§9° TAN cn. degrés , jufqu’à ce qu’ elles puiffent entrer fans
danger dans le plain-vif. On doit les biffer dans ce
inort-plain environ dix à douze jours, en observant
cependant de les en. retirer tous les deux jours, quelquefois
même tous les jours, fur-tout fi la chaux n’é-
loit point tout-à-fait ulée ou que les chaleurs fuffent
exceffives ; on les met égoutter fur le bord du plain
qu’on appelle la traite, & on les biffe ainfi en retraite
à-peu-près le même teins qu’elles ont féjourné
dans le mort - plain, c’eft-à-dire un ou deux jours»
Quoique nous ayons fixé le tems du féjour des peaux
dans le mort-plain à dix ou douze jours, nous nous
garderons cependant bien de les faire paffer immédiatement
après dans le plain-vif, comme nous avons
remarqué qu’on indiquoit dans le dictionnaire du
Commerce, quoique l’auteur ne les faffe féjourner
qu’une nuit dans le mort-plain , ce qui doit encore
les rendre beaucoup plus fufceptibles des impref-
fions du plain-vif, ce que nous n’ofons faire même,
après un féjour de dix a douze jours dans le mort-
plain , féjour qui auroit pu accoutumer infenfible-
ment les peaux à l’aâion de la chaux dans toute fa
force ; cette marche 8c ces obfervations paroîtront
peut-être de peu de conféquence à ceux qui ignorent
1a vraie 8c unique maniéré de tanner, ou qui
n’ont eu fur cet article que des connoiffances fort
bôrnées 8c fort imparfaites par la difficulté d’en acquérir
de juftes ; mais nous fommes perfuadés qu’un
bon ouvrier les mettra à leur jufte valeur, 8c fentira
que nous indiquons la maniéré de traiter parfaitement
les peaux, & non pas celle de.gâter les cuirs.
Si le poil quitte facilement les peaux en fortànt du
mort-plain, ce qu’il eft facile de connoître ;. on les
jette à l’eau pour les nettoyer en plus grande partie
de la chaux dont elles peuvent être couvertes; on les
retire enfuite 8c on les pofe fur le chevalet pour les
ebourer , ce qui fe fait avec le même couteau de
rivière, dont nous avons parlé ci-deffus. Lorfque la
dépilation eft complette , on les lave exactement 8c
on les met enfuite égoutter ; bien entendu cependant
, que fi le poil ne quittoit point facilement lgs
peaux, il faudroit les faire paffer dans un plain dont
la chaux fut moins ufée ; on doit alors les en retirer I
tous les jours pour les mettre en retraite égoutter,
comme lorfqu’eiles étoient dans le mort-plain, & les
y biffer jufqu’à ce qu’elles foient parvenues au point
d’être facilement ébourées. Ce premier 8c léger apprêt
donné , il faut les remettre dans un plain qui
tienne le milieu entre le mort 8c le v if ; elles y doivent
refter environ fix femaines, en obfervant de les
en retirer au plus tard tous les deux jours, 8c de les
biffer en retraite au moins le même tems ; ce terme
expiré, on doit les plonger dans un plain-vif 8c les
y biffer environ cinq à fix jours & autant en retraite
, & cela alternativement pendant un an 8c même
dix-huit mois. Au refte, le tems du féjour dans les
différens plains, fans en lever les peaux pour ,les mettre
en retraite, doit s’évaluer fuivant la faifon, c’eft-
à-dire le plus ou moins de chaleur; car en hiver, 8c
fur-tout lorfqu’il gele, elles peuvent refter fix femai-'
nes, hiême deux mois fans être mifes en retraite ;
l’ufage & l’attention font feuls capables de donner de
là précifion 8c de la jufteffe à toutes ces différentes
opérations. Le tems que les peaux font en retraite
doit être pour 1a plus grande partie employé à .remuer'
le plain, afin que la chaux ne s’amaffe pointau >
fond, qu’elle foit bien délayée, 8c qu’elle puiffe ainfi
agir également fur toutes les peaux & fur toutes, les j
parties de chacune. Si les plains qui doivent être.ou !
