1
tés 8c de toutes Tes forces. T elle eft l’origine des fou-
ver ains. L’on voit que leur pouvoir 8c leurs droits
ne font fondés que fur le contentement des peuples;
ceux qui s’établiffent par la violence, ne font que
des ufurpateurs; ils ne deviennent légitimes , que
lorfque le confentement des peuples a-confirme aux
Souverains les droits dont ils s’étoient emparés.
Les hommes ne fe font mis en fociété, que pour
être plus heureux ; la fociété ne s’eft choifi des fou-
ver ains que pour veiller plus efficacement à fon bonheur
& à fa confervation. Le Bien-être d’une fociété
dépend de fa fureté , de fa liberté & de fa puif-
fance, pour lui procurer ces avantages. Il a fallu que
le fouverain eut un pouvoir fuffifant pour établir le
bon ordre 8c la tranquillité parmi les citoyens, pour
•affurer leurs pofl'eflions, pour protéger les foibles
contre les entreprifes des forts, pour retenir les paf-
'fions par des peines, 8c encourager les vertus par
des recompenies. Le droit de faire ces lois dans la
fociété, s’appelle puiffance légifative. Voyei L égisla
t io n ,
Mais vainement le fouverain -aura-t il le pouvoir
‘de faire des lois , s’il n’a en même tems celui de les
faire exécuter : les pallions 8c les intérêts des hommes
font qu’ils s’oppofent toujours au bien général,
lorfqu’il leur paroit contraire à leur intérêt particulier.
Ils ne voient le premier que dans le lointain ;
tandis que fans ceffeils ont le dernier fous les yeux.
Il faut donc que le fouverain foit revêtu de la force
-néceffaire pour faire obéir chaque particulier aux
lois générales , qui font les volontés de tous, c ’eft ce
qu’on nomme puiffance exécutrice.
Les peuples n’ont point toujours donné la même
étendue de pouvoir aux fouverains qu’ils ont choifis.
L ’expérience de tous les teins apprend, que plus le
pouvoir des hommes eft grand, plus leurs pallions
les portent à en abufer : cette considération a déterminé
quelques nations à mettre des limites 41a puiffance
de ceux qu’elles chargeoient de les gouverner.
Ces limitations de la fouveraineté ont varié,
fuivant les circonftances , Suivant le plus ou moins
d ’amour des peuples pour la liberté, fuivant la grandeur
des incorrvéniefls auxquels ils s’étoient trouvés
entièrement expofés fous des fouverains trop
-arbitraires : c’eft-Ià ce qui a donné naiflance aux différentes
divifions qui ont été faites de la fouveraineté
8c aux différentes formes des gouvernemens.
En Angleterre, la puiffance-légiflatiye réfide dans le
roi 8c dans le parlement : ce dernier corps repréfente
la nation, qui par la conftitution-britannique,
s’efl: réfervé de cette maniéré une portion de la
puiffance fouveraine ; -tandis qu’elle a abandonné au
roi feul le pouvoir de faire exécuter les lois. ‘Dans
l ’empire d’Allemagne, Tempereur ne peut faire des
lois qu’avec le concours des états de l’Empire. U faut
■ cependant que la limitation du pouvoir ait elle-même
des bornes. Pour que le fouverain travaille au bien
de l’état, il faut qu’il puiffe agir 8c prendre les mesures
néceffaires à cet objet; ce feroit donc un vice
dans un gouvernement, qu’un pouvoir trop limité
dans le fouverain : il eftaifé de s’appercevoir de ce
yice dans les gouyernemens fuédois 8c polonois.
D ’autres peuples n’ont point ftipulé par des aCtes
exprès 8c authentiques les limites qu’ils fixoient à
leurs fouverains ; ils le font contentés de leur impofer
la néceflité de fuivre les lois fondamentales de l’état,
leur confiant d’ailleurs la puiffance légiflatiye , ainfi
que celle d’exécuter. C’ eft-là ce qu’on appelle fouveraineté
abfolue. Cependant la droite raifon fait voir
qu’elle a toujours des limites naturelles ; un fouverain
, quelque abfoht qu’il fo it , n’eft point en droit
de toucher aux lois conftitutives d’un état, non-plus
q u ’à fa religion ; il ne peut point altérer la forme du
gouvernement, ni changer Tordre de la fucceffion,
à-moins d’une autorifation formelle de fa nation;
D’ailleurs il eft toujours fournis aux lois de la juftico
8c à celles de la raifon, dont aucune force humaine
ne peut le difpénfer.
