dans une chapelle. Au milieu du fermon, le cadavre
parut animé, fit quelques mouvemens qui engageront
à le reporter chez lui ; de façon, ajoutel’hifto-
rien de ce fait, que fans le fermon on aurait enterré un
homme vivant, ou qui étoit prêt à le devenir. Ibid.
tom.I.p. Sx. Diemerbroek rapporte qu’un payfan
étant mon de la pelle, on fe préparoit à l’enterrer
après les vingt-quatre heures, fuivant l’ufage ; le
défaut de cercueil fit différer jufqu’au lendemain ;
te lorfqu’on voulut y mettre le corps, on s’apperçut
qu’il commençoit à reprendre l’ufage de la vie. Enfin,
il y a eu des personnes qui rappellées à la vie
dans le tombeau , en ont été retirées, ont été affez
heureufes pour faire entendre leurs cris à des gens
que le halard amenoit dans le voifinage. Ainfi un régiment
d’infanterie étant arrivé à D o le , plufieurs
l'oldats manquant de logemens, obtinrent la permif-
lion de fe retirer dans l’églife, te de coucher furies
bancs garnis du parlement te de l’univerfité ; quelques
foldats entendirent pendant long-tems des
plaintes qui fembloient fortir d’un tombeau ; ils
avertirent le clerc, on ouvre un caveau où l’on a voit
enterré le jour même une fille, onia trouve vivante
, &c.
Quelques enfans étant allés jouer fur le tombeau
d’un homme récemment enterré, furent épouvantés
du bruit qu’ils entendirent ; ils racontèrent la caufe
de leur frayeur ; on exhuma la perfonne qui étoit
pour lors en vie. Il eft évident que fi ces perfonnes
euffent été enterrées dans un cimetiere te couvertes
de terre, elles n’auroient pû faire- entendre leurs
cris ; & même fans les circonftances imprévues qui
fe rencontrèrent, elles feroient mortes de nouveau.
Quels affreux foupçons ne font pas naître de pareils
événemens fur le fort d’une infinité de perfonnes
qu’on enterre trop promptement, te fans beaucoup
de précautions, fans attendre fur-tout que la putré-
faftion manifeflée ait décidé leur mort irrévocable.
Il arrive de-là que plufieurs meurent abfolument,
qui auroient pû revivre fi on eût apporté à propos
des fecours convenables, ou du-moins fi on ne les
avoit pas privés d’air en les enfeveliffant fous la
terre, ou en les mettant dans des caveaux qui font
des efpeces de mouffetes ; d’autres au contraire, ce
qui eft encore plus terrible , revenus d’eux-mêmes
à la v ie , ne peuvent faire venir leurs plaintes à
ceux qui pourroient les fecourir, les tirer du tombeau
où ils font renfermés fans nourriture , ne revivent
que pour mourir encore plus cruellement
dans toutes les horreurs de’ la faim te du defefpoir.
On voit en effet fouvent en exhumant les corps
après plufieurs mois, qu’ils font changés de place,
de pofture, de fituation ; quelques-uns paroiffent
avec les bras, les mains rongées de rage. Dom Cal-
met raconte fur la foi d’un témoin oculaire, qu’un
homme ayant été enterré dans le cimetiere de Bar-
le-Duc, on entendit du bruit dans la foffe ; elle fut
ouverte le lendemain, & on trouva que le malheureux
s’étoit mangé le bras. On vit à Alais le cercueil
d’une femme dont les doigts de la main droite
étoient engagés fous le couvercle de fon cercueil
qui en avoit été foulevé. Le dofteur Crafft fait mention
d’une demoifelle d’Ausbourg, qui étant morte
d’une fuffocation de matrice, fut enterrée dans un
caveau bien muré ; au bout de quelques années on
ouvrit le caveau, l’on trouva la demoifelle fur les
degrés près de l’ouverture , n’ayant point de doigts
à la main droite. Cette hiftoire eft fort analogue à
celle d’un religieux carme, qui ayant été enterré
depuis long-tems, fut trouvé à l’entrée du caveau
les doigts écorchés , & la pierre qui bouchoit l’ouverture
un peu dérangée ; mais ce qui doit confirmer
& augmenter ces foupçons, c’eft le long inter-
yalle qui peut s’écouler entre la mort imparfaite te la
mort abfolue, c’eft-à-dire , depuis le tems où les organes
ont ceffe leurs mouvemens, jufqu’à celui où
ils perdent l’aptitude à les renouveller. On a vu
qu’il n’eft pas rare de revivre après deux ou trois
joursA» 1 exemple de myladi Rouffel prouve qu’on
peut être pendant fept jours dans l’état de mort imparfaite.
