du marafme fenile ; la circulation eft plus lente, plus
foible , bien moins universelle que dans les enfans ;
le pouls eft dur , foible , petit, inégal, pour l’ordinaire
intérieur : lorfque la vieilleffe devient décrépite
, l’irritabilité diminue considérablement ; les
vaiffeaux deviennent plus ou moins durs : on en a
vu près de l’origine du coeur qui avoient acquis
la dureté de l’os du cartilage , des pierres. Lorfque
la mort eft prochaine, le pouls eft intermittent, extrêmement
lent & foible ; & ces cara&eres augmentent
ainli par nuances jufqu’à ce que , la fenfibilité
du coeur entièrement détruite, les forces tout-à-fait
épuifées , le mouvement de cet organe cefle, 8c ces
vieillards meurent alors fans prefque s’appercevoir
qu’ils ceflent de vivre , le paflage de la vie à la mon
n’étant prefque pas fenfible chez eux. On voit par-
là que notre merveilleufe machine a cela de commun
avec toutes les autres ; que la maniéré dont les
mouvemens s’y exécutent eft une raifon fuffifante
pour en empêcher la perpétuité : chaque moment de
vie prépare 8c difpofe à la mon. Il eft facile d’apper-
cevoir combien peu on doit compter fur tous ces
élixirs admirables, ces fecrets précieux que des empiriques
ignorans ou fripons débitent pour prolonger
la vie , pour rajeunir 8c conduire à l’immortalité.
II. Sous le titre de mon violente nous comprenons
toutes celles qui font occafionnées par quelque caufe
extérieure dont l’a&ion eft évidente 8c prompte ;
nous comptons d’abord en conféquence toutes les
bleffures qui empêchent le mouvement du coeur,
par la fettion des nerfs, le dérangement du cerveau;
par l’effufiondufang, les plaies des ventricules, des
gros vaiffeaux, les épanchemens intérieurs, les chûtes
fur la tête ou l’épine, avec commotion ou luxation
, & c . les opérations chirurgicales mal faites ou
imprudemment entreprifes ; celles qui interceptent
la refpiration , comme celles qui pénètrent fort
avant dans la poitrine, qui coupent, détruifent la
trachée-artere. Nous mettons aufîi au nombre des
morts qui viennent par défaut de refpiration, celles
des noyés, de ceux qui font expofés à la vapeur du
vin fermentant, du charbon, des mines , des tombeaux
qui ont refté 1 ong-tems fermés, des mouffe-
tes , 8c très-rarement ou plutôt jamais la mort des
pendus ; car ils meurent le plus fouvent par la luxation
de la première vertebre du col : cette opération
eft un coup de maître, un tour délicat de bourreau
expérimenté, qui ne veut pas faire languir le
patient. Quelquefois aufîi les pendus meurent apoplectiques
, le lang étant retenu 8c accumulé dans le
cerveau par la compreflïon que fait la corde fur les
jugulaires. Le froid eft quelquefois 8c dans certains
pays fi violent, que les perfonnes les plus robuftes
ne fauroient y être expofées pendant quelque tems
fansperdre la vie de tout le corps ou de quelque partie
: fon effet le plus fenfible eft de fufpendre le mouvement
des humeurs, 8c d’exciter une gangrené locale
ou universelle ; cependant lorfqu’il eft pouffé
au dernier degré d’intenfité, il empêche la putréfaction
, il deffeche les folides, les refferre puiffam-
ment, & gele pour ainfi dire les fluides. Ceux qui
font morts de cette façon fe confervent pendant
long-tems : on en a trouvé qui étoient encore frais
après bien des années. On pourroit enfin rapporter
aux morts violentes celle qui eft l’effet des poifons
aétifs pris intérieurement ou introduits par quelque
bleffure ou morfure extérieure ; leur aCtion eft extrêmement
variée 8c fort obfcure. Voytz Poison.
