tent pas d’en douter. Il employa le premier les cantharides
en qualité de véficatoires , 6c eut pour imitateur
Archigenes. « Nous nous fervons du cata-
» plafme où elles entrent, dit ce dernier dans Ae-
» tius, parce qu’il produit de grands effets, pourvu
» que les petits ulcérés demeurent ouverts, & qu’ils
» fluent ; mais il faut avec foin garantir la vefîie par
» l’ufage du la it, tant intérieurement qu’extérieu-
» rement ».
Arétée n’avoit pas moins de modeftie que de fa-
v o ir , comme il paroît par fon détail d’une hydro-
pifie véficulaire, dont les autres médecins n’avoient
point parlé. 11 rapporte ailleurs le cas d’une maladie
encore plus rare. « Il y a , dit-il, uneefpece de
»manie dans laquelle les malades fe déchirent le
» corps, 6c fe font des incifions dans les chairs,
» pouffés à cette pieufe extravagance par l’idée de
» fe rendre plus agréables aux dieux qu’ils fervent,
» & qui demandent d’eux ce facrifice. Cette efpece
» de fureur ne les empêche pas d’être fenfés fur d’au-
»tres fujets : on les guérit tantôt par le fon de la
» flûte, tantôt en les enivrant ; 6c dès que leur ac-
» cès eft pâlie , ils font de bonne humeur, 6c fe
» croient initiés au fervice de Dieu. Au refte, con-
» rinue-t-il, ces fortes de maniaques font pâles, mai-
» grès, décharnés, &leur corps demeure long-tems
» affoibli des bleflures qu’ils fe font faites ».
Ce n’eft point ici le lieu de parler de l’anatomie
d’Arétée ; il fuffit de remarquer qu’il a coutume de
commencer chaque chapitre par une courte defcrip-
tion anatomique de.la partie dont il va décrire les
maladies.
Junius Publius Crafliis mit au jour une traduâion
latine de cet illuftre médecin, à Venife en 1552.
in-40. mais l ’édition greque de Goupylus, faite à
Paris en 1554. in-8\ eft préférable à tous égards.
Elle a été fuivie dans les artis medicoe principes de
Henri Etienne, en 1567. in-fol. Dans la fuite des
tems, Jean Wigan fit paroître à Oxford en 1723.
in-fol. une exa&e 6c magnifique édition d’Arctée :
cette édition ne cede le pas qu’à celle de Boerhaave,
publiée Lugd. Bat. in-fol.
Artorius, que Cælius Aurelianus a cité comme
fuccefleur d’Afclépiade , eft vraiffemblablement le
même médecin que celui que Suétone & Plutarque
ont appellé l’ami d’Àugufte, 6c qui fauva la vie à
cet empereur à la bataille de Philippe, en lui çon-
feillant ( apparemment d’après les defirs des militaires
éclairés ) de fe faire porter fur le champ de
bataille tout malade qu’il étoit, ou qu’il feignoit
d’être. Ce confeil fut heureufement fuivi par Au-
gufte ; car s’il fût demeuré dans fon camp, il feroit
infailliblement tombé entre les mains de Brutus, qui
s’en empara pendant l’a&ion. Quoiqu’Artorius ne fe
foit point illuftré dans fon art par aucun ouvrage ,
tous ceux qui ont écrit l’hiftoire de la Médecine, en
ont fait mention avant moi.
Afclépiadc , médecin d’une grande réputation à
Rome pendant la vie de Mitridate, c’eft-à-dire, vers
le milieu du fiecle xxxix. Cet Afclépiade n’étoit pas
de la même famille des Afclépiades, c’eft-à-dire des
enfans d’Afclépius, qui eft le nom grec d’Efculape ;
nous en parlerons tout-à-l’heure dans un article à
part. Il s’agit ici d’Afclépiade, qui remit en crédit
dans Rome la Médecine qu’Archagatus médecin
grec y avoit fait connoître environ 100 ans auparavant.
Afclépiade étoit dePrufe en Bithinie, & vint s’établir
à Rome à l’imitation d’un grand nombre d’autres
grecs qui s’étoient rendus dans cette capitale du
monde, dans l’efpérance d’y faire fortune. Afclépiade
pour fe mettre en crédit, condamna les re-
medes cruels de fes prédécefleurs, & n’en propofa
que de fort doux, difantpvec efprit, qu’un médecin
doit guérir des malades promptement 6c agréablement
; méthode charmantey.is’il étoit poifible de
n’ordonner rien que d’agréable, &c s’il n’y avoit ordinairement
du danger à vouloir guérir trop vite.
