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les recherches lui font permifes, ôc que les lui attribuer
toujours , ou comme on d it , recourir 1 ans-cel-
fe à la facriftie , n’eft qu’une reffource de la pareffe
orgueilleufe & de la fuperftïtieufe ignorance. Quel-
les font donc les caufes phyfiques de lafueur angloife.
Schiller penfe que l’influence des aftres, lur-toutde
faturne , de mars , & de mercure , n y a pas pfeu
contribué. Voyc\ In f l u e n c e d e s a s t r e s . Il ajoute
que le changement qonfidérable des faifons-, le genre
de v ie , ôc la mauvaife qualité de l’air , doivent aufli
être accufées ; il tire une preuve de l’aéhon de-l’air,
del’obfervation faite fur le^oifeaux qui étoient attaqués
de cette pefte, ôc qu’on trouvoit en grand nombre
morts fur les arbres, avec des petits abfcès fous
les aiffelles. Il n’eft pas douteux que les mau.vaifes
qualités de l’air ne foient la principale caufe de toutes
-les maladies épidémiques , ôc par conféquent de
la fueur angloife-, mais ce qu’il n’eft pas poflible de
déterminer, pourquoi cet air n’a-t-il ete infe&equ en
1483 ? pourquoi, & comment cette infeûion s’eft-
elle renouvellée de tems-en-tems? Les mauvaifes rai-
fons qu’on en adonnées, laiffent encore ces problèmes
à décider. Pourquoi aufli les étrangers en etoient-
ils exempts en Angleterre,& pourquoi les Anglois fu-
gitifs dans les autres pays , n’étoient-ils pas à l’abri
de fes coups ? Y auroit-il dans le fang des Anglois une
difpofition fans laquelle on peut impunément s’ex-
pofer aux caufes morbifiques : porteroient-ih en
naiflant le germe de cette funefte maladie , qui ne
peut être développé que par la conftitution analogue
de l’air' ? cette difpofition feroit-elle un effet de leur
façon de vivre , de l’ufage immodéré qu’ils font de,
la chair des animaux, ÔC de l’état particulier de leur
atmofphere ? voilà des queftions qu’on auroit pu décider
, fi les auteurs qui ont écrit fur cette maladie ,
euffent été meilleurs phyficiens ôc plus exafts obfer-
vateurs. La crainte peut être regardee comme une
des caufes des ravages de la futur angloife ; dans toutes
les peftes ôc les maladies épidémiques , elle joue
un très-grand rôle ; mais elle ne produit jamais l’épidémie
, elle ne fert qu’à en accélérer les progrès ;
plufieurs auteurs fe font manifeftement trompés, en
généralifant cette caufe. Voyt[ P e s t e . _
Dès que cette maladie fe déclaroit, il etoit très-
important de la reconnoître, elle parcourait fes tems
avec une fi grande rapidité , qu’il eut ete dangereux
de s’y méprendre ; mais cette même rapidité en étoit
un ligne diftin&if : d’ailleurs, lorfqu’une maladie eft
épidémique, il n’eft pas à craindre qu on la mecon-
noiffe , quelque variés qu’en foient les accidens ;
il y a toujours un cara&ere commun qui frappe les
moins éclairés , ôc que la crainte rend encore plus
remarquable. _ t
Le danger qui accompagnoit la futur angloife, n a
pas été ni aufli preflant, ni aufli certain dans tous
les différens tems oii elle a paru ; les années les plus
meurtrières ont é té , comme nous avons v u , 1518 ,
15 18, & 1551. La première année que cette maladie
fe fit connoître, en 1483 ? l’incertitude des médecins
, & les méthodes de traitement peu appropriées
qu’ils fuivirent, n’ajouterent pas peu à la violence
des accidens ; ôc en effet, comme l’ont remarqué
Herman , Erafme, ôc quelques autres , la futur
angloife prefque lïirement mortelle dès le commencement
, fe calma au point que perfonne n’en mou-
roit que par le defaut ou l’ignorance du médecin ;
v ceux qui fitccomboient étoient toujours morts avant
vin»t-quatre heures : aucun , dit Thomas Mo rus ,
n’a péri de cette maladie que le premier jour ; Erafme
a obfervé que les mêmes perfonnes étoient fou-
vent attaquées trois, ou quatre fois de cette maladie,
jufqu’à ce qu’enfin elles devenoient hydropiques ,
epifl.Sy. lib. X X V I . la futur qui paroiffoit étoit, fui-
yant toutes les obfervations, plutôt une crife falu-
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taire, qu’un fÿmptome dangereux, fa ceffation feule
étoit l’accident le plus à craindre , la caufe ôc le ligne
d’une mort prochaine ; ceux, dit Herman , dans qui
on repercutoit la fueür, mouroient en peu d’heures.,
& bientôt après leur cadavre détruit par la putréfaction
, s’en alloit en lambeaux ôc exhaloit une odeur
infupportable.