III. La mort fubite eft une ceflation prompte des
mouvemens vitaux, fans aucun changement confidérable
extérieur : c’ eft un paflage rapide fouvent
fans caufe apparente de l’exercice le plus floriffant
des différentes fondions , à une inaÇtion totale. On
ceffe de vivre dans le tems où la fanté paroît la
mieux affermie 8c le danger le plus éloigné, ait milieu
des jeux, des feftins, des divertiflëmens, ou
dans les bras d’un fommeil doux 8c tranquille; c’eft ce
quifaifoit fouhaiter aux anciens philofophes de mourir
de^ cette façon ; 8c en effet, à ne confidérer que
le préfent, c’eft la mort la moins défagréable , qui
évite les fouffrances , les horreurs que ne peuve.nt
manquer d’entraîner les approches de la mort ; qui
ne donne pas le tems de tomber dans cet anéamifle-
ment affreux, dans cet affaiffement fouvent honteux
pour un philofophe, qui la précédé dans d’autres cir-
conftances ; & enfin on n’a pas le tems de regretter
la vie , la promptitude de la mort ne permet pas to.u-
tesles îriftes reflexions qui fe préfentent à un homme
qui la voit s’approcher infenfiblemenr.
On a vu des morts fubites déterminées par des
pallions d’ame v iv es , par la joie, la terreur, la colère,
le dépit, &c. Une dame vaporeufe mourut
dans l’inftant qu’on lui donnoit un coup de lancette
pour la faigner, avant même que le fang fortît.
Quelques perfonnes font mortes ainfi fans qu’on
pût accufer aucune caufe précédente, fans que rien
parut avoir donné lieu à un changement fi prodigieux
; dans la plupart de ceux qu’on a ouverts, on a
trouvé des abfcès qui avoient crevé, du fang épanche
dans la poitrine ou dans le cerveau, des polypes
confidérables à l’embouchure des gros vaiffeaux.
Frédéric Hoffman raconte, fur le témoignage de
Graff, médecin de l’éle&eur Palatin, qu’un nombre
confidérable de foldats étant morts fubitement,
on en fit ouvrir cinquante ; il n’y en eut pas
un de ceux - là qui n’eut dans le coeur un polype
d’une grandeur monftrueufe, monftrofâ magnitudine.
Georges Greifell affure qu’il a trouvé de femblables
concrétions dans le coeur ou le cerveau de tous
ceux qui font morts d’apoplexie ou de catarre ,
Mifcell. nae^ curiof. 16 70 , obferv. LX X ÏV . Wepfer
dit avoir vu dans le cadavre d’un homme mort fubitement
apopleftique, un polype d’une étendue
immenfe, qui non-feulement occupoit les carotides
8c les vaiffeaux un peu confidérables du cerveau,
mais fe diftribuoit encore dans tous les finus 8c an-
fra&uofites de ce vifeere ; on comprend facilement
comment de femblables dérangemens peuvent fufpendre
tout-à-coup le mouvement progreflif du coeur
8c faire ceffer la vie ; mais il arrive quelquefois que
tous les vifeeres paroiffent dans un état fain 8c naturel,
on ne trouve aucun éclairciffementdans l’ouverture
du cadavre fur la caufe de la mon; c’eft principalement
dans le cas de mort fubite excitée par des
paflïons d’ame viv es , par des douleurs aiguës inattendues,
il n’y a alors qu’une affeftion nerveufe;
il y a lieu de préfumer que le même fpafme qui
s’obferve à l’extérieur , occupe les extrémités du
coeur, & les empêche d’admettre le fang ou de réagir
contre lui. Il eft à propos d’obferver ici que la
mort fubite peut aufîi arriver dans le cours d’ttné
indifpofition, d’une maladie, parles mêmes caufes
qui la déterminent en fanté, indépendamment de
celle de la maladie ; un malade trompe quelquefois
le prognoftic le mieux fondé, il meurt avant
le tems ordinaire 8c fans que les lignes mortels
ayent précédé, ou par une paflion d’ame, ou par
quelque dérangement interne qu’on ne fauroit prévoir
: on voit des exemples de cette mort dans quelques
fievres malignes, ceux qui en font attaqués
meurent dès le troifieme ou quatrième jour, au
grand étonnement des afliftans 8c du médecin même
qui ne s’attendoit à rien moins; le cadavre ouvert
ne laiffe appercevoir aucune caufe de mort, pas
le moindre vice dans aucun vifeere: ces cas méritent
d’être férieufement examinés ; n’y a - t - i l pas
lieu de foupçonner qu’on fe preffe trop d’ouvrir 8c
d’enterrer ceux qui font morts ainfi?
