clé t é , qui eft la fin à laquelle fe rapporte l’amour
de l’eftime.
MEQUE, PÈLERINAGE de LA {Hift. des Turcs.')
c’eft un voyage à la Meque prefcrit par l’alcoran.
« Que tous ceux qui peuvent le faire, n’y man-
» quent pas, dit l’auteur de ce livre ». Cependant
le pèlerinage de la Meque eft non-feulement difficile
par la longueur du chemin, mais encore par rapport
aux dangers que l’on court en Barbarie > où les
vols font fréquens, les eaux rares 6c les chaleurs
exceffiyes. Auffi par toutes ces raifons, les doôeurs
de la loi ont décidé qu’on pou voit fe difpenfer de cette
courfe, pourvu qu’on fubftituât quelqu’un à fa place.
Les quatre rendez-vous des pèlerins font Damas,
le Caire , Babylone 6c Zébir. Ils fe préparent à ce
pénible voyage par un jeûne qui fuit celui du rama-
zan ; & s’affemblent par troupes dans des lieux convenus.
Les fujets du grand-feigneur qui font en
Europe > fe rendent ordinairement à Alexandrie fur
<jes bâtimens de Provence, dont les patrons s’obli-
oent à voiturer les pèlerins. Aux approches du moindre
vaiffeau,ces bons mufulmans, qui n’apprehen-
dent rien tant que de tomber entre les mains des armateurs
de Malte , baifent la bannière de France,
s’enveloppent dedans, 6c la regardent comme leur
afyle.
D’Alexandrie ilspaffent au Caire,.pour joindre
la caravane des Africains. Les Turcs d’Afie s’affemblent
ordinairement à Damas ; les Perfans & les Indiens
à Babyfôrie ; les Arabes 6c ceux des îles des
environs, à Zébir. Les pachas qui s’acquittent de
ce devoir, s’embarquent à Suez, port de la mèr Rou
g e , à trois lieues & demi du Caire. Toutes ces caravanes
prennent fi bien leurs mefures, qu’elles
arrivent la veille du petit bairam fur la colline d’A-
rafagd, à une journée de la Meque. C ’eft fur cette
fameufe colline qu’ils croient que l’ange apparut à
Mahomet pour la première fois ; & c’eft-là un de
leurs principaux fanûuaires. Après y avoir égorgé
des moutons pour donner aux pauvres, ils vont faire
leurs prières à la Meque , 6c de la à Médine, où eft
le tombeau du prophète, fur lequel on étend tous
les ans un poêle magnifique que le grand-feigneur
y envoie par dévotion : l’ancien poêle eft mis par
morceaux ; car les pèlerins tâchent d’en attraper
quelque pièce , pour petite qu’elle foit, 6c la confer-
vent comme une relique très- précieufe.^
Le grand-feigneur envoie auffi par l’intendant des
caravanes, cinq cent fequins, un alcoran couvert
d’o r , plufieurs riches tapis, & beaucoup de pièces
de drap noir, pour les tentures des mofquées de la
Meque.
On choifit le chameau le mieux fait dti pays, pour
être porteurde l ’alcoran: à fon retour ce chameau,
tout chargé de guirlandes de fleurs 6c comblé de bé-
nédi&ions, eft nourri graffement, & difpenfé de travailler
lé refte de fes jours. On le tue avec folem-
nitéquand il eft bien vieux, & l’on mange fa chair
comme une chair fainte ; car s’il mouroit de vieil—
leffe ou de maladie, cette chair feroit perdue 6c fu-
jette à pourriture.
Les pèlerins qui ont fait le voyage de la Meque,
font en grande vénération le refte de leur vie ; ab-
fous de plufieurs fortes de crimes; ils peuvent en
commettre de nouveaux impunément, parce qu’on
ne fauroit les faire mourir félon la loi ; ils font réputés
incorruptibles, irréprochables &fanftifiés dès
ce monde. On affure qu’il y a des Indiens affez fots
pour fe crever les yeux , après avoir vu ce qu’ils
appellent les faints lieux de Méque ; prétendant que
les yeux ne doivent point après cela, être propha-
nés par la vue des chofes mondaines.