Il y a desobfervations inconteftables de noyés,
qui ont refté trois, quatre, te cinq jours fous l’eau.
On lit dans les mélanges des curieux de la nature, un
fait attefté par Kunkel, touchant un jeune homme
qui étant tombe dans l’eau, n’en fut retiré qu’après
huit jours ; te Pechlin affure qu’un jeune homme fut
pendant plus de quarante-deux jours enfeveli fous
les eaux, te qu’enfin retiré la feptieme feinaine , fp -
tima daman hebdommada extraclitm , on put le rap-
pelier à la vie. Ces réfurreélions qu’on pourroit regarder
comme des miracles de la Médecine, paffe-
ront pour des fiûions, pour des événemens fuppo-
fés dans l’efprit de quelques leéteurs, qui confondant
les bornes du poffible avec celles de leur con-
noiffance, ignorent que le vrai peut bien fouvent
n etre pas vraifl’emblable. Tous ces faits ^quelque
merveilleux qu’ils paroiffent, n’ont rien qtie de naturel
& de conforme aux lois de l’économie animale:
les anciens avoient déjà obfervé qu’on peut refter
fans pouls te fans refpiration pendant très long-
tems ; ils ont même décrit une maladie fous le nom
à'dnvoç , qui veut dire fans refpiration, où ils affurent
qu’on peut être pendant trente jours fans aucun ligne
de vie , ne différant d’un véritable mort, que par
1 abfence de la putrefa&ion. II y a un traité grec fur
cette maladie, 7Ttf/T)7ç aTn»«, que Galien, Pline, te
Diogene de Laerce, croient avoir été cqmpofé par
Héraclide de Pont, te que Celfe attribue à Démçÿ
crite. Cet ouvrage fut fait à l’occafion d’une femme
qui reprit l’ufage de la v ie , après avoir été pendant
fept jours fans en donner la moindre marque.
L’hiftoire naturelle nous fournit dans les animaux
des exemples qui confirment ceux que nous avons
rapportés : tout le monde fait que les loirs relient
pendant tout l’hiver au fond d’une caverne, ou enterrés
fous la neige, fans manger & fans refpirer ; te
qu’après ce tems lorfque la chaleur revierit, ils for-
tent de l’engourdiffement ; parfaite image de la mort
dans laquelle ils étoient enlèvelis : plufieurs oifeaux
paffent auffi tout l’hiver fous les eaux ; telles font
les hirondelles entre autres, qui loin d’aller fuivant
l’erreur populaire fort accréditée, dans des climats
plus chauds, fe précipitent au fond de la mer, des
lacs, te des rivières , & y paffent ainfi fans plumes
& fans vie jufqu’au retour du printems, lorfque la
chûte des feuilles annonce les approches du froid,
dit un poète latin.
Avolat ( hirundo ) & fe crédit aquis pracepfquefub
illas
Merfa , in dumofâ mortua valle jacet
Flebilis, exanimis, deplumis, nuda, neque ullam
Vivifoci partem m&Jta caloris habens
E t tamen huic redeunt in fenfus munera vitre ,
Cum novus herbofam jlofculus ornât humum , &c.-
David Herlicius, épigram. lib. VI.
M, Falconet, médecin de Paris , étant en Breffe,
vit apporter une maffe de terre que les pêcheurs
avoient tirée de l’eau ; te après l’avoir lavée & débrouillée
, il apperçut que ce n’étoit autre chofe
qu’un amas d’hirondelles qui approchées du feu fe
déroidirent te reprirent la vie. On lui affura qu’il
n’étoit pas rare d’en pêcher de la forte en cette province.
Traité de l'incertitude , &c. tome I. page 131.
