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S ic tïbi cumjluclus fubterlàbêre Sicanos,
jDoris amarafuam non intermifceat undam.
Àcradine, fituée entièrement fur le bord de la
tîier, 6c tournée vers l’orient, étoit de tous les quartiers
de la viile-le plus fpacieux ,1e plus beauôc le plus
fortifié, félon Strabon, liv, F I . pag. 270.
Tiÿttc,:ainfi appellée du temple de la Fortune, To-
_%», qui ornoit cette partie, s’étendoit le long de l’A-
chraaine au couchant, depuis le feptentrion vers le
midi. Elle étoit fort habitée ; elle avoit une fameufe
porte , nommée Hcxapyle, qui conduifoit dans la
campagne , 6c elle étoit fituée au feptentrion de la
ville.
Epipole étoit une hauteur hors de la ville, & qui
la commandoit. Elle étoit fituée entre Hexapyle 6c
la pointe d’Euryelle, vers le feptentrion 6c le couchant.
Elle étoit en plufieurs endroits fort efcarpée,
-&C pour cette raifon d’un accès difficile. Lorlque les
Athéniens firent le fiege de Syracuf&, Epipole n’é*
toit .point fermée de murailles ; les Syracul’ains la
.gardoient avec un corps de troupes contre les attaques
des ennemis. Euryele étoit l’entrée & le pafla- .
oe qui conduifoit à Epipole. Sur la même hauteur
d’Epipole étoit un fort, nommé Labdalc. Ce ne fut
•que long-tems après, fous Denys le tyran, qu’Epi-
pole fut environnée de murs , & enfermée dans la
ville, dont elle fit une cinquième partie, mais qui
étoit peu habitée. On y en avoit déjà ajouté une quatrième
, appellée Néapolis, c’eft-à-dire ville neuve, qui
■ couvroit Tyque.
La riviere Anape couloit à une petite demi-lieuê
de la ville. L’efpace qui'les leparoit étoit une grande
prairie, terminée par deux marais ; l'un appelle Sy-
raco, qui avoit donné Ion nom à la ville, 6c l’autre
Lyjimele. Cette riviere alloit fe rendre dans le grand
port. Près de l’embouehure vers le midi, étoit Une
efpece de château, appellé Olympie,k caufe du temple
de Jupiter olympien qui y étoit, 6c où il y avoit
de grandes richefi'es. Il étoit à cinq cens pas de la
ville.
Syracufe, comme nous l’avons vu, avoit deux ports
tout près Fuji de l’autre, & qui n’étoient féparés que
par l’île, le grand 6c le petit, appellés autrement
lacus. Selon la defcription qu’en fait Cicéron, ils
étoient .l’un 6c l’autre, environnés des édifices de la
ville. Le grand avoit de circuit un peu plus de cinq
milles pas, ou de deux lieues.
Ce port avoit un golfe, appellé Dafcon. L’entrée
du port n’avoit que cinq cens pas de large. Elle étoit
fermée d’un côte par la pointe de l’île Ortygie, & de
l’autre par la petite île, 6c par le cap de Plemmyrie,
qui étoit commandé par un château de même nom.
Au-deflus de l’Achradine étoit un troifieme port nom-
' mé le port de Trogile.
Cette ville fut fouvent affiégée fans être prife ;
mais enfin Marcelius, qui avoit eu la Sicile pour département
, réduifit toute cette île fous la puiffance
du peuple romain, en fe rendant maître de Syracufe,
qui fut emportée , malgré le génie d’Archimede, qui
employoit tout fon favoir à défendre fa patrie. On
prétend que les richeffes qui furent pillées par les
Romains au fac de Syracufe, égaloient celles qui furent
trouvées bientôt après à Carthage. Il n’y eut
que le tréfor des rois de Syracufe qui ne fut point
pillé par le foldat. Marcelius le réferva pour être
porté-à Rome dans le tréfor public.
On difoit communément que Syracufe produifoit
les meilleurs hommes du monde, quand ils le tournoient
à la vertu, 6c les plus méchans, lorfqu’ils s’a-
donnoient au vice ; quoique portés naturellement à
la volupté , les fâcheux accidens qu’ils effuyerent,
les remirent dans le devoir. Ils défendirent aux femmes
les robes riches , 6c mêlées de pourpre, à-moins
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qu’elles ne vouluffent fe déclarer courtîfanes publiques
; 6c les mêmes lois 'défendoient aux hommes
d’avoir de femblables ornemens,’ s’ils ne vouloient
paffer pour gelis qui fervoient à corrompre les femmes.