Lorfqu’un fouverain abfolu s’arroge le droit de
changer à fa volonté les lois fondamentales de fon
pays ; lorfqu’il prétend un pouvoir arbitraire fur la
perfonne 8c les poffeflions de fon peuple, il devient
un defpote. Nul peuple n’a pu ni voulu accorder un
pouvoir de cette nature à fes fouverains ; s’il l’avoit
fait, la nature 8c la raifon le mettent toujours en
droit de réclamer contre la violence. Voye^ Varticle
P o u v o i r . La tyrannie n’eft autre chofe que l’exercice
du defpotifme.
La fouveraineté lorfqu’elle réfide dans un feul
homme , foit qu’elle foit abfolue, foit qu’elle foit limitée,
s’appelle monarchie. Voyez -cet article. Lorf-
qu’elle réfide dans le peuple-même, elle eft dans
toute fon étendue , & n’eft point fufceptible de limitation
; c’eft ce qu’on appelle démocratie. Ainfi chez
les Athéniens la fouveraineté réfidoit toute entière
dans le peuple. La fouveraineté eft quelquefois exercée
par un corps , ou par une affemblée qui repréfente
le peuple, comme dans les états républicains.
En quelques mains que foit dépofé le pouvoiry軫-
vtrain , il ne doit avoir pour objet que de rendre
heureux les peuples qui lui font fournis ; celui qui
rend les hommes malheureux eft une ufurpation ma-
nifefte 8c un renverfement des droits auxquels l’hom-,
me n’a jamais pu renoncer. L e fouverain doit à fes fumets
la sûreté, ce n’eft que dans cette vue qu’ils fe font
fournis à l’autorité. Voyeç P r o t e c t i o n . Il doit établir
ie bon ordre par des lois falutaires , il faut qu’il
foit autorifé à les changer , fuivant que la néceflité
des circonftances le demande ; il doit réprimer ceux
qui voudroient troubler les autres dans la jouiffance
de leurs poffeflions, de leur liberté, de leur perfonne;
il a le droit d’établir des tribunaux 8c des magiftrats
qui rendent la juftice , 8c qui puniffentles coupables
fuivant des réglés sûres 8c invariables. Ces lois s’appellent
civiles, pour les diftinguer des lois naturelles
8c des lois fondamentales auxquelles le fouverain lui-
même ne peut point déroger. Comme il peut changer
les lois civiles , quelques perfonnes croient qu’il
ne doit point y être fournis ; cependant il eft naturel
que le fouverain fe conforme lui-même à fes lois tant
qu’elles font en vigueur, cela contribuera à les rendre
plus refpeétables à fes fujetsl
Après avoir veillé à la sûreté intérieure de l’état,1
le fouverain doit s’occuper de fa sûreté au-dehors ;
celle-ci dépend de fes richeffes -, de fes forces militaires.
Pour parvenir à ce but, il portera fes vues fur
l’agriculture, fur la population, furie commerce ; i l
cherchera à entretenir la paix avec fes voifins , fans
cependant négliger la difcipline militaire , ni les forces
qui rendront fa nation refpeftable-à tous ceux qui
pourraient entreprendre de lui nuire, ou de troubler
fa tranquillité ; de-là naît le droit que les fouverains
ont de faire la guerre , de conclure la paix , de former
des alliances, Oc. Voye{ P a i x , G u e r r e , Puis-.
SANCE.
Tels font les principaux droits de la fouveraineté
tels font les droits des fouverains ; l’hiftoire nous fournit
des exemples fans nombre de princes oppref-
feurs , de lois violées, de fujets révoltés. Si la raifon
gouvernoit les fouverains, les peuples n’auroient
.pas befoin de leur lier les mains, ou de vivre avec
eux dans une défiance continuelle; les chefs des nations
contens de travailler au bonheur de leurs fuje
ts ; ne chercheroient point à envahir leurs droits.
Par une fatalité attachée à lanature humaine, les hommes
font des efforts continuels pour étendre leur pouvoir
; quelques digues que la prudence des peuples
ait YQidu leur oppofer, il 11’ea eft point que l'ambition
bition te la force ne viennent à bout de rompre Ou d*é-
luder. Les fouverains ont un trop grand avantage fur
les peuples ; la dépravation d’une feule volonté fuffit
dans le fouverain pour mettre en danger ou pour détruire
la félicité de fes fujets. Au-lieu que ces derniers
ne peuvent guere lui oppofer l’unanimité ou le
concours de volontés 8c de forces néceffaires pour
réprimer fes entreprifes injuftes.
