ufage. La rai-
» fon nous a preferit cette réglé , & nous vous
», prions de nous y rappeller fans cefle. Nous vous
» conférons le pouvoir & l’autorité des lois fur cha-
» cun de nous ; nous vous en faifons l’organe & le
» héraut. Nous nous engageons à vous aider, & à
» contraindre avec vous quiconque de nous feroit
» affez dépourvu de fens pour défobéir. Vous devez
» concevoir en même tems que fi vous même alliez
» jufqu’à nous impofer quelque joug contraire aux
.» lois, ces mêmesiois vous déclarent déchu de tout
>> pouvoir & de toute autorité.
» Nous vous jugeons capable de nous gouverner,
» nous nous abandonnons avec confiance aux direc-
» tions de vos, 'confeils : c’eft un premier hommage
» que nous rendons à la fupériorité des talens dont
» la nature vous a doué. Si vous êtes fidele à vos
» devoirs, nous vous chérirons comme un préfent
» du ciel, nous vous refpe&erons comme un pere :
» voilà votre récompenfe, votre gloire, votre gran-
» deur. Quel bonheur de pouvoir mériter que plu-
» fleurs milliers de mortels vos égaux s’intéreflent
» tendrement à votre exiftence & à votre confer-
» vation !
» Dieu eft unêtrefouverainement bienfaifant ; il
» nous a fait fociables, maintenez-nous dans la fo-
» ciete que nous avons choifie ; comme il eft le mo-
» teur de la nature entière, où il entretient un ordre
» admirable, foyez le moteur de notre corps politi-
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» que : en cette qualité vous femblerez imiter l’Eire
» fuprème. Du refte , fouvenez-vous qu’à l’égard
» de ce qui vous touche personnellement, vous n’a-
» vez d’autres droits inconteftables, d’autres pou-
» voirs que ceux qui lient le commun des citoyens ,
»-parce que vous n’avez point d’autres befoins , &
».que vous n’éprouvez pas d’autres plaifirs. Si nous
» penfonS que quelqu’un des vôtres foit après vous
» capable du même commandement, nous y aurons
» beaucoup d’égard , mais par un choix libre & in-
». dépendant de toute prétention de leur part ».
Quelle capitulation, quel droit d’antique poffefiîon
peut prefçrire contre la vérité de cet édit perpétuel,
peut en affranchir les fouverains élus à ces conditions
? Que dis-je , ce feroit les priver d’un privilège
qui les revêt du pouvoir de fuprèmes bienfaiteurs,
& les rend par-là véritablement femblables à
la divinité. Que l’on juge fur cet expofé de la forme
ordinaire des gouvernemens ! ( D . J. )
Monarchie lim ité e , ( Gouvernement. ) forte
de monarchie où les trois pouvoirs font tellement fondus
enfemble, qu’ils fe fervent l’un à l’autre de balance
& de contrepoids La monarchie limitée héréditaire
, paroît être la meilleure forme de monarchie ,
parce qu’indépendamment de fa fiabilité, le corps
légiflatif y eft compofé de deux parties , dont l’une
enchaîne l’autre par leur.faculté mutuelle d’empêcher
; & toutes les deux font liées par la puiffance
exécutrice, qui l’eft ellc-meme par la légïflative.
Tel eft le gouvernement d’Angleterre, dont les racines
toujours coupées, toujours fanglantes, ont enfin
produit après des fiecles 1 à l’étonnemeut des nations
y le mélange égal de la liberté & de la royauté.
Dans les autres, monarchies européennes que nous
connoiffons, les trois pouvoirs n’y font point fondus
de cette maniéré ; ils ont chacun une diftribution
particulière fuivant laquelle ils approchent plus ou
moins de la liberté politique. Il paroît qu’on jouit en
Suede de ce précieux avantage , autant qu’on en eft
éloigné en Danemark ; mais la monarchie de Rùfïic
eft-unpur defpotifme. (D . J . )
MONARQUE , f. m. ( Gouvernement.) fouverain
d’un état monarchique. Le trône eft le plus beau
polie qu’un mortel puifle occuper , parce que c’eft
celui où on peut faire le plus de bien. J’aime à voir
l’intérêt que l’auteur de l’efprit des lois prend au bonheur
des princes, & la vénération qu’il porte à leur
rang fuprème.
Que le monarque, dit-il, n’ait point de crainte
il ne fauroit croire combien on eft porté à l’aimer.
Eh ! pourquoi ne l’aimeroit-on pas ? Il eft la fource
de prefque tout le bien qui fe fait, & prefque toutes
les punitions font fur le compte des lois. 11 ne fe montre
jamais au peuple qu’avec un vifage ferein : fa
gloire même fe communique à nous, & fa puiffance
nous foutient. Une preuve qu’on le chérit, c’eft
qu’on a de la confiance en lu i, & que lorfqu’un mi-
niftre refufe, on s’imagine toujours que le prince
auroit accordé, même dans les calamités publiques:
on n’accufe point fa perfonne ; on fe plaint de ce
qu’il ignore , ou de ce qu’il eft obfcdé par des gens
corrompus. Si le prince favoit , dit le peuple : ces
paroles font une efpece d’invocation.
Que le monarque fe rende donc populaire ; il doit
être flatté de l’amour du moindre de fes fujets : ce
font toujours des hommes. Le peuple demande fi
peu d’égards , qu’il eft jufte de les lui accorder : la
diftance infime qui eft entre le monarque & lui, empêche
bien qu’il n’en foit gêné. Il doit aufli fa voir
jouir de foi à part, dit Montagne , & fe communiquer
comme Jacques & Pierre à foi-meme. La clémence
doit être fa vertu diftinâive ; c eft le caractère
d’une belie ame que d’en faire ufage, diloit Cicéron
à Céfar,