0
<64$ S U I "fein de faccager ces trois cantons rebelles & dedes \
mettre à feu 6c à fang. Leurs citoyens fe conduifirent
•comme les Lacédémoniens aux Thermopyles. Ils at-
-tendirent, au nombre de cinq cens hommes,la plus
-grande partie de l’armée autrichienne au.pas de Mor-
garten. Plus heureux que les Lacedemoniens, ils portèrent
ledéfordre dans la cavalerie de l’archiduc, en
faifant tomber fur elle une .grele aftreufe de pierres,
■ & profitant de la confufion, ilsfe.jetterent avec tant
de bravoure fur leurs ennemis épouvantés, que leur
défaite fut entière.
Cette vi&oire fignalée ayant été gagnée dans le
■ canton de Schwitz , les deux autres cantons .donnèrent
ce nom à leur alliance, laquelle devenant plus-
générale, fait encore fouvenir par ce feul nom, des
iuccès brilians. qui leur acquirent la liberté.
En vain la' maifon d’Autriche tenta pendant trois
fiecles de fubjuguer ces trois cantons ; tous fes efljprts
eurent fi peu de réuffite , qu’au lieu de ramener les
trois cantons à fon obéiffance, ceux-ci détachèrent
-au contraire d’autres pays 6c d’autres villes du joug .
de la maifon d’Autriche. Lucerne entra la première
dans la confédération en 1332. Zurich, Glaris &c Zug
fui virent l’exemple de Lucerne vingt ans après ; Berne
qui eft en Suffis ce qu’Amfterdam eft en Hollande,
renforça l’alliance. En 1481 Fribourg &Soleure;
en 1501 Bafle & Schaffhoufe accrurent le nombre
dés cantons. En voilà douze. Le petit pays d’Appen-
z e ll, qui y fut aggrégé en 1513 , fit le treizième. Enfin
les princes de la maifon d’Autriche fe virent forcés
par le traité de Munfter de déclarer les Suffis un
peuple indépendant. C’eft une indépendance qu’ils
ont acquife par plus de foixante combats, 6c que félon
toute apparence, ils conferveront jlong-tems.
Les perfonnes un peu inftruites conviennent que
le corps helvétique doit plutôt être appellé la confédération
que la république des S u ffis , parce que les
treize cantons forment autant de républiques indépendantes.
Ils fe gouvernent par des principes tout
-differens. Chacun d’eux conferve tous les attributs
de la fou veraineté, 6c traite à fon gré avec les étrangers
; leur diète générale n’eft point en droit de faire
des réglemens, ni d’impofer des lois.
il efi vrai qu’il y a tant de liaifon entre les treize
cantons, que fi l’un étoit attaqué, les douze autres
feroient obligés de marcher à Ion fecours ; mais ce
feroitpar la relation que deux cantons peuvent avoir
avec un troifieme, 6c non par une alliance direâe,
que chacun des treize cantons a avec tous les autres.
Les Suffis ne voulant pas facrifier leur liberté à
l’envie de s’agrandir , ,ne fe mêlent jamais des con-
teftations qui s’élèvent entre les puiffances étrangères.
Ils obfervent une exafte neutralité , ne fe rendent
jamais garans d’aucun engagement , 6c ne tirent
d’autre avantage des guerres qui defolent fi fou vent
l’Europe , que de fournir indifféremment des hommes
à leurs alliés, 6c aux princes qui recourent à eux.
Ils croyent être affez puiffans, s’ils cônfervent leurs
lois. Ils habitent un pays qui ne peut exciter l’ambition
de leurs voifins ; 6cfi j’ofe le dire, ils font affez
forts pour fe défendre contre la ligue de tous ces mêmes
voifins. Invincibles quand ils feront unis,& qu’il
ne s’agira qüe de leur fermer l’entrée de leur patrie,
la nature de leur gouvernement républicain ne leur
permet pas 4 e faire des progrès au-dehors. C ’eft un
gouvernement pacifique,,tandis que tout le peuple
eft guerrier. L’égalité, le partage naturel des hommes
ÿ fubfifte autant qu’il eft pôflible. Les lois y font douces
; un tel pays doit refter libre !