Les enfans qui io.nt conçus dans ce pèlerinage ,
font regardés comme de petits faints, l'oit que les
pèlerins les aient eû de leurs femmes légitimes, ou
des aventurières : ces dernieres s’offrent humblement
fur les grands chemins, pour travailler à une
oeuvre auffi pieufe. Ces enfans font tenus plus proprement
que les autres, quoiqu’il foit malaifé d’ar
jouter quelque chofe à la propreté avec laquelle
on prend foin des enfans par-tout le levant. (•£>.ƒ.)
MÉQUINENÇA, (Gèog.) ancienne ville d’Efpa-
gne au royaume d’Arragon. Elle a été connue au-
fois fous les noms d’Ocîqgefa 6c àélclofa. Elle eft
forte par fa fituation, 6c défendue par un château.
Elle eft au confluent de l’Ebre 6c de la Ségre, dans
un pays fertile 6c agréable , à 12 lieues N. E. de
Tortofe, 65 N. E. de Madrid. Long. 1 7 .56. lut. 41.
*2. (0 . J.) .
MER , f. f. ( Gèog. ) ce terme lignifie ordinairement
ce vafte amas d’eau qui environne toute la
terre, & qui s’appelle plus proprement Océan. Foyeç
Océan.
Mer eft un mot dont on fe fert auffi pour expri-i
mer une divifion ou une portion particuliere de 1 O-
céan, qui prend fon nom des contrées qu’elle borde,
ou d’autres circonftances.
Ainû l’on dit, la mer d’Irlande, la mer Méditerranée
, la mer Baltique, la mer Rouge, &c. F7ye{ Méditerranée.
Jufqu’au tems de l’empereur Juftinien , la mer
étoit commune 6c libre à tous les hommes ; c’eft
pour cela que les lois romaines permettoient d’agir
contre toute pcrfonne qui en troubleroit un autre
dans la navigation libre , ou qui gêaeroit la pêche
de la mer. t t
L’empereur Léon , dans fa 56' novelle , a été le
premier qui ait accordé aux perfonnes qui étoient
en poffeffion de terres, le privilege de pêcher devant
leurs territoires refpe&ifs exclufivement aux
autres. Il donna même une commiffion particuliere
à certaines perfonnes pour partager entr’elles le Bof-,
phore de Thrace.
Depuis ce tems les princes fouverains ont tâché
de s’approprier la mer, 6c d’en défendre l’ufage public.
La république de Vénife prétend fi fort être la
maîtreffe dans fon golfe , qu’il y a tous les ans des
époufailles formelles entre le doge 6c la mer Adriar
tique. < '
Dans ces derniers tems les Anglois ont prétendu
particulièrement à l’empire de la mer dans le canal
de la Manche , 6c même à celui de toutes les mers
qui environnent les trois royaumes d’Angleterre
d’Ecoffe 6c d’Irlande, & cela jufqu’aux côtes ou aux
rivages des états voifins : c’eft en. conféqueace de
cette prétention que les enfans nés fur les mers de
leur dépendance font déclares natifs d Angleterre ,
comme s’ils étoient nés dans cette île même. Grotius
6c Selden ont difputé fortement fur cette prétention
dans des ou vrages qui ont pour titre , mare li-
berum, la mer libre, 6c mare claufum, la mer intèrdite.
Chambers. .. ...
Mer Méditerranée. F o y c ^ Méditerranée,1
Mer Noire. Foye{ Noire.
Mer Rouge. Foye{ Rouge.
Mer Caspienne. F o y e ^ Caspienne & Lac.'
Sur les différens phénomènes de la mer , voyeç
Flux & Reflux , Marée , Vent , Courant ,
Moussons , Géographie Physique , Lac.
Foyei auffi le difcours de M. de Buffon^r la théorie
de la terre, art. 8. 13.1$• On prouve dans ce difcours
; i°. que les amas prodigieux de coquilles
qu’on trouve dans le fein de la terre à des diftances
fort confidérables de la mer, montrent incontefta-
blement que la mer à couvert autrefois une grande-
partie de la terre ferme que nous habitons aujourd’hui.