Les Syracufains eurent une chanfon & une danfe
particulière de Minerve cuiraflee. A l’égard de leurs
funérailles, ce que Plutarque raconte de Dion, qui-
accompagna le corps d’Héraclide à la fépulture ,
avec toute l’armée qui le fuivit, fait juger que leur
coutume étoit d’enterrer les mortscependant Dio-,
dore de Sicile dit qu’Hozithemis, envoyé par le roi
Démétrius, fit brûler le corps d’Agathoclès.
Leurs forces furent bien confidérables, puifque
Gelon, s’étant fait tyran de Syracufe ,• vers l’an 260
de Rome, promit aux Grecs de leur fournir un fe-
cours de deux cens galeres, de vingt mille hommes,
armés de toutes pièces, de deux mille chevaux armés
de la même façon, de deux mille foldats armés à la
légère, de deux milles archers , & de deux mille ti-
- reurs de fronde \ avec le blé qui leur feroit néceffaire
durant la guerre contre les Perfes. Denys eut auffi
cinquante gros vaiffeaux, avec vingt ou trente mille
hommes de pié, 6c mille chevaux. Denis le jeune ,
fon fils, fut encore plus puifiant, pitifqu’il eut quatre
cens vaiffeaux ou galeres, cent mille hommes de pié
& dix mille chevaux.
• Ils avoient une loi, fuivant laquelle ils dévoient
élire tous les ans un nouveau prêtre de Jupiter ; ils
I avoient auffi une confrairie de miniftres de Cérès &c
de Proferpine, & il falioit faire un ferment folemnel
pour en pouvoir être. Celui qui devoit jurer entroit
dans le temple des déeffes Thefmofphores, Cérès
6c Proferpine, fe revêtoit après quelques facrifices,
de la chape de pourpre de Proferpine, 6c tenant en
fa main une torche ardente , il prétoit le ferment.
Mais il faut confulter fur l’ancienne Syracufe le cavalier
Mirabella. J’ajouterai feulement que cette ville
qui avoit un fénat, dont il n’eft prefque jamais fait
mention dans l’hiftoire , quoiqu’il fût compofé de fix
cens membres ,» effuya des malheurs que la . corruption
ordinaire ne donne pas. Cette ville toujours
dans la licence ou dans l’oppreffion, également travaillée
par fa liberté & par fa fervitude, recevant
toujours l’une 6c l’autre comme une tempête , 6c
malgré fa puiffance au dehors, toujours déterminée
à une révolution par la plus petite force étrangère,
avoit dans fon fein un peuple immenfe qui n’eut jamais
que cette cruelle alternative, de fe donner un
tyran , ou de l’être lui-même.
Syracufe foutint la guerre contre les Athéniens,
les Carthaginois & les Romains ; mais elle fut fou-
mife par Marcelius, l’an 452 de la fondation de Rome.
Ce grand homma fauva les habitàns de la fureur
du foldat, qui piqué d’une réfiftance trop opiniâtre,
vouloit tout mettre à feu & à fang. Il conferva à
cette ville fa liberté, fes privilèges 6c fes lois. Enfin
les Syracufains trouvèrent dans leur vainqueur un
prote&eur 6c un patron. Pour lui marquer leur re-
connoiffance, ils établirent en fon honneur une fête
qui fe célebroit encore du tems de Cicéron, 6c que
cet orateur compare à celle des dieux.
Marcelius au milieu'de fa gloire, fut extrêmement
touché de la mort d’Archimede ; car il avoit çxpref-
. fément ordonné qu’on prît foin de ne lui faire aucun
mal. Archimede étoit occupé à quelque démonftra-
tion de géométrie pour la défenle de fa patrie, dans
le tems même qu’elle fut prife. Un foldat brutal étant
entré dans fa chambre, & lui ayant demandé fon
nom, Archimede pour réponfe,le pria de ne le point
interrompre. Le foldat piqué de cette efpece de mépris
, le tua fans le connoître.
Ce favant géomètre périt ainfi à l’âge de 75 ans ,
dans la 142e olympiade, l’an de Rojne 452., 2
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ans ayant J. C. Archimede-avoit fouhaité que ceux
qui prendroient foin de fa fépulture, fiffent graver
fur fon tombeau .une fphere & un cylindre, ce qu’ils
ne manquèrent pas d’exécuter., 6c ils y ajoutèrent
uné infeription en vers de fix piés. Son deffein étoit
d’apprendre à la poftérité, que fi parmi ce grand
nombre de découvertes qu’il avoit faites en Géométrie
, il .en ' eftimoit quelqu’une plus que les autres ,
c’étoit d’avoir trouve la proportion du cylindre à la
Iphere qui y effconténueiL'.
