11 n’en eft pas de même de ceux qui penfent être
transformés enbetes , qui ont des délires triftes , inquiets
; celui, par exemple, qui s’abftenoit de piffer
crainte d’inonder le monde, rifquoit beaucoup pour
fa fanté & pour fa v ie , en retenant un excrément
dont le féjour dans la veflie ou la fuppreffion peut
occalionner des maladies très-fâcheufes. Le déliré,
dit Hippocrate, qui roule fur les chofes néceffaires,
eft très-mauvais en général : il eft à craindre que
les vices du bas-ventre n’empirent, que la bile noire
ne fe forme 8c n’engorge ces vaiffeaux & même
fe mêle avec le fang ; l’épilepfie fuccedant aufli
quelquefois à la mélancholie. Les tranfports ou me-
taftafes des maladies mélancholiques, dit Hippocrate
, font dangereufes au printems & à l’automne ;
elles font fuivies de même, de convulfion , de mortification
ou d’aveuglement , aphor. 5G. lib. I I . il
y a beaucoup à efperer que la melancholie fera difli-
pée fi le flux hémorroïdal, les varices furviennent ;
les déjections noires, la galle, les differentes éruptions
cutanées , l’élephantiafis font aufli , fuivant
Hippocrate , d’un très-heureux augure.
I) faut dans la curation de la mclancholie , pour
que le fuccès'en foit plus affuré , commencer par
guérir l’efprit 8c enfuite attaquer les vices du corps,
lorfqu’on les connoît ; pour cela il faut qu’un médecin
prudent fâche s’attirer la confiance du malade ,
qu’il entre dans fon idee, qu’il s’accommode à fon
délire, qu’il paroiffe perfuadé que les chofes font
telles que le mélancholique les imagine , 8c qu’il lui
promette enfuite une guérifon radicale , & pour l’o-
perer S il eft fouvent obligé d’en venir à des remedes
finguliers ; ainfi iorfqu’un malade croira avoir
renfermé quelque animal vivant dans le corps,il faut
faire femblant de l’en retirer ; fi c’eft dans le ventre,
on peut par un purgatif qui lecoue un peu vivement
produire cet effet, en jettant adroitement cet animal
dans le baflin, fans que le malade s’en apperçoi-
ve ; c’eft ainfi que certains charlatans par des
tours de foupleffe femblables abufent de la crédulité
du peuple , & paffent pour habiles à faire fortir
des vipères ou autres animaux du corps. Si le mélancholique
croit l’animal dans fa tè te , il ne faut
pas balancer à faire une incifion fur les tégumens ,
le malade comptera pour rien les douleurs les plus
vives , pourvu qu’on lui montre l’animal dont la
préfence l’incommodoit fi fort ; cette incifion a cet
autre avantage, que fouvent elle fait ceffer les douleurs
de tête qui en impofoient au malade pour un
animal & fert de cautere toujours très-avantageux.
On voit dans les différens recueils d’obfervations,
des guérifons aufli fingulieres. Un peintre , au rapport
de Tulpius, croyoit avoir tous les os du corps
ramollis comme de la cire, il n’ofoit en conféquence
faire un feul pas ; ce médecin lui parut pleinement
perfuadé de la vérité de fon accident ; il lui promit
des remedes infaillibles, mais lui défendit de marcher
pendant fix jours , après lefquels il lui donnoit
la permiflion de le faire. Le mélancholique penfant
qu’il falloit tout ce tems aux remedes pour agir 8c
pour lui fortifier & endurcir les os , obéit exactement
, après quoi il fe promena fans crainte & avec
facilité.
Il fallut ufer d’une rufe pour engager celui dont
nous avons parlé plus haut à piffer : on vint tout effarouché
lui dire que toute la ville étoit en fe u ,
qu’on n’avoit plus efpérance qu’en lui pour empêcher
la ville d’être réduite en cendres ; il fut ému de
cette raifon 8c urina, croyant fortement par-là d’arrêter
l’incendie. Il eft aufli quelquefois à-propos de
contrarier ouvertement leurs fentimens ; d’exciter
en eux des pallions qui leur faffent oublier le fujet de
leur délire : ç.’eftau médecin ingénieux & inftruit à
£ien faifir les occafion*. Un homme çroyoit avoir
des jambes de verre ; 8c de peur de tes caffer, il ne
faifoit aucun mouvement : il fouffroit avec peine
qu’on l’approchât ; une fervante avifée lui jetta exprès
contre les jambes du bois : le mélancholique
fe met dans une colere violente , au point qu’il fe
leve 8c court après la fervante pour la frapper. Lorf-
qu’il fut revenu à lui, il fut tout furpris de pouvoir
fe foutenirfur fes jambes, 8c de fe 'trouver guéri.
