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falloit donner aux foldats qui la compofoient, des
armes offenfives & défenfives plus fortes & plus pe-
fantes que celles de quelqu’autre peuple que ce fût.
J’en ai dit quelque chofe , mais je prie le letteur d’en
voir les détails dans Polybé Sc. dans Jofephe. Il y a
peu de différence, conclut ce dernier, entre les chevaux
chargés & les foldats romains. Ils portent, dit
Cicéron, leur nourriture pour plus de quinze jours,
tout ce qui eft à leur ufage, tout ce qu’il faut pour fe
fortifier; Sc à l’égard de leurs armes, ils n’es font
pas plus embarraffés que de leurs mains. Tufcul.
livre I I I .
Pour qu’ils puffent avoir des armes plus pefantes
que celles des autres hommes, il falloit qu’ils fe ren-
diffent plus qu’hommes : c’eft ce qu’ils firent par un
travail continuel qui augmentoit leur force , Sc par
des exercices qui leur donnoient de l’adreffe, laquelle
n’eft autre chofe qu’une jufte difpenfation des
forces que l’on a.
Il faut bien que j’ajoute un mot à ce que j’ai déjà
dit de \adifcipline des foldats romains. On les accou-
tumoit à aller le pas militaire, c’eft-à-dire, à faire en
cinq heures vingt milles, Sc quelquefois vingt-quatre.
Pendant ces marches, on leur faifoit porter des
poids de foixante livres : on les entretenoit dans
l ’habitude de courir Sc de fauter tout armés. Ils pre-
noient dans leurs exercices des épées , des javelots,
des fléchés d’une pefanteur double des armes ordinaires
; Sc ces exercices étoient continuels. Voye^
dans Tite-Live , les exercices que Scipion l’Afri-
quain faifoit faire aux foldats après la prife de Carthage
la neuve. Marius, malgré fa vieilleffe, alloit
tous les jours au champ de Mars. Pompée, à l’âge
de cinquante-huit ans, alloit combattre tout armé,
avec les jeunes gens ; il montoit à cheval, couroit à
bride abattue, & lançoit fes javelots.
Toutes les fois que les Romains fe crurent en danger,
ou qu’ils voulurent réparer quelque perte, ce
bit une pratique confiante chez eux d’affermir la discipline
militaire. Ont-ils à faire la guerre aux Latins,
peuples aufliaguerris qu’eux-mêmes, Manlius fonge
à augmenter la force du commandement, & fait mourir
fon fils qui avoit vaincu fans ordre. Sont-ils battus
à Numance, Scipion Emilienles prive d’abord
de tout ce qui les avoit amollis. II vendit toutes les
bêtes de fomme de l’armée, Sc fit porter à chaque
foldat du blé pour trente jours, Sc fept pieux.
Comme leurs armées n’étoient pas nombreufes ,
il étoit aifé de pourvoir à leur fubfiftance ; le chef
pouvoit mieux les connoître, & voyoit plus aifément
les fautes & les violations de la difeipline. La force
de leurs exercices, les chemins admirables qu’ils
avoient conftruits, les mettoient en état de faire des
marches longues Sc rapides. Leur préfence inopinée
glaçoit les elprits ; ils fe montroient fur-tout après
un mauvais fuccès, dans le tems que leurs ennemis
étoient dans cette négligence que donne la vi&oire.
Leurs troupes étant toujours les mieux difcipli-
nées, il étoit difficile que dans le combat le plus malheureux
, ils ne fe ralliaffent quelque part, ou que le
defordre ne fe mît quelque part chez les ennemis.
Aufli les voit-on continuellement dans les hifioires
quoique furmontés dans le commencement par le
nombre & par l’ardeur des ennemis, arracher enfin
la viéioire de leurs mains.
Leur principale attention etoit d’examiner en quoi
leur ennemi pouvoit avoir de la fupériorité fur eux ;
& d’abord ils y mettoient ordre. Les épées tranchantes
des Gaulois, les éléphans de Pyrrhus, ne
les furprennent qu’une fois. Ils fuppléerent à la foi-
bleffe de leur cavalerie, d’abord en ôtant les brides
des chevaux, pour que l’impétuofité n’en pût être
arrêtée, enfuite en y mêlant des vélites. Quand ils
eurent connu l’épée efpagnole, ils quittèrent la leur.