Cicéron nous apprend .dans fes tufculanes ,liy .V \
ji° . 62-6’(?.'quece monument fi remarquable étoit in-
qonnu de fontenisà Syracufe.« Lors , dit-il, que j’é-
» lois quèfieur enSicile, la curiofité me.porta à cher-:
«çhçr le tombeau d’Archimede. Je le démêlai, mal-
>>-gré les ronces& les épines dont il étoit prefque
«couvert ; 6c' malgré d’ignorance des Syracufains ,
n qui me jfoutenoient que ma recherche feroit inutile,
» & qu’ilsî Ah voient point chez, eux ce monument.
» Cependant je favôis par coeur- certains vers'fénaires
» que l’on .m’âvoit.donnés pour ceux qui étoient gra-
»> ves fur ce tombeau ,>6c où il étoit fait mention d’u-
» ne figure .fphérique, 6c â 1 un cylindre qui deyoient
« y être. Etant donc- un jour hors de la porte qui regarde
Agragas (Agrigente)jettant les yeux avec
« foin de tous côtés ,j’apperç.us parmi un grand nom-
« bre de tombeaux qui font clans cet endroit-là , une-
«-colonne.un' peu plus élevée, que les ronces qui l’én-
» vironnoient, & j’y remarquai la figure d’une fphe-
» re 6c d’un cylindre.! Aum-tôt adreffant la parole-
».-aux principaux de la ville qui étoient avec moi, je
y leur dis que je croyois voir le tombeau d’Archime-
» de. On envoya fur le champ des hommes qui net-
» toyerent la place avec des faùlx, & nous firent un:
» paffage^.Nous.approchâmes, 6c nous vîmes l’inf-.
» cription qui paroiffoit encore , quoique la -moitié
» des lignes fut effacée par le tems. Ainli la plus gran-
» dé ville de Grece, 6c qui anciennement avoit été
» la plus floriffante par l’étude des lettres, n’eut pas
connu le tréfor qu’elle poffédoit, fi un homme ,
>>;né dans un pays qu’elle regardoit prefque comme
» barbare,un arpinate,n’eût été luidécouvrir le tom-
» beau d’un de fes citoyens, fi diflingué par la jufteffe
» 6c par la pénétration de fon efprit.
Le peuple àe-Syracufe, fi paffionné autrefois pour
les fçiences, qui avçfit fourni au monde des hommes
illuftres en toute efpece de littérature ; ces hommes
fi amoureux de la belle poéfie , que dans la déroute
des Athéniens, ils accordoient la' vie à celui qui pou-
voit leur réciter les vers d’Eurypide;ces mêmes hommes
étoient tombés dans une profonde ignorance,
l'oit par une révolution , qui n’eft que trop naturelle
aux chofes du monde, foit que le changement arrivé
plufieurs fois dans le gouvernement en eût apporté
dans l’éducation des hommes 6c dans les maniérés
de penfer. La domination des Romains avoit
frappé le dernier coup,& abâtardi les efprits au point
qu’ils l’étoient, lorfque Cicéron alla quefteur en Sicile.
Le même jo ur qui met un homMe libre aux fers,
L u i ravit la moitié de fa vertu première.
Tandis qu’on eft obligé à Cicéron de fon curieux
récit de la découverte du tombeau d’Archimede, on
ne lui pardonne pas la maniéré méprifante dont on
croit qu’il a parlé d’abord du grand mathématicien
de Syracufe, immédiatement avant le morceau qu’on
yient de lire. L’orateur de Rome voulant oppofer à
la vie malheureufe de Denys le tyran , le bonheur
d’une vie modérée 6c pleine de fageffe, dit : « je ne
» comparerai point la vie d’un Platon 6c d’un Archy-
» tas, perfonnages confommés endoftrine 6c en ver-
>> tu , avec la vie de Denys, la plus affreufe, la plus
# remplie de miferes , 6c ia plus déteftable que l’on
Tome X y .
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b puiffe imaginer. J’aurai recours à un homme de la
» meme ville que lui, un homme obfcur, qui a vécu
» plufieurs années après lui. Je le tirerai de fa pouf-
» iiere, 6c je le ferai paroître fur la fcèhe , le compas
» à la main, cethomme eft Archimede-, dont j’ai dé-
» couvert le tombeau» ; 6c le refte que nous avons
d abord traduit ci-deffus. E x eadem tube hominem ho-
muncionem a pulvere & radio ex citabo , qui multis an~
nis pofl fuit, Archimedem.