MO R
IV. La morrqui doit être uniquement appellée morr
de maladie, eft celle qui arrive dans les derniers
tems, lorfque les fymptomes, les accideûs, lafoi-
bleffe font parvenus au plus haut période ; dans les
maladies aiguës, la mort arrive d’ordinaire dans le
tems où la maladie ayant parcouru fes différens
périodes, fe termineroit par quelque crife falutaire
fi elle avoit tourné heureufèment ; de façon qu’on
peut la regarder comme une des terminaifons des
crifes de la maladie où la nature a eu le deffous.
On pourroit juger 8c raifonner d’une fievre aiguë
comme d’une inflammation; car comme cette affè-
ôion locale fe termine par la réfolution j ou par la
fuppuration, ou enfin par la gangrener de même
les maladies aiguës fe guériffent entièrement ou dégénèrent
en maladies chroniques, ou enfin finiffent
par la mort de tout le corps ; en approfondiffant
cette matière on trouveroit beaucoup de rapport
dans la façon dont cës différentes terminaiions
s’opèrent dans l’un 8c l’autre cas. Voyeç Inflamm
a t io n & Maladie aigue; Toutes les maladies
aiguës fe reffemblent affez par leurs caufes , leur
marche, leurs effets , 8c leur terminaifon ; elles ne
me paroiffent différer qu’accidentellement par un
fiege particulier, par la lelion fpéciale, primitive ,
chronique de quelque vifeere, par l’altération plus
ou moins forte du fang, Caufes qui en rendent le
danger plus ou moins preffant. L’effet le plus heureux
, le plus complet de l’augmentation qu’on ob-
ferve alors dans le mouvement du fang, du coeur
& des arteres , eft de rappeller ou de fuppléer l’excrétion
dont la fuppreflion avoit donné naiffance
â la maladie, de corriger 8c de refondre, pour ainfi
dire, les humeurs, 8c enfin de rétablir l’exercice
des organes affe&és, Lorfque la gravité du mal, le
dérangement confidérable des vifeeres, la foibleffe
des forces empêchent la réuflîte de ces efforts, l’altération
du fang augmente, il ne fe fait aucune coc-
tion, ou elle n’eft qu’imparfaite, fuivie d’aucune
excrétion ; le fang n’obéit que difficilement aux
coups redoublés du coeur 8c des vaiffeaux, 8c leurs
pu Rations deviennent plus fréquentes, à mefure
que la lenteur du mouvement du fang augmente,
les obftacles oppofés à la circulation fe multiplient,
les forces continuellement diffipées 8c jamais réparées
vont en décroiffant ; le mouvement progreflif
du fang diminue peu - à - peu, 8c enfin celle entièrement;
les. battemens du coeur 8c des arteres font
fufpendus, la gangrené univtrfelle fe forme, 8c la
mort eft décidée. Tous ces changemens que nous
Venons d’expofer fe manifeftent par différens lignes
qui nous font connoître d’avance le fort funefte
de la maladie. Il ne nous eft pas pofîible d’entrer
ic i dans le détail de tous les lignes mortels, qui varient
dans les différentes maladies, on pourra les
trouver expofés aux articles de feméiotique, comme
pouls, refpiration, urine, &c. dont on les tire,
de aux maladies qu’ils caraôérifent : nous n’en rapporterons
à préfent que quelques généraux qui fe
rencontrent prelque toujours chez les mourans,qui
précèdent 8c annoncent une mort prochaine. La
phyfionomie préfenie un coup - d’oeil frappant, fur-
tout pour le médecin expérimenté, dont les yeux
font accoutumés à l’image de la mon; une pâleur
livide-défigure le vifage ; les yeux font enfoncés,
obfcurs, recouverts d’écailles, la pupile eft dilatée,
les tempes font affaiffées, la peau du front dure, le
nez éffiié, les levres tremblantes ont perdu leur coloris
; la refpiration eft difficile, inégale yfttrcoreufe ;
le pouls eft foible, fréquent, petit, intermittent ;
quelquefois les pulfations font allez élevées, mais
on fent un vuide dans l’artere, le doigt s’y enfonce
fans refiftance ; bien-tôt après le pouls fuit de deffous
le doigt ; les pulfatiqns femblent remonter :
Tome X %
M O R 7*3