Lafutur étant l’unique remedede cette maladie,il
paraît évidemment que le médecin n’a autre chofe.à
faire qu’à féconder la nature , ou fuppléer à fon défaut
ü elle eft trop foible ; il ne faut négliger aucun
fecours pour fairefuer , les frittions doivent d’abord
être employées ; fi leur effet n’eft pas affez confidé-
rable, il faut avoir recours aux fiidorifiques internes ;
la maniéré de les adminiftrer eft affez indifférente ,
peu importe qu’on les donne en opiate, en potion,
en tifanne , &c. il faut bien fe garder d’employer les
préparations de pavot, qu’on eft affez dans l’ufage
de mêler aux potions fiidorifiques^, pour en affurer
&C en augmenter l’effet ; le fommeil que ces remedes
occafionnent eft mortel dans ces maladies , ôc loin
de l’exciter , il faut le prévenir ÔC l’empêcher, en
fecouant le malade, en lui parlant à haute voix; cette
précaution eft recommandée par tous les auteurs, ils
s’accordent aufli tous à défendre tout aliment folide
ou liquide, à moins que la foibleffe ne foit extrême ,
& que la fyncope ne foit à craindre : alors on peut
permettre un potage, bu un peu de poulet rôti, ôc
pendant tout le jour que dure , ou peut durer la maladie
, il faut tenir le malade dans un lit bien chaud ,
bien couvert, fans cependant l’affaiffer fous le poids
des couvertures , avoir attention que l’air froid n’y
pénétré pas ; dans cet état on le laiffe fuer fans le
changer de,linge; dès qu’il a ceffé & que les fympto-
mes font diflipés , on le frotte avec des ferviettes
chaudes, on lui met du linge blanc, ôc on le tranf-
porte dans un autre lit : on peut alors lui donner un
bouillon , Ôc le laiffer dormir pendant quelques heures
, après quoi il n’eft pas indifférent de lui provoquer
de nouveau la futur , fi elle ne revient pas naturellement
; par ce moyen on prévient des rechutes
prefque toujours funeftes. Riquinus raconte qu’un
payfan attaqué de la futur angloife, méprifânt les réglés
ordinaires de traitement, s’avifade fe jetter dans
un four d’oii l’on venoit de tirer les pains , il y fua
prodigieufement, on l’en retira après quelque tems
extrêmement foible, mais guéri ; ôcce qu’il y eut de
plus fingulier y c’eft que , s’il en faut croire cet auteur
, les pains qu’on cuifit après dans ce four , prirent
une qualité venimeufe, ôc tous ceux qui en mangèrent
moururent enragés. Il paroît par-là qu’il n’y
auroit pas de fecours plus prompt ôc plus affuré dans
la futur angloife que de mettre les malades dans une
étuve , fi l’on n’avoit pas à craindre le même inconvénient
: cette crainte eft fondée fur une autre obfer-
vation femblable, rapportée par Herman. Un médecin
ayant des bubons peftilentiels fous l’aiffelle gauche
, va comme pour fe laver au bain public, il fait
allumer plus qu’à l’ordinaire le feu des poêles, Sc
dans cette efpece d’étuve, il fe fait frotter avee for-g
ce par deux'domeftiques , pour exciter plutôt Ôc
plus abondamment la fueur qui ne tarda pas à couler
de toutes parts ; il remédie à la foibleffe qu’il éprou-
Voit par quelques verres de vin fpiritueux, & fort
ainfi du bain parfaitement guéri ; mais fa fueur avoit
tellement infetté le lieu du bain , que celui qui en
avoit la direttion, fes domèftiques, ôctous ceux qui
vinrent enfuitefe baigner, y moururent auflitôt ; le
gouvernement fut obligé de faire murer cet endroit,
pour prévenir d’autres accidens aufli funeftes.