en partie , ou tout-à-fait. vifs avoient notablement
perdu de leur force, il faudroit y remettre une quantité
fuffifante de chaux , eu égard à la quantité de
peaux qui doivent y entrer 8c à l’a&ion qu’on en exig
e , ôc c’eft ce qu’on appelle pancerunplain , ce qui
T A N
ferait aitffi, lorfque les peaux font en retraite. Lés
peaux ayant été parfaitement plamées & ayant féjourné
fuflifamment dans les plains, il faut les porter
à 1a riviere & les y laver ; on les pofe enfuite fur
le chevalet pour les echarner, ce qui fe fait avec un
couteau à-peu-près femblable à celui dont on fe fert
pour ébourer, à l’exception que ce dernier doit être
tranchant. Après qu o i, on doit les quioffer, c ’eft-à-
dire les frotter à force de bras fur le chevalet avec
une efpece de pierre à éguifer, que l’on nomme quiof-
f i ou queux , pour achever d’ôter 1a chaux qui pour-
roit être reftée du côté oii étoit le poil, qu’on appelle
le côté de la fleur ; on ne doit faire cette dermere
operation qu’un ou deux jours après que les peaux
auront été lavées 8c écharnées. Auffi-tôt que les
peaux auront été ainfi quioffées ; on les met dans les
; foffes ; on les y étend avec foin, 8c on les poudre à
mefure avec du tan , c ’eft-à-dire avec de l’écorce de
jeune chêne, concaffée ÔC réduite en groffe poudre
dans des moulins deftinés à cet ufage, 8c que l’on
appelle pour cela moulins à tan. Il eft bon d’obferver
ic i, que plus le tan eft nouveau , plus il eft eftimé ,
car il perd beaucoup de fa qualité à mefure qu’il vieillit
; fa principale a&ion fur les cuirs étant d’en ref-
ferrer les pores, il eft confiant qu’il doit être moins
aftringent lorfqu’il eft furanné , & fi les Tanneurs
avoient à coeur de ne livrer des cuirs que parfaitement
apprêtés , ils fe ferviroient toujours du tan le
plus nouveau, vu que la bonté du cuir ne confifte ,
que dans la denfité 8c le reflerrement de fes parties ;
d’oîi il eft facile de- conclure, que plus les cuirs refirent
dans le tan pourvu qu’il foit nouveau, 8c plus
ils acquièrent de force 8c de confiftance pour réfifter
aux différens ufages auquels on peut les employer.
On donne aux cuirs fo.rts, cinq poudres, 8c même
fix, au lieu que trois ou au plus quatre doivent fuf-
fire lorfqu’ils le font moins, ^en obfervant de les imbiber
d’eau à chaque poudre qu’on leur donnera ,
ce que les Tanneurs appellent donner de La nourriture ;
pour nous, nous croyons effeflivement que l’eau
peut bien être aux cuirs une efpece de nourriture, en
ce qu’elle diffout le tan , 8c qu’elle en doit par confisquent
rendre les parties aftringentes y beaucoup
plus; faciles à pénétrer ; mais il faut auffi pour agir
fur la quantité de cuirs étendus dans 1a foffe, qu’il y
ait une quantité fuffifante de tan , que nous regardons
comme 1a principale 8c la vraie nourriture qui
doit donner aux cuirs fa perfe&ion. La première
poudre doit durer environ deux mois. La fécondé
trois ou quatre j 8c les autres cinq ou fix plus ou
moins , fuivant la force du cuir qui pourra s’évaluer
par là grandeur 8c l’épaiffeur de la peau, par l’âge de-
l’animal, 8c parle travail oit il aura pu être affujetti;
de forte que pour qu’un cuir fort ait acquis le degré
de bonté requis pour être employé , il faut qu’il ait
féjourné dans les foffes un an 8c demi, même deux-
ans , autrement on tanneroit par extrait, comme
dans le di&ionnaire du Commerce qui ne donne
aux cuirs les plus forts , qui exigent- au moins cinq
poudres , que neuf mois oc demi de féjour dans les
foffes. Nous favoos bien que peu de Tanneurs les y
biffent le tems que nous affurons être abfolument n é -,
ceffaire pour qu’ils foient parfaitement tannés ; mais
c’étpit une raifon de plus pour l’auteur du diôion-
naire , de relever l’erreur occafionnée, ou par l’avi- •"
di;té du gain, ou par l’impuiffance dé foutenir un
métier qui demande de groffes avances ; quelques
fpécienfgsque peuvent être les raifons des Tanneurs
pour.déguifer, ou leur avarice, ou leur impuiffance ,
nous n’en ferons jamaisdupes. La preuve la plus claire
& la plus facile à être apperçue parles yeux même
les.moins clairs-voyans, que les cuirs n’ont point
féjourné affez de tems,, foit dans les plains , foit
dans les foffe?, ou dans les deux enfemble, 8c qu’ils
f T A 11 n’bnt pas çtcfufii&mmentnoiirris dans les foffes : cfeft
orfqu en les fendant „ on apperçoit dans lé milieu
une raie blanchâtre, que l’on appelle la corne ou la.
cmdzu du cuir ; c’eft ce défaut qui eft caufe que les
femelles des fouliers ou des bottes s’étendent, tirent
le a u , 8c enfin fe pourriflbnt en très-peu , de-tems!