Ils éludèrent la fcien.ee des pilotes , par l ’invention
d’une machine que Polybe nous a décrite. En un mot,
comme dit Jofephe, la guerre étoit pour eux une méditation,
la paix un exercice.
Si quelque nation tint de la nature ou de fon inf-
titution, quelque avantage particulier , ils en firent
d’abord ulage : ils n’oublierent rien pour avoir des
chevaux numides, des archers crétois, des frondeurs
baléares, des vaiffeaux rhodiens ; enfin jamais
nation ne prépara la guerre avec tant de prudence,
& ne la fit avec tant d’audace.
Elle parvint à commander à tous les peuples, tant
par l’art de la guerre que par fa prudence, fa fagefl'e,
fa confiance, fon amour pour la gloire & pour la patrie.
Lorfque fous les empereurs , toutes ces vertus
s’évanouirent, l’art militaire commença àdécheoir ;
mais lorfque la corruption fe.mit dans la milice même
, les Romains devinrent la proie de tous les peuples.
La milice étoit déjà devenue très à charge à l’état.
Les foldats avoient alors trois fortes d’avantages,
la paie ordinaire, la récompenfe après le fervice ,
& les libéralités d’accident, qui devinrent des droits
pour des gens qui avoient le prince Sc le peuple entre
leurs mains. L’impuiffance où l’on fe trouva de
payer ces charges, fit que l’on prit une milice moins
chere. On fit des traites avec des nations barbares
qui n’avoient ni le luxe des foldats romains, ni le
même efprit, ni les mêmes prétentions.
Il y avoit une autre commodité à cela : comme
les Barbares tomboient tout-à-coup fur un pays, n’y
ayant point chez eux de préparatifs après la réfolu-
tion de partir, il étoit difficile de faire des levées à
tems dans les provinces. On prenoit donc un autre
corps de Barbares toujours prêt à recevoir de l’argent
, à piller & è/fe battre. On étoit fervi pour le
moment ; mais dans la fuite on avoit autant de peine
à réduire les auxiliaires que les ennemis.
Enfin les Romains perdirent entièrement leur d if
cipline militaire, Sc abandonnèrent jufqu’à leurs propres
armes. Végéce dit que les foldats les trouvant
trop pefantes , ils obtinrent de l’empereur Gratien
de quitter leur cuiraffe, Sc enfuite leur cafque ; de
façon qu’expofés aux coups fans défenfe, ils ne fon-
gerent qu’à fuir. De plus, comme ils avoient perdu
la coutume de fortifier leurs camps , leurs armées
furent aifément enlevées par la cavalerie des Barbares.
Ce ne fut pas néanmoins une feule invafion
qui perdit l’empire , ce furent toutes les invafions.
C ’eft ainfi qu’il alla de degré en degré de l ’affoiblif-
fement a la degénération, dé la dégénération à la
décadence, & d e la décadence à fa chûte, jufqu’à c#
qu’il s’affaiffa fubitement fous Arcadius Sc Honorius.
L’empire d’occident fut le premier abattu, Sc Rome
fut détruite parce que toutes les nations l’attaquant
à la fois, la fubjuguerent, Sc pénétrèrent par-tout.1
V7ye^ tout ce tableau dans les confidérations fur les
caufes de la grandeur des Romains St de leur décadence.
(Z), ƒ .)
M i l i t a i r e , pécule ( Jurifprud. ) voye^ P é c u l e
CASTRENSE.
M i l i t a i r e , tejlament (Jurifprud.) voye^ T e s t a m
e n t .
MILITANTE, E g l is e ( Théolog. ) ce terme s’entend
du corps des Chrétiens qui font fur la terre.
On diftingue trois fortes d’églifes, en prenant ce
terme dans fa lignification la plus étendue : Jégliji
militante, par où l’on entend les fideles qui (ont fur la
terre ; l'églife fouffrante, c’eft-à-dire les fideles qui
font dans le purgatoire, Sc l'églife triomphante, qui
s’entend des Saints qui font dans le ciel. Voyeç
E g l is e .
