general considérer toute la masse de terrain comme formée par
l’eau. On remarque cependant, dans la relation de M. Becker,
une idée assez importante, qui aurait mérité de fixer plus particulièrement
son attention : c’est la comparaison de la formation
de Schemnitz avec celle de Meissen, sur les bords de l’Elbe,
en Saxe. Mais, sous quel point de vue l’auteur compare-t-il ces
deux contrées? prétend-il établir rigoureusement l’identité entre
la formation des porphyres de Schemnitz et celle des siénites
des bords de l’Elbe, et regarder lespechstein du Tribischthal
comme semblables, de nature et de position, à ceux de Hongrie?
C’est ce qu’on ne peut savoir; car il jete cette idée comme
au hasard dans une phrase qui n’a aucun rapport à cet objet,
et il faut deviner tout ce que peut-être il avait en vue.
En parlant de la stratification, M. Becker afiuoncÿ que toutes
les couches plongent vers l’èSt, et il ën Conclut que tout ce
qu’on a regardé jüsqu’à présent à Schemnitz comme des filons >
sont aussi de véritables couches. Sur ces deux points, il est en
contradiction manifeste avec les descriptions de M. Esmarck,
qui paraissent cependant assez précises.
On voit, d’après ces détails généraux sur les principaux ouvrages
qui ont rapport à la Hongrie, combien il est difficile d’avoir
aujourd’hui des idées saines sur la nature et la position du
terrain de Schemnitz. Tous les auteurs se contrarient mutuellement,
soit sur l’ordre des faits qu’ils ont observés, soit sur les
opinions qu’ils ont adoptées, relativement à l’origine de ces
grandes masses minérales, que les uns ont regardées comme
entièrement formées par l’eau, et les autres comme des dépôts
volcaniques. M. de Buch, celui de tous les géologues le plus capable
peut-être de démêler la vérité au milieu de ces opinions
diverses, a vainement cherché, dans les différens ouvrages, quelques
données propres à fixer définitivement nos idees. Cependant,
par des comparaisons savantes, fruit d’une longue habitude
d’observer la nature, il est parvenu à démontrer au moins
qu’il devait exister des dépôts volcaniques sur différents points
de la Hongrie. Ce qu’il y a de plus remarquable, c ’est qu’il est
arrivé à cette conclusion importante, en rassemblant les faits
épars çà et là dans l’ouvrage même de M- Esmarck, où l’auteur
s’abandonne entièrement aux idées neptuniennes*. C’est un premier
hommage à la mémoire de Fichtel ; puisse la suite de notre
travail rendre à ce savant observateur la justice que ses contemporains
lui ont si indignement refusée, parce qu’il s’était
élevé contre le neptunisme, qui était alors généralement accrédité!
Sans doute, Eiehtel est allé trop loin dans ses conclusions
volcaniques; sans doute, il n’avait pas recueilli toutes les données
du problème ; mais il n’est pas moins vrai qu’à une epoque
où nos connaissances étaient très-incertaines, il avait aperçu
des vérités incontestables, que nous aurons occasion de citer,
et que nous rappellerons toujours avec plaisir, pour le venger
de la haine et de l’envie qui l’ont poursuivi jusqu’à sa mort.
Ce sont précisément les incertitudes que je viens de rapporter
qui m’avaient conduit à entreprendre un voyage en Hongrie.
Je m’étais familiarisé, avant de sortir de Paris, avec toutes
les observations que divers voyageurs avaient recueillies, et je
croyais pouvoir porter directement mes pas sur les points les
plus essentiels à vérifier; mais j’ai reconnu, en peu d’instans,
que tous les naturalistes avaient confondu entre eux plusieurs
* Mémoire lu à l’Académie .de Berlin, le 25 Mars i:8i 3.
Nous verrons par la suite- de notre travail, que M. de Buch, trompé par
M. Esmarck, a un peu trop étendu le domaine du feu , dans la Hongrie, et
que le terrain qui renferme lès mines de Schemnitz ne peut etre regardé comme
d’origine ignée.