Tous ces faits vérifient bien la remarque de Pline ,
qui fert d’épigraphe à l’ouvrage de M. Bruhier:
« telle eft la condition des hommes , dit ce favant
» naturaiifte K ils font expofés à des jeux de hafard,
» tels
» tels qu’on nè peut même fe fier à la mort
Caujes. Il n’eft pas poffible de déterminer quelles
font les caufes qui occafionnent la mort, te quelle
eft leur maniéré d’agir, fans connoître auparavant
celles qui entretiennent cette continuité & cette réciprocité
d’aétions qui forment la vie. Voye^ V ie ,
Économie animale. On peut regarder du-moins
dans l’homme, te dans les animaux dont la ftruchire
eft à-peu-près femblable, la circulation dufang ou le
mouvement du coeur te des arteres,comme le ligne le
plus affuré , la mefure la plus exaéle, te la caufe la
plus-évidente de la vie. Deux autres fon&ions fur-
nommées aufii vitales , favoir la refpiration te l’action
du cerveau, concourent effentiellement à l’intégrité
dé cette première , qui eft la fonction par
excellence. La nécelîité de la refpiration eft fondée
fur ce que tout le fang qui va fe distribuer dans les
différentes parties du corps , eft obligé, depuis l’inf-
tant de la naiffance , de paffer par les poumons :
auffi dès que le mouvement de ce vifeere, fans lequel
ce paffage du fàng ne peut avoir lieu , vient à
ceffer , la circulation eft entièrement arrêtée par
tout le corps , le coeur & les .arteres eeffent tout de
fuite leurs battemens ; te ce qu’il y a de remarquable
, c’eft que dès le moment qu’on fait recommencer
la refpiration , on renouvelle les Contractions
alternatives du coeur. Quelques écrivains, obferva-
teurs peu exaéts te anatomiftes mal inftruits , ont
penfé que dans les perfonnes qui reftoient long-tems
fans refpirer, le trou ovale ouvert te le canal artériel
conîervant les propriétés & les ufages qu’il avoit
dans le foetus, fuppléoient à la refpiration , en donnant
lieu à une circulation particulière , telle qu’on
l ’obferve dans le foetus ; mais c’eft un fait gratuitement
avancé, qui n’a d’autre fondement que la difficulté
de trouver une explication plus conforme aux
préjugés qu’on s’eft formé fur les caufesde la vie te
de la mort. Il eft d’ailleurs contraire auxobfervations
anatomiques te à l’expérience qui fait voir que dans
les noyés te les pendus, les mouvemens du coeur te
les arteres ne font pas moins interceptés que ceux
des organes de la refpiration. On n’a encore rien
de bien décidé fur la maniéré dont le cerveau influe
fur les organes de la circulation ou c^e la vie :
le fluide nerveux fi univerfellement admis n’eft appuyé
fur aucune preuve fatisfaifante ; & le folidifme
des nerfs rejetté fans examen plus conforme au témoignage
des fens & à la plûpart des phénomènes
de l’économie animale, fouffre encore quelques difficultés
; mais quel que foit le méchanilme de cette
aélion, il eft certain qu’elle eft néceffaire au jeu des
nerfs : les obfervations te les expériences concourent,
à prouver la néceffité d’une libre communication
des nerfs cardiaques entre le cerveau te le coeur,
pour continuer les mouvemens de cet organe ; mais
il eft à-propos de remarquer què le coeur continue
de battre quelquefois affez long-tems, malgré la ligature
, la fedion , i’entiere deftru&ion de tous ces
nerfs ou d’une grande partie. "WH lis lia dans un chien
les nerfs de la paire vague ou de la huitième paire,
q u i, de concert avec les rameaux de Tintercoftal,
vont former le plexus cardiaque te fe diftribuer au
coeur ; le chien après cette opération tomba muet,
engourdi, eut des friffons , des mouvemens convul-
fifs dans les hypocondres : ces mêmes nerfs entièrement
coupés, il ne laiffa pas de vivre plufieurs jours,
refufant conftamnaent de manger. Cerebr. anatom.