Hift. acad. 17x0. pag. 5. 20. Que le fonds de
la mer eft compofé à-peu-près comme la terre que.
nOus habitons, parce qu’on y trouve les mêmes matières
, & qu’on tire de la furface du fonds de la mer
les mêmes chofes que nous tirons de la furface de la
terre. 30. Que la mer a un mouvement général d’orient
en occident qui fait qu’elle abandonne certaines
côtes , 6c qu’elle avance fur d’autres. 40. Qu’il
eft très-probable que les golfes 6c les détroits- ont
été formés par l’irruption de l’Océan dans les terres.
Foyei Continent & T erraquée. Foyeç auffi D éluge
, Montagne & Fossile. (O)
C ’eft une vérité reconnue aujourd’hui parles na-
turaliftes les plus éclairés, que la mer, dans les tems
les plus reculés , a occupé la plus grande partie du
continent que nous habitons ; c’eft à fon féjour qu’eft
du la quantité prodigieufe de coquilles , de fquelet-
tes de poiffons, 6c d’autres corps marins que nous
trouvons dans les montagnes 6c dans les couches de
la terre , dans des endroits, fouvent très-éloignésdu
lit que la mer occupe actuellement. Vainement vou-
droit-on attribuer ces phénomènes au déluge uni-
verfel ; on a fait voir dans \'article Fossilles , que
cette révolution n’ayant été que paffagere , n’a pu
produire tous les effets que la plupart des phyficiens
lui ont attribués. Au contraire , en fuppofant le féjour
de la mer fur notre continent, rien ne fera plus
facile que de fe faire une idée claire de la formation
des couches de la terre de concevoir comment
un fi grand nombre de corps marins fe trouvent renfermes
dans un terrein que la mer a abandonné.
F°ye{ Fossilles ; T erre , couches de la ; Terre ,
révolutions delà.
La retraite de la mer a pu fe faire ou fubitement,
ou fuceffivement, &,peu-à-peu ; en effet, fes eaux
ont pu fe retirer tout-à-coup , 6c laiffer à fec une
portion de notre continent par le changement du
centre de gravité de notre globe, qui a pu caufer
l’inclination de fon axe. A l’égard de la retraite des
eaux de la mer qui fe fait fucceffivement 6c par degrés
infenfibles , pour peu qu’on ait confidéré les
bords de la mer , on s’apperçoit aifément qu’elle s’éloigne
peu-à-peu de certains endroits, que les côtes
augmentent, & que l’on ne trouve plus d’eau dans
des endroits qui étoient autrefois des ports de-mer où
les vaiffeaux abordoient. L’ancienne ville d?Alexandrie
eft actuellement affez éloignée de la mer ; les
villes d’A rles, d’Aigues-mortes, &c. étoient autrefois
des ports de mer ; il n’y a guere de pays maritimes
qui ne fourniffent des preuves convaincantes de
cette vérité ; c’eft fur tout en Suède que ces phénomènes
ont été obfervés avec le plus d’exaâitude depuis
quelques années, ils ont donné lieu à une dif-
pute très-vive entre plufieurs membres illuftres de
l’académie royale des fciences de Stockholm. M.
Dalin ayant publié unehiftoire générale de la Suède
, très-eftimée des connoiffeurs, ofa jetter quel-
quesfoupçons fur l’antiquité de ce royaume, 6c parut
douter qu’il eut été peuplé,.auffi anciennement que
l’a voient .prétendu les hiftoriens du nord qui l’ont
précédé; il alla plus loin , & crut trouver des preuves
que plufieurs parties de la Suede avoient-éré
çpuvertes des eaux de la mer dans des tems fort peu
éloignés de nous ; ces .idées ne manquèrent pas de,
trouver, des contradicteurs ; prefque tous les peuples
de la terre ont de tout tems été très - jaloux de
l’antiquité de leur origine. On crut la Suede deshonorée
parce qu’elle n’avoit point été immédiatement
peuplée par les fils de Noé. M. Celfius, lavant géomètre
de l’académie de Stockholm, inféra en 1743 ,
dans le recueil de fon académie, un mémoire très-
curieux ; il y entre dans le détail des faits qui prou-,
y,ent que les eaux ont diminué 6c diminuent encore
journellement dans la. mer Baltique,- ainfi que l’O-
çean qui borne la Suede à l’occident. 11 s’appuie du