On appelle la première églife militante, parce* que
la vie d’un chrétien eft regardée comme une milice^
il;
îm un combat continuel qu’il doit livrer àU monde
au démon & à fes propres paffions.
MILLE, f. m. ( Gramm. Arithmét. ) nOm de nombre
égal à dix centaines ; il s’écrit par l ’unité fuiviô
de trois zéros.
Mil l e , f. m. ( Géographie. ) mefure en longueur
dont les Italiens, les Anglois St d’autres nations fe
fervent pour exprimer la diftance entre deux lieux.
Poye^ Me su r e , D i s t a n c e , &c.
Dans ce fens le mot mille eft à peu près de même
ufage que lieue en France , & dans aautres pays.
Voyc{ L ie u e .
Le mille eft plus du moins long dans différens pays .
Le mille géographique ou italien contient mille
pas géométriques , mille paffüs ; Sc c’eftde-là que le
terme mille eft dérivé, &c.
Le mille anglois contient huit ftades ; le ftade quarante
perches, & la perche feize piés St demi.
Voici la rédu&ion qu’a faite Cafimir des milles
ou lieues des différens pays de l’Europe au pié romain
, lequel eft égal au pié du Rhin, dont on fe fert
dans tout le Nord.
piéi.
Le mille d’Italié, * • ï * I j>ooo.
d’Angleterre, . . . . 5454*
d’Ecoffe, . . . . . 6ooo.
de Suède, . * * . . 3o°00,
deMofcovie, . * * * 375°*
de Lithuanie » . . . * 18500.
de Pologne, . * . . 1 9 8 5 0 .
d’Allemagne * le petit, * . 2.0000.
le moyen , . 11500.
le plus grand, . 15000.
de France, . . > . * 15750.
d’Efpagne, . . . . . 11170.
de Bourgogne, . . . . 18000.
de Flandres, . . . * 10000.
d’Hollande , . . . . 14000.
de Perfe, qu’on nomme aufli parafangue,
. . . . 18750.
d’Egypte, . . . . . 15000.
Chambers.
M il l e s d e LONGITUDE , terme de Navigation ;
t ’ eft le chemin que fait un vaiffeau à l’eft ou à l’o u e ft,
par rapport au méridien d’où il eft p a r ti, ou d’où il
a fait voile (voyc{ Mé r id ie n ) ; ou bien c’eft la différence
de chemin de longitude, foit o rientale, fo it
o ccidentale, entre le méridien fous lequel eft le v aiffeau
, St celui d’où la derniere obfervation ou fup-
putation a été faite. Voy c{ L o n g it u d e .
Dans tous les lieux de la terre, excepté fous l’é-
quateür, ce chemin doit être compté par le nombre
des milles de degré des parallèles fur lefquels on fé
trouve fuccêffivement ; ainfi il y a de la différence
entre la longitude proprement dite, St les milles de
longitude. Soient (fig. 8. Navig. ) deux lieux A , G ,
la longitude eft repréfentée par l’arc A D de l’équateur
, les milles de longitude par les fommes des arcs
A B , I K , H F , parallèles à l’équateur. La fomme
de ces arcs A B , I K , H F , &c. étant plus petite que
la fomme des arcs A B , B C 9 C D , ou que l’arc
A D qui exprime la longitude, fe nomme par cette
taifon lieues mineures de longitude. Voyeç L ieues m i n
e u r e s de l o n g it u d e . Au refte la lbnune de ces
arcs A B , I K , H F , contient autant de degrés que
l ’arc entier A D : fur quoi voye^ les articles L o x o d
r o m ie & L o x o d r o m iq u è .