Il eft une erreur funefte aubonheur des peuples,
dans laquelle les fouverains ne tombent que trop
communément ; ils croient que la fouveraineté eft
avilie dès lors que les droits font refferrés dans des
bornes» Les chefs de nations qui travailleront à la
félicité de leurs fujets, s’affurerontleur amour, trouveront
en eux une obéiffance prompte , 8c feront
toujours redoutables à leurs ennemis. Le chevalier
Temple difoit à Charles II. qu’un roi d'Angleterre qui
eft l'homme de fon peuple , efl le plus grand roi du monde
1 mais s’ il veut être davantage , il rüeft plus rien. Je
veux être P homme de mon peuple, répondit le monarque
» Fcye{ les articles PO U VO IR , A U T O R IT É ,
P u i s s a n c e , S u j e t s , T y r a n .
S o u v e r a i n , ( Jurifprud.) c e t it r e e f t d o n n é à c e r ta
in s t r ib u n a u x , com m e a u x c o n fe i ls fouverains , a u x
c o u r s fouveraines ; c e q u i n e fig n ifie p a s q u e Ces ju g
e s a y e n t u n e au to r ité fouveraine q u i le u r fo i t p ro p r e ,
m a is q u ’ils e x e r c e n t la ju f t ic e a u n om du fouverain.
A la table de marbre, on appelle tenir le fouverain,
ïorfque les commiffaires du parlement viennent y
tenir l’audience»
D e m êm e a u x r e q u ê te s d e T h ô t e l , le s m a ît r e s
d e s r e q u ê te s , é ta n t a u n om b re de f e p t , ju g e n t au
fouverain c e r ta in e s c a u fe s d o n t ils fo n t ju g e s en d e r n
ie r reflort» Foye{ C o n s e i l s o u v e r a i n , C o u r
s o u v e r a i n e , M a î t r e d e s r e q u ê t e s , R e q u ê -t
TES DE L’HOTEL. ( A )
Souverain , ( Monnoie.') c’eft le nom d’une mon-
noie frappée en Flandres vers le commencement du
dernier fiêcle. Il y avoit aüfli un àemi-fouverain 8c
un quart de fouverain. Le fouverain de Flandres étoit
du poids de fix deniers 12 grains, ou a gros 12
grains trébuchans, 8c étoit reçu en France pour 13
livres.. Le demi - fouverain valoit 10 livres 10 fous,
pefant t gros 6 grains ; le gros 3 liv. 5 fous pefant
demi gros 3 grains» Cette monnoie n’a pas toujours
eu le même type. Le livre qui contient les réglemens
faits en 1641 pour les monnoies, donne la figure de
deux fouverains , dont le premier frappé en 1616, a
d’un côté les effigies des archiducs Albert &Elifabeth
afiis, & de l’autre côté -l’écu d’Autriche. Le fécond
frappé en 1Ô21, a d’un côté lé bufte de Philippe IV.
roi d’Efpagne , & de l’autre côté,fon écu. ( D . J. )
■ SOUVERAINETÉ, ( Gouvernement. ) on peut la
définir avec Puffendorf, le droit de commander en
dernier reffort dans la fociété c ivile , que les membres
de cette fociété ont déféré à une feule ou à plu-
heurs perfonnes, pour y maintenir Tordre au-dedans,
& la défenfe au-dehors, 8c en général pour fe procurer
fous cette proteérion un véritable bonheur, &
fur-tout l’exercice affuré de leur liberté.