Il ne faut pas croire cependant que la forme du
gouvernement républicain foit la meme dans tous les
cantons. Il y en a fept dont la république eft arifto-
cratique, avec quelque mélange de démocratie ; &
fix font purement démocratiques, Les fept ariftocras
u r
tiques font Zurich , Berne , Lucefne , Bàfîe, Frî»
bourg, Soleure, Schaffhoufe ; les fix démocratiques
font U r y , Schwitz, Underwald, Zug, Glaris 6ç Appenzell.
Cette, différence dans leur gouvernement-
femble être l’effet de l’état dans lequel chacune de
ces républiques fe trouva, avant qu’elles fuffent érigées
en cantons. Car comme les fept premières ne
confifterent chacune que dans une v ille , avec peu
ou point de territoire , tout le gouvernement réfida
naturellement dans le bourgeois, 6c ayant été une
fois reftraint à leur corps, il y continue toujours ,
nonobftant les grandes acquifitions de territoires qu’elles
ont faites depuis. Au contraire, les fix cantons
démocratiques n’ayant point de villes ni de villages
qui puflént prétendre à quelque prééminence par
deffus les autres, le pays fut divifé en communautés»
6c chaque communauté ayant un droit égal à la* fou-
veraineté, on ne put pas éviter de les y admettre éga^
lement, 6c d’établir la pure démocratie.
On fait que la Suffi prife pour tout le corps helvétique,
comprend la Su ffi propre, les alliés des Suffis^
6c les fujets des Suffit s. La Suffit propre eft partagée
en feize fouverainetés, favoir treize cantons, deux
petits états fouverains, qui font le comté de Neuf-
Châtel & l’abbaye de S. G all, une république qui eft
la ville de S. Gall. Les alliés des Suffis font les Griffons,
les Vallaifans 6c Genève. Les fujets des Su ffies
font ceux qui fonthors de la Suffit, ou ceux qui obéif-
fent à plufieurs cantons qui les poffedent par indivis.
11 y a des cantons qui font catholiques, 6c d’au-
. très proteftans. Dans ceux de Glaris 6c d'Appenzell»
les deux religions y régnent également fans caufer le
moindre trouble.
Je me fuis éttndu fur la Suffit, 6c je n’ai dit que
deux mots des plus grands royaumes d’Afie, d’Afrique
6c d’Amérique ; c’ eft que tous ces royaumes ne
mettent au monde que des efclaves, & que la Su ffit
produit des hommes libres. Je fais que la nature fi libérale
ailleurs , n’a rien fait pour cettecontrée, mais
les habitans y vivent heureux ; les ffolides richeffes
qui confiftent dans la culture dé la terre » y font recueillies
par des mains fages 6ç laborieufes. Les douceurs
de la fociété, 6c la faine philofqphie ,• fans laquelle
lafociété n’a point de charmes durables, ont
pénétré dans les parties.de la Suffit où le climat eft le
plus tempéré, 6c oîi regne l’abondance. Les feftes
de la religion y font tolérantes. Les arts 6c les feien-
ces y ont fait des progrès,admirables. Enfin dans ces
pays autrefois agreftes, on eft parvenu en plufieurs
endroits à joindre la politeffe d’Athènes à la fimplicité
de Lacédémone. Que ces pays fe gardent bien aujourd’hui
d’adopter le luxe etranger, 6c de laiffer
dormir les lois fomptuaires qui le prohibent !
Les curieux de l’hiftoire des révolutions de \a.Suiffe
confulteront les mémoires de M. Bochat , qui forment
trois volumes in-40. Gefner , Scheuchzer 6c
"Wagner ont donné l’hiftoire naturelle de l’Helvétie.
(Le Chevalier DE J a v C O U R T . ')
Suisses ^ privilèges dts Su ffis en France pour leur
commerce ; ils peuvent introduire dans le royaume
les toiles du cru 6c de la fabrique de leur pays fans
payer aucuns droits. Ce privilège eft fondé fur les
traités que nous avons faits avec eux depuis le xv.
fiecle, ainfi que fur plufieurs arrêts 6c lettres-patentes
qui ont encore expliqué 6c confirmé ce privilège.
Le détail de tous ces titres paroît être ici fu-
perflu , il fuffira d’en .donner les dates. Voyt{ les
traités de 1463,1475«, x5i 2j & 1715.Voyeq.
les lettres-patentes & les.arrêts de 1551 , 157 l >
15 9 4 ,16 0 2 , 16 58, 1693 , 1692 & 1698.