Trallian raconte qu’un médecin diflipa le délire mélancholique
d’un homme qui s’imaginoit n’avoir
point de tête, en lui mettant deffüs une balle de
plomb dont le poids douloureux lui fit appercevoir
qu’il en a voit une. On doit avoir vis à-vis des mélancholiques
l ’attention de ne rien dire qui foit relatif
au fujet de leur délire : par ce moyen ils l’oublient
fouvent eux-mêmes ; iis raifonnent alors , 8c
agiffent très - fenlément fur tout le refte ; mais dès
qu’on vient à toucher à cette corde, ils donnent des
nouveaux lignes de folie. On doit aufli écarter de
leur vue les objets qui peuvent les reveiller. Un de
ces mélancholiques qui s’étoit figuré qu’il étoit lapin,
raifonnoit cependant en homme très-fenfé dans un
cercle ; lorfque malheureufement un chien entroit
dans la chambre, alors il femettoit à fuir & alloit fe
cacher promptement fous un lit pour éviter les pour-
fuites du chien. On peut dans pe cas-là occuper l’efprit
de ces perfonnes ailleurs, l’amufer, le diftraire
par des bals, des fpe&acles , 8c fur-tout par la mu-
fique, dont les effets font merveilleux.
Pour ce qui regarde le corps, les fecours dont
l’efficacité eft la mieux conftatée, font ceux qu’on
tire de la diete ; ils font préférables à ceux que la
pharmacie nous offre , 8c encore plus à ceux qui
viennent de la Chirurgie. Je prens ici le mot dicte
dans toute fon étendue , pour l’ufage des fix chofes
non naturelles ; & on doit interdire aux mélancholiques
des viandes endurcies par le fel & la fumée ,
les liqueurs ardentes , mais non pas le v in , qui eft
un des grands anti-mélancholiques , qui fortifie & réjouit
l’eftomac ; les viandes les plus legeres, les plus
faciles à digérer, font les plus convenables ; les
fruits d’été bien mûrs font très-falutaires. On doit
beaucoup attendre dans cette maladie du changement
d’a ir , du retour du printems, des voyag es ,
de l’équitation, des friétions fur le bas-ventre , des
exercices vénériens, fur-tout quand leur privation
a occafionné la maladie , & encore plus de la jouif-
fance d’un objet aimé, &c. la maladie du pays exige
le retour dans la patrie ; il eft dangereux de différer
trop tard ce remede fpécifique : on eft quelquefois
obligé d’en venir, malgré ces fecours , à quelques
remedes ; on doit bien fe garder d’aller recourir à
ces bifarres compofitions qui portent ces noms faf-
tueux d’exhilarans , anti - mélancholiques , 8cc. ces
remedes femblent n’être faits que pour en impofer ,
adfucum & pompam, omme on dit.Les feuls remedes
vraiment indiqués , font ceux qui peuvent procurer
le flux hémorrhoïdal ou le rappeller, les apéritifs
falins, le nître, le fel de Glauber, le fel de feignette,
le tartre vitriolé, &c. les martiaux, les fondans aloé-
tiques , hémorrhoïdaux , hépatiques , les favon-
neux fur-tout : ces médicamens variés fuivant les
indications, les circonftances , les cas , 8c prudemment
adminiftrés, font très-efficaces dans cette maladie,&
la guériffent radicalement. Il eft quelquefois
aufli à - propos de purger ; il faut, fuivant l’avis
d’Hippocrate , aphor. g i Hv. IV. infifter davantage
fur les purgatifs cathartiques, même un peu forts ,
& parmi ceux-là il faut choifir ceux que les obfer-
vateurs anciens ont regardés comme fpécialement
affe&és à la bile noire , 8c qui font connus fous le
nom de mélanagogucs, tels font, parmi les doux ou
médiocres , les mirobolans indiens-, le polypdde,
l’épithime, le féné ; parmi les forts, oja compte la
pierre d’Arménie > lazuli, la coloquinte, l’hellébore
noir, &cv' 1
MÉLANDRIN, ( Hiß. nat. ) poiffon de mer. On
le confond fouvent avec le fargo auquel il refl’em-
ble beaucoup par la forme du corps 8c par la pofi-
tion 8c le nombre des nageoires. Le corps eft pref-
qu’entierement noir, 8c le tour de la tête a une couleur
violette ; les dents font petites & aiguës. Ce
poiffon différé du fargo en ce qu’il n’a pas la queue
fourchue ; fa chair eft ferme 8c affez nourriffante.