La fuite étant un expédient obfervé inutile pour fe
garantir de la futur angloife, les auteurs conleillent
d’allumer de grands feux avec des bois odoriférans ,
dans les rues ôc les maifons , précaution confeillee
par
$ Ü Ë
par Hippocrate dans là pefte , & couronnée par le
fuccès;de prendre des poudres ôc desiiïfùfians aromatiques
, alexipharmaques, &c. ôc lorfqn’on en a heu-
reufement réchappé , il faut bien fe garder du froid
qui ne manque pas d’occafionnerün cours de ventre
prefque toujours mortel, comme le prouve la trifte
expérience de ceux qui étant guéris, s’y font incon-
fidérément expofés. (ro)
S u e u r , f. m. ( Corroytrit.) ouvrier quiàutréfois
travailloit les cuirs au fortir ae la main du tanneur.
C’étoit celui qui les mettoit en fuin ou ~en graiffe,
qu’on nomme alors fouin ; les Sueurs , comme on le
voit dans les anciens ftatuts des Corroyeurs, fai-
foient une communauté particulière, q u i, aufli bien
que celle des Baudroy.eurs Ôc des Cordonniers, a
été réunie à la communauté des Corroyeurs. Savaty.
( D .J . )
SUE VUS ou SUE B U S , ( Géog. anc. ) fleuve de
Ja Germanie , félon Ptolomée , l. I I . c. x. Spener,
■ notit. Gémi. ant. L II. c. ij. veut que ce foit une des
embouchures de l’Oder : favoir celle du milieu, ap-
peüée Suint ou Suevt, ôc qui approche plus du nom
des Sueves qui ont anciennement habité dans ces
quartiers. ( D .J . )
SUEZ, ( Géog. mod..') petite ville d’Egypte, fur la
fcôte feptentrionale de la mer Rouge,.à vingt lieues
au nord de T o r , avec un vieux château ruiné, Ôc un
petit port à trois journées du chemin du Caire.
Les anciens appelioient Sue{ la ville des héros,
Héréopolis ; peut-être ne s’acquit-elle un fi beau nom
qu’à caufe de fon commerce.Elle eft cependant fituée
dans un terrein fort ftérile jufqu’à cinquante milles
tout-autour; elle manque d’eau, ôc fon port qui a
peu de fond, n’eft qu’une vraie rade dangereufe: les
foudans d?Egypte j Ôc après eux les Turc s, ne l’ont
point réparé ; ôc d’ailleurs dans le tems même qu’ils
y travailloient pour s’oppofer aux progrès que fai-
foient les Portugais, il falloit qu’alors même les chameaux
portaffent tous les matériaux, depuis le Caire
jufqu’à Sue\. ( D . J. )
S u e z , le golphe de, ( Géog. mod. ) anciennement
Iltroopolitts Jinus ; c’eft la partie la plus feptentrionale
de la met Rouge, ôc l’endroit oii vraifl’embia-
blement les Ifrâëlites la pafferent à pié fec ; ce gol-
phe n’eft fëparé de la mer Méditerranée que par un
ifthme d’enViron cinquante milles* qui joint l’Afie à
l ’Afrique, ôc qu’on appelle Viflhmt de Sut{; nous en
allons faire l’article. (D .J . ') S u e z , ijlhine de 9 ( Géog. mod. ) ifthme qui joint
fAfie à l’Afrique. Cèt ifthme peut avoir cinquante
milles d’étendue, quoique Plutarque ne lui en donne
que trente-fept, jufqu’a l’endroit oiil’on s’embarque
jur le £>[Ü.. Les rois d’Egypte confidérant les grands
avantages qui reviendroient à leur pays par la-Com-
munieatibn des mers , tentèrent fôuvent de couper
cet ifthmê, Ôc défaire par ce moyen une île de toute
l’Afrique. Séfoftris, au rapport de Strabon, fut le
premier qui forma ce deffein, ôc qui fit fon poflible
pour I’executer. Darius, roi de Perfe ôc d’Egypte,
tenta la même entreprife, ôc çonduifit fon ouvragé
jufqu’aux lacs Amers , nommés de la fortè à caufe de
l’amertume de leurs eaux. Le premier Ptolomée parmi
les fucceffeurs d’Alexandre, fe propofa d’achever
l’ouvrage, ôc l’abandonna cependant bientôt après»
Les uns difent que ce fut par crainte d’inondër l’Egypte
, qui eft plus baffe de trois coudées que la mer
Rouge. D ’autres affurent que ce fut de peur que la
mer en entrant dans le N il, ne gâtât par fon amertu^-
me les eaux de ce fleuve, ôc oui pour comble dé maux
tout fon pays ne devînt ftérile, d’abord que fes campagnes
fetrouveroient arrofées des eaux de la mer.
Quoi qu’il en foit, on fe contenta de ereufer un
canal qui joignoit le Nil à la mer Rouge, C e fut alors
Tome X V %
s u f m
que les ports de cette mér commencèrent à être fameux.