Sous le nom de Suffies,, il faut entendre ici non-
feulement les peuples des Treize Cantons, mais en-
‘ core les habitans des ville & abbaye de Saint-Gai,
du V alais, de la ville de Mulhaufçn, 6c enfin ceux
des
S U I des trois ligiies grifes & de la comté de Neiichatèi.
Ils composent tous le louable corps helvétique, 6c
jouiffent tous en France des mêmes privilèges fans
aucune diftinétion.
L’entrée des toiles étrangères n’eft permife dans le
royaume que par les villes de Rouen 6c de Lyon »
en prenant pour cette dernière des acquits à caution
aux bureaux de Gax ou de Coulonge , fuivant un
arrêt du 12 Mars 1692. Mais, en faveur des Suffies
feulement, le bureau de Saint-Jean-de Lofné eft ouvert
comme les deux autres , par un arrêt de 1698.
La pofition du territoire des Suffies 6c de celui de
leurs alliés , ne leur permet pas de faire entrer leurs
toiles par Rouen ; ainfi ce n’eft qu’à Lyon qu’ils exercent
leurs droits, après avoir rempli néanmoins certaines
formalités.
Ils font obligés de faire inferire leurs noms 6c en-
regiftrer leurs marques au bureau de la douane.
Chaque particulier n’y eft admis qu’après avoir constaté
fon origine devant le préfident en la jurifdi&ion
de la douane , par des certificats authentiques des
magiftrats des lieux de fa naiflance. La vérité de ces
certificats doit être atteftée avec ferment par deux
négocians fuffies déjà inferits. Enfuite le procureur
du roi & le diçe&eur de la douane font entendus ;
6c enfin lorfque rien ne s’y oppofe, on expédie des
lettres d’infeription , dans lefquelles il eft défendu au
nouvel inferit de prêter fon nom 6c fa marque , à
peine d’être déchu de fon privilège.
Il n’y a que ceux des marchands fuffies qui ont
rempli ces formalités , qui puiffent faire entrer leurs
toiles à Lyon fans payer des droits. On exige même
que les balles de toiles portent l’empreinte de la
marque inferite ( qui par conféquent a été envoyée
à un correspondant) , 6c qu’elles Soient accompagnées
des certificats des lieux d’où elles viennent,
portant que ces toiles font du cru 6c de la fabrique
du pays des Suffis , conformément aux arrêts de
1692 6c 1698.
Il femble que de la teneur de ces deux arrêts, les
Suffies pourroient inférer que leurs bafins doivent
être exempts de droits d’entrée comme leurs toiles.
Mais il eft confiant que leurs bafins payent les droits
ordinaires ; peut-être eft-ce parce que tout privilège
eft de droit étroit , 6c que les bafins ne font point
nommés dans ces privilèges, ou bien parce que le
coton dont ces bafins font en partie compofés , empêche
que l’on ne puiffe les regarder comme mar-
chandifes du cru du pays des Suffies.
Par une conceftion de François I. en l’année 1515,
qui eft motivée pour fervices rendus , & entr'autres
prêt d'argent , les marchands des villes impériales
avoient obtenu quinze jours de délai, au-delà des
quinze jours fuivant immédiatement chaque foire ,
pendant lefquels, conformément aux édits de Charles
VII. 6c de Louis XL les marchandifes ne payent
à la fortie de Lyon aucun des droits dus dans les autres
tems. Les Suif!es qui n’avoient que dix jours de
grâce , en demandèrent quinze comme les Allemands
, ce qui leur fut accordé par Henri II. le 8
Mars 1551. Pour jouir de cette faveur, ils doivent
le faire inferire à l’hôtel-de-ville comme ils le font à
la douane pour l’affranchiffement des droits d’entrée.
La raifon en eft que ces droits de fortie, qui font
domaniaux, ont été aliénés à la ville de Lyon en
1630.
Voye{ fur tout cet objet les differentes hifioires des
Suffies , ou au moins le recueil de leurs privilèges,
imprimé chez Saugrain en 1715 ; le mémoire de M.
d’Herbigny, intendant de Lyon ; dans l'état de la
France, par le comte de Boulainvilliers ; 6c le rt-
cueildes tarifs , imprimé à Rouen en 1758.