Rondelet, Hiß. des poiffons, I. part. liv. K. chap. vij.
Foyei S ARG O , poiffon.
■ MÉLANGE, f. m. ( Gram. ) il fe dit de l’aggré-
gation de plufieurs chofes diverfes. Le vin de cabaret
eft un mélange pernicieux à la fanté. La fociété
eft un mélange de fots & de gens d’efprit. On donne
le titre de mélanges, à un recueil d’ouvrages com-
pofés fur des fujets divers. Le mélange des animaux
produit des monftres & des mulets. On ne s’eft pas affez
occupé du mélange des efpeces.'
Mélange , ( Pharm. ) c’eft une opération de pharmacie
, foit chimique, foit galénique, qui corilifte à
unir enfemble plufieurs fimples ,foit folides, foit liquides
, ou plufieurs drogues par elles-mêmes corn-
pofées ; comme lorfqu’on fait un opiate avec la thériaque
, la confection hyacinthe & le catholicon double.
Ce mélange doit être raifonné ; car il faut joindre
des remedes qui foient analogues , &: dont l’union
faffe un effet plus énergique ; c’eft ainfi que les
fels joints au féné tirent mieux fa teinture , & que
les alkalis joints aux graiffes aident à divifer les
corps gras & à les rendre mifcibles à l’eau &plus efficaces
foit pour l’intérieur, foit pour l’extérieur.
Le mélange eft faux 8c nuifible, lorfqü’on emploie
des médicamens qui n’ont nulle analogie, ou qui fe
détruifent. On peut reprocher ce défaut à plufieurs
compofitions galéniques, quoiquefaftueufes & faites
avec, beaucoup d’appareil ; on a même fait ce jugement
il y a long-tems de la thériaque d’Androma-
chus.
Les poudres diamargariti froides & chaudes , les
efpeces diambra & autres , font des preuves plus
que fuffifantes de ce que nous avançons. On peut
dire que dans ces mélanges on fouffle tout-à-la-fois le
chaud 8c le froid. Voye^Pharmacie a L'article Préparation.
- Mélange, terme de Chapellerie, qui fe dit de la
quantité de chaque matière qui entre dans la compo-
fition d’un chapeau, 8c que l’on mêle enfemble : par
exemple, du poil de lapin avec du caftor, de là laine
de mouton avec celle desagneauxj&c. Voye^ Chapeau.
- MÉLANGE , fe dit en Peinture , des teintes qu’on
fait en mêlant les couleurs fur la palette avec un
couteau, 8c fur la toile avec le pinceau ; c’eft-à-dire,
en les fondant enfemble. On ne dit point, des couleurs
bien mélangées; mais des couleurs bien fondues.
Mélange, en terme de Potier, eft proprement
l’aftion de mêler la terre avec du fable, du ciment,
ou du mâche-fer. Le fournalifte fait toujours fon mélange
avec du mâche-fer. Voyeç Fournalistes.
MELANI M o n t e s , ( Géog. anc. ) en grec
^aveto'puf chaîne de montagnes que Ptolomée place
dans l’Arabie-pétrée : ce font les mêmes montagnes
que l’Ecriture-fainte nomme Oreb 8c Sinaï.
• MÉLANIDE, adj. f. ( Mythol. ) furnom qu’on a
donné quelquefois à Vénus, & qu’on a formé du grec
ftt'xaç, ténèbres, parce que cette déeffe aime.le fi-
lence de la nuit, dans la recherche de fes plaifirs.
. MELANIPPIUM F l u m e n i ( Géog.anc.) rivière
d’Afie dans la Pamphylie ; elle étoit confacrée
à Minerve, au rapport de Quintus-Calaber, liv. III.