témoignage d’un grand nombre de pilotes 6c de pêcheurs
avances en âge , qui attellent avoir trouvé
dans leur jeuneffe beaucoup plus d’eau en certains
endroits qu’ils, n’en trouvent aujourd’hui ; des écueils
6c des pointes des rochers qui étoient anciennement
lotis 1 eau. ou a fleur d eau, lortent maintenant de
plufieurs piés au-deffus du niveau de la mer ; on ne
peut plus paffer qu’ayec des chaloupes ou des barques
dans des endroits où il paffoit autrefois des navires
chargés ; des bourgs & des villes qui étoient
anciennement fur le bord de la mer , en font maintenant
à une diftance de quelques lieues;on trouve
des ancres 6c des débris de vaiffeaux qui font fort
avancés dans les terres, &c. Après avoir fait l'énumération
de toutes ces preuves, M. Celfius tente de
déterminer de combien les eaux de lawerbaiffent en
un tems donné. 41 établit fon calcul fur plufieurs ob-
fervations qui ont été faites en différens endroits, il
trouve entr’autres qu’un rocher qui ctoit il y a 168
ans à fleur d’eau , & fur lequel on alloit à la pêche
des veaux marins,s’eft élevé depuis ce tems de 8 piés
au-deffus de la furface de la mer. M. Celfius trouve
que l’on marche à fec dans un endroit où 50 ans auparavant
on avoit de l’eau jufqu’au genou. Il trouve
que des écueils qui étoient cachés fous l’eau, dans la
jeuneffe de quelques anciens pilotes , & qui même
étoient à deux piés de profondeur , fortent maintenant
de 3 piés , &c. De toutes ces pbfervations , il
réfulte, fuivant M. Celfius , que l’on peut faire une
eftimation commune, & que l’eau de la mer baiffe eh
un an de 4^ lignes, en 18 ans de 4 pouces & 5 lignes,
en cent ans de 4 piés 5 pouces, en 500 ans de, 22
piés 5 pouces , en mille ans de 45 piés géométriques
, &c.
M. Celfius remarque, aveçraifon , qu’il feroit à
fouhaiter que l’on obfervât exaélement la hauteur
de certains endroits au-deffus du niveau de la mer,
par ce moyen la poftérité feroit à portée de juger
avec certitude de la. diminution de fes eaux ; à fa
priere, M. Rudman fon ami, fit tracer en 1731 une
ligne horifontale fur une roche appelléejwarthcellen
pce wiheken, !qui le trouve à la partie lepienirionale
de l’île de Lo>efgrurid , à dt;ux milles au not d-eft de
Gefle. Cette ligne marqi préciiément jtilqts’0ù venoit
la îurface des eaux ei1 1731. Voye . mémoires
de l'acadér,nie de.Suede om. F année 1S 3.II Leroit
à fouhaii:er que l’on fiù des oblerva tioris de ce
genre fur tout:ésles côtes oc dans toutes h;s mc/iconnues,
cela je:tteroit .beau up de jour fuir un phénomené
trés-curieux de la Phytique , & dont juiqu’à
préfent l’on ne paroît s’être fortement occupé qu’en
Suede.
La grande queftion qui partage maintenant les
académiciens de Suede , a pour objet de lavoir fi la
diminution des eaux de la mer eft réelle ; c'eft-à dire,
fi la.lomme totale des eaux de la mer diminue effectivement
fur notre globe , ce qui parôît être le fen-
timent de M. Celfius, du célébré M. Linnæus & de
plufieurs autres : ou fi , comme M. Browallius 6c
d’autres ,1e prétendent , cette diminution des eaux
n’eftque relative ; c’eft à-dire, fi la mer va regagner
d’un côté ce qu’elle perd d’un autre. On fent aifément
combien cette queftion eft embarraffante en
effet, il faudroit un grand nombre d’obfervations
faites dans toutes les parties de notre globe, & continuées
pendant plufieurs fiecles pour la décider avec
quelque certitude.
Il eft conftantque les eaux de la mer s’élèvent en
vapeurs , forment, des nuages & retombent en pluie ;
une partie de ce,s pluies rentre dans la mer, une autre
forme des rivières qui retombent encore dans la
mer , de là il réfulte une circulation perpétuelle qui
ne tend point à produire une diminution réeljedes
eaux de la mer ; mais , fuivant M. Celfius, la partie
des eaux qui abreuve les terres, 6c qui.fcrt à la