Il peut etre important d’ajouter ici que les toiles
de Suffi , que l’on envoie de France aux îles 6c co-
Tome XV»
S’ U ï 649 lonies françoifés ,foiit affujetties , par f article 14, dll
reglement du mois d’Avril 1717 , concernant lé
commerce de nos colonies, aux differens droits dûs
à la fortie 6c dans l’intérieur du royaume d’une pro-
vince à l’autre* Voye[ Pro vin ces réputées' étrangles.
L article 3 . du meme reglement > a exempté de
tous ces droits » dans le cas de l’envoi aux colonies ,
les marchandifes 6c les denrées du cru 6c de la fabrique
de France. Mais comme les toiles de Suiffe une
fois forties de leurs ballots , n’ont plus rien qui les
caraéléfife » il paroît qu’il feroit aifé de les envoyer
à-travefs tout le royaume de Lyon à la Rochelle ,
pour paffer à nos colonies comme toiles françoifés.
Afin de prévenir tout abus à cet égard , on pour-
roit exiger que les toiles de Suiffe reçuffent dans leur
p a y s , ou lors de l’ouverture des balles en France »
une marque^ particulière 6c diftinftive. Cette idée
s’eft préfehtée fi naturellement, que j’ai cru devoir
l’ajouter à cet article avant de le terminer. Article de
M. B r i s s o n , infpecleur des manufactures, & académicien
de Ville-Franche en Beaujollois.
SUITE , f. f. ( Gram. ) enchaînement » liaifon »
dépendance , qui détermine un ordre fuccelïïf entré
plufieurs chofes. On dit les fuites d’une affaire ; la
fuite de la débauché ; la fuite d’itn raifonnement ; la
fuite d un prince ; c’eft à la fuite d’une affaire ; une
fuite d’événemens fâcheux ; une fuite de fottifes ; la
fuite de l’hiftoire eecléfiaftique ; une fuite de mé-1
dailles de poètes.
Su i t e » en Algèbre, eft la même chofe que ferieé
Voye1 SERIE,
Suite , ( Jurifpnid. ) fignifie la continuation ou
la pourfuite d’une choie.
Suivre le barreau, c’eft le fréquenter, y aflïfter.
Etre à la fuite de la cour ou du confeil, c’eft fe
tenir auprès 6c à fes ordres.
Faire fuite d’une demande ou procédure , c’efli
continuer les pourfuites commencées*
Suites de bêtes, dans la coutume de Berry & autres
coutumes, e’eft proprement une revendication
que fait celui qui a donne du bétail à cheptel, lorf-
qu’il eft vendu à fon infçu par le preneur*
Suite fe prend quelquefois pour le Croît diibétaiL
On dit croît 6c fuite ; la coutume dé Tourainé , article
100 , dit que ceux qui ont droit de faultrage 6c
preage , avec faculté de mettre dans les prés dont
ils jouiffent des vaches 6c bêtes chevalines avec leur
fuite , n’y peuvent mettre que le croît 6c fuite de
Tannée feulement, c’eft-à-dire , les veaux 6c poulins
de l’année.
Suite dedixmc , ou dixme de fuite. Voye%_ D ixMe*
Suite par hypotheque, eft lorfqu’en vertu de l’hy-
potheque on pourfuit le détenteur d’un bien qui eft
hypothéqué à une créance. On dit communément
que les meubles n’ont pas de fuite par hypotheque ,■
c’eft-à-dire , que quand ils font déplacés du lieu où
on les avoit donnes en nantiffement, on ne les peut
pas faifir entre les mains d’un tiers, fi ce n’eft ert
cas dé banqueroute ou pàf droit de revendication*
Voye[ l'article 270 de la coutume de Paris.
Suite de perfonnes ferves , c’eft la revendication
que peut faire le feigneur de fes.hommes ferfs, lorfque
f'âns fon confentement ils vont demeurer hors
de fa feigneurie. Vôye^ les coutumes de Berry , Ni-
vernois , Bourbonnais, Bourgogne , Comté*
Droit de fuite du châtelet de Paris , eft un droit
particulier, en vertu duquel lorfqu’un commiffairé
du châtelet de Paris a appofé le fçellé, il doit être par .
lui appofé par droit de fuite dans tous les lieux où il
peut fe trouver des effets du défiint , 6c l’inventaire
doit être fait de même par les notaires du châtelet »
ou par ceux des lieux auxquels les officiers du ehè-*
telet délivrent des eommiffions à cet effet*
NNnn