• Je ne p “ s meperfuaderquç.Cic:eroh/ïi curieux
dé d e c ïw r ir le toitibeau d’Àrchiniède, tiùomphant
en quelque maniéré d’avoir rduffi,& d,’a!raiï fait re-
vivre cer homme j i dïjtin^èpar la pinlwatUn & parla.
dc jhn cfpnt, ce foutjfes. terrnes.: ic ne puis ,
dis-je, me periuader qu’il ait eu deflein de ir.arqutr
eq même tems^dqmépris pour liti,& qù’i] le foitcon-
tredit figloffieremênt.-Di(offSfl8néqtté Cicéron fait
aiiulion à iîoiibü dans lequel Archimede étoit tombé
jufqueÿjà, que fés prôpr&icbncitoyens l’ignoroient!
A-trifï la pt-nfee de Ciiceeoii eft, qu’il hë-mettroit pas
Denysen p.arallelè.avec^derbommes cêfebtbsïtrahu,
géfs & çotînits, mais avec tm homme otjiur en ap-
paience, éhfeveh dans I oubli, inconnu dans fa propre
pdfrie-j qu’il avoit été obligé *d’y déterrer &£
qui paf eèiàT-même fàifoit? un contrafle plus fraps
panfl i ■ ' 1 r ’
Par ces motsye le tirerai de lapoufjjere, cette pouf-
fief é ne doit pas fe prendre dans le fens figuré, mais
dans Je fens propre ; c’eft la pouffiere fur laquelle on
traçoit des figures de géométrie dans les écoles d’Athènes.
Si cette pouffiere', pulvis , n’a rien de bas ,
cé radius, cette baguette qui fervoit à y tracer des fi-
gufes, n’a rien qui le foit non-plus : Dèfcripjit radio
totum quigentibus orbem. C ’eft cette baguette quePy-
thago.re tient à la main dans un beau révers d’une médaille
des Samiens, frappée à l’honneur de l’empe1-
re[,r Commode, 6c dans une ^utre , frappée par lés
mêmes Samiens, en l’honneur d’Herennia Etrufcilla,
femme de Trajanus Decius.
Il nous refte plufieurs ouvrages d’Archimede &
l’on fait qu’il y en a plufieurs de perdus. Entre’ les
ouvrages; qui nous reftent, il faut mettre affumpto-
rum, Jive lemmatum liber, qu’Abraham Echellenfis a
traduit de l’arabe, 6c qui a paru avec les notes de'Bo-
relli à Florence, en 1661 , in fol. Il y a fous le nom
d’Àrchimede un traité des; miroirs ardens, traduit de
l’arabe en latin par Antoine Gogava. On a d’ailleurs
les ouvrages fuivans, qui ne font pas imprimés : de
fractione circuit, en arabe, par Thebit. perfpecliva ,
en arabe. Opéra geometrica Arckimedis in compendium
redacla per Albertum. Bartolocci affure qu’on trouve
dans la bibliothèque du Vatican, en hébreu mf. les
élemens de mathématique d’Archimede.
On pourroit mettre au rang des ouvrages perdus
de ce grand homme , la defcription des inventions
dont il étoit l’auteur, & qu’on peut recueillir des fes
écrits , & des autres anciens. Tels font i° . T?f
STupctviïç , méthode pour découvrir la quantité d’argent
mêlé avec l’or dans une couronne ; voye^ le récit
que Vitruve, 1. IX . c. iij. nous a fait de cette découverte.
20. Une autre invention d’Achimede , le
xo'^A/ov, machine à vis pour vuider l’eau de tous
endroits. Diodore de Sicile nous apprend qu’il inventa
la roue égyptienne, qui tire l ’eau des lieux
les plus profonds; 30. L’he lix, machine à plufieurs
cordes & poulies, avec laquelle il remua unegalere
du roiHiéron. 40. Letrifpafte ou polyfpaftes, machine
pour enlever les fardeaux. 50. Les machines
dont il fe fervit pour la défenfe de Syracufe, que Po-
ly b e , Tite-Live & Plutarque , ont amplement décrites.
6°. Les miroirs ardens avec lefquels on dit
qu’il mit le feu aux galeres des Romains. Voye^ les
mém, de Tacad, des Sciences, 70 Ses machines pneu