Il eft vifible que tandis que le vaiffeau fait fous un
même rhumb un certain chemin de peu d’étendue,
par exemple trois à quatre li.eües, l’efpace qu’il décrit
eft réellement à l’efpace qu’il décrit efi longitude
, comme le finus total eft au flnus de l’angle
confiant de la route avec le méridien. Cette proportion
donnera facilement les milles de longitude ,
M f f e i
qui ne font que la fomme de ces derniers efpâces;
V o y e ^ D e g Re & Na v ig a t io n . ( O )
MILLE-FEUILLE ,mUÏcfolium, f. f. (Botan.) gènré
de plante à fleur radiée , dont le difqiie eft compofé
de plufieurs fleurons ; la couronne de cette fleur eft
formée par des demi-fleurons qui font pofés fur des
embryons , Sc foutenus par un calice eeailleüx , St
prefque cylindrique. Ces embryons deviennent dans
la fuite des femences minces; Ajoutez aux càra&eres
de ce genre que les découpures des feuilles font très-
petites , St qué les fleurs nàifferit en bouquets fort
ferrés. Tournefort, injl, rei herb. Poye^ P l a n t e ;
Tournefort compte neuf efpecés de ce genre dd
plante, d’entre lefquelles nous décrirons la commune
à fleur blanche, nommée par la plupart des
Botaniftes, mille folium vulgare album, & par les Anglois
, thé common white-flowerd yarro'w.
Sa racine eft ligneufe , fibreufe, noirâtre, tra-
.çante. Elle jette des tiges nombreufés à la hauteur
d’un pié ou d’un pié Sc demi, roides quoique menues
, cilyndriques, cannelées, velues, rougeâtres,
moelleules & rameufes vers leurs fômmités. Ses
feuilles font rangées fur une côté, découpées menu,
reffemblantes en quelque maniéré à celles de la camomille*
mais plus roides, aîlées, ou repréfentanc
des plumes d’oifeaux, d’une odeur agréable, St d’un
goût un peu âcre.
Ses fleurs naiffent à la cime des branches , en
ombelles ou bouquets fort ferrés, fonds. Chaque
‘fleur eft petite , radiée, blanche, ou un peu purpurine
, odorante , foutenue par un calice écailleux ,
cilyndrique ou oblong. Lorfque les fleurs font tombées
, il leur fuccede des femences menues. Cette
plante croît préfqué par-tout, le long des grands’
chemins, dans les lieux incultes, fecs ; dans les cimetières
& dans les pâturages. Elle fleurit en Mai
Juin, St pendant tout l’été.
Elle eft un peu âc fe, amere, & gromatiqiie. E lla
rougit confidérablement le papier bleu, & les fleurs
donnent par la diftillation une huile fine , d’un bleu,
foncé. Les fleurs de camomille en donnent aufli
mais je ne fâche pas d’autres plantes qui aient cette
propriété finguliere.
On regardé avec raifon la mille-feuille comme
vulnéraire & aftringente ; en conféquence on l’emploie
intérieurement pour arrêter toutes fortes d’hémorrhagies.
Dans ces cas, l’expérience a prouvé
qu’uné forte décoftion ( & non pas une fimple infu-
fion) de tdute la plante, racine & feuilles, eft là
meilleure méthode. On applique cette décoûion
ou la plante fraîchement pilée , fur les plaies ou fur
les coupures, Sc elle y fait des merveilles ; d’où
vient qu’on appelle vulgairement là mille-feuille,
, l’herbe aux voituriers,aux charpentiers, parce qu’elle
n’a pas moins dè vertu pour arrêter le fang dés coupures
, qiie la brunelle, la grande confoude, l’orpin,
St quelques autres plantés employées à cet ufa<>e. ■ m Mil l e -FEUILLE, ([Chimie, Pharmac. &Mat. méd.)
cette plante a une odeur forte, Sc une faveur un peu
âcfe St amere ; elle donne dans la diftillation avec
l’eau une petite quantité d’huile effentielie de cou-»
leur bleiie ; elle eft analogue en cela avec la camomille
, avec laquelle elle a d’ailleurs les plus grands
rapports. M. Car'theüfer obferve que l’huile de mille
feuille n’a cette couleur bleue que lorfque là planté
d’où on l’à retirée avoit cru dans un terrein fertile
Sc chargé d’engrais , & que celle qui étoit fournie
par la même plante, qu’on auro'it cueillie dans uâ
lieu fec St fablonneux, étoit jaunâtre.
Ort emploie en Médecine les fleurs Sc l’herbe de
cette plante : chacune de ces parties fournit les mêmes
principes Sc dans la même proportion ; félon le#
analyfes de Garîheufer St de Neuman, fetiletnetil