. MÉLANO-SYRIENS , LÈS, Melano-Syri, ( Géog.
une. ) c’eft-à-dire, Syriens-noirs. On appelloit de ce
nom les habitarts de la véritable Syrie, au-delà du
mont Taurus , pour les diftinguerdes Leuco-Syriens ,
c’eft-àdire, Syriens-blancs , qui habitoient dans la
Cappadoce, vers le Pont-Euxin. ( D . J. )
MÉLANTERIE, f. f. ( Hijl. nat. Minéral. ) nom
donné par quelques auteurs anciens à une fubftance
minérale , fur laquelle les fentimens des Naturalif-
tes ont été très-pairtagés. Il y a tout lieu de croire que
ce qu’ils ont voulu défigner par-là , n’eft autre chofe
qu’une cfpece de terre ou de pierre de couleur noire ,
chargée d’un vitriol qui s’eft formé par la décompofi-
tion des pyrites. C ’eft Ce que M. Henckel a fait voir
dans fa pyritologie ; ainfi la mélantcrie peut être définie
une pierre noire chargée de vitriol.
M ELANTH II, ( Géog. anç. ) écueil de la .mer
Icariénne, auprès de Samos. Strabon en parle, Liv.
X IV . pag. G. Le nom moderne eft Furni, félon
Niger, 8c Fdrnelli, félon d’autres. (Z)./.)
Mêlas , ( Médec. ) tache de la peau ,fuperficielle,’
noirâtre, de couleur de terre d’diiibre. Cette tache
eft exempte de douleur & d’excoriation, 8c la couleur
de la peau n’y eft altérée qu’à fa furfaeë; Elle
paroît peu différer des taches livides de quelques feor-
butiques. Vôye^ Lentilles. (Y )
Mêlas , ( Géog.anc.') ce mót eft g rec, & lignifie
noir; 8c parce que les fleuves dont le cours eft lent,
ou dont le fonds eft obfcur, paroiffent avoir les
eaux noires , les anciens ont appellé bien des- rivières
du nom de Mêlas. Il y en avoit une en Arcadie1,
une en Achaïe , une enBéotie , une en Migdonie,
une en Macédoine, une en Pamphylie, une en Thef-
falie , & une enThrace , dont le nom moderne eft
Sulduth ; enfin , une en Cappadoce j on l’appelle aujourd’hui
Carafon.
Mêlas Sinus-, ( G é o g . a n c . ) golfe de Thrace , à
l ’embouchure de là riviere de même nom. L’île de
Samo-Thrace étoit à l’entrée ; la ville de Cardia
étoit au fond du golfe. Cette ville de Cardia s’appelle
aujourd’hui M é g a r i f e , & donne fon nom au golfe.
L’île de Samandrachi eft la Samo-Thrace des an*
ciens. (JD. J.)
MÉLASSE , f. f. ( Mat. méd.) c’eft cette matière
graiffeufe & huileufe , mais fluide qui refte du fucre
après le raffinage , & à laquelle on n’a pu donner,1
en la faifant brûler, une confiftanceplusfolide que
celle du firop ; on l’appelle aufli pour cela Jîrop de
fucre.
Cette mélaffe eft à proprement parler l’eau-mere
du fucre , ou la fécule du fucre qu’on n’a pu faire
cryftallifer, ni mettre en forme de pain.
Quelques-uns font de cette eau-mere une eau-de-
vie qui eft fort mal-faine.
Il s’eft trouvé des empiriques qui ont fait ufage de
ce prétendu firop pour différentes maladies, qu’ils
donnaient fous un1 nom emprunté; ce qui a mis cé
remede en vogue pendant quelque tems.
Les gens de Ta campagne des environs desvilles oîi
fe fait Te raffinage du fucre, ufent beaucoup de cette
forte de firop ; ils en mangent ; -ils en mettent dans
l’eau ; ils en font une efpece de v in , & s’en fervent
au lieu de fucre ; quelques épiciers en frelatent leur
eau-de-vie. V o y e { Sucre.
MÉLAZZO ou MÉLASSO , ( Géog.) ancienne
ville de la Turquie afiatique , dans la Natolie. C’eft
; l’ ancienne Mylafa où l’on voyoit encore dansle dernier
fiecle de beaux monumens d’antiquité, entr’au-
tres un petit temple de Jupiter, un grand temple dédié
à Augufte, 8c la belle colonne érigée en l’honneur
de Ménander, fils d’Euthydeme, un de fes
plus célébrés citoyens. Long. ^S.yo. lat. J y . z g .
ME LC A , fxtXua. , ( Pharmac. ) ce terme eft latin
félon Galien, & fignifie une forte louable d’aliment
rafraîchiffant, humeâant, 8c en ufage chez les Romains.
C ’eft une efpece d’oxygala, ou de lait repofés