elles deviennent infenfibles au poignet ; en appliquant
la main au pli du coude, lorfque l’artere n’eft
pas trop enfoncee ,on les y apperçoit encore ; c’eft
un axiome propofé par Hippocrate, 8t fort accrédité
chez le peuple, que la mort ne tarde pas lorfque le
pouls eft remonté au coude, enfin tous ces battemens
deviennent imperceptibles, le nez, les oreilles 8c les
extrémités font froides * on n’apperçoit plus qu’un
léger fautillement au côté gauche de la poitrine,
avec un peu de chaleur, qui ceflent enfin tout-à-
fait , & le malade meurt dans des efforts inutiles
pour refpirer. Il n’eft pas rare de trouver dans les
cadavres des engorgemens inflammatoires , des dépôts,
des gangrenés dans'les vifeeres, qui ont fouvent
accéléré 8c déterminé la rnort\ ces defordres
font plutôt l’effet que la caufe de la maladie; il eft
cependant affez ordinaire aux médecins qui font
ouvrir les cadavres, d’appuyer fur ces accidéns fe-
condairës, fouvent effets de l’a rt, l’impofîibilité de
la gnérifôn, ils montrênt à des afliftans peu inftruits
tous ces defordres* comme des preuves de la gravité
de la maladie , & juftifient à leurs yeux leur
mauvais fucès. Il y à quelquèfôis des maladies pefti-
lentielles, des fievres malignes qui fe terminent an
trois ou quatrième jour par la rriort; le plus fouvent
on trouve des gangrenés internes, caufes fuffifantes
de mort. Ces gangrenés paroiffent être une foiirce
d’exhalaifons méphitiques, - qui fè portant fur les
nerfs, occafionnent un relâchement mortel ; ce*
maladies fi promptes femblent aufîi attaquer fpécia-
lement les nerfs, & empêcher principalement leur
aâion ; le fymptôme principal eft une foibleffe extrême
, un affaiffement fingulier ; on peut rapporter
à la mort qui termine les maladies aiguës, celle qui
eft déterminée par une abftinence trop longue»
qui fuit l’inanition ; il eft bien difficile de décider
en quoi 8c comment les alimens donnent, entretiennent
& rétabliffent les forces ; leur effet eft certain
, quoique la raifon en fôit inconnue : dès qu’on
cefle de prendre des alimens,' ou qu’ils ne parviennent
point dans le fang , ou enfin quand la nutrition
n’a pas lieu, les forces diminuent, les mouvemens
ne s’exécutent qu’avec peine 8c làffitude, les
contrarions du coeur s’affoibliffent, lé mouvement
inteftin du fang n’étant pas retenu par l ’abord continuel
d’un nouveau chyle, fe développe, les différentes
humeurs s’altèrent, la falive acquiert une
âcreté très-marquée, la machine s’affaiflë infenfi-
blement, les défaillances font fréquentes, la foibleffe
exceflive, enfin le malade relie enfeveli dans
une fyncope éternelle.
Dans les maladies chroniques la mort vient plus
lentement que dans les aiguës , elle 1e préparé de
loin, 8c d’autant plus sûrement ; elle s’opère à-peu-
près de même ; quand la maladie chronique eft
prête à fe terminer par la fanté ou par la mort, elle
devient aiguë. Toute maladiè chronique qui eft établie
, fondée fur un vice particulier, une obftruftion
de quelques vifeeres, fur-tout du bas-ventre , qui
donne lieu à l’état cachettique qui les accompagne
toujours, à des jauniffes^ dès hydropifies, &c. qui
empêche toujours là nutrition, la parfaite élaboration
du fang, de façon qu’il eft rapide, fans ton,
fans force, 8c fans activité ; le mouvement inteftin
languit, les nerfs font relâchés, les vaiffeaux affaiblis,
peu ienfibles, la circulation eft dérangée ; les
forces, produit de l’aâion réciproque de tous les vif-
céres manquent, diminuent de jour en jour, le pouls
eft concentré, muet, &confervant toujours un cara-
ftere d’irritation ; lorfque la maladie tend à fa fin
il devient inégal, intermittent, foible, 8t fe perd
enfin tou t-à-fa it; ii ne fera pas difficile de comprendre
pourquoi la lefion d’un vifeere particulier
entraîne la ceflation des mouvemens vitaux, fi l’on