Ce nouvel Efculape ayant réduit toute la fcience
d’un médecin à la recherche des caufes des maladies
, changea de face l’ancienne médecine. Il la
borna félon Pline, à cinq chefs, à des remedes doux,
à l’abftinence des viandes , à celles du vin en certaines
occafions, aux frifrions, &c à la promenade : il
inventoit tous les jours quelque chofe de particulier
pour faire plaifir à fes malades.
Il imagina cent nouvelles fortes de bains, & entre
autres des bains fufpendus ; en forte qu’il gagna ,
pour ainfi dire, tout le genre humain, 6c fut regardé
comme un homme envoyé du ciel. Quoique tous
ces éloges partent de l’efprit de Pline, qui n’eft guère
de fang froid quand il s’agit de louer ou de blâmer,
il eft vrai cependant que le témoignage de l’antiquité
, eft prefque tout à l’avantage d’Afclépiade.-
Apulée, Scribonius Largus, Sextus Empiricus, &
Celfe, en font beaucoup de cas ; mais pour dire quelque
chofe de plus, il étoit tout enfemble le médecin
6c l’ami de Cicéron, qui vante extrêmement fon
éloquence ; ce qui prouve que ce médecin n’avoit
pas quitté fon métier de rhéteur, faute de capacité.
Mal,heureufement les écrits d’Afclépiade ne font
pas parvenus julqu’à nous ; & c’eft une perte, parce
que, s’ils n’étojent pas utiles aux Médecins, ils fer-
viroient du-moins aux Philofophes à éclaircir les
écrits que nous avons d’Epicure, de Lucrèce, & de
Démocrite. Il ne faut pas confondre notre Afclépiade
avec deux autres de ce nom cités par Galien, &
dont l ’un fe diftingua dans la compofition des médi-
camens appelles en grec pharmaca.
Afclépiades, Afclepiadoe c’eft ainfi qu’on a nommé
les defeendans d’Efculape, qui ont eu la réputation
d’avoir confervé la Médecine dans leur famille
fans interruption. Nous en faurions quelque
chofe de plus particulier, fi nous avions les écrits
d’Eratoûhènes , de Phérécides, d’Apollodore, d’A-
rius de Tarfe, 6c de Polyanthus de Cyrène, qui
avoient pris le foin de faire l’hiftoire de ces defeendans
d’Efculape. Mais quoique les ouvrages de ces
auteurs fe foient perdus, les noms d’une partie des
Afclépiades fe font au moins confervés, comme le
juftifie la lifte des prédécefleurs d’Hippocrate, dix-
huitieme defeendant d’Efculape. La généalogie de
ce grand homme fe trouve encore toute dans les
Hiftoriens. On penfera fans doute que cette généalogie
eft fabuleufe ; mais outre qu’on peut répondre
qu’elle eft tout aulfi autentique que celle de la
plupart de nos grands feigneurs, il eft du-moins certain
, qu’on connoifloit avant Hippocrate, diverfes
branches de la famille d’Efculape, outre la fienne ;
6c que celle d’où ce célébré médecin fortoit, étoit
diftinguée par le furnom d * Afclépiades Xébrides, c’eft-
à-dire de Xébrus.
On comptoit trois fameufes écoles établies par
les Afclépiades : la première étoit celle de Rhodes ;
6c c’eft aulfi celle qui manqua la première, par le
défaut de cette branche des luccefleurs d’Efculape ;
ce qui arriva, félon les apparences, long-tems avant
Hippocrate, puifqu’il n’en parle point comme il fait
de celle de Gnide, qui étoit la troifieme, 6c de cell$.
de Gos, la fécondé. Ces deux dernieres fleurifloient
en même tems que l’école d’Italie, dont étoit Pytha-
gore, Empédocle, & d’autres philofophes médecins,
quoique les écoles greques fuflent plus anciennes.
Ces trois écoles, les feules qui fiflent du bruit,'
avoient une émulation réciproque pour avancer les
progrès de la Médecine, Cependant Galien donne la
îa première place à celle de Cos, comme ayant pro*
duitleplus grand nombre d’exceUens difciples ; celle
de Gnide tenoit le fécond rang , 6c celle d’Italie le
troifieme. Hérodote parle aulfi d’une école d’Afclé-
piades établie.à Cyrène, où Efculape avoit un temple.
