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naturel, par exemple , d’être lourd , à né pouvoir
pas entendre 4e fon de la trompette. On n’y avok
pas cependant beaucoup d’égard dans une guerre
imprévûe &c dangereufe.
Cette maniéré de -lever des foldats ceffa fous les
empereurs. Les levées dépendirent alors de l’ava-
rice ou du caprice de ceux qui les faifoient ; à quoi
on doit attribuer eh partie la ruine de l’empire romain.
La levée de la cavalerie étoit plus facile, parce
que tous les chevaliers étoient écrits fur lesregiftres
des cenfeurs ; on en prenoit trois cent pour chaque
légion. Il ne paroît pas qu’avant Marius une partie
de la cavalerie fût de l’ordre des chevaliers , & l’autre
compofée de citoyens particuliers qui fervoient
à cheval.
La levée des foldats étant faite, on en prenoit un
de chaque légion qui prononçoit les paroles du ferment
avant tous les autres, qui les répétoient en-
fuite. Par ce ferment, ils promettoient d’obéir au
général, de fuivre leur chef, & de ne jamais abandonner
leur enfeigne.
On ne les obligea à faire ce ferment que l’année
de la bataille de Cannes ; on leur demandoit feulement
auparavant s’ils ne promettoient pas d’o béir
, &c.
Les foldats alliés fe levoientdans les villes d’Italie
.par les capitaines romains, & les confuls leur indi-
quoient le jour & le lieu oit ils dévoient fe rendre.
Ces alliés fervoient à leurs dépens, les Romains ne
leur donnoient que du blé ; c ’eft pourquoi ils
»voient leurs quefteurs particuliers. Il ne faut pas
confondre avec les alliés les troupes auxiliaires qui
étoient fournies par les étrangers. Ceux qu’on ap-
pelloit evocati étoient des foldats vétérans , qui,
ayant accompli le tems de leur fervice, retournoient
à la guerre par inclination pour les commandans.
Ils étoient fort conlidérés dans l’armée, & exempts
des travaux militaires ; ils portoient même la marque
qui diftinguoit les centurions ; c’étoit un far-
ment.
Des ordres différens qui compofoient la milice. Les
chefs & les foldats compofoient deux différens ordres.
D ’abord il y avoit quatre ordres de fantaffins ;
favoir les vélites, qui étoient les plus pauvres & les,
plus jeunes citoyens : ce corps n’étoit pas fort confi-
déré,& on comptoitpeu fur lui. Après eux venoient
les piquiers, hajlati, îuivis desprincipes , jeunes gens
ainfi nommés, parce qu’ils commençoient le combat.
Enftiite venoient ceux qu’on appelloit triarii ou
pilant, parce qu’ils fe fervoient du javelot* Les derniers
s’appelloient antepilani: c’étoient les plus âgés
6 les plus expérimentés. On les plaçoit au troifieme
rang dans le corps de referve, & on n’y en mettoit
jamais plus de fix cens. On fubdivifoit ces corps en
dix compagnies appellées manipules, manipuli.
Chaque compagnie de piquiers & d’enfans perdus
étoit de deux centuries de foixante ou foixante-dix
hommes ; car on ne doit pas entendre par centurie
une compagnie précife de cent hommes , mais un
certain nombre d’hommes^ La compagnie des tria-
riens étoit de foixante hommes feulement. On com-
pofoit une cohorte de trois compagnies de chaque
ordre & d’une compagnie de frondeurs , ce qui fai-
foit quatre cens vingt hommes ; mais la cohorte ne
fut pas ordinaire dans le tems de la république , on
ne s’en fervoit que quand l’occafion l’exigeoit : d’une
-compagnie de chaque ordre on compofoit un corps,
qui étoit à-peu-près ce que nous nommons aujourd
’hui brigade.
La légion étoit compofée de dix cohortes du tems
de Romuius ; comme les cohortes étoient petites,
la légion étoit de trois mille hommes, & elle ne fut
3gue de quatre mille deux cens hommes tant que la
ïcpùblicjue fut libre ; mais elle devint beaucoup plus
grande dans la fuite : elle ne paffa cependant jamais
fix mille hommes. A chaque légion on joignoit toujours
trois cens chevaux qu’on appèlloit ailés , 6c
cette aile étoit diviféè en dix troupes nommées tur-
mot : chaque turme étoit divifée en trois décuries ou
dixaines.