, - s, |ÜHSjflj| f°îs fuflifamment tannés, on les tire
de la folle pour les faire lécher en les pendant, en
®Ir ; eniuite- op les nétoie de-leur tan , & on,les!
fuet dans un lieu ni trop fec ni trop humide, on des?
etendapres , on les empile les uns fur lesautres, &
on met deffus dejroffes piêrres ou des poids de fer
afin de lès redrefler ; c’eft en cet état que le Tanneur
peut alors recueillir légitimement le fruit de fes.,travaux,
de fa patience , & de foninduftrie. Les cuirs
■ aPPrçtes^Appellent cuirs plaqués, pour les dif-
tmguer des autres différemment travaillés ■ c-tte
maniéré de tanner, s’appelle tanner en fort. On peut
u H J011 B H uflachvement enfort des cuirs de
vaches & de chevaux, & ils fe traitent de la même
mamere-due nous venons, d’expofer; mais il ne feutr
-eu eSard leur force qui eft moindre, ni qu’ils fé-
journent auffi long-tems dans les plains & dans les
iolies, m qu ils foient auffi nourris ; l’iifage indiquera
la quantité de tems & de nourriture qu’exi-
geront les cuirs , fur-tout lorfque le Tanneur laura
en diftinguer exaÔement la force. Lorfqu’on deftine
les cuirs de vaches ou de chevaux à faire les empeignes
& les quartiers des fouliers, 8c des bottes ƒ on
doit les rougir, ce qui s’appelle les mettre en coudre-
f> ce T 1,1 (e ^ait la maniere fuivante ; après
qu ils ont ete jilamés à la chaux de 1a façon que nous
avons indiqiiee, ce qui exige beaucoup moins de
tems, vu qu ils ne font pas à beaucoup près fi forts que
es cuirs de boeufs. On les arrange dans une cuve de
do is , appedee empnmerie, on y met enfuite de l’eau
rroide en allez grande quantité pour pouvoir remuer
es cuirs, en leur donnant un mouvement circulaire ;
&c c elt precifement dans cé tems qu’on verfe peu-
â-peu 8c tres-dou cernent le long des bords de la cuve,
de 1 eau un peu plus que tiede en affez grande quan-
tite poûr echâuffer le tou t, enfuite on jette par--
deflus plein une corbeille de tan en poudre ; il but
bien fe donner dégarde de ceffer de remuer les cuirs
en tournant, autrement l’eau & le tan pourroient
les brûler; cette opération s’appelle coudrer Us cuirs
ou ïes brader pour faire lever le grain ; après que lés
cuirs ont ete amfi tournés dans 1a cuve pendant une
heure ou deux plus ou moins, fuivant leur force 8c
la chaleur du coudrement ; on les met dans l’eau
îroide pendant un jour entier, on les remet enfuite
oans la meme cuve 8c dans la même eau qui a fervi à
les rougir dans laquelle ils relient huit jours : ce
tems expiré on les retire , on les met dans la fpffe , ;
oc on leur donne feulement trois poudres de tan
dont la première dure cinq à fix femaines, la fécondé
deux mois, 8c la troifieme environ trois. Tout le
relié fe pratique de même que pour les. cuirs forts.
Ces cuirs ainfi apprêtés , fervent encore~aux Selliers
octaux Malliers. Les peaux de veaux reçoivent les
memes apprêts que ceux des vaches 8c chevaux qu’on
a mis en coudrement, cependant avec cette différence
que les premiers doivent être rougis ou tournés dans
la cuve plus de tems que les derniers. Quand les
cuirs dé chevaux, de vaéhes & de veaux ont été
plames, coudrés tannés , 8c qu’on les a fait lécher
au fortir de la foffe au tan ; on les appelle cuirs
OU peaux en croûte, pour les diftinguer des cuirs plaques,
qui ne fervent uniquement qu’à faire les femeb
les des fouliers & des botte?,. Les peaux de veaux en
coudrement fervent aux mênies .ouvrages que les
cuirs des vaches qui ont eu le même apprêt; mais
elles fervent à couvrir les livres', à faire desjour-
reaux depee , des étuits 8c des gaines; ^ couteaux,.