page 23 4. Lower a réitéré cette expérience avec le
même fuccès, de corde, pag. c/o. Vieuffens eft encore
allé plus loin, pour ôter lieu à tout vain fubterfuge:
il coupa ces nerfs & ceux qui concourent à la formation
de Tintercoftal; te malgré cela le chien qu’il
fournit à ce martyre philofophique vécut plus de vingt
heures. Nevrograph. pag, iyg. On oblçrve que les
Tome X i
jeunes animaux , plus muqueux & par cônfcquenf
plus irritables, réfiftent encore plus long-tems à ces
épreyves ; ils font beaucoup plus vivaces. Il eft certain
que dans les apoplexies fortes Tadion du cerveau
eft très-dérangée , louvent anéantie : il arrive ce-*
pendant quelquefois que le coeur continue de battre
à l’ordinaire, tandis que tous les autres mouvemens
font interrompus.L’exemple d’une perfonne qui garda
pendant long-tems un abfcès au cervelet, joint
aux expériences que nous avons rapportées,font voir
évidemment que l’ingénieufe diftindion des nerfs
qui naiffent du cervelet d’avec ceux qui tirent leur
origine du cerveau , fondement peu folide de la fàâ
meufe théorie des maladies loporeufes propofée par
Boerrhaave , fi accréditée dans les écoles, que cette
diftindion,dis-je, eft purement arbitraire, abfolument
nulle. Il réfulte de là que la caufe du mouvement
du coeur ne réfide point dans les nerfs qui s’y diftri-
buent ; ils ne me paroiffent avoir d’autre ufage que
celui de produire te d’entretenir fon extrême & fpé-
ciale contradilité,principe fondamental & néceffaire
de tout mouyement animal. Voye%_Sensibilité. Le
principal, ou pour mieux dire Tunique moteur ad if
du coeur, eft le fang qui y aborde ,qui irritant les parois
fenfibles des ventricules , en détermine confé-
quemment aux lois de l’irritabilité les contradions
alternatives. Voye^ Coeur. Ce que je dis du coeur
doit s’appliquer aux arteres qui fuivent les mêmes
lois, te qui femblent n’être qu’une continuation ou
une multiplication de cet organe.
Toutes les caufes de mort tendent à fufpcndre les
mouvemens du coeur , les unes agiffant fur les nerfs
ou fur le cerveau , attaquent te détruifent Tirritabi-
lité , paralyfent pour ainfi dire le coeur , le rendent
infeniible à Timpreffion du fang , ou le mettent hors
d’état d’exécuter les mouvemens accoutumés ; les
autres oppofent des obftacles invincibles à Texpul-
fion du fang , ou erfipêchent fon retour dans les ven-*
tricules. On peut compter quatre efpeces , quatre
caufes générales de mort, ou quatre façons particulières
de mourir : i ° . la mort naturelle ou de vieil-
leffe ; 20. la mort violente ; 30. la mort fubite ; 40. la
mort de maladie, qui fe rapportent aux deux caufes
premièrement établies.
I. La mort de vieilleffe eft celle qui arrive naturellement
aux vieillards décrépits, par le défaut des
organes propres à cet âge, indépendamment de toute
maladie étrangère. Quelques auteurs auffi peu au fait
de la vraie morale que de la faine phyfique, pour
trouver une raifon de cette mort, ont èu recours à
des caufes finales toujours incertaines, à des volontés
expreffes de Dieu ; ayant à expliquer comment
on mouroit dans ces circonftances , ils ont mal déterminé
le pourquoi : d’autres, auffi mauvais phyfi-
ciens, ont gratuitement attribué cette mort aux fatigues
de Tanie, au dégoût qu’ils lui ont fuppofé det
refter trop long-tems emprifonnée dans notre frêle
machine. Van-Hclmont Ta déduit de l’extin&ion de
la flamme vitale te du chaud inné : cette idée eft
du-moins plus naturelle, mais elle n’explique encore
rien. 11 refte à déterminer quelle eft la caufe de cette
extinâion.
On trouve dans la ftruchire du corps humain &
dans l’examen de fes propriétés , des raifons très-
fimples de cette mort : on n’a qu’à obferverles chan-
gemens qui arrivent dans l’organifation du corps te
dans le méchanifme des fondions lorfque l’âge augmente
, on verra que depuis le premier inftant que
Ton commence à vivre , les fibres deviennent plus
fortes , plus ferrées , moins fenfibles , moins irritables.
Dans la vieilleffe > la plûpart des petits vaif-
feaux s’oblitèrent, les vifeeres fe durciffent, les le-
crétions diminuent, la peau n’eft plus humeâée, la
maigreur augmente de plus en plus jufqu’au point;
YYyy.