Le nombre des fantaffins alliés égaloit & quelquefois
furpafioit celui des Romains , & la cavalerie
étoit deux fois plus nombreufe. Tous les alliés
étoient féparés en deux corps, que l’on mettoit auxs
deux côtés de l’armée : peut-être les plaça-t-on
ainfi, afin que s’ils vouloient entreprendre quelque
chofe contre les Romains, leurs forces fe trouvaffent
divifées. On choififfoit la troifieme partie de leurs
cavaliers, qui faifoit le nombre de deux cens, pour
être aux ordres des confuls , qui de ces deux cens ,
appellés extraordinaires , tiroient une troupe pour
leur fervir de garde. Les autres quatre cens étoient
diftribués en dix troupes. Les Romains fe condui-
foient ainfi en apparence pour faire honneur aux
alliés ; mais la véritable raifon étoit afin que les plus
diftingués, combattant fous les yeux du général
devinffent autant d’otages & de garants de la fidélité
des peuples qui les avoient envoyés ; & qu’en cas
qu’ils vouluffent faire quelque entreprife contre les
intérêts de la république , ils ne fuffent pas en état
d’en venir à bout.
La cinquième partie de l’infanterie ( ce qui faifoit
840 fantaffins ) étoit diftribuée en huit cohortes de
336 hommes, avec une demi-cohorte de gens d’élite
, ablccli, compofée de 168 foldats ; le refte étoit
divifé en dix cohortes de 336 hommes. Il eft incertain
fi les alliés étoient divifés par compagnies, ce
qui eft pourtant allez vraiffemblable : deux légions
avec les troupes des alliés & la cavalerie, failoient
une armée confulaire, qui étoit en tout de 18600
hommes.
Il y avoit des officiers particuliers &, des officiers
généraux : les officiers particuliers étoient les centurions
qui conduifoient les différens corps, ordinum
duclores. Les tribuns, par ordre des confuls, les choi-
fiffoient dans tous les ordres des foldats , excepté
dans celui des vélites , & on avoit fur-tout égard à
la bravoure. Ces centurions , pour marque de Ieur-
charge , portoient une branche de farment. Chaque
centurion choififfoit deux fous - centurions , qui
étoient à-peu-près comme nos lieutenans, & deux
enfeignes, gens diftingués par leur courage.
Les officiers s’avançoient, en paffant d’un ordre
dans un autre ; de façon que le centurion de la dixième
compagnie des piquiers montoit à la dixième
compagnie de ceux qu’on appelloitprincipes: decelle-
là il paffoit à la dixième de ceux qu’on appelloit triai-
res. Quand on étoit parvenu à la première compagnie,
un centurion, après avoir été le dixième, devenoit le
neuvième, le huitième, &c. jufqu’au grade de premier
centurion, ce qui ne pouvoit arriver que fort tard ;
mais celui qui avoit ce beau grade étoit admis au
confeil de guerre avec les tribuns : fon emploi con-
fiftoit à défendre l’aigle, d’où vient que Pline & Ju-
vénal fe fervent du terme d'aigle pour exprimer le
premier centurion. Il recevoit les ordres du général ;
il avoit des gratifications confidérables , & étoit fur
le pié de chevalier romain.
Les tribuns étoient au nombre de trois fous Romuius
, mais dans la fuite les légions ayant été com-
pofées d’un plus grand nombre de foldats , on fit fix
tribuns pour chaque légion. Ils furent choifis par
les rois dans le tems de la monarchie , & puis par
les confuls , jufqu’à ce que le peuple commença à
en créer fix l’an 345 , & feize dans l’année 444.
Après la guerre de Perfée , roi de Macédoine , les
confuls en nommèrent la moitié & le peuple l’autre«'
Du tems de Cicéron ils furent choifis dans les camps
mêmes par les confuls ou par les proconfuls. Quelquefois
les tribuns militaires avoient été préteurs.