Enfin, le même hiftorien fait mention d’une
école de Médecine qui régnoit à Crotone, patrie de
Démoeede,. Voye{ D émqcede.
On connoît la méthode des Afclépiades de Gnide
par quelques pafiages d’Hippôcrate, dont on peut
recueillir , i°. que ces médecins fe contentoient de
faire une exaéle defeription des fymptomes d’une
maladie, fans raifonner fur les caufes, & fans s’attacher
au prognoftic ; i!°. qu’ils ne fe fervoient que
d’un très-petit nombre de remedes , qu’eux & leurs
prédécefleurs avoient fans doute expérimentés. L’é-
îatériùm, qui eft un purgatif tiré du concombre
fauvage , le.lait, & le petit-lait, faifoient prefque
toute leur médecine.
A l’égard des médecins de C o s , on peut aulfi
dire , que fi les prænotiones càdcce qui fe trouvent
parmi les oeuvres d’Hippocrate, ne font qu’un recueil
d’obfervations faites par les médecins de Cos,
comme plufi.eurs anciens l’ont cru ; il paroît que
cette école fuivoit les mêmes principes que celle de
Gnide, 6c qu’elle s’attachoit peu à la Médecine rai-
fonnée, c’eft-à-dire, à celle qui travaille à rechercher
les caufes cachées des maladies, 6c à rendre
raifon de l’opération des remedes.
Quoi qu’en dife Galien, les Afclépiades n’avoient
pas fait encore de grands progrès dans l’Anatomie
avant le tems d’Hippocrate ; mais la pratique de
l ’art leur fourniflbit tous les jours des occafions de
voir fur des corps vivans , ce qu’ils n’avoient pû
découvrir fur les morts, lorfqu’ils avoient à traiter
des plaies, des ulcérés, des tumeurs, des fraâurçs,
& des diflocations.
Athenée, natif d’Attalie 1 ville de Cilicie , fut'le
premier fondateur de la fede pneumatique. Ce médecin
parut après Thémifon, après Archigène , 6c
fleurit un peu de temps après Pline. Il penfoit que
ce n’eft point le feu , l’air, la terre & l’eau qui font
les véritables élémens ; mais il donnoit ce nom à ce
qu’on appelle les qualités premières de ces quatre
corps, c’eft-à-dire, au chaud , au froid, à l’humid
e , & a u fec ; enfin , il leur ajoutoit un cinquième
élément , qu’il appelloit efprit, lequel, félon lui,
pénétroit tous les corps , & les confervoit dans leur
état naturel. C ’eft la même opinion des Stoïciè,ns
que Virgile infinue dans ces vers de fon Ænéïde
l. VI.
Principio coélum ac terras , campofque liquentes ,
Lucentemque globum lunoe. , titàniaque aflra,
Spiritus intus alit : totamque infufa per artus "
Mens agitat molem , 6* magno fe corpore mifeet.
Athenée appliquant ce fyftème à la Médecine,
croyoit que la plupart des maladies furvenoient,
lorfque l’efprit dont on vient de parler, fouflre le
premier quelque atteinte : mais comme les écrits
de ce médecin , à l’exception de deux ou trois chapitres
qu’on trouve dans les recueils d’Oribaze, ne
font pas venus jufqu’à nous , on ne fait guere ce
qu’il entendoit par cet efprit, ni comment il con-
venoit qu’il fouffre. On peut feulement recueillir
de fa définition du pouls, qu’il croyoit que cet efprit
étoit une fubftance qui fe mouvoit d’elle-même
, & qui mouvoit le coeur & les artères. Galien
prétend qu’aucun des médefcins de ce tems-là n’avoit
fi univerfellement écrit, de la Médecine qu’A-
thenée.