La ville de Coptos devint l’entrepôt de toutes
les marchandifes qui paffoient des Indes en Egypte.
Depuis que l’on a laiffé détruire le canal qui com-
muniquoitle Nil avec la mer Rouge, on eft obligé
d’employer les chameaux pour tranfporter par terre
les marchandifes.
Cléopâtre, après la perte de la bataille d’AÔiumy
vint à Alexandrie, où fe rendit Antoine, qui la trouva
toute occupée d’un deffein fort extraordinaire.
Pour éviter de tomber entre les mains d’O&ave y
préfumant bien qu’il la pourfuivroit, elle fongeoit à
faire tranfporter fes vaiffeaux de la mer Méditerranée
dans la mer Rouge par l’ifthme qui a cinquante à foi-
xante milles de largeur de Pharma à S u e Elle pro-
jettoit enfuite de mettre fes tréfors dans fes vaiffeaux
ôc dans les autres qu’elle avoit déjà fur cette mer,
pour aller chercher quelque retraite écartée ; mais
elle abandonna ce deffein, dans i’efpoir peut-être de
faire encore la conquête de ce nouveau maître du
monde. (D . J . )
- SUEZIC, ( Géog. mod J) par les Orientaux Sueriahy
province voifine de la Colchide, dont les peuples
nommés anciennement Tçani ôc Lafi habitoient la
plus grande partie. ( D . J. )
SUFFEGMAR, ( Géog. mod. ) riviere d’Afrique *
dans la Barbarie , au royaume d’Alger; elle prend fa
fource aux montagnes qui bornent le grand Atlas, ôc
fe jette dans la mer, aii levant de Gigeri. C ’ ëft l’Amp-
faga des anciens ,ôu l’Ampfagas de Ptolomée. (Z). J.)
- SUFFETES , f. m. pl. ( Hiß. anc. ) c’eft ainfi que
l’on nömmoit chez les Carthaginois les deux principaux
magiftrats de la république qui étoient élus parmi
les fénateurs les plus diftingués par la naiffance *
par la richeffe,ôc par les talens. Leur autorité ne du-
roit que pendant une année , comme celle des con-
fuls romains ; mais il ne paroit pas que les fujfctt 's
fuffent chargés du commandement des armées pendant
leur magiftrature ; pour l’ordinaire leurs fonctions
étoient purement civiles ; cependant nous
voyons qu’Annibal, Himilcon ôc Magon ont commandé
les armées des Carthaginois dans le tems même
qu’ils étoient revêtus de la dignité defuffetes; ils
convoquoient le fénat auquel ils préfidoient ; ils y
propofoient les matières fur lefquelles on devoit délibérer;
ils recueilloient les fuffrages; Quelques auteurs
croient qu’ils avoient le droit de vie Ôc de mort*
ôc d’infliger les punitions qu’ils jugeoient à-propos.
Aucune loi ne pou voit paffer dans le fénat fans
leur concours ; lorfqu’ils n’étoient point d’accord
avec te fénat, le peuple décidait. Chaque ville de la
domination carthaginoife avoit des fujfetes, à l’exemple
de la capitale;. ' . ’ - ,
SUFFIBULUM, f. m. ( Littéral. ) ce mot, dans
Feftus, fignifie le voile blanc que les veftales met-
toient fur leurs têtes lors des facrifices, ôc qui étoit
attaché avec une agraffe. (D i J.')
SUFFISANT, SUFFISANCE, ( Lahg.franç.) lorf-
que fuffifant eft participe* il fignifie feulement qui
fu jß t, comme un ordinaire fuß jhnt, des provifions
fußfantes ; mais lorfqu’il eft ad je a if, il défigne un
préfomptueux ; « rien.de plus infupportable dans la
» vie que ces hommes fußfans * ces femmes fußfan~
» tes, qui décident de tout fans rien fàvoir. » Ce mot
ne fe prend en bonne part que quand il eft joint à un
autre qui en détermine la lignification. Il ne faudroit
donner les premières places de l’état qu’à des gens
fußfans, ôc capables dé remplir les grandes charges
de la couronne; „ „ „
L’on doit faire la même remarque du motfaß/an-
ct; il fe dit du vrai mérite ôc du faux mérité. Les riches
gâtés par la fortune montrent ordinairement une
fu ß fa n u orgueilleufe ; mais l’adverfité jointe au ae-
nie produit Ta grande capacité ÔC lay«/^'^mod efte.