Les empereurs commencèrent à faire des tribuns
de foldats pour fix mois feulement, afin qu’ils puffent
gratifier un plus grand nombre de perfonnes ; il y
en avoit même qu’on appelloit ladclavii, laticla-
viens, parce qu’ils devenoient fénateurs, comme le
difent Dion & Xiphilin : d’autres fe nommoient an-
gufliclavii, angufticlaviens , parce qu’ils ne pou-
voient afpirer qu’à l’ordre des chevaliers.
Les tribuns avoient pour marque diftindive une
efpece de poignard ou de couteau de chaffe ; leur
charge étoit de rendre la juftice , de recevoir le mot
du guet du général, de le donner aux autres , de
veiller fur les munitions , de faire faire l’exercice
aux troupes, de pofer les fentinelles, &c. Deux des
tribuns commandoient la légion chacun leur jour
pen.dant deux mois ; enforte que dans une armée
confulaire il y en avoit au moins quatre pour faire
exécuter les ordres du général. Ceux qui avoient
paffé par le tribunat militaire étoient cenfés chevaliers
, comme nous l’avons dit des premiers centurions
appellésprimopili, & ils portoient un anneau
d’or au doigt. Il y en avoit trois à la tête de chaque
corps dé cavalerie ; celui des trois qui avoit été
nommé le premier , commandoit tout le corps , &
dans fon abfence celui qui fui voit : ils fe choifiiToient
autant de lieutenant. Les alliés avoient leurs com-
mandans particuliers, qui étoient nommés par lès
confuls pour la fureté de la république.
Ceux qui avoient le commandement de toute l’ar-
jn é e, étoient le général & fes lieutenans ; le général
étoit celui à qui toute l’armée obéiffoit, qui faifoit
tout par lui-même, ou qui le faifoit faire fous fes
aufpices. Cette coutume fut toujours obfervée dans
les malheurs de la république, & c’étoit un ufaee
fort ancien de ne rien entreprendre qu’après avoir
pris les aufpices. Ce qui diftinguoit le général étoit
le manteau, mais il eft vraiffemblable qu’ils ne por-
toient qu’une cafaque 9fagum: ces mots du-moins fe
confondent fouvent.
Les lieutenans étoient ordinairement choifis par
les généraux ; il leur falloit cependant un decret du
fénatpbur cette éle dion. Ces lieutenans étoient pour
l’ordinaire d’un courage & d’une prudence confom-
mée : leur charge étoit auffi importante qu’honorable.
Nous Voyons dans l’hiftoire quel’ilIuftrcP. Cornélius
Scipion l’africain, qui fournit les Carthagi-
nois, avoit été lieutenant de Lucius fon frere § dans
la guerre contre Antiochus ; & l’an 5 56, P. Sulpicius
& P. Velleius , deux hommes confulaires, furent
lieutenans en Macédoine.
Le nombre des lieutenans varia plufieurs fois dans
les occafions : Pompée en eut 15 dans la guerre contre
les pirates, parce que cette guerre s’étendoit fur
toute la mer Méditerranée. Cicéron étant proconful
de C ilicie, en avoit quatre ; cependant on régloit ordinairement
le nombre des lieutenans fur celui des
légions : leur devoir étoit d’aider en tout le général
ce qui leur fit donner dans la fuite le nom de fous-
confuls. Leur pouvoir éto,it fort étendu, quoique
cependant par commiffion. Augufte étant général, &
ayant les aufpices fous lui feu l, fit tout par fes lieutenans
, & donna à quelques-uns le titre de confulai-
res ; ceux-ci commandoient toute l’armée, & les autres
qui conduifoient chaque légion , portoient le
nom de prétoriens.
Des armes de la milice romaine. Les armes chez les
Romains étoient défenfives & offenfives ; les offen-
fives étoient principalement le trait. Il y en eut de
bien des efpeces, félon les différens ordres des foldats.
. .
Tome
Les foldats armés à la legere , s’appelloient en
general ferentarii.
Les vélites qui furent créés l ’an 5 4 1 , cédèrent
quand on donna le droit de bourgeoilie à toute l’I-
talie ; on leur fubüitua les frondeurs Jundkom, S£
• les archers , jaculatores.