Je dis d’abord que la fouveraineté eft le droit de
commander en dernier reflort dans la fociété, pour
faire comprendre que la nature de la fouveraineté
confifte principalement en deuxehofes ; la première
dans le droit de commander aux membres de la fociété
, c eft-à-dire de diriger leurs aérions avec empire
Ou pouvoir de contraindre ; la fécondé eft que ce
droit doit être en dernier reffort, de telle forte que
tous les particuliers foient obligés de s’y fotutiettre ,
Jans qu’aucun puiffe lui réfifter : autrement fi cette
autorité n’étoit pas fupérieure , elle ne pourront pas
procurer à la fociété Tordre & la sûrete qui font les
fins pour léfqudles elle a été établie,
Tome
Je dis enfuite que c’eft un droit déféré à line ou k
plufieurs perfonnes , parce qu’une république eft aufli
bien fouveraine qu’une monarchie»
J’ajoute enfin, pour fe procurer fous cette protec*
tion un véritable bonheur, &c. pour faire connoître
que la fin de la fouveraineté eft la félicité des peuples»
On demande quelle eft la fource prochaine de la
fouveraineté, 8c quels en font les caraôeres ? Il eft
certain que l’autorité fouveraine, ainfi que le titre fur
lequel ce pouvoir eft établi, 8c qui en fait le droit *
reluit e immédiatement des conventions mêmes qui.
forment la fociété civile , 8c qui donnent naiflance
au gouvernement. Comme la fouveraineté réfide originairement
dans le peuple, 8c dans chaque particulier
par rapport à fobmême , il réfulte que c*eft le
tranfport 8c la réunion des droits de tous les particuliers
dans la perfonne du fouverain, qui le conftitue
t e l, 8c qui produit véritablement la fouveraineté ; perfonne
ne f auroit douter , par exemple , que lorfque
les Romains choifirent Romulus 8c Numa pour leurs
rois/», ils ne leur conféraffent par cet aûe même la
fouveraineté fur eux qu’ils n’avoient pas auparavant,
8c à laquelle ils n’avoient certainement d’autre droit
que celui que leur donnoit l’éleérion de ce peuple.
Le premier caraâêre effentiel de lafouveraineté, &
celui d’oii découlent tous les autres , c’eft que c’eft
un pouvoir fouverain 8c indépendant , c’eft-à-dire
une puiffance qui jugo en dernier reffort de tout ce
qui eft fufceptible- de la direérion humaine, 8c qui
peut intéreffer le falut 8c l’avantage de la fociété ;
mais quand nous difons que la puiffance civile eft paf
fa nature fouveraine 8c indépendante, nous entendons
feulement que cette puiffance une fois confti-
tuée, a une puiffance telle que ce qu’elle établit dans
l’étendue de fon diftrift, ne fauroit être légitimement
troublé par un autre pouvoir.
En effet, il eft abfolument néceffaire que dans tout
gouvernement, il y ait une telle puiffance fuprème ;
la nature même de la chofe le veut ainfi, & il ne fauroit
fubfifter fans cela ; car puifqu’on ne peut pas
multiplier les puiffanees à l’infini, il faut néceffaire4*
ment s’arrêter à quelque degré d’autorité fupérieur à
tout autre; 8c quelle qtie foit la forme du gouvernement
monarchique , ariftocratique, démocratique ,
ou mixte , il faut toujours qu’on foit fournis à une
décifion fouveraine, puifqu’il implique contradiction
de dire qu’il y ait quelqu’un au-deffus de celui ou ceux
qui tiennent le plus haut rang dans un même ordre
d’êtres.
Un fécond caractère qui eft une fuite du premier^
c’eft que le fouverain comme t e l , n’eft ténu de rendre
compte à perfonne ici-bas de fa eonduiteîquandje dis
que le fouverain n’eft pas comptable, j’entends aufli
long tems qu’il eft véritablement fouverain ; car la
fouveraineté n’exifte que pour le bien public, & il n’eft:
pas permis au fouverain de l’employer d’une maniéré
directement oppofée à fa deftination, puifqu’il eft
confiant que tout fouverain , ou tout corps de fouveraineté
eft fournis aux lois naturelles & divines.
Les limitations du pouvoir fouverain ne donnent
aucune atteinte à la fouveraineté ; car un prince ou un
fénat à qui on a déféré la fouveraineté, eh peut exercer
tous les aCtes, aüfli-bien que dans une fouveraineté
abfolue : toute la différence qui s’y trouve, c’eft
qu’ici le roi prononce feul en dernier reffort, Avivant
fon propre jugement, 8c que dans une monarchie
limitée, il y a un fénat qui conjointement avec le
r o i , connoît de certaines affaires , 8c que fon confentement
eft une condition néceffaire fans laquelle
le roi ne fauroit rien décider.
Il nous refte à dire un mot des parties -de la fouveraineté
, ou des différens droits effentiels qu’elle ren->
ferme, L ’on peut çonfidérçr Ia^ fouveraineté comme un
Uhh