Iorfqu,ÊÎtesoiit ete ontreeelapaffees en alun.Lcs peaux
de mouton , béhets ou brebis en coudrement qu’on
n om m e taiannes-, fervent auffi à couvrir deslivres &
fts,.Cordonniers les empioyent aux talons des fouliers
oc des bottes pour les couvrir. Enfinles Tanneurs paf-
ci: encore en coudrement & en alun , des peaux
de fangliers , de cochons ou de truies ; ces peaux
î,“ yf ” l a “ “ v,nr dcs tabl“ » des malles & des livres
d eglife. Il eft A-propos d’obferver ic i, que prefimé
tous les artifansiqju emploient ces différentes etpe!
ces de peaux , né te fervent de la plupart q tiV
près qu elles,ont encore été apprêtées par les Cour-
royeurs ; nous tra.terons ce, article en fon M
pallons a la,façons de planter les peaux à 1 W .
ainwle II. Maniéré de plamer les peaux 1 Vornéi
Apres avoir oté les cornes, les oreilles & la queue
aux peaux & les avoir lavées & nettoyées comme
nous lavonsmdiquopour les plamer à la chaux ôri
les met dans des cuves, foit de bois > foit de pierres
& ,au lieu, de chaux, on fe fert de ferme d’orse &
,0n le,s fait pafler fucceffivement dans quatre Sfi’x 8c
m êm e ^ ç u v e s fuivant la forc e ,d e sL te : ces c“
ves^.appellent iiif« »™ & équivalent aux plains j
» e f t à remarquer, que quoique fes Tanneurs
nayent ffS efleaivéntent le:nombre de plains où
de ballemens que nous indiquons être nécefiàires •
les peaux font cependant cenlées paffer parScê nont’
bre de plains ou de baffemens , parce- que la même
cuve .peut en remettant, S d e la chaux, fi c’éft im
plain oir de fa farine d’orge, fi c’eft un baffement
d “ ne M l d?llx >même de trois B U plains
foit baffemens-; de forte que pour ce qui regai-de les
plains, la^ cuve qui aura fervi au moreplâin, neuf
fervir apres de plain-vir, fi on le pence pour cet^effet
H H W f f l Ê m LeS p e 3 u x reftent dans-ces
différens baffemens, environ quinze jours dans cha-
que, & cette progreffifin tucceifive dés peaiix de
baffement en baffement, peut durer quatrJlTnb
metpfefix mois sfelonque le tanneur les a poufféês
& nourries, & félon la force des cuirs q'tiïl H pofés^
Ordinairement les peaux fortant du premier b S
fement font en état d’être ébourrees ; l ’ouvrier a,V
tentit peut foui décider de ce, inftant, & lé feifir
Lorfl[tf e les peaux ont fuffifamment féjourné dans les
baffemens; ,, on les lave , on les nettoie & on les
echarne , comme nous 1 avons tndiqué en traitant la
maniéré deplamer à la chaux ; aprèéquoi on les éofe
dans les folies Ot on les y traite de la même 1 1 1
■ ■ ■ fellle différence qu’il pourroit y
avom„ce ft quelles ne fejournent pas à'beaucoup
près fi long-tems dans les baffemens, fur-tout s’ils
fppt:b,ennourns, que dans les plains qu’il n’eft vuere
poffibie.de hâter, crainte déibrtiler les cuirs. N o u s
appelferons ces fortes de baffemens baffemens i la n c f , '
pour.les diftinguer des baffemens ronges , dont n o S
allons parler en expliquant la manière6 de plamer les
peaux à la gigée. r es
Article III. Maniéré de plamer les cuirs à la-, gigée Les
peau* forces des mains du boucher, on les nettoie
tom me pour les plamer des deux façons que noué
venons de traiter:,; lorfqu’elles,-ffont bien ?avées &
btep egouttees , on les- met dans des étlivésH on lei
étend tur des perches les unes, fur les-autres ; quand
la chaleur les a pénétrées,& quand elles font échaufe
fees au point que le poil 1« puiffe facilement quitter!
or. le met fur le chevalet pour les êbeurrer ; & s’il
fe trouve des endrpfeoi, lle.poSl H H H f e «
du fable que 1 on feme fur la peau ; & en la frottant
avec.le,couteau de nvieré, dont nons avons parlé
en, traitant la manière de plamer i l» chaux , on en-?
leve le poil qui avoit d’abord réfifté à la feule aèioii
du couteau. Les. peaux ne.reftent ordinairement quei
tt-ois ou quatre jours dans ces étuves ; au refte ’ la'
p l u s « moins de tems. dépend abfolument du plus