• Aven^oar , médecin arabe, moins ancien qu’A-
vicenne, & qui a précédé Averrhoës qui le comble
d’éloges dans plus d’un endroit de fes ouvrages. Il,
Tome X %
naquit, ou du moins il demeuroit à Séville , capitale
de l’Andaloufie, où les califes mahômétans faifoient
pour lors leur réfidence. Il vécut beaucoup
au-delà de cent ans,, &. jouit d’une famé parfaite
jufqu’au dernier moment de fa vie , quoiqu’il eût
efliiyé bien des traitemens barbares de la paj;t d’Har
l y , gouverneur de Séville. Il paroît par fon livre
nommé thaifer, qu’il avoit la direflion d’un hôpital
,. & qu’il fut fouvent employé par le miramamo-
lin. Il montre dans le même ouvrage beaucoup de
favoir & de jugement. Il paroît méprifer toutes les
fubtilités des l'ophiftes, 6c regarder' l’expérience
comme le guide le plus sûr que l’on puifle jfuivre
dans la pratique de la Médecine. Mais attaché en
même tems à la fefte dogmatique, il raifonne avec
bon fens fur les caufes & les fymptomes des maladies.
Enfin , comme il prend Galien pour fon guide
dans la théorie médicinale , il ne perd aucune oe-
cafion de le citer. Son livre thaifler-ou theifir^
c’eft-à-dire, reclificatio mediçationis & regiminis , a
été imprimé à Venife en 1496. & 1514- in-fol.; On
l’a réimprimé avec fon antidotaire, 6c les collec-
tions d’Averrhoès, Lugduni , iSg 1. in-$°. ;
Averrhoès viyoit peu de tems après Aycnzoar.,
.puifqu’il nous apprend lui-même qu’il étoit en iiai-
fon avec fes enfans. Il mourut à Maroc, vers l’an
6po de l’hegyre , 6c fes ouvrages l’ont rendu célèbre
dans toute l’Europe. 11 naquit à C.ordoue , fut
élevé dans la jurifprudence , à laquelle -il préféra
l’étude des mathématiques. Il féconda par fon application
les talens qu’il tenoit de la nature , 6c fe
rendit encore fameux par fa patience 6c fa généralité.
Ilcompofa par ordre du miramamolin de Maroc
, fon livre fur la Médecine fous le nom de .collection
, parce que, de fon a veu , c’eft tut fimpje recueil
tiré des autres auteurs ; mais il y fait un grand
ufage de la philofophie d’Ariftote, qui étoit fon héros.
Il paroît être4e,prenfier auteur qui ait alluré
qu’on ne peut pas avoir deux fois la petite-vérole.
Bayle a recueilli un grand nombre de pafiages dans
différens auteurs au lujet d'Averrho'es , mais comme
il n’a pas cru devoir confulter les originaux pour
fon deflèin, il n’eft pas furprenant qu’il ait commis
autant de méprifes qu’il a fait de citations.
Les ouvrages d’Averrhoès font intitulés Collecla-
neorum de re medica,Lugduni, 1537. fol. Venetiis apud
JuntaSy 15 52 .fol. 6c fon commentaire fur Avicene.,
a aulfi vû le jour, Venetiis, 1555. z/z fol.
Avicennes, fils d’A ly , naquit à Bochara dans fa
province de Korafan ,v e r s l’an 980, & pafla la
plus grande partie de fa vie à Ifpahan ; il fit des progrès
fi rapides dans l’étude des Mathématiques 6c
de la Médecine , que fa réputation fe répandit de
toutes parts ; mais fon favoir ne put le détourner
des plaifirs,nides maladies qu’ils lui procurèrent ; il
mourut à l’âge de cinquante-fix ans, en 1036. à Médine.
Néander n’a fait qu’un roman de la vie de cet
auteur.
Le fameux canon d'Avicenne a été fi goûté, dans
toute l’A fie, que divers auteurs arabes du douzième
& treizième fiecles, l’ont commenté dans ce
tems-là : la do&rine de cet auteur. prit aulfi grand
crédit dans toute l’Europe, & s’eft foutenue jufqu’au
rétablilfement des lettres ; cependant fes ouvrages
ne renferment rien de particulier qui ne fe
trouve dans Galien, dans R azès, ou Haly Abbas-.
Ils ont été imprimés un grand nombre de fois à
Venife , & entre autres apud Juntas , en 1608. infol.
a vol. C ’eft la meilleure édition^ il eft inutile
d’indiquer les autres.
Câlins Aurelianus, médecin méthodique, a écrit
en latin. Il paroît à fon ftyle, qui eft allez particulier
, qu’il étoit africain , ce que le titre de fon ouvrage
achevé de confirmer. Il y eft appellé. Calius
N n