Les armes des vélites étoient premièrement le fa-
bre d’Efpagne, commun à tous les foldats. Ce fâbre
avoit une excellente pointe, & coupoit des deux
côtés ; enforte que les foldats pouvoient fe fervir du
bout & des deux tranchans. Du tems de Polybe ,
ils lé portoient à la cuiffe droite. Ils portèrent en fécond
lieu fept javelots ou demi-piques qui avoient
un doigt d epaiffeur, trois pieds de longueur , avec
une pointe de neuf doigts. Cette pointe étoit fi fine,
qu’on ne pouvoit renvoyer le javelot quand il avoir
été lancé , parce que la pointe s’émouffoit en tombant,
Ils portoient encore un petit bouclier de bois
d’un demi-pié de large, couvert de cuir. Leur cafque
étoit une efpece de chaperon de peau appellé gales
ou galerus, qu’il faut bien diftinguer des cafques ordinaires
qui étoient de métal, & qu’on appèlloit caf
fis ; cette forte de cafque étoit affez commune chez
les anciens*
Les armes des piquiers & des autres foldatsétoient
premièrement un bouclier qu’ils appelloientJcutum9
différent de celui qu’ils nommoient clipeus. Celui-ci
étoit rond, & l’autre étoit ovale ; la largeur du
bouclier etoit de deux pies & demi, & fa longueur
d environ quatre pies j de façon qu’un homme en
fe courbant un peu pouvoit facilement s’en couvrir«
parce qu’il étoit fait en forme de tuile creufe im-
bricatus. On faifoit ces boucliers,de bois pliant &
léger, qu’on couvroit de peau ou de toile peinte ;
c’e ft, dit-on, de cette coutume de peindre les armes,
que font venues les armoiries. Le bout de ce
bouclier étoit garni de fer, afin qu’il pût réfifter plus
facilement, & que le bois ne fe pourrît point quand
on le pofoit à terre. Au milieu du bouclier il y avoit
une efpece de boffe de fer pour le porter ; on y at-
tachoit une courroie.
Outre le bouclier, ils avoient le javelot qu’ils
nommoient/>i/<z r les uns étoient ronds & d’une grof»
feur a remplir la main j les autres étoient quarrés ,
ayant quatre doigts de tour & quatre coudées de
longueur. Au bout de ce bois étoit un fer à crochet
qui faifoit qu’on ne retiroit le javelot que très-difficilement
; ce far avoit à-peu-près trois coudées de
long ; il étoit attaché de maniéré que la moitié te-
noit au bois, & que l’autre fervoit de pointe : en
forte que ce javelot avoit en tout cinq coudées 8c
demie de longueur. L’épaiffeur du fer qui étoit attache
au bois, etoit d un doigt ôc demi, ce qui prouve
qu’il devoit être fort pefant, & propre à percer
tout ce qu’il atteignoit. Us fe fervoient encore d’autres
traits plus légers qui reffembloient à^peu-près à
des pieux.
Jls portoient un cafque d’airain ou d’un autre métal
, qui laiffoit le vifage nud ; d’où vient le mot de
Céfar à la bataille de Pharfale , foldats 9frappe{ ait
vifage. On voyoit flotter fur ce cafque une aigrette
de plumes rouges 8t blanches, ou de crin de cheval.
Les citoyens d’un certain ordre étoient revêtus d’une
cuiraffe à petites mailles ou chaînons , & qu’on appelloit
harmata ; on en faifoit auffi d’écaiiles ou de
lames de fer : celles-ci étoient pour les citoyens les
plus diftingués , & pouvoient couvrir tout le corps.
Héliodore en a fait une defeription fort exa&e ; cependant
la plûpart des foldats portoient des cuiraffes
de lames de cuivre de douze doigts de largeur, qui
couvroient feulement la poitrine.
Le bouclier , le cafque, la cuiraffe , étoient enrichis
d’or 8c d’argent, avec différentes figures qu’oa
gravoit deffus c’eft pourquoi on les portoit tou-
S $ s ij